Influence du milieu sur l idéation - article ; n°1 ; vol.1, pg 180-190
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Influence du milieu sur l'idéation - article ; n°1 ; vol.1, pg 180-190

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Description

L'année psychologique - Année 1894 - Volume 1 - Numéro 1 - Pages 180-190
11 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1894
Nombre de lectures 10
Langue Français

Extrait

Th. Flournoy
Influence du milieu sur l'idéation
In: L'année psychologique. 1894 vol. 1. pp. 180-190.
Citer ce document / Cite this document :
Flournoy Th. Influence du milieu sur l'idéation. In: L'année psychologique. 1894 vol. 1. pp. 180-190.
doi : 10.3406/psy.1894.1049
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/psy_0003-5033_1894_num_1_1_1049VI
DE L'ACTION DU MILIEU SUR L'IDÉATION
II en est du cours des idées qui continuellement traversent
notre esprit comme du tourbillonnement des feuilles mortes
balayées par le vent d'automne : nul doute théorique que
chaque feuille ne suive toujours l'exacte résultante de sa vitesse
acquise et des diverses forces agissant sur elle, mais nul espoir
pratique d'emprisonner jamais les mille détours de son vol
désordonné dans une formule définie, ni de faire la part du
vent, des chocs, de la pesanteur, en chaque point de sa trajec
toire compliquée. Le jeu capricieux de notre imagination se
refuse de même à toute déduction précise et complète ; il est
quasi impossible de retracer avec certitude l'enchevêtrement de
circonstances externes et internes qui a déterminé l'apparition
ou la victoire de telle idée particulière, et inversement personne
ne peut prédire à coup sûr, dans un cas donné, l'idée qui va
jaillir et triompher de ses rivales. Il faudrait déjà s'estimer
heureux de savoir quels sont en général et en gros, dans cette
mécanique intérieure, les rôles respectifs, très variables d'un
individu et d'un instant à l'autre, du milieu actuel, des év
énements récents, des habitudes prises, des prédispositions
natives, etc.
Cette sorte de triage entre les causes principales qui con
courent à la production de nos idées, a été tentée de bien des
façons et constitue le thème central de nombreuses recherches
expérimentales de ces dernières années sur l'association. Je ne
parlerai ici que d'une série d'essais entrepris à l'instigation de
M. Binet dans le but de définir plus spécialement l'action de ce
qu'on peut appeler le milieu psychologique. On sait combien
ce milieu influe sur les expériences de suggestion, notamment
sur les expériences dites de transmission de pensée. On croit. FLOURNOY. — I/IDEATION 181 TH.
quand on a choisi un mot pour le suggérer, qu'on l'a choisi
au hasard entre cent mille, et en réalité on a subi un certain
nombre d'influences inconscientes qui ont considérablement
rétréci le cercle de ce choix. Il serait fort intéressant de se
rendre compte de l'étendue et des restrictions de cette appa
rente liberté illimite'e d'imagination dont on croit jouir, en
comparant les idées que le même milieu fait naître chez des
sujets différents.
J'ai naturellement adopté le plan très simple que M. Binet
suivait de son côté, qui consiste à prier une personne, sans
autre explication et en la laissant absolument libre et abandon
née à elle-même, d'exécuter dix dessins quelconques sur une
feuille de papier, puis d'y écrire dix mots isolés, enfin d'indiquer
cinq actions exécutables dans la pièce où elle se trouve. On
essaie ensuite, en interrogeant le sujet, de découvrir la raison
qui lui a fait écrire tel mot ou dessiner, tel objet plutôt que
tout autre. Répétée séparément dans les mêmes conditions sur
un très grand nombre de personnes (non prévenues, cela va
sans dire), cette expérience permettrait d'apprécier jusqu'à un
certain point l'action du milieu sur les idées que le sujet réalise
spontanément par le dessin ou l'écriture, et de la comparer à
l'influence des souvenirs, des préoccupations latentes, des habi
tudes professionnelles, etc. Mes circonstances particulières ne
m'ont malheureusement pas permis d'opérer sur beaucoup de
gens1. Il peut toutefois y avoir quelque utilité, dans l'ignorance
