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1 Support de cours de culturologie Etudes interculturelles européennes du Professeur Martin Hauser Généralités concernant ce cours et le mastère dont il est une partie Ce cours est un des cours principaux du Mastère « Communication interculturelle dans la perspective de l’intégration européenne » fondé en 2002 par le Département-Chaire UNESCO à l’Université de Bucarest et soutenu par l’Université de Fribourg (CH), ainsi que par d’autres institutions de prestige roumaines et étrangères. Dans le cadre de ce mastère, ce cours est complété par d’autres cours de facture humaniste, mais aussi de cours en sociologie, histoire et philosophie des religions, sciences politiques et encore en sciences économiques. Il fait ainsi clairement partie d’une démarche d’études pluridisciplinaire et vouée aux cultures en Europe et à leurs relations. Information www.interculturel.org 1. Définition de « culture » Bien que les définitions de « culture » soient innombrables, nous en proposons ici une comme hypothèse de travail : “Cultura este mijlocul firesc şi natural, dar în acelaşi timp şi necesar fiinţei umane, care îi permite acesteia să se exprime pe sine şi să reflecteze asupra vieţii şi a finalităţii sale eterne.” Cette définition tout étant englobante, elle pourrait être interprétée comme tenant peu compte de la dimension « incarnationnelle ». Or, cela n’est pas l’intention que nous avons avec la définition donnée. Par ailleurs, dans le cadre de ce ...

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Support de cours de culturologie Etudes interculturelles européennes du Professeur Martin Hauser
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Généralités concernant ce cours et le mastère dont il est une partie Ce cours est un des cours principaux du Mastère « Communication interculturelle dans la perspective de l’intégration européenne » fondé en 2002 par le Département-Chaire UNESCO à l’Université de Bucarest et soutenu par l’Université de Fribourg (CH), ainsi que par d’autres institutions de prestige roumaines et étrangères. Dans le cadre de ce mastère, ce cours est complété par d’autres cours de facture humaniste, mais aussi de cours en sociologie, histoire et philosophie des religions, sciences politiques et encore en sciences économiques. Il fait ainsi clairement partie d’une démarche d’études pluridisciplinaire et vouée aux cultures en Europe et à leurs relations. Information www.interculturel.org 1. Définition de « culture » Bien que les définitions de « culture » soient innombrables, nous en proposons ici une comme hypothèse de travail : “Cultura este mijlocul firesc i natural, dar în acela i timp i necesar fiin ei umane, care îi permite acesteia s  se exprime pe sine i s reflecteze asupra vie ii i a finalit  ii sale eterne.” Cette définition tout étant englobante, elle pourrait être interprétée comme tenant peu compte de la dimension « incarnationnelle ». Or, cela n’est pas l’intention que nous avons avec la définition donnée. Par ailleurs, dans le cadre de ce cours, nous étudions des culturologies comme celle de Bronislav Malinowski, qui base la culture sans hésitation sur la biologie !
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En résumé, cette partie du cours est consacrée à la question de la teneur de la culture et à des auteurs qui répondent à cette question. Brève indication bibliographique Bronislav Malinowski, A scientific Theory of Culture and Other Essays, North Carolina 1944 Tudor Vianu, Filosofia culturii i Teoria Valorilor, Bucure ti 1998 2. La science de l’interculturel L’histoire de cette science qui s’est développée dans la deuxième moitié du 20 e siècle est suffisamment riche en études, bien qu’elle soit relativement courte. Elle a ses racines aux Etats-Unis d’Amérique mais passe également à l’Europe, par importation et production propre. Cette nouvelle science a-t-elle trouvé des solutions positives, des véritables « road maps », pour conduire à la compréhension interculturelle? -Tenant compte de l’ensemble produit par cette science jusqu’à ce jour, nous constatons surtout qu’elle a rendu évident le grand nombre de problèmes qui surviennent ou peuvent survenir dans la communication interculturelle et qu’elle a fait preuve de la volonté de disposer de concepts théoriques. Cela s’explique spécialement par le fait que cette jeune science devait et doit se donner un profil – scientifique - ! Dans le cadre de ce cours, nous abordons quelques-unes de ces théories et en donnons un résumé. Cependant, notre option fondamentale se situe un peu ailleurs. Nous pensons qu’il est important de présenter l’interculturel dans sa réalité, qu’il se situe au niveau des grandes dimensions européennes, ou qu’il se situe seulement au niveau local. Nous nous proposons surtout d’observer en quoi il est positif ou négatif pour en tirer un enseignement pour l’interculturel du présent et de l’avenir. Par ailleurs, les théories de cette science – dont nous parlions plus haut – nous seront également utiles dans la mesure où elles peuvent nous aider à mieux comprendre et apprécier les réalités interculturelles que nous observons et traitons. L’interculturel est pour nous une science appliquée.
