Nithard et la Res Publica : un regard critique sur le règne de Louis le Pieux - article ; n°22 ; vol.11, pg 149-161
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Nithard et la Res Publica : un regard critique sur le règne de Louis le Pieux - article ; n°22 ; vol.11, pg 149-161

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Description

Médiévales - Année 1992 - Volume 11 - Numéro 22 - Pages 149-161
13 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1992
Nombre de lectures 18
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Monsieur Philippe Depreux
Nithard et la Res Publica : un regard critique sur le règne de
Louis le Pieux
In: Médiévales, N°22-23, 1992. pp. 149-161.
Citer ce document / Cite this document :
Depreux Philippe. Nithard et la Res Publica : un regard critique sur le règne de Louis le Pieux. In: Médiévales, N°22-23, 1992.
pp. 149-161.
doi : 10.3406/medi.1992.1245
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/medi_0751-2708_1992_num_11_22_1245Médiévales 22-23, printemps 1992, pp. 149-161
Philippe DEPREUX
NITHARD ET LA RES PUBLICA :
UN REGARD CRITIQUE SUR LE RÈGNE
DE LOUIS LE PIEUX1
Dans sa notice relative à l'année 803, l'auteur des Annales roya-
leSy d'une manière tout à fait exceptionnelle pour l'époque, a recours
à l'expression res publica pour désigner l'État, mais cette expression
s'applique à l'Empire byzantin2. Au contraire, Walahfrid Strabon, en
son Prologue à la Vita Karoli d'Eginhard, évoque la Francorum res
publica ; il fait alors allusion au règne de Louis le Pieux3. Entre
l'époque où écrit l'annaliste et celle où le poète prend la plume, une
redécouverte de la notion de res publica s'est opérée, qui permet le
transfert au regnum Francorum d'un concept s'appliquant originell
ement à l'État romain4. Ce n'est pas à proprement parler une étude
sur le recours au concept de res publica que nous proposons ici, mais
plutôt un essai dont l'objet est de saisir ce que la référence à cette
notion et l'usage qui en a été fait sous le règne de Louis le Pieux
et dans les temps qui suivent immédiatement son décès peuvent nous
apprendre sur le gouvernement de cet Empereur et sur la nature de
son pouvoir : au centre de cette enquête se place l'œuvre de Nithard,
dont le recours au concept de res publica illustre éloquemment ce
qu'un contemporain des fils de Louis le Pieux pouvait penser du règne
1. Cette étude s'inspire en grande partie du chapitre IV de mon Rapport de D.E.A.
(Université de Paris-IV — Sorbonne, juillet 1990) intitulé : Travaux préliminaires pour
une étude de l'entourage de Louis le Pieux et du gouvernement de cet Empereur. Je
tiens à exprimer ma reconnaissance à MM. O. Guillot, mon directeur de recherches,
Y. Sassier et J.-P. Brunterc'h, qui ont accepté de faire partie du jury.
2. Il est fait allusion à l'empereur Nicéphore, qui tune rempublicam regebat. Ann.
regni Francorum, a. 803, MGH SS rer. Germ. 6, p. 118.
3. Sub Ludowico imperatore, cum diversis et multis perturbationibus Francorum
res publica fluctuaret et in multis decideret... Eginhard, Vie de Charlemagne, éd. L. Hal
phen, Paris 1938 (rééd. 1981), p. 106.
4. Cf. Y. Sassier, « L'utilisation d'un concept romain aux temps carolingiens :
la res publica aux ix* et x< siècles », Médiévales, t. 15, automne 1988, pp. 17-29. 150
du successeur de Charlemagne. Il convient cependant d'étayer l'hypo
thèse de lecture ici proposée par le témoignage d'autres sources : c'est
aux documents diplomatiques qu'on aura principalement recours.
Remarques sur les diplômes de Louis le Pieux : une proposition
d'interprétation
Si Ermold le Noir, rapportant une anecdote qui circulait au début
du IXe siècle, laisse entendre que Louis aurait été destiné à succéder
à son père en raison de sa piété5, l'auteur anonyme qu'on a cou
tume d'appeler « l'Astronome », paraphrasant la parabole des
talents6, assure que c'est l'heureuse administration de son royaume
d'Aquitaine qui valut au benjamin des fils de Charlemagne l'héritage
de l'Empire7. Or le biographe n'hésite pas à recourir à l'expression
res publica quand il évoque « la félicité du royaume d'Aquitaine ».
Le propos de l'Astronome peut-il cependant trouver justification ?
Comme le remarque Yves Sassier, bien que l'expression res publica
apparaisse quelques rares fois dans des actes publics (en lien étroit
