Antiquité gréco-romaine  ; n°1 ; vol.23, pg 206-214
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Annales. Économies, Sociétés, Civilisations - Année 1968 - Volume 23 - Numéro 1 - Pages 206-214
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Publié le 01 janvier 1968
Nombre de lectures 36
Langue Français

Extrait

Monsieur Pierre Vidal-Naquet
André Chastagnol
J. Melzer
Antiquité gréco-romaine
In: Annales. Économies, Sociétés, Civilisations. 23e année, N. 1, 1968. pp. 206-214.
Citer ce document / Cite this document :
Vidal-Naquet Pierre, Chastagnol André, Melzer J. Antiquité gréco-romaine. In: Annales. Économies, Sociétés, Civilisations. 23e
année, N. 1, 1968. pp. 206-214.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ahess_0395-2649_1968_num_23_1_421898BRÈVES ET PRISES DE POSITION NOTES
Antiquité gréco-romaine
m Fonction de la monnaie dans la Grèce archaïque. — L'adoption par
la Grèce à la fin du VIIe siècle de l'instrument monétaire a-t-elle été pro
voquée par des causes directement économiques : développement du grand
commerce méditerranéen et du commerce interne des cités-états ? S'ex-
plique-t-elle par l'apparition au premier rang de la société hellénique
d'une importante catégorie sociale de marchands ? Pour l'immense major
ité des historiens la réponse est affirmative. Cette vue traditionnelle est
pourtant intenable ; elle a été mise en cause dès 1931 par J. M. Keynes (A
Treatise on money), en 1962 à la conférence d'histoire économique d'Aix-
en-Provence par M. I. Finley, et surtout par Ed. Will qui, dans deux
articles qui sont ou devraient être classiques (« De l'aspect éthique de
l'origine grecque de la monnaie », Revue Historique, 212, 1954, pp. 209-
231 ; « Réflexions et hypothèses sur les origines du monnayage », Revue
Numismatique, 17, 1955, pp. 5-23, voir aussi Korinthiaka, Paris, 1955,
pp. 495-502), avait montré, en utilisant surtout un texte d'Aristote et
les travaux de B. Laum, que l'institution de la monnaie d'État ne peut
être comprise hors de l'effort général de codification et de mesure qui
caractérise la mutation contemporaine de la cité grecque. Ces hypo
thèses pouvaient-elles être démontrées ? Ed. Will ne le pensait pas : « Où
sont les documents qui peuvent étayer quelque hypothèse que ce soit
sut ces questions ? Il n'en est point. » (Korinthiaka, p. 502). De tels
documents existent pourtant ; ce sont les plus anciens trésors monétaires.
Ce sont eux qui font l'objet d'un article de numismate anglais C. M. Kraay
(« Hoards, Small Change and the Origin of Coinage », Journal of Hellenic
Studies, 84, 1964 pp. 76-91). Bien qu'il ait apparemment ignoré les études
d'Ed. Will, tout se passe comme si l'auteur répondait aux questions
posées par ce dernier.
C. M. Kraay a tenté de vérifier une double hypothèse : si la fonction
monétaire est d'abord commerciale, on constatera une très grande di
spersion des trouvailles (commerce international), et on verra se multiplier
la monnaie divisionnaire (petit commerce local). Dans les deux cas, la
réponse sera négative : les monnaies d'Italie ne franchissent pas le détroit
de Sicile, les monnaies de Sicile ne se trouvent guère en Italie que dans
la zone de Reggio, des cités commerçantes comme Egine ou Corinthe ont
une aire de diffusion très restreinte (à condition d'examiner les trésors
dans leur ensemble et de tenir compte des chiffres) ; au contraire une
région productrice d'argent comme le nord-est de la Grèce (Thrace et
Macédoine) exporte ses monnaies en grande quantité et très loin, la
monnaie semble dans ce cas être plus un objet de commerce qu'un moyen
de commerce.
Un cas est tout à fait particulier, celui d'Athènes : cité productrice
d'argent, ses exportations de numéraires sont pratiquement nulles avant
le début de la frappe des « chouettes » (dernier quart du VIe siècle) ; elles
206 NOTES BRÈVES
prennent ensuite un extraordinaire essor, antérieur à la fameuse décou
verte de la « source d'argent » (483). La recherche de nouveaux filons au
Laurion peut même, je crois, s'expliquer par cet essor.
Quant aux monnaies divisionnaires, leur développement sera très