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Philosophiquement et épistémologiquement parlant, il nous semble indiqué d’éviter tout dualisme entre réalités interculturelles et théories interculturelles. Pour rester fidèles au chemin et à la méthode que nous avons choisis pour nos études, notre enseignement et les recherches liées à ce cours mettent généralement l’accent principal sur les réalités historiques de l’interculturel , pour, si possible, proposer des éléments de solution pour le présent et l’avenir. Dans ce but, nous parcourons notamment les relations interculturelles au niveau général européen mais nous analysons aussi certaines situations plutôt régionales ou locales. Les travaux de fin de mastère et quelques autres recherches effectuées ou à effectuer par les étudiant-e-s complètent la démarche proposée par le cours. Ce dernier parcourt les réalités interculturelles européennes environ de l’Empire romain jusqu’à nos jours. Brève indication bibliographique Ernest Gellner, Reason and Culture: The historic role of rationality and rationalism, Oxford 1992 Jacques Demorgon, Complexité des cultures et de l’interculturel, Paris 2000 Molefi Kete Asante, Eileen Newmark, Cecil A. Blake (editors), Handbook of intercultural communication, Beverly Hills/ London 1979 CMI (Comunicare & Management Intercultural), revue de recherche du Département-Chaire UNESCO, no. 1 (3), Bucure ti 2007. 3. La dimension religieuse et interconfessionnelle. Les relations interreligieuses et interconfessionnelles représentent un aspect important à l’intérieur du questionnement interculturel. De façon très générale, on peut observer que là où les frontières entre religions et confessions n’ont pas renforcé ou ne renforcent pas les lignes de démarcation interculturelles, elles ont plutôt aidé à renforcer les liens interculturels positifs. Cela est arrivé par le sufisme dans les Balkans ou encore dans l’Espagne et la Sicile médiévales où les religions chrétienne et musulmane, et encore juive, étaient suffisamment proches pour aider la cohabitation interculturelle.
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Pour ce qui est des relations interconfessionnelles chrétiennes, nous mentionnons la période 1890-1990 comme étant celle qui a permis un très grand rapprochement entre chrétiens d’origines et appartenances confessionnelles diverses. Des organisations comme le Conseil Oecuménique des Eglises et la Conférence des Eglises européennes, et notamment leurs pionniers charismatiques, ont joué un rôle considérable pour ce rapprochement qui a largement dépassé les barrières culturelles. Or, vers et avec la fin de la « guerre froide », la quête de la propre identité, qu’elle soit religieuse ou culturelle, a pris le dessus, à un tel point souvent que l’entente interreligieuse et interconfessionnelle est mise en danger. Les relations interculturelles sont évidemment très tributaires de toute cette situation. Brève indication bibliographique Aviva Doron, Delicate Balance - Jews, Moslems, Christians: Tensions, Tolerance and Coexistence (Medieval Toledo as a model), Haifa 2004 Reinhard Frieling, Der Weg des kumenischen Gedankens, Göttingen 1992 4. Quelques blocs historiques marquants de la situation culturelle et interculturelle en Europe L’évolution culturelle peut et doit être comprise comme influencée et influençant, à son tour, l’évolution politique, économique, religieuse et scientifique. a. Les cultures de l’Antiquité et de l’Antiquité tardive et les communications entre elles (5e siècle av. J-C. au 4e siècle ap. J-C.) Ici, il s’agit de développer les multiples aspects de la culture des cités grecques, de la civilisation qui en est le résultat. Il faut notamment tenir compte aussi de tout ce qui est « influence orientale » sur la civilisation et la culture grecque. La transformation de cette civilisation en culture hellénistique a suscité une série de – nouvelles – cultures, selon l’étendue de l’Empire créé par Alexandre le Grand. Fondamentale est l’influence de la culture grecque et, plus tard, de la culture hellénistique sur la culture latine. Cette communication, cette interférence interculturelle
