Platon et Protagoras : l « apologie » du sophiste dans le Théétète et son rôle dans le dialogue - article ; n°1 ; vol.24, pg 197-234
39 pages
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Platon et Protagoras : l'« apologie » du sophiste dans le Théétète et son rôle dans le dialogue - article ; n°1 ; vol.24, pg 197-234

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Description

Collection de la Maison de l'Orient méditerranéen ancien. Série littéraire et philosophique - Année 1994 - Volume 24 - Numéro 1 - Pages 197-234
38 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1994
Nombre de lectures 163
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Platon et Protagoras : l'« apologie » du sophiste dans le
Théétète et son rôle dans le dialogue
In: Parerga. Choix d’articles de Daniel Babut (1974-1994). Lyon : Maison de l'Orient et de la Méditerranée Jean
Pouilloux, 1994. pp. 197-234. (Collection de la Maison de l'Orient méditerranéen ancien. Série littéraire et
philosophique)
Citer ce document / Cite this document :
Babut Daniel. Platon et Protagoras : l'« apologie » du sophiste dans le Théétète et son rôle dans le dialogue. In: Parerga. Choix
d’articles de Daniel Babut (1974-1994). Lyon : Maison de l'Orient et de la Méditerranée Jean Pouilloux, 1994. pp. 197-234.
(Collection de la Maison de l'Orient méditerranéen ancien. Série littéraire et philosophique)
http://www.persee.fr/web/ouvrages/home/prescript/article/mom_0151-7015_1994_ant_24_1_1358Revue des Études Anciennes, 84, 1982 197
PLATON ET PROTAGORAS : L'«APOLOGIE» DU SOPHISTE
DANS LE THÉÉTÈTE ET SON RÔLE DANS LE DIALOGUE
On a souvent remarqué que Protagoras semble bénéficier, dans les Dialogues de Platon, d'un
traitement de faveur par rapport aux autres sophistes qui y sont mis en scène . Le portrait que
trace de lui, en particulier, le dialogue qui porte son nom le dépeint sous des couleurs plutôt favo
rables, dans l'ensemble , et le fait apparaître en tout cas comme une personnalité bien supérieure
à celle d'un Thrasymaque, d'un Calliclès, ou d'un Hippias . Plusieurs critiques ont noté que dans
les discussions qui l'opposent à Socrate, au cours de ce dialogue, Protagoras se réfère à un code
moral assez exigeant et défend des positions très différentes, voire opposées à celles que Platon
reproche ailleurs à d'autres sophistes . Bien plus, ce n'est pas seulement l'homme qui semble
mieux traité que ses confrères, mais sa pensée qui serait prise plus au sérieux : alors que les Dia
logues ne soufflent mot des spéculations philosophiques de Gorgias , pourtant auteur d'un traité
1. Voir par exemple G. Vlastos, Plato's Protagoras : Β. Jowett's translation revised by Martin Ostwald, ed. with
an introd. by G.V., New York 1956, pp. VU-IX ; l'introduction de Vlastos est reproduite dans le volume Sophistik de
la collection Wege der Forschung (187), édité par C.J. Classen, Darmstadt, 1976, auquel renverront les références ci-
dessous ; ici pp. 272-273 ; W.K.C. Guthrie, A History of Creek Philosophy, III, Cambridge, 1969, pp. 265-266.
2. Cf. Ε. Ν. Lee, «'Hoist with his own Petard' : Ironic and Comic Elements in Plato's Critique of Protagoras (Tht.
161-171)», dans Exegesis and Argument, Studies in Greek Philosophy presented to Gregory Vlastos, Assen, 1973, p.
226 : «The character «Protagoras» as Plato dramatically depicts him in the dialogue Protagoras is a complex and fairly
sympathetic figure».
3. Comparer notamment l'intermède de 334 d sq. à la scène parallèle de Gorgias, 505 d sq. : ce n'est pas Protagoras
qui menace de rompre l'entretien comme le fait Calliclès quand le débat tourne à sa confusion, mais Socrate, parce qu'il
ne peut obtenir de son interlocuteur ce qu'il veut. Jusqu'au bout, et malgré le supplice que Socrate lui fait parfois endurer
(cf. 333e), Protagoras reste digne et «joue» loyalement «le jeu».
4. Cf. A. Grant, The Ethics of Aristotle, Londres, 1885, I, p. 144, cité par Guthrie (ci-dessus, n. 1), p. 265 : «Prota
goras is represented throughout the dialogue as exhibiting an elevated standard of moral feelings» ; Vlastos (ci-dessus,
n. 1), p. 288 : «Protagoras' moral standards differ as much from these [ceux de Thrasymaque, de Calliclès et du «dialo
gue mélien» chez Thucydide] as white from black...» ; M. Gagarin, «The Purpose of Plato's Protagoras», Transactions
and Proceedings of the American Philological Association, 100 (1969), p. 133 sq.
5. Cf. G. Grossmann, «Platon und Protagoras», Zeitschrift für Philosophische Forschung, 32, (1978), p. 510 sq.
