Analyses d'ouvrages ; n°3 ; vol.5, pg 475-483

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Bulletins et Mémoires de la Société d'anthropologie de Paris - Année 1993 - Volume 5 - Numéro 3 - Pages 475-483
9 pages

Sujets

• Sociologie, société et politique

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• Publié par: BULLETINS_ET_MEMOIRES_DE_LA_SOCIETE_D-ANTHROPOLOGIE_DE_PARIS0
• Publié le: 01 janvier 1993
• Nombre de lectures: 34
• Langue: Français

Extrait

Analyses d'ouvrages
In: Bulletins et Mémoires de la Société d'anthropologie de Paris, Nouvelle Série, tome 5 fascicule 3-4, 1993. pp.
475-483.
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Analyses d'ouvrages. In: Bulletins et Mémoires de la Société d'anthropologie de Paris, Nouvelle Série, tome 5 fascicule 3-4,
1993. pp. 475-483.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/bmsap_0037-8984_1993_num_5_3_2377Bull, et Mém. de la Société d'Anthropologie de Paris, n.s., t. 5, 1993, pp. 475-483
ANALYSES D'OUVRAGES
P.U.F. Les Dogons et I.N.E.D. de Boni Editeurs, : approche Paris, démo-génétique (1993) 302 pages, d'un 170F isolât du Mali. M. H. Cazes,
Faire un compte-rendu critique de l'ouvrage dirigé par M. H. Cazes n'est pas chose
facile. Il s'agit d'une étude très longue et très fouillée. Comment faire un compte-rendu
exhaustif ? Puisqu'il faut être partiel, il s'agit de ne pas être partial, alors que la lecture
de l'ouvrage suscite tour à tour admiration devant la quantité et la qualité du travail et
parfois déception devant les conclusions qu'on peut en retirer.
M. H. Cazes, chercheur à l'INED, a conduit pendant près de 15 ans ces recherches
démographiques et génétiques sur l'isolât des Dogons de Boni (Mali). Il ne s'agit
nullement de la population de la « Falaise » (Bandiagara) célèbre pour sa cosmogonie
rapportée par des ethnologues comme Marcel Griaule {Dieu d'eau. Entretien avec
Ogotemmêlé, éd. du chêne. 3 éd., 1966, Fayard, Paris). Les Dogons de Boni sont une
population sans doute fille des précédents, émigrée, isolée sur quatre ergs, au sud de la
piste entre Douentzja et Hombori.
M. H. Cazes commence son ouvrage par une description précise de la situation
économique et culturelle de la population. Elle montre comment cette population, isolée
de sa culture d'origine et des populations avoisinantes de la plaine a perdu jusqu'à la
pratique de l'art et le travail du fer. Elle montre aussi comment cette population a su
trouver, dans des conditions difficiles voire hostiles, un équilibre de vie, économique,
sociale et culturelle.
Le point fort et central de l'étude des Dogons de Boni est la reconstitution totale du
réseau généalogique depuis les ancêtres fondateurs jusqu'aux habitants actuels. On sait
à quel point une telle reconstitution n'est pas sans poser de problèmes de fiabilité, surtout
quand il n'y a pas d'état-civil écrit, mais une mémoire et une tradition orale. De ce point
de vue, le travail de M. H. Cazes est remarquable car elle connaît parfaitement les limites
et les difficultés de l'exercice et ne perd jamais l'occasion de valider la fiabilité de sa
reconstitution, aussi bien par le croisement d'enquêtes parallèles que par des analyses
biologiques (un nombre limité cependant, mais confirmant la quasi-absence d'exclusion
de paternité dans cette population). Le réseau généalogique étant reconstitué et bien
reconstitué, M. H. Cazes s'est fixée un but que le titre de l'ouvrage mentionne : étudier
la dynamique de cette population aussi bien à travers les paramètres classiques de la
démographie qu'à travers ceux de la génétique des populations.
L'originalité de l'ouvrage consiste en effet dans la mise en œuvre parallèle de ces deux
disciplines afin d'évaluer l'isolement des Dogons, la mesure et la structure de
cet isolement entre massifs, ou à l'intérieur des massifs entre villages.
Ainsi le chapitre consacré à l'étude de l'endogamie et des échanges matrimoniaux
(entre villages ou massifs) est-il suivi d'un chapitre illustrant les conséquences de la
structure matrimoniale sur l'évolution génétique des Dogons. Cette évolution est formal
isée de deux façons différentes. Dans un premier temps, M. H. Cazes calcule, par un JEAN LOUIS SERRE 476