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représente un paradigme qui marquera l’Europe entière durablement. Elle mérite ainsi une attention toute particulière dans le cadre de ce cours. b. L’Occident et les grands changements provoqués par les migrations (5e-16e siècle), l’Orient européen pendant cette même période et les échanges interculturelles.Les migrants (peuples barbares) arrivant en Occident européen  à la fin de l’Antiquité y provoquent une grande mutation sur le plan de la culture et de la civilisation, mutation qui s’avère plus ou moins ample selon les régions – ce qui peut, par exemple, être vérifié par le maintien des bases latines ou non dans le support des langues qui se créent ou se parlent dans les régions où les migrants se sont fixés (cf. dans ce sens la différence ainsi créée entre la Suisse alémanique et la Suisse romande). Avec l’arrivée des migrants et leur fixation, la culture antique au niveau de la population simple disparaît rapidement ou peu à peu. Elle parvient à se maintenir, mais de façon très amputée, au niveau de la nouvelle élite qui reprend l’autorité des précédents fonctionnaires romains. C’est l’Eglise, en Europe occidentale, qui est le plus grand soutien de la culture antique telle qu’elle subsiste encore. - Au niveau politique, l’antagonisme entre le pape et l’empereur est le signe marquant de toute cette période de l’histoire occidentale : On peut observer un lien direct entre ce fait et la sécularisation – ultérieurement encore plus massive – de la culture et même des Eglises en Occident. Pour une bonne perception de la culture occidentale dans son ensemble, il faut bien apprécier le berceau multiculturel et interculturel de l’Espagne, où par des savants musulmans ou encore juifs un savoir plus précis de l’Antiquité, entre autres, a été amené et revitalisé – un savoir qui, par la suite, va influencer fondamentalement les penseurs chrétiens du Haut Moyen Age et du Moyen Age tardif (philosophes et théologiens) et contribuera à préparer l’émergence de la Renaissance. Avant la Renaissance, la structure de pensée musulmane (et juive) va influencer considérablement la pensée occidentale. Elle sera importante pour le Moyen Age tardif, la Renaissance et – étonnamment? – surtout pour la Réforme. Cette structure de pensée musulmane contribuera aussi, à sa manière, à la sécularisation montante et déjà existante dans l’Occident européen.
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Le Moyen Age tardif, par des philosophes-théologiens comme Guillaume d’Occam et son nominalisme, la Renaissance, par des hommes de lettres comme Francesco Pétrarque, et notamment la Réforme, avec l’œuvre littéraire de Martin Luther, redonneront non seulement vie à la culture antique et à ses langues, mais encore aux cultures autochtones, « nationales », qui, jusque là, n’avaient que des possibilités très limitées de se manifester. Ainsi, la Réforme est, outre l’aspect spirituel et religieux, une manifestation culturelle – et politique, bien sûr – par excellence, dans et pour l’histoire de l’Europe occidentale. Pendant cette même période – du 5e au 16e siècle – l’Europe orientale  peut se réjouir d’une continuité culturelle plus grande, en tout cas en ce qui concerne l’Empire byzantin. D’ailleurs, l’existence de cette continuité, et même d’une certaine splendeur culturelle, est souvent très mal connue des occidentaux ! Ainsi, en effet, la civilisation et la culture byzantines ne sont pas le résultat de grandes ruptures telles que nous les observons pour l’Europe occidentale. Dans l’Empire byzantin en particulier, nous constatons la continuation de la culture antique, bien que cette dernière devienne toujours davantage seulement grecque et marquée par l’influence du christianisme. En outre, cette culture byzantine devra se frotter et s’affronter aux cultures slave (grande migration), bulgare (formation d’un empire), arabe (venue de l’islam), occidentale (croisades) et ottomane (avant et après la chute de Constantinople). Une communication culturelle et interculturelle malgré tout réelle entre l’Est et l’Ouest européens pendant toute cette période se fera par les familles impériales ou royales, par des négociants et plus radicalement par les humanistes de Byzance qui cherchent refuge en Occident. Leur départ n’est pas seulement motivé par les Ottomans et la chute de Constantinople, mais aussi par les restrictions antérieures à la civilisation byzantine, sous l’influence de l’Eglise, visant un humanisme véritablement libre. Or, ces réfugiés nourriront l’Occident et contribueront à l’évolution occidentale, notamment en rapport avec la Renaissance ou encore avec la Réforme du 16e siècle. Pendant toute cette période, il est vrai, les chemins parcourus par les deux parties de l’Europe vont diverger et donner des résultats fort différents . Dans ce sens, la dispute au 14e siècle entre Grégoire Palamas et Barlaam de Calabre est éloquente : elle montre