lent dans l'ensemble du monde grec : ainsi à Crotone, l'atelier le plus
important de l'Italie du Sud, il n'existe pratiquement aucune monnaie
inférieure au statère (tétradrachme) avant 480 ; le tableau est moins net
en Grèce centrale puisqu' Athènes notamment semble avoir eu dès le
VIe siècle une monnaie de billon ; celle-ci est au contraire très rare dans
le nord-est et en Asie mineure (à l'exception partielle de l'Ionie).
Le tableau d'ensemble est clair : il existe sans doute des aires de diffu
sion régionale : ainsi les monnaies des grandes cités d'Italie du Sud se
retrouvent ensemble dans presque tous les trésors locaux, il existe des
zones d'exportation d'argent monnayé, mais la carte de la circulation
monétaire telle qu'on peut se la représenter à l'aide de l'étude de C. M.
Kraay, ne coïncide pas avec la carte du grand commerce méditerranéen
telle qu'on peut l'imaginer à l'aide des textes littéraires et surtout des
trouvailles archéologiques, elles-mêmes d'interprétation ambiguë. Ainsi,
si, comme beaucoup de faits le laissent supposer, il existe des relations
directes importantes entre Sybaris et Milet, ces relations ne se traduisent
pas dans les trouvailles monétaires. Il faut donc admettre que la fonction
monétaire n'est pas d'abord une fonction d'échange. Le cas d'Athènes est
cependant particulier : une mutation brusque se produit à la fin du
VIe siècle, avec l'apparition des « chouettes » un peu partout en Médi
terranée orientale. Comment expliquer ce phénomène ? Par la politique
des Pisistratidee possessionnés dans le nord-est, comme le pense M. Kraay ?
Ou par la révolution politique que symbolisent les réformes de Clisthène,
comme nous l'avons suggéré ? (P. Lévêque et P. Vidal-Naquet, Clisthène
Г Athénien, pp. 57-61). Quoiqu'il en soit, l'expansion de la monnaie athé
nienne n'est certes pas indépendante des décisions politiques de l'Etat,
de sa volonté d'imposer le prestige de la cité, mais il serait absurde de ne
pas la mettre en relation également avec l'incontestable développement
du commerce.
Reste qu'il s'agit là de données tardives ; si nous remontons maintenant
au début du monnayage, il faut, selon С M. Kraay, abandonner les expli
cations traditionnelles. Beaucoup plus qu'avec le commerce et les commerç
ants, il faut mettre la frappe par l'État de petits lingots estampillés en
relation avec les besoins propres de l'État. Dans le monde grec du VIIe et
du VIe siècle, les fonctions de l'État se compliquent énormément et les
occasions qu'il a d'encaisser ou de décaisser du métal précieux se multip
lient. Le commerce a sa part dans ce développement, dans la mesure où
les droits de douane (à l'entrée et à la sortie) constituent une des ressources
de l'État, mais, il faut tenir compte également de la solde des mercenaires,
des travaux publics, des amendes qui, dès 570 à Chios, sont exprimées en
numéraires. С M. Kraay note que l'État distribue parfois
aux citoyens, sous forme de monnaie, le produit des mines. Ce point avait
précisément été développé par Ed. Will : « Sociologues et ethnographes
ont fortement marqué aux origines des pratiques monétaires l'importance
des faits de distribution : distribution de dons par le chef à ses fidèles,
distribution de butin aux participants de la chasse et des parts de la
victime à la communauté sacrifiante ; répartition des récoltes entre les
membres de la tribu... » ( Korinthiaka, p. 499). L'historien français a émis
l'hypothèse que les débuts de la monnaie ont pu être facilités par les redis-
207 ANNALES
tributions de terre qu'ont connues, à l'époque archaïque, nombre de cités
grecques : l'État aurait distribué des numéraires à ceux dont il confisquait
les terres. L'étude de С M. Kraay, sans être aussi audacieuse, va dans le
même sens. On pourra sans doute la contester dans le détail ; il faudrait
notamment, tenter de vérifier, là où les trésors n'ont pas été dispersés, si
la proportion de monnaies frappées dans une cité et surfrappées dans une
autre est aussi limitée que l'indiquent ses sources. Mais tel q

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