Pavimenta poenica - article ; n°2 ; vol.94, pg 639-655
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Description

Mélanges de l'Ecole française de Rome. Antiquité - Année 1982 - Volume 94 - Numéro 2 - Pages 639-655
Philippe Bruneau, ~~«Pavimenta poenica»~~, p. 639-655. Examen de la rubrique~~ Pavimenta poenica~~ du lexique de Festus et de la citation de Caton qu'elle contient : 1 - Le dernier mot de celle-ci, ~~poeniciistent~~, resté inintelligible, est corrigé en ~~poenicissant~~, hapax bâti sur un modèle bien attesté à l'époque et qui résume l'accusation de Caton contre ceux qui utilisent des produits de luxe carthaginois, dont les pavements. Il s'ensuit que ~~pavimenta poenica~~ ne figure pas chez Caton. 2 - Celle-ci n'apparaît que chez Festus et rien n'empêche que, de son temps, elle ait désigné, comme il le dit, des pavements en marbre de Numidie. 3 - Conséquences pour l'histoire de la mosaïque : a) n'apparaissant pas chez Caton, la locution ne peut être tenue, comme on l'a proposé, pour le nom antique de notre ~~opus signinum~~; b) Caton nous apprend que, de son temps, l'usage des pavements était récent à Rome et pouvait passer pour un apport punique.
17 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1982
Nombre de lectures 44
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Philippe Bruneau
Pavimenta poenica
In: Mélanges de l'Ecole française de Rome. Antiquité T. 94, N°2. 1982. pp. 639-655.
Résumé
Philippe Bruneau, «Pavimenta poenica», p. 639-655.
Examen de la rubrique Pavimenta poenica du lexique de Festus et de la citation de Caton qu'elle contient : 1 - Le dernier mot de
celle-ci, poeniciistent, resté inintelligible, est corrigé en poenicissant, hapax bâti sur un modèle bien attesté à l'époque et qui
résume l'accusation de Caton contre ceux qui utilisent des produits de luxe carthaginois, dont les pavements. Il s'ensuit que
pavimenta poenica ne figure pas chez Caton. 2 - Celle-ci n'apparaît que chez Festus et rien n'empêche que, de son temps, elle
ait désigné, comme il le dit, des pavements en marbre de Numidie. 3 - Conséquences pour l'histoire de la mosaïque : a)
n'apparaissant pas chez Caton, la locution ne peut être tenue, comme on l'a proposé, pour le nom antique de notre opus
signinum; b) Caton nous apprend que, de son temps, l'usage des pavements était récent à Rome et pouvait passer pour un
apport punique.
Citer ce document / Cite this document :
Bruneau Philippe. Pavimenta poenica. In: Mélanges de l'Ecole française de Rome. Antiquité T. 94, N°2. 1982. pp. 639-655.
doi : 10.3406/mefr.1982.1338
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/mefr_0223-5102_1982_num_94_2_1338PHILIPPE BRUNEAU
PAVIMENTA POE Ν ICA
Si l'histoire de la mosaïque antique se construit pour l'essentiel, com
me il est normal, sur l'examen des mosaïques elles-mêmes, il est aussi
légitime d'y mettre en œuvre les textes grecs et latins, d'ailleurs relativ
ement peu nombreux, qui la concernent. Encore faut-il, pour en faire des
sources historiques utiles, les comprendre aussi précisément que possible,
tâche que rend souvent malaisée l'emploi de termes techniques dont le
sens ne nous est pas évident. Tâchant, quant à moi, depuis une quinzaine
d'années, à dissiper certaines des ombres qui obnubilent l'intelligence de
ces témoignages antiques1, c'est un nouveau cas obscur que j'aborde ici,
celui des pauimenta poenica, expression connue par une des rubriques du
lexique de Festus où elle paraît attribuée à Caton l'Ancien.
La question est devenue archéologiquement importante dans la me
sure où Gilbert Charles Picard, suivi par d'autres spécialistes, a plusieurs
fois indiqué — j'y reviendrai en détail dans la dernière section de cet arti
cle — qu'il convenait d'identifier ces «pavements puniques» avec le genre
de pavement que nous nommons conventionnellement aujourd'hui opus
signinum2, revêtement fait d'un ciment rose vif où sont insérées, soit irr
égulièrement, soit pour former décor, quelques tesselles blanches et parf
ois noires (fig. 1 et 2) : ce serait la preuve que les Romains, au temps de
Caton, considéraient eux-mêmes cette technique comme une invention
carthaginoise et nous tiendrions ainsi une précieuse information sur ses
origines.
1 Ph. Bruneau, BCH, 91, 1967, p. 423-446 (avec compléments dans BCH, 99,
1975, p. 283-286, et 102, 1978, p. 138-145), sur κατάκλυστον et λιτόστρωτον ; REG,
80, 1967, p. 325-330, sur άβακίσκοι; Antike Kunst, 12, 1969, p. 80-82, et Le sanct. et
le culte des divin, égypt. à Érétrie, 1975, p. 77, sur κονίαμα; EADélos, XXIX, Les
mosaïques, 1972, p. 119-120, sur les noms de pavements dans les inscriptions
déliennes; Ree. Plassart, 1976, p. 15-27, sur lacedaemonius orbis; ΣΤΗΛΗ (Mél.