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une culture orientale européenne trempée dans la spiritualité, tandis que la culture occidentale signale déjà une tendance à l’autonomie du monde. c. Le 17e siècle Tout d’abord, il y a deux tableaux politiques – et économiques – bien différents entre l’Ouest et l’Est de l’Europe. À l’Ouest , des princes, des rois, ainsi que l’empereur s’affrontent par une division qui se propage jusqu'à l’intérieur du Saint Empire romain germanique ; à la lutte politique est mêlée la lutte interconfessionnelle (Guerre de Trente Ans, 1618-1648). Et, de façon tout a fait générale, c’est un siècle aux antagonismes marqués: par exemple, la floraison religieuse, aussi bien du côté catholique que du côté protestant – luthérien ! -, basée encore sur la culture de la Renaissance, versus une manière scientifique beaucoup plus rationnelle d’aborder le monde et la nature. Les cultures régionales de cette période sont la curieuse prolongation de la Renaissance, mais elles sont maintenant à nouveau plus spécifiquement marquées par le christianisme sous sa forme catholique ou luthérienne. Ainsi, la culture de la Renaissance devenue culture baroque dans les régions catholiques ou encore luthériennes est une culture de forte connotation religieuse, voire chrétienne. En pays reformés, par contre, nous trouvons une culture sobre, civique et économique (cf. les thèses de Max Weber !), soit une culture moins tournée vers l’art, que vers l’érudition littéraire et encore géographique, mais provenant parfaitement aussi de la culture de la Renaissance. La civilisation occidentale du 17e siècle s’engage ainsi dans deux voies différentes, l’une religieuse et culturelle, l’autre plutôt scientifique. Il reste à voir comment évoluera chacune des orientations et comment cette même civilisation sera capable de gérer les deux. À l’Est , il y a antagonisme entre le désir expansionniste de la Russie et celui de l’Empire ottoman. L’Europe de l’Est, pour autant qu’elle se retrouve sous l’Empire ottoman, se distingue par une double culture, celle de l’occupant ottoman, marquée par l’islam, et celle des populations autochtones, marquée surtout par le christianisme. Nous devons donc constater une situation culturelle partiellement asymétrique entre les deux parties de l’Europe, dans le sens que pour le siècle en question l’Europe
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occidentale se manifeste en des cultures solidifiées, unifiées, tandis que l’Europe orientale se distingue partiellement par des cultures superposées. Les contacts entre les deux parties de l’Europe sont très limités sur le continent, mais plus fréquents par les voies maritimes et fluviales, pour le commerce. Cependant, mentionnons encore, pour clore, un autre type de contact, soit les avancées militaires ottomanes en Hongrie et jusqu'à Vienne. Constatons également que grâce à la mainmise des Ottomans sur la Transylvanie, il y a là l’étonnante situation d’une sorte de tolérance -partielle - de type multiculturel et multiconfessionnel. d. Le 18e siècle Malgré quelques guerres sur le continent européen, à ses frontières et dans ses colonies, on peut peut-être parler d’un équilibre relatif entre les puissances en place ou en devenir (comme la Prusse), ce qui permet de longues périodes de paix – fragile ! -. En effet, ce siècle est marqué, à partir de l’Europe occidentale, par la tentative philosophique et psycho-sociale de prendre ses distances par rapport au passé obscurantiste, marqué par l’affrontement irrationnel et destructeur de forces antagonistes, aussi religieuses : ainsi, le 18e siècle est celui des « Lumières » ou encore de l’ « Aufklärung . » Il se déclenche pendant ce siècle une recherche politique, philosophique, ainsi que psychosociologique, qui