3 Bernard Faÿ, itinéraire d un collabo en terre fribourgeoise
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3 Bernard Faÿ, itinéraire d'un collabo en terre fribourgeoise

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La page trois
3 La Gruyère /Jeudi 14 janvier 2010 / www.lagruyere.ch
Bernard Faÿ,itinéraire d’un collabo en terre fribourgeoise HISTOIRE.Condamnémaçons français. Avec l’aide de 300 collaborateurs, il fiche aux travaux forcés à la 64 000 maçons, publie les noms Libération, le vichyste de 18 000 d’entre eux, fait per-Bernard Faÿ trouva re-dre leur emploi à près de 3000 fonctionnaires. Pire encore, il fuge à Fribourg en 1951 fait déporter un millier de mem-et publia ses mémoires bres de la société secrète, dont aux Editions du Sapinla moitié seront fusillés. Comble de la dérision: au grand dam vert, à Bulle. Enquête. des antimaçons, les persécu-CHRISTOPHE DUTOIT tions de Faÿ touchèrent davan-tage la «France d’en bas, peu-«Comment Bernard Faÿ, hom-plée de postiers, d’instituteurs me cultivé, esthète cosmopo-et de petits fonctionnaires» et lite, personnalité omniprésentene donnèrent pas preuve de la du monde parisien des arts etthéorie du complot. des lettres, familier de Picasso ou de Tzara, comment ce per-Déguisé en curé sonnage a-t-il pu devenir unArrêté le 19 août 1944, le vi-collaborateur de haut vol du-chyste proche du maréchal rant la Seconde Guerre mon -Pétain fut jugé à la fin 1946, diale?» La question hanteLecondamné aux travaux forcés à cas Bernard Faÿperpétuité, à la confiscation, dernier livre d’Antoine Compagnon,qui ade ses biens et à la dégrada-secoué ces dernières semainestion nationale. Emprisonné, il le landerneau historique et las’évada de l’hôpital d’Angers le presse française. Cet éclairage30 septembre 1951 et franchit est d’autant plus fascinant quela frontière suisse déguisé en ce personnage singulier de lacuré. Sous les pseudos de Phi-collaboration a trouvé refuge àlippe Conaint ou Pierre Conin, Fribourg, en 1951, et qu’il pu-«il transita par Genève et arriva blia ses mémoires à Bulle.à Fribourg où il retrouva son «Faÿ fut un individu peu re-ami Gonzague de Reynold», ex-commandable et même très dé-plique Sylvie Couchepin, dansUne photographie de Bernard Faÿ (à gauche) prise en Suisse en 1957, l’année de son amnistie.ARCHIVES FAMILIALES / GALLIMARD plaisant, un intellectuel qui sa-un mémoire de master déposé crifia la morale à la politique»,à l’Université de Fribourg en écrit Antoine Compagnon,octobre 2009.moins obscure et douteuse, quivrage. Tout au plus sait-on que Nous ne saurions admettre que documenté. «Il croyait à la ré-années à la villa Saint-Jean, te-saisons et des jours, le journalcolonnes duFribourgeois, dans son ouvrage richementIl séjourne alors plusieursimprima la même annéeDesFaÿ a sans doute écrit dans les notre Université catholique prît à son demption sociale par les régi-nue par des marianistes à Pé-d’Alphonse de Châteaubriant,comme il le laisse entendre à service leurs bourreaux ou les compli-mes forts et s’enticha derolles, «l’office de blanchisse-autre sinistre personnage, favo-Gonzague de Reynold. De ces des persécuteurs.GÉRARD GLASSON Franco et de Pétain après Mus-ment des vichystes», selon lesrable à l’idéologie nationale-so-même, il publia durant la solini.» termesde Francis Python, pro-cialiste, qui rencontra Hitler àguerre des éditoriaux édifiants fesseur d’histoire contempo-Berchtesgaden en 1938. «Le Sa-dansLa Gerbe, l’hebdomadaire Il tourne casaquepatriotes torturés, comme desacadémicien français. «Dans sapin vert est peut-être une mai-d’Alphonse de Châteaubriant.raine à l’Uni de Fribourg. «Il ob-«De famille ultrabourgeoisetient un poste de professeur decommunistes envoyés au po-correspondance avec Gonza-son d’édition bidon créée par«Je me souviens avoir croisé par sa condition financière etfrançais à l’Institut pratique deteau. Nous ne saurions admet-gue de Reynold, Faÿ dit son hé-Faÿ», avance Sylvie Couchepin.ce vieux monsieur avec une ultracatholique par sa mère», lefrançais, sous l’égide de l’Uni-tre que notre Université catho-sitation à faire un procès à Gé-«Cette enseigne semble être af-canne à la Bibliothèque canto-jeune homme est atteint par laversité, ainsi qu’à l’Ecole deslique prît à son service leursrard Glasson, relève Sylviefiliée au journalLe Fribourgeois, nale,rapporte Francis Python. polio et peine à assumer sesFougères, sur Pérolles, et aubourreaux ou, tout au moins,Couchepin. Finalement, sesjusqu’en 1956, date de son ra-Finalement, il n’aura ni le sou-penchants homosexuels. Bril-collège de Champittet, à Lau-les gens qui furent, peu ouamis l’en dissuadent par peurchat par Ettore Appetito, quitien des milieux intellectuels ni lant américanophile, nommé ausanne.» prou,les complices des persé-d’un scandale.»s’empresse de