Entre Marx et Keynes la coexistence est-elle possible ?
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  Entre Marx et Keynes la coexistence est-elle possible ?  André SEGURA
   Cet article s'inscrit dans la conception walrasienne des rapports entre les sciences telle que J.M Keynes l'a mise en oeuvre. Pour L. Walras, l' économie politique pure est une science toute à fait semblable aux sciences physico-mathématiques (Walras [1874-1877], p.29) ; elle doit adopter leur méthode rationnelle et donc sabstraire du réel pour y retourner. Mais L. Walras ne se contente de faire des emprunts méthodologiques aux sciences dures ; il s'empare d'un concept clé de la physique et le met au centre de son analyse1.  Rester fidèle à cette démarche, qui consiste à s'inspirer des "sciences dures" en économie politique, n'implique pas de continuer à théoriser sur la base des concepts empruntés par L. Walras mais d'être attentif aux progrès de ces sciences et tenter de les importer en économie politique.  L'idée en soi n'est pas neuve ; la nouveauté de la démarche tentée ici réside dans ce qui est importé : le sous-produit d'un progrès crucial de la physique.  Pour les néo-classiques, en déhors de la théorie de l'équilibre économique général il n'y a pas de sciences. Pour les auteurs qui ont tenté une synthèse post-classique2, il s'agissait de construire                                                  1Cl. Allègre écrit à propos à propos des travaux de Clausius dans le domaine de la thermodynamique : "Il clarifie aussi des notions essentielles comme équilibre (...) Cette notion d'équilibre, dérivée de la mécanique, va connaître une fortune considérable. Lorsque les ingénieurs Cournot et Walras chercheront à transformer la conception philosophique de l'économie d'Adam Smith en une approche quantitative (...) ils recourront aussi à la notion d'équilibre et, à partir de là, calqueront leurs calculs sur ceux de la Thermodynamique" (Allègre [1995], p.35-36]  2cf. Segura [1993]   
entre marx et keynes...  un corpus théorique destiné à supplanter la théorie néo-classique. Les marxistes rejettent dans le domaine de l'idéologie tous les courants qui relèvent de l'économie politique. Pour les auteurs, de quelque obédience que ce soit, la pensée doit être unique.  Le présent article propose une voie de rupture avec cette attitude théorique ; démarche éclectique ? Pourquoi pas ? "L'éclectisme" de la science physique a produit des résultats. Sur la question de la nature de la lumière, il semblait établi avec certitude qu'elle était une onde ; les interférences mises en évidence par l'expérience de Fresnel en attestait. Mais, il était impossible d'expliquer le phénomène photoélectrique sur cette base ; il revint à A. Einstein de l'avoir expliqué en 1905 en reprenant à son compte l'idée de Max Planck selon laquelle l'énergie transportée par la lumière est répartie en quanta . Alors, la lumière est-elle une onde ou un faisceau de grains d'énergie appelés photons ? "Einstein émet l'hypothèse, peut-être la plus audacieuse du siècle, que la lumière a deux visages : tantôt onde, tantôt particule" (Allègre [1995], p.78). Le visage donc la théorie à retenir diffère selon le problème posé. Tel est le sous-produit dont l'importation est proposée.  On pourrait considérer que le principe de cette importation a déjà été suggéré par J.M Keynes ; on peut l'imaginer en lisant le passge suivant de laThéorie générale... le volume de la "Si : production est pris comme donnée, c'est-à-dire si on le suppose gouverné par des forces extérieures à la conception de l'école classique, il n'y a rien à objecter à l'analyse de cette école concernant la manière dont l'intérêt individuel détermine le choix des richesses produites, les proportions dans lesquelles les facteurs de production sont associés pour les produire et la répartition entre ces facteurs de la valeur de la production obtenue" (Keynes [1936], p.372). Les théories keynésienne et néo-classique seraient donc théoriquement valables pour selon la question posée ; elles coexisteraient parce que leur domaine de validité est différent . Cette coexistence procède de ce que la division théorique acceptable range dun côté la Théorie de lEntreprise ou de lIndustrie individuelles ainsi que des rémunérations et de la répartition entre les différents usages dune quantité donnée de ressources et de lautre la Théorie de la Production et de lEmploi dans leur ensemble  (Keynes [1969],p.294) .  Ce qui est à retenir de cette démarche keynésienne est que des théories différentes, dont la cohérence est loin d'être évidente, sont utilisables selon le problème posé ; mais les théories à propos desquelles la question de la coexistence est posée ici sont celles de K. Marx et de J.M Keynes. Cette idée de coexistence pourrait être l'amorce d'un "nouveau départ" de l'analyse économique3.                                                                                                                                                                             3 retournement conjoncturel de la fin des années soixante a induit une remise  Leen cause de la situation classique réalisée autour du keynésianisme de la synthèse ; un intense débat théorique s'en est suivi qui n'a pas encore provoqué  2 
entre marx et keynes...