se concentre sur l’être humain en tant que tel. À cause des expériences faites pendant les siècles précédents (domination de type féodal, guerres meurtrières et de longue durée), ainsi que sur la base de la philosophie antique et des fondements judéo-chrétiens revitalisés, les droits humains voient le jour. Ces droits signifient qu’un accent est mis aussi bien sur l’universel que sur l’individuel : il y a égalité en dignité et en droits fondamentaux à la vie entre tous les êtres humains, ce qui inclut en même temps l’acceptation, voire la valorisation, de l’individualité. Dorénavant, l’Europe occidentale spécialement devra toujours tenir compte de ces droits, bien qu’elle ait encore beaucoup de mal à les réaliser et à les appliquer du point de vue politique et économique. Outre ces changements aux niveaux philosophique et psycho-sociologique, il y a encore des changements aux niveaux religieux et scientifique. Le changement religieux signifie un recul du confessionnalisme exagéré, son remplacement par un déisme qui se
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combine alors avec une tolérance religieuse qui peut inclure encore le judaïsme et l’islam (cf. G. E. Lessing, « Nathan der Weise », par exemple). Le nouveau climat, qui pourtant, ne s’installe pas partout avec une même densité et/ou vitesse (ainsi beaucoup moins en Espagne qu’en Allemagne, par exemple), est la conséquence naturelle de presque deux siècles de conflits religieux en Europe occidentale. Ainsi, la religion y devient, dans bien des cas, plus la religion de l’individu que la religion d’une institution ecclésiastique. La démarche scientifique change à son tour. Elle se détache de plus en plus de ses présupposés métaphysiques ou abstraits pour devenir peu à peu expérimentale. Ainsi, les présupposés mathématiques de l’étude de la nature et de l’être humain tombent. Il se crée une nouvelle relation de l’être humain à la nature. En ce qui concerne les porteurs de la culture au 18e siècle, nous les trouvons encore chez les nobles, mais aussi chez les bourgeois, ainsi que parmi des individus, quelques fois pauvres ou peu fortunés, dépendant d’un travail modeste, ou encore de mécènes. - Or, dans la culture se manifeste certainement un souffle nouveau. Dans l’expression de la nouvelle culture, on peut observer une recherche d’ordre et d’équilibre. C’est le classicisme qui prime. Cette orientation s’observe par exemple en philosophie, en littérature, ou encore en musique, bien que la période baroque ne s’arrête pas à la fin du 17e siècle, mais empiète sur le 18e. Il serait cependant erroné de croire que le classicisme ne signifie qu’ordre et équilibre – érigés par des humains se comportant seulement rationnellement. Il contient également une recherche individuelle qui peut s’exprimer par un goût pour la nature et pour soi-même : on parlera du style rococo. Les orientations indiquées concernent une partie considérable de l’Europe occidentale. Quant à l’Europe orientale , elle reste encore presque complètement sous ses anciennes structures politiques et économiques pendant tout ce siècle. Cependant, le pouvoir ottoman s’affaiblissant, l’évolution politique va plutôt dans le sens d’une future indépendance d’États-nations, qui se réalisera aux siècles suivants. Du point de vue culturel, on observe une nette influence des Lumières sur la Russie, notamment sur le tsar et son entourage. Ailleurs en Europe de l’Est, les Lumières auront une certaine influence sur la classe supérieure de la société, mais elles se manifesteront plutôt comme une Renaissance tardive, sans toutes les tendances nouvelles et critiques inhérentes aux Lumières. Notamment, la force de civilisation et civique
