La littérature thomiste récente - article ; n°64 ; vol.42, pg 591-608

Fernand Vansteenberghen

Description

Revue néo-scolastique de philosophie - Année 1939 - Volume 42 - Numéro 64 - Pages 591-608
18 pages

Informations

• Publié par: REVUE_NEO-SCOLASTIQUE_DE_PHILOSOPHIE
• Publié le: 01 janvier 1939
• Nombre de lectures: 55
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 1 Mo

Extrait

Fernand Van Steenberghen
La littérature thomiste récente
In: Revue néo-scolastique de philosophie. 42° année, Deuxième série, N°64, 1939. pp. 591-608.
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Van Steenberghen Fernand. La littérature thomiste récente. In: Revue néo-scolastique de philosophie. 42° année, Deuxième
série, N°64, 1939. pp. 591-608.
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LA LITTÉRATURE THOMISTE RÉCENTE
L'aperçu bibliographique qu'on va lire fait suite à celui de
février 1938 (1) et il achève le cycle des bulletins médiévaux parus
cette année dans la Revue néoscolastique.
Etudes générales.
Parmi les meilleures introductions à la vie et à la doctrine du
Docteur Angélique, il faut compter depuis longtemps celle de
Mgr HoOGVELD. Or voici que le succès de l'ouvrage a obligé l'au
teur à le remettre sur le métier en vue d'une troisième édition,
qui vient de paraître (2>.
Ce beau volume, orné d'une reproduction hors-texte du
S. Thomas de Fra Angelico (fragment de la Crucifixion), comprend
une partie historique (1-84), une partie doctrinale (85-209) et un
appendice sur la bibliographie thomiste (210-217). C'est le plan du
petit livre de Mgr Grabmann (Thomas von Aquin. Eine Einfiihrung
in seine Persônlichk.eit und Gedanl%enWelt, 6e éd., 1935), dont l'ou
vrage de Mgr Hoogveld n'était, primitivement, qu'une traduction
remaniée. Mais déjà dans la deuxième édition (1929), et plus encore
dans celle qui nous occupe, l'apport personnel du professeur de
Nimègue est considérable, surtout dans la section doctrinale. Dans
cette dernière, une bibliographie spéciale, tenue à jour, est donnée
au terme de chaque chapitre ; le lecteur qui désire approfondir
une question est donc mis sur la voie.
La partie historique comporte six tableaux : la vie de S. Tho
mas ; ses écrits ; sa personnalité ; ses caractéristiques comme savant ;
la lutte autour du thomisme naissant ; les sources de la doctrine
thomiste (avec des indications pour l'étude critique des œuvres de
<*> Cf. La littérature albertino-thomiste (1930-1937), dans la Revue Néoscol
astique de Philosophie, février 1938, pp. 126-161.
(2) Dr J. H. E. J. HoOGVELD, Inleiding tot leven en leer van S. Thomas van
Aquino. Derde bijgewerkte druk. (Wijsgerige en zielkundige Bibliotheek). Nij-
megen-Utrecht, Dekker en Van de Vegt, 1939; un vol. 24x16 de XII-217 pp.
Prix : 2.50 fl. ; relié, 3.25 fl. Fernand Van Steenberghen 592
S. Thomas). Dans toute cette première partie, l'auteur n'a négligé
aucun effort pour fournir un exposé conforme aux résultats des
recherches les plus récentes. La « neutralité » qu'il observe assez
souvent en présence des opinions divergentes est peut-être exces
sive en certains cas : ainsi, en ce qui concerne la chronologie des
écrits de S. Thomas, les conclusions et les hypothèses de Man-
donnet sont dépassées par les travaux de Glorieux, de Lottin, de
Mansion et d'autres. Pour le mouvement des traductions au XIIIe
siècle (p. 5), il eût été sage de citer Mgr Pelzer (dans la 6e éd. de
l'Histoire de M. De Wulf).
La partie doctrinale de l'ouvrage est divisée en neuf chapitres
et l'ordre suivi dans l'exposé de la pensée de S. Thomas nous
paraît fort heureux. Deux chapitres, d'abord, sont réservés aux
problèmes fondamentaux de la connaissance : l'un envisage la
portée de la connaissance humaine dans l'ordre naturel (I), l'autre
traite des rapports entre science et foi (11). Puis vient un aperçu sur
les principes de la métaphysique thomiste (III), couronné par une
double étude sur Dieu : son existence et sa nature (IV), sa causal
ité ou ses rapports avec l'univers créé (V). Passant ensuite au
monde humain, l'auteur esquisse la psychologie (VI), l'éthique
