Deux chercheuses québécoises ont réalisé une étude sur les rela
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Colle ctif c ontre le s viol ences fa miliales e t l ’exc lusion (CV FE )Venus d e l’étranger, de s e xemples d e fre ins à la m obilitéprofessionnelle de s f emmes René Be gon, c hargé d e p rojets au CVFELe mar ché du t ravail es t sans au cun dout e l’ un d es e njeux d e l ’égalité ent re f emmes e thommes. Le s pos sibilités d ’accès aux e mplois, l es c onditions de mobi lité, l’ entrée dans d esprofessions m ajoritairement ou traditi onnellement ma sculines, co mme l’ informatique oucertains mé tiers t echniques, s ont au tant d e dom aines où on p eut s’ interroger s ur la pla ceoccupée par l es fe mmes.Voici t rois é clairages p articuliers, g lanés a u c ours d e l ’Univ ersité d’ été 2005 d e l a FE R U L g1(Fe mmes Ens eignement Re cherche) , qui po rtait su r la mobil ité .Les relations de travail dans les entreprises de pointe au QuébecD eux c hercheuses qu ébécoises ont r éalisé un e é tude su r le s r elations d e t ravail da ns l a« nouvelle é conomie », s ’int errogeant not amment su r l e « type d e g estion de s r essourceshumaines qu ’on y p ratique », a insi qu e, plus p articulièrement, sur l a ques tion d e l ’« équité e n2emploi » dont y b énéficient l es t ravailleuses tr ès qu alifiées qu ’on y r encontre .L ’étude m ontre qu e l a lo gique é conomique et l ’o rganisation du t ravail p ropres aux e ntreprisesde ce tte « nouvelle éc onomie » c oncourent d’ une maniè re implaca ble à m arginaliser ou àéliminer le s f emmes, ...

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Langue Français

Extrait

Collectif contre les violences familiales et l’exclusion (CVFE)
Venus de l’étranger, des exemples de freins à la mobilité
professionnelle des femmes
René Begon, chargé de projets au CVFE
Le marché du travail est sans aucun doute l’un des enjeux de l’égalité entre femmes et
hommes. Les possibilités d’accès aux emplois, les conditions de mobilité, l’entrée dans des
professions majoritairement ou traditionnellement masculines, comme l’informatique ou
certains métiers techniques, sont autant de domaines où on peut s’interroger sur la place
occupée par les femmes.
Voici trois éclairages particuliers, glanés au cours de l’Université d’été 2005 de la FER ULg
(Femmes Enseignement Recherche), qui portait sur la mobilité
1
.
Les relations de travail dans les entreprises de pointe au Québec
Deux chercheuses québécoises ont réalisé une étude sur les relations de travail dans la
« nouvelle économie », s’interrogeant notamment sur le « type de gestion des ressources
humaines qu’on y pratique », ainsi que, plus particulièrement, sur la question de l’« équité en
emploi » dont y bénéficient les travailleuses très qualifiées qu’on y rencontre
2
.
L’étude montre que la logique économique et l’organisation du travail propres aux entreprises
de cette « nouvelle économie » concourent d’une manière implacable à marginaliser ou à
éliminer les femmes, simplement parce qu’elles sont moins prêtes que les hommes (pour des
raisons de responsabilité familiale) à multiplier les heures supplémentaires.
Les données
Basée sur 88 entretiens en profondeur réalisés majoritairement avec des employés experts en
génie informatique et aussi certains cadres, l’enquête s’est déroulée auprès de sept entreprises
de la région de Montréal : trois petites firmes de service informatique aux entreprises, une
entreprise de conseil en communication, deux sociétés de développement de produits
d’optique et de télécommunications, ainsi que les services informatiques de deux grandes
entreprises plus traditionnelles, choisies à titre d’éléments de comparaison.
Au Québec, le secteur des services technologiques aux entreprises occupait, en 2002, 5,1% de
l’emploi total. Les hommes représentaient à cette date deux tiers des emplois, mais la part des
femmes était en croissance, passant d’un quart des postes de travail en 1987 à un tiers en
2002. Si les femmes dominent nettement dans les emplois très qualifiés des services sociaux
(76,5%) ou de l’enseignement et de l’administration publique (66,6%), il n’en va pas de même
dans les sciences naturelles et appliquées (22%) ou les technologies de l’information (TI)
(27%). Ainsi on ne compte que 17,7% de femmes parmi les ingénieurs logiciels. Cette faible
représentation des femmes dans le secteur des TI s’observe également aux USA et en Europe.
1
« Femmes et mobilités », deuxième université d’été de la FER-ULg, Liège, du 28 au 31 août 2005.
