Recherches interlinguistiques en orientation spatiale - article ; n°1 ; vol.53, pg 171-207
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Description

Communications - Année 1991 - Volume 53 - Numéro 1 - Pages 171-207
37 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1991
Nombre de lectures 16
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Clifford Hill
Claude Vandeloise
Recherches interlinguistiques en orientation spatiale
In: Communications, 53, 1991. pp. 171-207.
Citer ce document / Cite this document :
Hill Clifford, Vandeloise Claude. Recherches interlinguistiques en orientation spatiale. In: Communications, 53, 1991. pp. 171-
207.
doi : 10.3406/comm.1991.1806
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/comm_0588-8018_1991_num_53_1_1806Clifford Hill
Recherches interlinguistiques
en orientation spatiale *
I. INTRODUCTION
Quand ils effectuent des recherches interlinguistiques, les lin
guistes affrontent beaucoup de problèmes, deux des principaux
consistant à 1) délimiter un champ d'expérimentation auquel les
locuteurs de n'importe quelle langue peuvent, en principe, réagir,
et 2) établir des procédures relativement indépendantes du langage
lui-même pour susciter la représentation verbale de ce champ.
Il n'est pas étonnant que les linguistes se soient tournés vers les
domaines visuels pour résoudre ces problèmes. Berlin et Kay (1969),
par exemple, ont développé une méthode souvent utilisée pour étu
dier comment différents langages décrivent le spectre des couleurs.
Leur méthode est relativement directe : un ensemble d'échantillons
colorés (chacun correspondant à une séquence prédéterminée du
spectre) est présenté à des locuteurs de différentes langues et on leur
demande de proposer les dénominations appropriées. Ainsi, ces
locuteurs répondent bien aux mêmes ensembles de stimuli visuels, et
ils le font avec une intervention relativement limitée du langage.
Bien sûr, la tâche doit être verbalement expliquée, ce qui permet
nécessairement différentes formulations. Mais l'absence d'explication
entraînerait de la part des sujets une forme de structuration qui ri
squerait de s'éloigner plus encore des buts fondamentaux recherchés
par les expérimentateurs. Au cours des années, Berlin et Kay ont raf
finé leurs méthodes pour s'approcher de la structuration idéale tout
* Je voudrais remercier Franklin Horowitz, Eric Larsen et Cathy McQure, ainsi que Joye Smith qui
a été, comme toujours, une source d'inspiration pour la rédaction de cet article, dans la forme aussi bien
que dans le fond. Je remercie également Laurie Anderson et Massimo Brandigi qui m'ont fourni un lieu
tranquille à Florence pour le rédiger. Merci enfin aux nombreux collègues qui m'ont aidé à développer
cm recherches interlinguistiques tout au long des année*.
171 Clifford Hill
en restant confrontés aux problèmes habituels de la recherche empi
rique : sélectionner des échantillons représentatifs de sujets pour
chaque groupe ; minimiser les reports de réponse d'un stimulus à
l'autre ; évaluer la variation des réponses pour les mêmes stimuli ; et
ainsi de suite. Comme ces auteurs le reconnaissent eux-mêmes, de
tels problèmes ne peuvent jamais être totalement résolus, en parti
culier quand la recherche s'effectue sur différentes langues, disper
sées à travers le monde. Néanmoins, certaines procédures peuvent
être suivies afin que les problèmes soient minimisés. L'essentiel est
que leur approche soit fondée sur un domaine bien délimité (c'est-à-
dire les couleurs) et utilise des moyens relativement indépendants du
langage pour susciter la représentation verbale du stimulus (les
échantillons colorés).