  Pour répondre à cette question il faut comparer les analyses que K. Marx développe dansLe Capitalet celles exposées par J.M Keynes dans laThéorie générale de l'emploi, de l'intérêt et de la monnaie(essentiellement). J. Robinson, pour ne citer que la plus illustre, s'est déjà essayée à une telle comparaison ; mais elle ne se situait pas dans la perspective d'une coexistence4favorisée par les rapports de complémentarité (4) et les points de convergence (3) ; quant aux divergences (2), non seulement elles ne constituent pas des obstacles insurmontables mais sont parfois le creuset d'une complémentarité.  Sur la question des rapports entre niveaux macroéconomique et microéconomique, qui fait l'originalité de l'analyse keynésienne native relativement à la théorie orthodoxe, divergence et convergence entre Marx et Keynes sont tellement mêlées que cette question fera l'objet d'un développement spécifique (5).  Mais penser que l'on puisse trouver des points de convergence et de complémentarité entre les théories de K. Marx et J.M Keynes peut sembler étonnant, a priori, lorsqu'on sait comment ce dernier pensait ses rapports à Marx (1).  1 - KEYNES PENSE SON RAPPORT A MARX  Cest dun même mouvement que, le 21 novembre 1934, J.M Keynes, qui se compte parmi les hérétiques, rejette, J.B Say, D. Ricardo et Marx, considérés comme des orthodoxes5. Il récidive, mais en étant un peu moins imprécis, dans la lettre quil écrit à George Bernard Shaw le 1er Janvier 1935 Pour comprendre mon état desprit, toutefois, vous devez savoir que jécris actuellement un livre de théorie économique qui révolutionnera grandement - non pas, je suppose, dès maintenant, mais au cours des dix prochaines années - la manière dont le monde considère les problèmes                                                                                                                                                                            l'émergence d'un nouveau corpus théorique susceptible de jouer le rôle qui fut celui de laThéorie Générale... dans l'évolution de l'analyse. La recherche de cette coexistence s'inscrit dans la perspective de ce "nouveau départ". Les termes de situation classique et de nouveau départ doivent être pris au sens schumpétérien (Schumpeter [1954]; Segura [1996])  4 son DansEssai sur l'économie de Marx, elle compare l'analyse développée par Marx dansLe Capital avec "l'enseignement universitaire traditionnel". Dans cet enseignement, elle prend soin de distinguer les économistes orthodoxes, qui ont beaucoup à apprendre de Marx, de Keynes qui , avec son analyse de la demande effective, "fournit une base pour l'étude de la loi d'évolution du capitalisme, qui est esquissée mais pas entièrement développée par Marx lui-même" (Robinson [1942], p.VII ; IX ; 33 ; 39). Cette comparaison avec les économistes académiques contemporains, au premier rang desquels figure Keynes, devrait permettre à chaque partie d'"y gagner en essayant de comprendre les critiques que lui adresse l'autre" (Robinson [1942], pp.VII-VIII). Le but de l'ouvrage semble donc de contribuer au développement séparé du marxisme d'une part et de l'économie académique, notamment dans sa composante keynéso-kaleckienne, d'autre part.  5Keynes [1934], p.488   
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