Kontoléon), 1978, p. 134-143, sur le Pap. Cairo Zen. 59665.
2 Conventionnellement, car le passage de Pline, H.N., XXXV, 165, qui semble
avoir inspiré l'expression moderne, peut concerner une technique différente.
MEFRA - 94 - 1982 - 2, p. 639-655. 640 PHILIPPE BRUNEAU
À première vue, cette opinion n'a rien que de plausible puisque l'opus
signinum est en effet assez amplement représenté sur les sites du monde
carthaginois, à Carthage même3, à Kerkouane4, en Sardaigne5, à Sélinon-
te6 (fig. 1 et 2). Pourtant, je le dis d'entrée de jeu, l'équation des pauimen-
ta poenica de Festus et de notre opus signinum ne me paraît plus accepta
ble dès lors qu'on examine de près le passage de Festus. Le voici, trans
crit de l'édition Lindsay et suivi du résumé qu'on en trouve dans l'abrégé
rédigé au VIIIe siècle par Paul Diacre :
Pavimenta poenica, marmore Numidico constrata significai Cato, cum
ait in ea, quant habuit, ne quis consul bis fieret : «Dicere possum, quibus
uillae atque aedes aedificatae atque expolitae maximo opere citro atque
ebore pauimentis t poeniciistent ~\».
PAULI EXCERPTA
Pauimenta poenica, hoc est marmore Numidico strata.
Apparat critique
Poenicis sient Jordan stent Augustinus (Venitiis 1559)
La fin du texte est frappée d'une crux : manifestement corrompue,
elle ne présente aucun sens et comme les corrections proposées, j'y
reviendrai, n'arrangent rien, c'est une traduction inachevée que, provisoi
rement, je présente ici :
«Pavements puniques, faits en marbre de Numidie. Caton y fait allu
sion lorsqu'il dit dans son discours sur la réitération du consulat : je puis le
dire, ceux qui ont des maisons de campagne et des demeures construites et
décorées avec le plus grand soin de bois de citrus, d'ivoire, de pavements
[???]»
Cette courte notice est difficile à deux titres : non seulement, en effet,
la fin en est actuellement inintelligible, mais il est archéologiquement
impensable que Caton ait eu en vue, comme le dit Festus, des pavements
en marbre de Numidie; en effet, il n'en existait nulle part au IIIe siècle et
3 S. Lancel et autres, Byrsa I, Coll. Éc. franc, de Rome, 41, 1979, passim;
S. Lancel, CRAI, 1981, p. 187; etc. — Cf. la mise au point sur «les pavements puni
ques» de M. Fantar, Dossiers de l'archéologie, 31, nov.-déc. 1978, p. 6-11.
4 Cf. M. Studi magrebini, I, 1966, p. 57-65.
5 G. Pesce, Sardegna punica, 1960, p. 76 et pi. 63.
6 M. Fantar, op. cit. (supra, n. 3), p. 10. «PAVIMENTA POENICA» 641
Illustration non autorisée à la diffusion
Fig. 1 et 2 - Pavements en opus signinum de Sélinonte :
caducée et « signe de Tanit » ; bucrane à l'intérieur d'une couronne. 642 PHILIPPE BRUNEAU
ce n'est pas pour une autre raison que G. Ch. Picard a songé à l'opus
signinum. Pour voir un peu plus clair dans cette situation passablement
confuse, il me paraît indispensable de ne pas examiner ensemble deux
textes que séparent plus de trois cents ans, la citation corrompue de
Caton et la glose de Festus, et de n'apprécier qu'ensuite les conséquences
de cet examen philologique pour l'archéologie de l'opus signinum et, plus
généralement, des pavements.
I - LA CITATION DE CATON
Possédant un début de phrase tout à fait intelligible et sachant par
ailleurs qui était Caton, le plus simple est de nous demander d'abord ce
que notre orateur a chance d'avoir voulu dire, en s'assurant naturell
ement que le sens proposé convient aux réalités archéologiques du temps
(A); une correction toute simple se présente alors qui accorde la fin,
actuellement corrompue, de la phrase a son mouvement général (B).
A - Sens général
Quelles que soient les incertitudes sur la construction de la phrase,
nous connaissons trop bien Caton pour ne pas deviner de quoi il parle.
Deux de ses thèmes favoris se laissent aisément reconnaître : la condamn
ation du luxe et l'opposition à Carthage.
1 - La condamnation du luxe.
Les témoignages convergents des auteurs anciens nous laissent de
Caton l'image d'un adversaire déclaré d'un luxe qui se développait alors à
Rome (Tite-Live, XXXIV, 1-4, discours de Caton contre l'abrogation de la
loi Oppia; Cornelius Nepos, Caton, 2 : multas res nouas in edictum addidit
qua re luxuria reprimeretur, quae iam turn incipìebat pullulare, «il fit à
l'édit un bon nombre d'additions pour réprimer le luxe qui commençait
déjà alors à se répandre»; Plutarque, Caton, 18, 2-5, impôts supplémentair
es sur les produits de luxe).
Or, si court soit-il, notre texte se rattache évidemment à ce thème
majeur de la pensée politique de Caton. Non seulement il y est question
de «maisons de campagne et de demeures construites à très grand soin» POENICA» 643 «PAVIMENTA
alors que la traditionnelle simplicité romaine devait appeler bien moins
de recherche, mais apparais

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