la liquider»,les attaches suffisantes pour Collège de France, il tourne ca-«Bien qu’au début des an-cuteurs.» Un discours sans am-comme l’explique Christophes’implanter à Fribourg, au mo-saque durant les années trente.nées 1950 il hésitât à se réfugierbiguïté, adressé directement àLié auFribourgeoisment où le canton s’ouvre à laMauron, conservateur au Mu-En 1937, il prend la parole àen Espagne ou au Canada, il fi-José Python, conseiller d’EtatEntre-temps, le collabo aurasée gruérien, à Bulle, auteurmodernité.» Bernard Faÿ mou-Berlin devant le comité alle-nit par montrer son attache-et ministre de l’Education.le temps d’écrire ses mémoires,d’un séminaire surLe Fribour-rut en 1978, oublié. Jusqu’à ce mand de l’Académie du droitment à Fribourg où il ne rencon-L’attaque est suffisammentintituléesgeoisDe la prison de ceque des historiens fassent re-en 1997. des nations et y rencontre lestre aucun problème jusqu’enforte pour que Faÿ soit poussémonde, Journal, prières et pen-Les liens de Bernard Faÿ àsurgir cette figure du passéjeunesses hitlériennes. Il côtoie1959, poursuit Sylvie Couche-à la démission, grâce à la vigi-sées 1944-1952Bulle sont encore peu clairs et, qu’il publie en dans ce cadre Gonzague depin. Au contraire, l’épurationlance de Pierre-Henri Simon,1953 aux Editions du Sapin vert,Antoine Compagnon n’y fait au-Antoine Compagnon, Reynold, professeur à l’Univer-française était très critiquéeprofesseur à Fribourg et futurà Bulle. Une enseigne pour lecune référence dans son ou-Le cas Bernard Faÿ, Gallimard sité de Fribourg.dans certains milieux, qui Nommé administrateur de lavoyaient dans les exilés des vic-Bibliothèque nationale fran-times et qui les protégeaient.» Un refuge pour les anciens de Vichy çaise en 1940, il devient un vi-Malgré son amnistie en avril chyste zélé et fait notamment1957 – alors que François Mitter-effacer les noms des donateursrand est ministre de la Justice – juifs sur les murs de l’institu-Bernard Faÿ voit sa présence«Depuis la Révolution française (dèspoursuivies en Suisse ni même extradées.nais ou grecs, internés dans des camps à tion. Surtout, durant ses quatredans les couloirs de Miséricorde1789), le canton de Fribourg a toujours faitAu contraire, le vent tournera et, avecGrangeneuve ou à la Maison de Ville à La années à la rue Richelieu, à Pa-attaquée par la presse. LaNatio-Roche. Plus tard, dans les années 1960, lal’adoption des premières lois d’amnistieoffice de terre de refuge, explique Francis ris, Ber nard Faÿ lance une fa-nal-Zeitung, jour nal radical bâ -Python, professeur d’histoire contempot re-Gruyère a même servi de tanière pour des- dèsla fin des années 1940, la plupar rouche lutte contre les francs-lois, met le feu aux poudres auvétérans de la guerre d’Algérie. Ainsi, unraine à l’Université de Fribourg. Pour lestourneront en France où «ils se tireront printemps 1959.sans mal des mains d’une justice fatiguéelégitimistes français (royalistes contre-ré-certain Georges Watin, dit «La Boiteuse», volutionnaires) dans les années 1830 oude ces problèmes», comme le note l’histo-officier de l’OAS (Or ganisation armée se-PUBLICITÉPoussé à la démissionpour de nombreux religieux tout au longrien Alain Clavien.crète) et auteur d’un attentat contre le e Quelques jours plus tard,du XIXsiècle.» A une certaine époque, ilgénéral de Gaulle en août 1962, se cachera Gérard Glasson, député bulloisn’était pas rare de se cacher dans le cou -Le cas de Watin dit «La Boiteuse»illars-sous-Mont, avant deun temps à V et rédacteur en chef deLafinir ses jours au Paraguay.Cependant, Fribourg n’a pas été qu’unevent de la Valsainte, à Cerniat. Ce «réseauCD Gruyèreterre d’asile pour les vichystes. Le canton, fait une interpellationarrière des congrégations religieuses» a au Grand Conseil. «Nous som -servi de base aux collaborationnistes dea aussi accueilli des résistants durant la Se-mes en possession d’un rap-Vichy et autres admirateurs du maréchalconde Guerre, notamment des amis du car-A suivre dansLa Gruyèrede samedi: port émanant du Centre de do-Pétain. dinalJournet, ou encore des soldats polo-Des épurés français dans «Le Fribourgeois» cumentation juive contempo-«Dans les cantons catholiques PUBLICITÉ raine. Il dépeint le professeurcomme Fribourg, il suffisait sou-en cause comme un antisémitevent de dire que vous étiez pour-notoire», écrit-il sous forme chassépar les communistes en www.celsa.chraison de votre foi catholiqued’une philippique dans son journal. «Nous pensons que lapour obtenir un statut de réfugié charité chrétienne commandepolitique», analyse Francis Py-d’avoir pitié de ces victimesthon. C’est pour cette raison que [les francs-maçons], commeles nombreuses «victimes» de des Juifs déportés, comme desl’épuration n’ont jamais été
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