où je suis encore des résultats obtenus de son côté par M. Binet,
à résumer ici les réponses que j'ai recueillies de quarante-trois
personnes.
Pour les actes d'abord, la nature même de la question, limitant
leur choix à ceux qui sont exécutables dans la pièce où se trouve
le sujet, fait que les réponses varient peu. Sauf une seule idée
un peu saugrenue (se pendre à l'espagnolette de la fenêtre), les
ordres indiqués respirent tous la banalité et.se maintiennent
ordinairement dans le vague; on dirait que la paresse d'inventer
ou d'écrire empêche les individus de formuler des actes précis
et détaillés, et les fait se contenter dans les trois quarts des cas
(85 sur 116) d'un simple verbe sans complément. Sur un total
(1) Un des obstacles auxquels on se heurte dans une petite ville pour
des recherches exigeant toujours des personnes non prévenues, c'est la
difficulté d'obtenir le secret de la part des gens qui ont déjà fait l'expé
rience. Il suffit d'un bavard qui trahit sa promesse de silence pour vous
enlever une foule de sujets. 182 L'ANNÉE PSYCHOLOGIQUE. 1894
de 116 actes, je n'en trouve guère que 24, soit un cinquième, qui
soient bien définis et visent des objets présents déterminés (all
umer ou éteindre le feu, 9 fois; remonter la pendule, déplacer
tel meuble, ouvrir la porte ou la fenêtre, etc.). Des autres, qui
ne sont conçus qu'en termes généraux, une moitié (48) a traita
l'étude ou à la conversation (écrire, 12 fois ; lire, 11 fois ; causer,
discuter, méditer, travailler, etc.) et l'autre moitié (44) à des
actions organiques sans signification intellectuelle (dormir,
7 fois; boire, 5 fois; fumer, s'asseoir, danser, faire de la gymn
astique, tousser, etc.). Le peu d'originalité et surtout de préci
sion de ces réponses m'a bientôt fait renoncer à cette question,
afin de raccourcir d'autant une expérience que les gens trouvent
toujours trop longue et à laquelle ils ne se soumettent qu'en
rechignant parce qu'ils n'en voient pas le but.
Les mots et dessins offrent plus de variété, et il serait fort
instructif de démêler chaque fois les causes cachées qui les ont
dictés; cela n'est malheureusement possible que dans certains
cas, avec les personnes accoutumées à s'observer et capables de
rendre compte de ce qui s'est passé en elles. Le plus souvent on
en est réduit à des conjectures. De là une forte dose d'arbitraire
dans la répartition des cas entre les rubriques d'une statistique,
et dans la fixation même de ces rubriques. Comme distinction
principale, j'ai adopté celle entre les idées qui n'ont aucune
relation évidente avec le milieu actuel, et celles qui en dépendent
manifestement, de l'aveu même du sujet ou du moins sans qu'il
puisse leur découvrir une autre source plus vraisemblable. Le
terme de milieu doit d'ailleurs être pris dans un sens large,
embrassant non seulement le présent actuel, c'est-à-dire les
choses ou incidents qui peuvent frapper les sens du sujet pendant
qu'il écrit et dessine, mais encore son passé immédiat, par où
j'entends ce qui a occupé les moments précédents depuis le
commencement de sa visite (les expériences ayant toujours eu
lieu chez moi). Je fais également rentrer dans le présent actuel
quelques cas où les réponses du sujet ont traduit son état sub
jectif occasionné par l'expérience elle-même (embarras, impat
ience, etc.). — Les idées qui ne paraissent pas relever du milieu
peuvent à leur tour se répartir en trois catégories selon leur
origine probable. Les unes proviennent de circonstances acci
dentelles de fraîche date, qui les ont mises en relief et font ainsi
comprendre leur présence à fleur de la conscience; par exemple,
des esquisses de paysages, souvenir d'un récent voyage; le
mot bouton écrit pour avoir quelques heures auparavant FLOURNOY. — L'iDÉATION 183 TH.
cherché un bouton de manchettes égaré ; une paire de fleurets
dessinés par quelqu'un qui a, ces derniers jours, remanié l'a
rrangement de sa panoplie. D'autres idées se rattachent aux
habitudes particulières du sujet, à ses goûts, à sa profession, etc.;
bref, elles font pour ainsi dire partie de sa constitution indivi
duelle et sont en co

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