traitement informatique des données généalogiques, le coefficient de consanguinité de
tous les individus et, par sommation, la consanguinité par village ou par massif à un instant
donné. Ceci lui permet de visualiser l'évolution dans le temps de la proportion de la
consanguinité due à des mariages entre apparentés du même village, du même massif ou
de massifs différents, (consanguinité intra-village, intra-massif inter-villages et inter
massifs). Cette approche intègre les échanges matrimoniaux dans une de leur consé
quence, l'évolution de la consanguinité.
Dans un deuxième temps, M. H. Cazes en bon élève d'A. Jacquard, calcule les
probabilités d'origine des gènes. Cette analyse donne des conclusions convergentes sur
l'isolement respectif des massifs ou des villages. Elle nous permet aussi de cibler
l'importance de divers fondateurs dans le réseau généalogique.
Les études coûteuses de groupes sanguins n'ont pas pu englober un grand échantillon.
Leurs résultats, bien que limités, sont tout à fait cohérents avec l'approche démog
énétique. Non seulement ils valident la cohérence des généalogies, mais aussi les
conclusions génétiques de l'étude de ces généalogies du point de vue de l'isolement
génétique et de la dérive génétique qui en découle.
L'ouvrage sur les Dogons de Boni est donc une véritable monographie englobant des
questions aussi variées que la démographie, la génétique, l'économie, les structures
sociales et culturelles du groupe, en le situant au carrefour entre ses origines connues et
ses futurs possibles et problématiques.
Il reste malgré tout une déception. M. H. Cazes écrit elle-même : « Finalement,
l'analyse des données hémotypologiques illustre les résultats obtenus par l'exploitation
des généalogies mais elle s' avère un peu décevante compte tenu des efforts consentis pour
obtenir les données. » Je dirai, personnellement, que ce sentiment s'applique presque à
tout l'ouvrage.
Si une bonne connaissance ethnologique des Dogons de Boni laissait supposer
l'existence d'une double barrière démo-génétique entre massifs d'une part et entre
villages d'un même massif d'autre part, l'étude généalogique de M. H. Cazes a permis de
la démontrer et de la quantifier. La question qui se pose alors est de savoir si une telle
démonstration valait une telle quantité de travail alors que l'hypothèse semblait aller de
soi au départ, c'est en ce sens que le travail, en tout point remarquable de maîtrise des
concepts et des outils, peut paraître parfois un peu décevant. Il eut été si enthousiasmant
de découvrir des phénomènes inattendus.
Ce travail doit être salué comme une monographie qui participe à l'œuvre de mémoire
d'un peuple, d'un moment de l'humanité, qui est destiné à disparaître et dont les seules
archives seront justement cette monographie de M. H. Cazes.
Jean Louis Serre
Groupe de cytogénétique et génétique humaine,
Université de Versailles/St Quentin en Yvelines
45, avenue des Etats-Unis,
78000 Versailles ANALYSES D'OUVRAGES 477
The Spitalfields Project, Volume 2 : The Anthropology, The Middling Sort, par T.
Molleson et M. Cox avec A. H. Waldrom et D. K. Whittaker. Council for British
Archarology Research Report № 86. 1993. 321 p., 1 microfiche, nombreuses photos et
illustrations.
Depuis quelques années, nombreux sont les communications aux congrès, les articles
scientifiques et les projets de recherches où il est question de la série de « Spitafields ».
C'est donc avec un immense intérêt que j'ai pris connaissance du volume de « The
Spitalfields Project » portant sur Г anthropologie. Dès le titre « The Middling Sort », « La
Classe Moyenne », le ton est donné. Il s'agit d'une de ces quelques séries de squelettes
à travers le monde auxquelles viennent d'être par ailleurs consacré un symposium dans
le cadre de l'American Association of Physical Anthropologists, Toronto 1993, pour
lesquelles l'âge, le sexe et la condition sociale de nombreux sujets sont connus.
Ici il s'agit plus spécialement d'environ 1 000 squelettes provenant de la crypte de
Christ Church à Spitalfields, l'un des quartiers de Londres. Ce sont les restes de sujets
inhumés entre 1 729 et 1 852, mais ayant vécu pour la plupart