6. Cf. J.M. Robinson, «On Gorgias», dans Exegesis and Argument (ci-dessus, η. 2), p. 49 sq.
R.E.A. LXXXIV, 1982. Platon 198
50 REVUE DES ETUDES ANCIENNES
Sur le non-être ou la Nature , la doctrine protagoréenne de «l'homme-mesure» est longuement
discutée dans le Théétète, avec un souci d'objectivité qui a frappé les commentateurs . De même,
il est notable que Platon se soit gardé de caricaturer, comme l'a fait Aristophane , la fameuse
thèse de Protagoras, objet de scandale universel dans l'Antiquité , selon laquelle il est toujours
possible, dans un débat, de faire triompher la cause la plus faible (τόν ήττω λόγον κρείττω
ποιεΐν) . Pourquoi cette apparente indulgence, pourquoi cette appréciation nuancée de la pré
tention du plus illustre des sophistes de s'aventurer dans le domaine propre de la philosophie,
le plus étranger qui soit au sien, aux yeux de Platon ?
Le problème se pose avant tout à propos du traitement réservé à Protagoras dans le Théét
ète, où il n'est pas aisé d'apprécier exactement les intentions de l'auteur à son égard . Sans
doute la longue discussion de sa thèse (1 5 le-1 86e) aboutit-elle à un rejet catégorique de celle-ci,
et sa condamnation, en 183b-c, paraît sans appel («Ainsi, Théodore, de ton ami nous voilà
quittes...» 14 ). Mais la réfutation menée par Socrate ne va pas sans une certaine ambiguïté, dans
la mesure où il n'est pas toujours évident qu'elle atteigne, ni même qu'elle vise réellement le vrai
Protagoras. Le lecteur a en effet souvent l'impression que Platon se soucie moins de critiquer
la véritable pensée du sophiste que de se servir arbitrairement de lui pour définir ses propres posi
tions. C'est ce que suggèrent, notamment, trois observations.
D'abord l'amalgame auquel procède Socrate, tout au long de la discussion, entre la thèse
expressément attribuée à Protagoras et certaines doctrines philosophiques qui en sont rappro
chées d'une manière apparemment arbitraire. Dès le début, en effet, la formule protagoréenne
de «l'homme-mesure de toute chose» est assimilée à la théorie de Théétète sur l'identité de la
science et de la sensation (1 5 le-1 52a), puis à la doctrine héraclitéenne du mobilisme universel
(152c-d). Or, Platon ne fait guère d'efforts pour dissimuler ce que cet amalgame a d'arbitraire.
7. Cf. J.H. Newiger, Untersuchungen zu Gorgias' Schrift Über das Nichtseiende, Berlin-New York, 1973.
8. Cf. Κ. von Fritz, «Protagoras», dans Realencyclopädie der classischen Altertumswissenschaft, 23, 1957, col. 917.
9. Nuées, 112 sq., 889 sq.
10. Cf. Aristote, Rhét. II, 24, 1402 a 25-26, και εντεύθεν δικαίως έδυσχέραινον οί άνθρωποι τό Πρωταγόρου
επάγγελμα.
11. Cf. Aristote, ibid., 1402 a 24, Eudoxe, fr. 307 Lasserre (Stéphane de Byzance, s.v. "Αβδηρα : Protagoras, A
21 Diels-Kranz). Voir également Diogène Laérce IX, 51 (Protagoras, B6 a D-K.), Clément d'Alexandrie, Strom. VI, 65,
Sénèque, Ep. 88, 43 (Protagoras, A 20 D-K.).
12. Voir par exemple Timée, 19 e, τό δέ τών σοφιστών γένος... φοβούμαι δέ μή πως... άστοχον άμα φιλοσόφων
ανδρών ή και πολιτικών...
13. Voir à ce sujet dans la bibliographie établie par C.J. Classen dans Sophistik (ci-dessus, n. 1), les rubriques 3,3,1
et 4,1 de la section consacrée à Protagoras, pp. 700-705. Parmi les publications plus récentes, on peut citer M. F. Burnyeat,
«Protagoras and Self-refutation in Plato's Theaetetus», Philosophical Review, 85, (1976), p. 172 sq. ; A. Barker, «The
Digression in the Theaetetus, Journal of the History of Philosophy, 14 (1976), p. 457 sq. ; R. J. Anderson, The Dramatic
Unity of Plato's Diss. Yale Univ., New Haven Conn., 1976 ; K.M. Dietz, Protagoras von Abdera. Untersu
chungen zu seinem Denken, Bonn, 1976 ; S. Waterlow, «Protagoras and inconsistency. Theaetetus 171 a 6-c7»,
Archiv für Geschichte der Philosophie, 59 (1977), p. 19 sq. ; J.A. Doull, «A Commentary on Plato's Theaetetus», Dionysius,
1 (1977), p. 5 sq. ; Piatone, Teeteto, trad., introd., comment, e note di G. Mazzara, Napoli, 1977 ; F. Decleva-Caizzi,
«II frammento 1D-K. di Protagora. Nota critica», Acme, 31 (1978), p. 1 1 sq., avec une analyse critique de la bibliogra
phie relative à Protagoras.
14. Trad. A. Dies, C.U.F. 84, 1982 199 REA,
PLATON ET PROTAGORAS
En 165d-e, Socrate avertit Théétète que son redoutable allié pourrait bien lui «tendre une embusc
ade», et ruiner sa thèse sur l'identité de la science et de la sensati

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