En Bretagne : forêts seigneuriales et droits d usage (XVIe-XVIIe siècles) - article ; n°4 ; vol.8, pg 482-492
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Description

Annales. Économies, Sociétés, Civilisations - Année 1953 - Volume 8 - Numéro 4 - Pages 482-492
11 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1953
Nombre de lectures 28
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Michel Duval
En Bretagne : forêts seigneuriales et droits d'usage (XVIe-XVIIe
siècles)
In: Annales. Économies, Sociétés, Civilisations. 8e année, N. 4, 1953. pp. 482-492.
Citer ce document / Cite this document :
Duval Michel. En Bretagne : forêts seigneuriales et droits d'usage (XVIe-XVIIe siècles). In: Annales. Économies, Sociétés,
Civilisations. 8e année, N. 4, 1953. pp. 482-492.
doi : 10.3406/ahess.1953.2207
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ahess_0395-2649_1953_num_8_4_2207EN BRETAGNE
FORÊTS SEIGNEURIALES ET DROITS D'USAGE
(XVI« - XVHe SIÈCLES)
A l'époque médiévale, la terre fournissait si parcimonieusement à l'homme
sa subsistance que la forêt offrait, à qui y avait accès, des ressources insoup
çonnées. Le bois répondait à des utilisations nombreuses et diverses. Outre
qu'il constituait le seul combustible connu, il entrait en plus grande propor
tion qu'actuellement dans la construction. Les premières forteresses féo
dales n'étaient que de simples palissades en bois, entourant un donjon, lui-
même en planches. Et si, à partir du xie siècle, la pierre de taille fut employée
dans les principaux édifices militaires et religieux, les maisons roturières
demeurèrent longtemps en bois. De fréquents incendies les ravageaient, ren
dant d'autant plus nécessaire l'emploi de nouveaux matériaux. Le bois
entrait en outre dans la confection des outils agricoles ; il servait à l'écla
irage en fournissant torches et luminaires. Ce qui était vrai pour le bois de
construction et de chauffage, ne l'était pas moins pour le pacage des bestiaux.
La forêt, avec ses étendues fraîches en été, humides en hiver, entretenait et
prolongeait la pousse de l'herbe. Selon G. Roupnel, « en donnant abri au
porc, elle a fourni longtemps à l'homme sa principale nourriture ani
male ». Au moyen âge le bien public exigeait impérieusement le maintien de
certaines surfaces boisées. De fait, dès le хше siècle, l'hypothèque usagère
pesait déjà, si lourdement que tel seigneur, devant les privilèges héréditaires
dont jouissaient ses vassaux, renonçait à certains essartements fructueux
pour son patrimoine, et maintenait son domaine en « nature de bois »x. Par un
curieux retour, T« usage » contribuait ainsi indirectement à sa sauvegarde.
D'ailleurs, tant que les friches demeurèrent considérables, le cheptel errant
d'ailleurs restreint ne menaça pas dangereusement la forêt. Aussi bien, des
dispositions prohibitives étaient-elles édictées contre la divagation des an
imaux. En outre le «pasnage» qui s'exerçait sur une grande échelle dans des
1. Sur réclamation des usagers, Alain d'Avaugour, seigneur de Mayenne, s'engage en 1263
à ne pas essarter son domaine forestier : « As chevaliers et as gentilhommes et toz cels qui ont
feu et ussaige en ma dicte forest soit de viez, soit de novel, que je jamais y essemplerai ni ne
vendrai ni ne ferai essempler » (Angot, Dictionnaire de la Mayenne, ss. Forêt de Mayenne). FORÊTS SEIGNEURIALES ET DROITS D'USAGE 483
secteurs souvent réservés, faisait l'objet d'une organisation juridique et financ
ière. Quand, à la suite des grands défrichements, le nombre des tenures se
multiplia, et, avec lui, l'effectif des troupeaux, le problème devint plus aigu.
Certes, le régime de la vaine pâture constituait un appoint sérieux ; mais,
outre qu'il ne donnait accès aux terres qu'une partie de l'année, il n'offrait
aux bêtes qu'une nourriture insuffisante : le regain, la première coupe de
foin étant réservée au propriétaire du sol. Aux premiers jours du printemps
aussi bien qu'aux époques brûlantes de l'été, seule la forêt procurait au plus
grand nombre de bestiaux des ressources complémentaires. Force fut donc
pour le seigneur d'imposer une réglementation. D'où la tendance à un éla
rgissement des pratiques usagères au cours des xve et xvie siècles —
tendance à laquelle devait répondre, sur le plan coutumier, celle, non
moins remarquable, de l'uniformisation du statut pénal et juridictionnel des
bénéficiaires.