n. l'orientation spatiale :
haut/bas, devant/derrière ',
gauche/droite
Ces dernières années, j'ai poursuivi avec des collègues des
recherches interlinguistiques dans un autre domaine de l'expérience
humaine, l'orientation spatiale. Ce domaine, contrairement à celui
des couleurs, n'est pas uniquement fondé sur la vision, car nous
continuons à orienter l'espace même quand nous ne pouvons pas
voir : lorsque nous sommes dans le noir, nous gardons, en partie
grâce à des indications kinesthésiques, le sens de l'orientation. Il
nous est toujours possible de nous déplacer à gauche si on nous le
demande, à condition de ne pas faire partie de ces gens qui
confondent leur gauche et leur droite. Comme en témoigne ce type
de difficultés, l'orientation est un domaine complexe et peut donc
être abordé de différents points de vue : par exemple, la perspective
psychomotrice grâce à laquelle les individus utilisent des indications
physiologiques pour recalibrer constamment leur sens de l'orienta
tion spatiale. Abordant ce domaine, je ne cherche pas à l'appréhender
dans toute sa complexité, pas plus que Berlin et Kay ne couvrent
toute la complexité physiologique de la perception des couleurs. Tout
comme eux, cependant, je tente, dès que c'est possible, de relier les
faits linguistiques aux faits physiologiques.
Pour délimiter l'orientation spatiale, je me suis centré sur trois
axes : les axes haut/bas, devant/derrière et gauche/droite, qui consti
tuent, en quelque sorte, mes échantillons colorés. Ces axes sont fon-
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damentaux pour appréhender l'espace immédiat, se distinguant ainsi
d'axes plus abstraits comme les axes nord-sud et est-ouest de l'espace
géographique. Tous les langages se donnent apparemment les
moyens de représenter ces axes immédiats, même quand ce n'est pas
le cas pour les axes abstraits. De plus, le lien entre l'orientation cano
nique des corps humains dans l'espace physique et ces axes fournit la
stabilité nécessaire à la recherche interlinguistique. En comparant les
termes de différentes langues, nous avons la certitude que « haut »
correspond à la position de la tête, « bas » à celle des pieds ; « devant »
à la position des yeux, des organes génitaux ou des orteils, « der
rière » à l'autre côté ; « la gauche » au côté du cœur, et « la droite » à
l'autre. N'étant pas extérieurement marquées, la gauche et la droite
sont plus difficiles à distinguer et, comme je l'ai déjà suggéré, dans
toute culture, il y a des individus qui ont du mal à les distinguer.
La hiérarchie selon laquelle ces axes sont ordonnés se caractérise
par cette plus grande difficulté à distinguer la gauche et la droite.
Notre sens de la verticale est meilleur que celui de l'horizontale et,
dans le plan horizontal, nous conceptualisons mieux l'axe devant/
derrière que l'axe gauche/droite. Cette hiérarchie se représente
comme suit :
haut/bas > devant/derrière > gauche/droite
Cette importance relative est liée à des aspects fondamentaux de
notre expérience : par exemple, nous avons tendance à nous tenir
droit et à marcher vers l'avant. La même expérience nous permet de
différencier les pôles individuels de ces deux axes : haut est plus sail
lant que bas parce que nous sommes orientés vers le haut ; et devant
est plus saillant que derrière parce que nous marchons vers l'avant.
Non seulement l'axe gauche/droite est moins saillant que les deux
autres, mais encore ses deux pôles sont différenciés. C'est qu'il
n'existe pas une forme d'expérience comme la position debout ou la
marche avant pour distinguer l'un de l'autre les pôles gauche/droite.
Il est vrai que la plupart des individus préfèrent l'usage de leur main
droite ; cependant, si nous les regardons utiliser leur main gauche,
l'effet n'est pas le même que s'ils marchaient en arrière ou se tenaient
sur leur tète. Pour tout dire, j'utilise ma main gauche en écrivant cet
article sans que personne ne s'arrête dans la bibliothèque pour me
dévisager.
Il est intéressant de noter que la structure linguistique reflète en
différents points les faits de l'expérience humaine mentionnés ci-
dessus. Pour commencer, les termes bipolaires décrivant les axes
173 Clifford Hill
haut/bas et devant/derrière sont différemment marqués linguistique-
ment : c'est ainsi qu'il n'est pas naturel de dire en anglais down and
up ou back and fronts bien que, dans beaucoup de langues, les termes
désignant s'inversent lorsqu'un contexte dynamique
est introduit. En anglais, par exemple, on utilise back and forth plu
tôt que forth and back (voir Hill et Parry 1988 pour un traitement de
cette inversion). Pour des raisons déj

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