avec l'Italie) datant du règne de Charlemagne, le terme de « res
publica n'appartient pas vraiment au langage administratif ou polit
ique et reste encore perçu, à l'époque, comme indissociable du cadre
de l'ancien État romain »8. C'est le règne de Louis le Pieux qui,
pour cette question, marque un tournant ; le changement est sensible
« dès les premières années »9. Il n'existe à ce jour aucune étude sur
l'entourage de Louis le Pieux10. Néanmoins, il est connu que Louis
écarta du palais nombre de serviteurs (ministri) de son père et les rem
plaça par ses propres collaborateurs11. Par conséquent, c'est dans le
règne aquitain de Louis le Pieux qu'il faut chercher les prémices des
concepts politiques et des pratiques qui trouveront leur épanouisse
ment lors de son règne impérial. Les termes d'un diplôme de Louis
le Pieux, datant de mai 808, en apportent confirmation : il est fait,
dans ce document, référence à la res publica12. Par conséquent,
5. Ermold le Noir, Poème sur Louis le Pieux..., éd. E. Faral, Paris 1932 (rééd.
1964), v. 600-635, pp. 48-50.
6. Mt XXV, 14-30 ; Le XIX, 12-27.
7. Anonymi vita Hludowici imperatoris, c. 19, MGH SS 2, p. 617.
8. Y. Sassier, op. cit., p. 19.
9. Ibid.
10. Je compte contribuer à combler cette lacune avec la prosopographie qui ser
vira de base à ma thèse de Doctorat, portant sur « l'entourage et le gouvernement
de l'empereur Louis le Pieux (781-814-840/843) ».
11. K. Brunner, Oppositionnelle Gruppen im Karolingerreich, Wien/Kôln/Graz
1979, p. 96.
12. Ce diplôme porte le n° 519(500) dans J.-F. Bôhmer, Regesta imperii, tome 1 :
Regesten des Kaiserreichs unter den Karolingern, 751-918, ... bearbeitet von E. Mùhl-
bacher... vollendet von J. Lechner.. mit... Konkordanztabellen und Ergànzungen von
C. Bruni und H.H. Kaminsky, Hildesheim 1966 (cité par la suite BM2). 151
l'assertion de l'Astronome peut être défendue. Il n'empêche que c'est
sous le règne impérial de Louis que le recours au concept de res
publica connaîtra son plein essor, comme le montre Yves Sassier, qui
accorde à juste titre une importance particulière aux diplômes de Louis
le Pieux13. Nous voudrions, dans la même perspective, apporter sur
ce point quelques compléments14.
Yves Sassier avait recensé dix-sept actes de Louis contenant
l'expression res publica15 ; nous sommes en mesure de doubler ce
chiffre16. Ces nouvelles données confirment dans leur ensemble les
tendances distinguées par l'auteur : les actes portant mention de la
res publica datent essentiellement des débuts du règne de Louis le
Pieux. Mais contrairement à ce que laissait supposer une constata
tion d'Yves Sassier17, il n'y a pas abandon total de l'expression entre
825 et 832. Par ailleurs, le diplôme BM2 929(900), où cette expres
sion est aussi employée, fut délivré alors que Hugues, le successeur
de l'abbé de Marmoutier Theoto, était déjà à la tête de la
chancellerie18. Il convient cependant de formuler ici une remarque,
à propos de la nature des actes où l'on rencontre l'expression res
publica : on a bien quelques références à ceux qui administrent la res dans les diplômes d'immunité ; c'est néanmoins dans les diplô
mes d'exemption de tonlieu19 et, d'une manière générale, dans les
actes touchant à la fiscalité que cette expression est la plus usuelle20.
Dans une thèse récente sur la chancellerie de Louis le Pieux, les diplô
mes de cet empereur ont fait l'objet d'un double classement en fonc
tion des destinataires, d'une part selon leur répartition géographique,
d'autre part selon leurs titre et qualité21. Ils n'ont cependant pas été
classés en fonction de leur nature ; nous voudrions à ce propos for-
13. Y. Sassier, op. cit., pp. 19-21.
14. L'auteur n'a pas eu la possibilité de voir l'ensemble des diplômes de Louis
le Pieux (cf. note 9, p. 19), travail que j'ai eu l'occasion de mener plus avant.
15. Y. Sassier, op. cit., p. 20.
16. Les actes où l'expression apparaît sont les suivants : BM2 519(500), 523(504),
538(519), 543(524), 546(527), 548(529), 553(534), 568(548), 578(558), 583(563), 596(576),
610(590), 618(598), 620(600), 623(603), 629(609), 631(611), 655(641), 667(653), 668(654),
693(672), 723(— ), 734(710), 765(740), 801(777), 847(821), 855(832), 856(— ), 85

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