(VII), la doctrine politique et sociale (VIÎI) de S. Thomas. Un der
nier chapitre traite de la chrétienté et de l'Eglise (IX).
Dans tout cet exposé du système thomiste, l'auteur suit de
près les textes, qui sont d'ailleurs abondamment reproduits en tr
aduction ou du moins cités comme témoins par de simples références.
L'interprétation que donne Mgr Hoogveld de la théorie thomiste
de la connaissance est étroitement apparentée à celle de Mgr Noël
dans Le réalisme immédiat ; bien entendu, l'aperçu est forcément
assez sommaire, et les vraies difficultés ne sont guère touchées <3).
La même remarque doit être faite pour le chapitre réservé aux
cinq voies et à la déduction des attributs de Dieu. D'autre part,
les mérites exceptionnels de S. Thomas comme psychologue et
(3)-A propos de la réfutation, par S. Thomas, du monopsychisme d'Aver-
roès (pp. 100-101), l'auteur parle de l'intellect agent unique, là où il faudrait
parler de l'intellect tout entier, et principalement de l'intellect possible ou ré
ceptif. Cette confusion se retrouve chez pas mal d'historiens et il importe de la
dissiper. Rappelons donc que l'erreur spécifiquement averroïste, réfutée par S. Tho
mas dans le De unitate intellectus, consiste à affirmer qu'il y a un intellect pos
sible unique pour tous les hommes. La question de l'intellect agent est délibé
rément laissée de côté. littérature thomiste récente 593 La
comme moraliste sont bien mis en lumière. Le chapitre sur la
chrétienté et l'Eglise est plutôt un hors-d'oeuvre, car il relève de
la synthèse théologique de S. Thomas, au même titre que les doc
trines trinitaires ou christologiques.
L'appendice bibliographique mentionne le Bulletin thomiste,
les autographes de S. Thomas, les éditions complètes, les princi
pales éditions et traductions partielles, les biographies de S. Tho
mas et quelques introductions générales au thomisme.
Le P. Timothée RICHARD a été frappé par la mort le 5 sep
tembre 1938, au moment où il achevait de corriger les épreuves de
son dernier ouvrage : Comment étudier et situer saint Thomas <4).
Ce livre est rédigé sous forme d'entretiens : un dialogue s'engage
entre l'auteur et un étudiant qui, parvenu au terme de sa philo
sophie, désire aborder l'étude directe et personnelle de la Somme
théologique.
On trouve dans le premier entretien de longues considérations,
utiles mais assez banales, sur les devoirs de V enseigné : celui-ci
doit fournir un travail personnel et actif, notamment par des exer
cices de rédaction ; il doit dépasser les mots pour atteindre les
idées; éviter l'éparpillement des lectures multiples et superficielles;
assimiler d'une manière approfondie la philosophie scolastique, base
de la formation théologique ; enfin, mener de front le culte du vrai
et celui du bien, car la doctrine sacrée doit nourrir l'âme tout
entière. — II nous paraît excessif de dire que la connaissance de
la philosophie thomiste constitue Y unique nécessaire (p. 31) en fait
de préparation immédiate à l'étude de S. Thomas (même idée,
p. 42) : à côté de cette préparation doctrinale, une préparation
historique (connaissance du milieu et des sources) et une prépar
ation philologique (connaissance du latin médiéval et du latin
scolastique) sont également indispensables et font trop souvent
défaut.
Ce qui frappe dès l'abord dans les cinq autres entretiens, c'est
l'allure apologétique : le souci de l'auteur semble être de défendre
l'œuvre de S. Thomas contre les critiques dont elle a fait ou pourr
ait faire l'objet. Ce point de vue ne manque assurément pas
d'intérêt.
Un premier groupe de difficultés vise la forme des écrits de
<4> T. RICHARD, O. P., Comment étudier et situer saint Thomas. Paris, Le-
thielleux, s. d. [1938]; un vol. 19x12 de 214 pp. Prix : 15 1rs. 594 Fernand Van Steenherghen
S. Thomas : langue abstraite, méthodes d'exposition, intellectua
lisme ; l'auteur met en relief les avantages de ces tendances et
montre qu'elles ne sont pas exclusives (5).
Dans les chapitres ultérieurs, ce sont des objections de carac
tère doctrinal qui sont examinées. D'abord, S. Thomas n'a-t-il pas
négligé la psychologie, du moins au sens moderne du mot, et cette