2
Stéphanie Chasserio et Marie-Josée Legault, « Relations de travail dans services technologiques aux entreprises,
pratiques de conciliation entre la vie privée et la vie professionnelle et effets différenciés selon le genre », Télé-
université, Université du Québec à Montréal, 2005.
René Begon, « Des exemples de freins à la mobilité professionnelle des femmes venus de l’étranger»
1
Collectif contre les violences familiales et l’exclusion (CVFE)
Qu’entend-on par « nouvelle économie » ? La « nouvelle économie » est née vers 1995, aux
Etats-Unis, de la conjonction de deux « révolutions », l’informatique et la libérale. D’une part,
les développements de la micro-informatique laissent entrevoir la possibilité d’une économie
fondée sur l’information, une « économie du savoir » et d’autre part, une nouvelle génération
d’entrepreneurs prônent le retour aux principes de l’économie libérale. Sur le plan des
relations de travail, la « nouvelle économie » voit émerger un nouveau mode d’organisation
qu’on appelle l’organisation libérale ou flexible (en France), l’organisation post-
bureaucratique ou post-taylorienne (Grande-Bretagne ou Etats-Unis). Les caractéristiques en
sont : la diminution des hiérarchies, l’autonomisation des travailleurs, la flexibilité du travail,
la fin des garanties d’emploi, des horaires stables, etc.
La gestion par projets
Dans les entreprises de la nouvelle économie, le mode de fonctionnement le plus courant est
la « gestion par projets ». Chaque projet correspond à un contrat passé entre l’entreprise
prestataire de services et son entreprise cliente. Pour le réaliser, on rassemble une équipe
autour d’un chef de projet. L’équipe est différente à chaque fois et sa vie est limitée dans le
temps. L’essentiel est de produire les services commandés dans les limites de temps et de
budget fixés par le contrat. La satisfaction du client est l’impératif majeur. Les risques sont
importants, notamment parce que l’équipe doit supporter toutes les contraintes qui pèsent sur
une entreprise classique et prendre toutes les décisions stratégiques, alors qu’elle ne maîtrise
pas les impératifs de temps. Une des conséquences immédiates est souvent de tenter de tout
faire pour limiter les risques et donc, de prester de nombreuses heures supplémentaires qu’il
n’est question généralement ni de se voir payées, ni de récupérer.
3
Cela se traduit dans la façon dont ces experts parlent d’eux-mêmes : « avoir une approche
client », « être disponible 24h/24 », « dire tout le temps oui », etc. Pour les employés et les
cadres interrogés (en tout cas, les hommes) dans l’enquête, la notion de durée normale de la
semaine n’a pas de sens. Au sein des entreprises observées, 46,6% des femmes déclarent
travailler plus de 40 heures par semaine, contre 81% chez les hommes. Par ailleurs, 40% des
femmes travaillent le nombre d’heures stipulé sur leur contrat, alors que seuls 16,3% des
hommes sont dans le même cas.
La place des femmes
La longueur des prestations, la difficulté d’être rétribué pour les heures supplémentaires,
l’impossibilité d’aborder la question de la réduction du temps de travail : ces éléments
compromettent la conciliation entre vie professionnelle et vie privée qui tient particulièrement
à cœur aux femmes parce qu’elles sont toujours les premières concernées par les
responsabilités familiales. A la question de savoir qui avait déjà songé à réduire ses heures de
travail, trente femmes sur 45 (soit 66,6%) ont répondu affirmativement, contre huit hommes
sur 43 (19%). De même, les enquêteuses se sont demandé qui refuserait ou avait refusé une
promotion pour les mêmes raisons familiales : 14% des femmes ont répondu affirmativement,
contre 7% des hommes.
La gestion par projets a tendance à évacuer les instances de régulation classique de
l’entreprise : les structures de direction ou le service des ressources humaines, par exemple.
C’est le chef de projet qui est l’interlocuteur unique de ces salariés très qualifiés qu’on
3
Dans le système de gestion par projet, il n’y a plus de norme propre à l’entreprise, tout ce qui concerne
l’aménagement du temps de travail est laissé à la discrétion (et à l’arbitraire) du chef de projet.
René Begon, « Des exemples de freins à la mobilité professionnelle des femmes venus de l’étranger»
2
Collectif contre les violences familiales et l’exclusion (CVFE)
présente comme très autonomes. En fait, cette autonomie doit s’entendre dans le cadre du
contrat qui consiste à satisfaire les demandes du client. Dans ce contexte, il serait vain de
croire qu’il n’y a plus de contrôle. Il existe une forte instance de régulation qui se caractérise
par la « mise en concurrence constante de tous les professionnels » : les chefs de projets entre
eux, les experts entre eux pour bien se placer lors de la sélection des futures équipes ou lors
du choix d’un nouveau chef de projet, etc.