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n’aura, en Europe orientale, que peu de prise et de répercussions. Les besoins y sont autres, étant donné que, du point de vue culturel et civique, par exemple, l’individu n’a pas souffert, sauf quelques exceptions spécifiques, d’agressions de la part du pouvoir ecclésial ou/et politique. La connaissance de l’Occident se fait par les voyages et les séjours des nobles et des commerçants venant de l’Europe orientale. L’Europe orientale est elle-même devenue une attraction pour ceux qui y vont travailler (à Saint-Pétersbourg, par exemple) ou qui y voyagent, préoccupés par la « question d’Orient ». Or, bien qu’en Europe occidentale se manifeste l’idée naissante d’une Europe unie, incluant aussi ses parties orientales, des situations culturelles très différentes subsistent entre l’Est et l’Ouest. Et cet état de faits se prolongera jusqu'à nos jours. e. Le 19e siècle Ce siècle est surtout marqué, politiquement parlant, par l’émergence des États-nations en Europe occidentale et, partiellement aussi, en Europe orientale. En Europe occidentale , une nouvelle civilisation voit le jour, plus démocratique, mais aussi marquée par l’industrialisation et la modernisation de l’économie et, en réalité, aux effets antisociaux. Pour ce qui est de la religion chrétienne, deux tendances peuvent être observées : d’une part, une nouvelle confessionnalisation (après l’équilibre caractérisant souvent les Lumières), d’autre part une libéralisation, encore bien plus forte qu’au 18e siècle, aux effets dissolvants, notamment à cause de la pénétration des sciences critiques, voire exactes, dans la théologie (cf. par exemple le phénomène de l’historicisme !). Ainsi, certaines théologies s’approchent même de l’athéisme… Notons encore qu’évidemment, le courant libéral trouvera une assise plus facile dans une partie du protestantisme que dans le catholicisme romain. Les sciences critiques, exactes, techniques et expérimentales progressant tangiblement, le monde occidental connaît ainsi une sécularisation sans précédent. L’industrialisation impose aussi ses marques. En fin de comptes, une partie significative des sociétés d’Occident s’éloigne progressivement de la foi chrétienne, voire de toute croyance religieuse.
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Du point de vue religieux et surtout culturel, il est important de rappeler – dans cette conjoncture – l’existence d’un nouveau subjectivisme, soutenu par le christianisme – notamment catholique – le romantisme, qui peut conduire au « relativisme culturel » et soutenir l’idée et la réalisation de l’État-nation… Il n’est ainsi pas non plus étonnant que ce nouveau courant soit celui qui tend à transcender « l’immanentisme » préparé par la philosophie du 18e siècle et maintenant très présent dans les mentalités, dans les réalités sociales, voire prolétaires au 19e siècle. Le romantisme représente ainsi un courant différent par rapport à une ambiance qui est en train de s’étendre. Quant aux porteurs de la culture, ils sont des nobles faisant partie de l’Ancien Régime ou des bourgeois, ou encore des personnalités très diverses. Mentionnons pour clore ce paragraphe que deux systèmes philosophiques, d’ailleurs très apparentés entre eux, l’hégélianisme et le matérialisme dialectique, ont essayé d’unir ou de réunir au niveau de la pensée les deux tendances fondamentales du 19e siècle, celle qui pousse vers la transcendance et celle qui est « immanentiste ». Pour y parvenir, ils sont partis de pôles opposés, le premier étant intellectuel, le deuxième étant matériel. Le succès intellectuel et pratique de ces deux systèmes philosophiques représente une question ouverte. En Europe de l’Est , le processus de l’édification des États-nations est le résultat des événements qui ont eu lieu en Europe occidentale dès le 18e siècle. Le courant allant vers la démocratisation et l’indépendance nationale produit en Europe de l’Est quelques effets spécifiques. Il est facilité par l’augmentation des échanges et des voyages de personnes entre les deux parties de l’Europe, mais plus spécialement des séjours de jeunes – étudiant-e-s de l’Europe orientale en Occident – jeunes qui retourneront ensuite chez eux avec des idées nouvelles, parfois révolutionnaires. Ce siècle est aussi celui qui prépare la fin de la domination des Ottomans et encore des Habsbourgs d’Autriche dans les Balkans. N’ayant pas subi les mutations profondes du 18e siècle avec une nécessité et une intensité comparables à celles de l’Occident, l’Europe orientale, du point de vue religieux, restera attachée à sa situation traditionnelle. Or, cela signifiera également que l’Europe orientale restera dans une situation culturelle relativement peu modifiée. En effet, l’ « absence » d’un 18e siècle vraiment provocateur de changements en Europe
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