Il serait inexact de voir, dans l'ouverture de la forêt seigneuriale à un
nombre plus considérable d'animaux, l'effet d'une politique désintéressée.
Qu'on lise les'Usements de Brecilien1 : on y sent l'atmosphère de contrainte
qui préside à l'enrôlement des bestiaux. Le seigneur n'a plus aucune raison
d'user à l'égard des nouveaux venus des habitudes de tolérance qu'il avait
longtemps pratiquées, par nécessité, dans les limites de son domaine. Fort
des armes que lui confère la coutume, il entend les utiliser pour obliger les
propriétaires des bêtes errantes à les inscrire2 moyennant finances aux rôles
de la forêt. Il se sent. d'autant plus capable d'imposer ses volontés qu'il
dispose d'une administration bien organisée et directement intéressée à sa
politique. Car les forestiers ont ouvert la voie aux seigneurs. La pratique de
la confiscation, dont ceux-ci usaient et abusaient dans les parties de la forêt
confiées à leur garde, a été en quelque sorte canalisée au profit du seigneur.
Ayant réussi à imposer un contrôle à ses officiers, il va, en laissant subsister
en leur faveur l'éventualité d'un profit, faire d'eux des auxiliaires conscients
et actifs. Désormais l'inscription, moyen de contrôle et source de revenus,
se généralise et devient obligatoire, aussi bien pour le pacage des divers
animaux que pour la collecte des menus produits3. Un passage curieux des
Usements nous apprend qu'elle n'épargne pas même les bestiaux des usagers,
en l'absence d'une marque distinctive4. Telle quelle, la formalité de l'in
scription s'offre aux intéressés comme une véritable soupape de sûreté leur
permettant de régulariser a posteriori une situation délictueuse, voire une
véritable assurance, un moyen forfaitaire de se mettre à l'abri des consé
quences fâcheuses d'une confiscation abusive.
1. Cf. Us et Coutumes de Brecilien, 1467, publié dans le Cartulaire de Redon (Aurélien
de Courson), « Prolégomènes». (A leur sujet, voir .l'extrait de la communication de l'auteur
dans le compte rendu des Journées d'Histoire du Droit, Rennes, 1951)..
2. « Toutes personnes qui veulent avoir leurs bestes en la dicte forest doitvent les escrire
deux fois l'an aux officiers de la forest, vendeur ou couterelle et s'en lievent les deniers a tïeux
termes de l'an » (Brecilien).
3. « Tout homme qui doibt prandre genetes et joncs en la de. forets le peult fire en se ins-
cripvant aux diets officiers a chacun des trois paiements de ventes de bois » (Ibid.).
4. « Les usagers de Loheac, se ilz sont trouvés explectant о quartier de Haulte Forest, ne
aultres endroits que leurs diets ussaiges et s'ils ne soient es escripts de la forest, peuvent estre
pris a renezon, ainsi que les aultres non escriptz » [Ibid.). 484 . ANNALES
L'intégration des riverains dans l'économie de la seigneurie, entraînant
l'extension en leur faveur du régime pénal mitigé institué par la coutume,
leur permettait de bénéficier d'un statut juridique protecteur, qui leur accor
dait pratiquement les avantages conférés aux anciens usagers1. On comprend
que dès lors l'usage ait été profondément altéré dans son essence. Ce n'est plus
sur la qualité des intéressés ni sur la situation de leurs biens que l'on se
fonde pour déterminer l'étendue de leurs droits. Le nouveau modus vivendi
dont les Usements de Brecilien donnent l'exemple le plus parfait, ne fait
qu'enregistrer un compromis d'intérêts. Déjà moderne dans sa conception,
il se superpose à la mosaïque des anciennes concessions sans d'ailleurs effacer
leurs caractères propres. Toutefois, le régime se généralisant, les privilèges
primitifs font figure d'exceptions gênantes, que l'on vise à réduire et à nor
maliser. Par contrecoup, on détermine avec soin les usagers2 et leurs droits3.
Ainsi, la forêt n'est plus ce monde fermé réservé à, la jouissance Exclusive du
seigneur et de ses hommes, elle s'ouvre à, tous ceux qui acceptent de payer
un d

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