Un autre type de régulation peu coûteux et très efficace est rempli par l’équipe elle-même. En
effet, dans un système où de très fortes contraintes (lourdeur de la tâche, longueur des
prestations) pèsent sur tous les travailleurs, ceux-ci auront facilement tendance à « surveiller »
leurs collègues de manière à repérer ceux qui cherchent à travailler moins d’heures ou à
s’absenter, c’est-à-dire qui veulent faire des « entorses à la flexibilité ambiante ». Ce contrôle
social par les pairs a également comme conséquence de marginaliser les femmes qui
« demandent des aménagements d’heures de travail » quand elles sont mères de jeunes
enfants.
Un discours d’entrepreneur
Dans ce nouveau secteur peu hiérarchisé, les possibilités de promotion consistent à être
nommé chef de projet, si possible dans un projet prestigieux, ou encore à être engagé dans une
entreprise plus renommée. Dans ces conditions, la notion d’« emploi stable » cède la place à
celle de « carrière nomade ». Une telle carrière repose sur la constitution d’une « solide
réputation » qu’on monnaye en évoluant sur le marché du travail. Surtout fondée sur la
capacité de prester un grand nombre d’heures supplémentaires (dans l’optique de satisfaire le
client), cette réputation est bien plus facilement accessible aux hommes qu’aux femmes pour
les raisons déjà évoquées.
La notion même d’« engagement professionnel » a beaucoup évolué, passant de la « fidélité à
un emploi et aux valeurs d’un employeur » à la « capacité à répondre aux exigences d’un
client ». « Le discours des ingénieurs salariés ressemble finalement à s’y méprendre à un
discours d’entrepreneur : la performance de chacun assure la position compétitive sur le
marché et, par conséquent, la satisfaction du client assure son propre emploi ». Il va sans dire
que, dès qu’elles ont des enfants, les femmes sont les grandes perdantes d’un tel système.
L’intérêt principal de cette étude ne réside pas dans son aspect statistique qui est très limité,
mais plutôt dans l’exposé de la logique d’un système d’organisation du travail très répandu
dans les petites entreprises de pointe et dont on constate qu’un des effets est de marginaliser
systématiquement les femmes qui assument leurs responsabilités familiales.
Les secondes parties de carrière des femmes en France
Deux chercheurs marseillais ont étudié la manière dont les femmes de plus de quarante ans
négocient leur deuxième partie de carrière en France entre 1998 et 2003, en comparant leurs
résultats à ceux des hommes. Leur recherche est fondée sur une étude de l’INSEE (enquête
Formation Qualification Professionnelle 2003) et étudie, de 1998 à 2003, un échantillon de
5397 personnes de 40 à 58 ans (dont 2426 femmes)
4
. A partir de la proportion d’hommes et de
femmes existant au sein des 177 professions de leur échantillon, les chercheurs ont classé
4
Arnaud Dupray et Laurence Diederichs-Diop, « Les secondes parties de carrière de femmes selon le degré de
mixité des professions : quelques constats pour le France », Marseille, Cereq, 2005.
René Begon, « Des exemples de freins à la mobilité professionnelle des femmes venus de l’étranger»
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Collectif contre les violences familiales et l’exclusion (CVFE)
celles-ci en cinq catégories de « très masculines » (80% d’hommes) à « très féminines » (80%
de femmes) en passant par « masculines » (60 à 80% d’hommes), « féminines » (60 à 80% de
femmes) et « mixtes » (40 à 60% d’hommes et de femmes).
La vie professionnelle après quarante ans peut constituer un moment particulièrement délicat
étant donné la fragilité des travailleurs âgés dans des contextes de fermeture ou de
délocalisation d’entreprises. Pour les femmes, cependant, ce moment peut coïncider avec une
plus grande disponibilité, à la suite d’un allègement des charges familiales, et se traduire par
la possibilité de s’investir davantage dans le travail, de changer d’emploi ou d’en retrouver un.
Mobilités professionnelles
La première observation en matière de mobilité est qu’avec l’âge les ségrégations
professionnelles s’approfondissent : les femmes se concentrent dans les professions féminines
et les hommes dans les professions masculines. L’hypothèse émise pour expliquer ce constat
est que hommes et femmes ont des critères de satisfaction professionnelle différents, les
premiers s’attachant d’abord à des aspects purement professionnels (revenu, carrière, prestige,
etc.), les secondes privilégiant des caractéristiques qualitatives du travail (ambiance,
autonomie, relations).
Le taux de changement d’emplois sur cinq ans est de 24,6 % pour les femmes et de 27,6 %
pour les hommes. Pour les deux sexes, c’est dans les professions féminines que la mobilité est
la plus faible. Pour les hommes, elle culmine à 28,7 % dans les professions mixtes et pour les
femmes à 33 % dans les professions très masculines. Cela peut être interprété, chez ces
dernières, comme une volonté de changer d’emploi pour progresser ou bien, à l’inverse, de
trouver un emploi « moins exigeant en terme de rythme et d’intensité du travail ».
Les femmes sont beaucoup plus nombreuses que les hommes à occuper un premier emploi ou
à reprendre un travail, surtout dans les professions masculines, féminines et très féminines.
Par contre, la mobilité interne promotionnelle est toujours plus forte chez les hommes et cela
dans tous les univers professionnels. Chez les femmes, c’est dans les professions très
masculines et mixtes que les possibilités de mobilité sont les meilleures, mais elles ne
s’accompagnent d’un avantage salarial que dans le premier cas.
Rémunérations
L’écart des salaires entre hommes et femmes est de 9 % dans les professions très masculines
et de 30 % dans les professions masculines. Cela signifie que les femmes sont relativement
plus nombreuses dans les professions les moins qualifiées et les hommes dans les postes de
direction. C’est dans les professions très masculines et féminines que les femmes gagnent le
mieux leur vie. Au sein des professions très masculines, les femmes sont surreprésentées dans
les postes à responsabilités : alors qu’elles ne forment que 6,9 % des effectifs, elles
constituent 18,4% des chefs de projet informatique et 28 % des cadres administratifs,
financiers et commerciaux des grandes entreprises.
Cependant, d’une manière générale, en matière salariale, « ce sont les professions masculines
qui proposent les meilleures conditions de rémunération, viennent ensuite à égalité les
professions très masculines et les professions mixtes, puis les professions très féminines et
enfin féminines (…) La mobilité professionnelle a partout un impact positif sauf dans les
professions mixtes. »
René Begon, « Des exemples de freins à la mobilité professionnelle des femmes venus de l’étranger»
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Collectif contre les violences familiales et l’exclusion (CVFE)
Pour les femmes, l’impact de la mobilité présente des aspects spécifiques. Ainsi,
« l’ancienneté n’a une incidence positive que dans les professions très féminines alors que la
mobilité professionnelle n’est efficace en matière salariale que dans les professions
féminines ». En conséquence, la mobilité est surtout un atout pour les hommes, celle des
femmes étant probablement davantage liée à des considérations familiales (adaptation à la
carrière du mari).
Sentiment de mobilité sociale
Le sentiment de mobilité sociale (comparé au statut d’emploi du père) est plutôt positif : de 44
% chez les femmes dans les professions masculines à 62 % chez les hommes dans les
professions très masculines ou mixtes. Cependant, le sentiment d’une mobilité sociale positive
est plus fréquent chez les hommes. C’est que la question a plus de sens pour eux : d’une part,
leurs attentes professionnelles sont plus orientées vers la carrière que celles des femmes et
d’autre part, l’homme se compare plus facilement à son père que la femme, dont la référence
est plutôt la mère.
D’autres arguments interviennent dans cette différence : le retard salarial des femmes et
l’avantage financier important tiré par les hommes de la mobilité professionnelle, notamment
par la promotion interne. « Par ailleurs, hommes et femmes ne jugent pas de la même façon
leur mobilité sociale suivant les types de profession. Ainsi, plus la profession est masculine,
voire mixte, plus les hommes sont nombreux à considérer qu’ils sont en situation de mobilité
sociale ascendante. Pour les femmes, en revanche, ce sont les professions féminines ou mixtes
qui assurent au plus grand nombre le sentiment d’une mobilité sociale positive. » Pour ce qui
est de l’influence de la carrière antérieure, c’est la mobilité interne ascendante qui procure le
plus grand sentiment de progression (70 % chez les hommes et 67 % chez les femmes).
En conclusion, l’étude souligne que, dans la deuxième partie de carrière, les femmes
« continuent d’être pénalisées par rapport à leurs homologues masculins » et cela autant en
termes de mobilité professionnelle que de salaire. Deuxième chose : il existe « des écarts
considérables en termes de mobilité et de salaire selon l’univers professionnel dans lequel
travaillent les femmes ». Ainsi, les exigences professionnelles des univers masculins et très
masculins sont peu compatibles avec l’âge, le fait d’avoir des enfants et celui d’être de
nationalité étrangère. Ce type de constat explique que « le mouvement naturel en matière de
mobilité d’univers est à un repli des femmes sur les professions plutôt féminines en seconde
partie de carrière alors que l’inverse est observé chez les hommes ».
Sur le plan salarial, c’est l’univers professionnel féminin qui est le moins inégal entre les
sexes. En matière de mobilité professionnelle, par contre, ce sont les univers mixtes et très
masculins qui sont le plus favorables aux femmes. La perception subjective de la mobilité
sociale est généralement positive pour les deux sexes, quoique plus accentuée chez les
hommes. Cette satisfaction par rapport au statut social de l’emploi est plus forte dans les
univers féminins pour les femmes et masculins pour les hommes, c’est-à-dire lorsque le
travailleur ne sent pas en minorité.
Enfin, les auteurs de l’étude font observer que le salaire, même s’il est généralement
défavorable aux femmes, ne devrait pas être le seul critère de comparaison des conditions de
travail entre hommes et femmes. En effet, les femmes semblent avoir de ce point de vue des
critères d’appréciation qui dépassent le cadre salarial et qui entrent en jeu pour définir la
René Begon, « Des exemples de freins à la mobilité professionnelle des femmes venus de l’étranger»
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Collectif contre les violences familiales et l’exclusion (CVFE)
satisfaction professionnelle : atmosphère de travail, contacts humains, souplesse des horaires,
etc.
Mixisation des emplois masculins dans l’industrie en Alsace
Une équipe de chercheurs a étudié, sur le moyen terme, l’« intégration des femmes dans des
métiers masculins » dans l’industrie alsacienne
5
. Face à ces possibilités de « mixisation »,
quatre profils de femmes ont été définis. Dans le « parcours statique », des femmes quittent
des postes peu qualifiés pour des tâches de type « masculin » (règleur, conducteur de bus,
soudeur) qui demandent peu de formation complémentaire. Peu exigeantes, ces femmes
recherchent surtout un salaire d’appoint et la possibilité de concilier vie professionnelle et vie
familiale. Le « parcours réactif » est le fait de femmes dotées de formations « masculines »
(usinage, mécanique, menuiserie) qui désirent exercer un métier masculin, sans toujours y
parvenir à cause des résistances au sein des entreprises. Le « parcours opportuniste » concerne
des femmes ambitieuses qui saisissent toutes les occasions de formation technique au sein de
l’entreprise, sans interrompre leur carrière pour s’occuper de leurs enfants. Le « parcours
stratégique » désigne des femmes jeunes, volontaires, dotées d’une formation technique et qui
font tout pour réaliser leur ambition d’occuper un poste « masculin ».
Pour les auteurs, la « mixisation » des emplois se joue dans l’interaction entre ces parcours et
trois grands « champs » : la motivation, l’autorité et la rationalité. La « motivation » recouvre
la question du désir, de la « volonté » qui pousse les femmes à sortir de leur sphère. Sous la
notion d’« autorité », on envisage les « autorisations » que les femmes se donnent d’aborder
des métiers masculins, en bravant certains « interdits » familiaux ou de genre. Enfin, la
« rationalité » concerne la façon dont les femmes s’accommodent des contraintes diverses
qu’emportent leurs affectations professionnelles.
Concrètement, les auteurs de l’étude observent que les postes de travail en mixisation sont
souvent les moins qualifiés et les plus précarisés.
En résumé, l’exemple québécois des petites entreprises de haute technologie montre que
l’ensemble du fonctionnement de ces structures, qui exige des travailleurs un
surinvestissement dans le temps de travail, est défavorable aux femmes et que, pour mener
une « carrière nomade », celles-ci doivent mener leur vie professionnelle d’une manière
« masculine ». L’étude française sur les deuxièmes parties de carrières féminines souligne que
les femmes ont tendance à se concentrer dans les entreprises les plus féminisées, alors que les
hommes se rassemblent dans les structures plutôt masculines, les femmes étant généralement
concentrées dans les secteurs les moins rémunérateurs. Enfin, l’étude alsacienne sur la
« mixisation » de certaines professions ouvrières confirme que ces postes de travail sont
souvent les moins qualifiés et les plus précarisés.
5
Michèle Forte, Myriam Niss, Marie-Claude Rebeuh, Emmanuel Triby, « Mobilités dans l’industrie : les
modalités de la mixisation des emplois masculins », BETA-Centre associé au Cèreq, Strasbourg, France.
René Begon, « Des exemples de freins à la mobilité professionnelle des femmes venus de l’étranger»
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