L enseignement en milieu rural dans la Turquie de l entre-deux-guerres - article ; n°95 ; vol.24, pg 625-642
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L'enseignement en milieu rural dans la Turquie de l'entre-deux-guerres - article ; n°95 ; vol.24, pg 625-642

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Description

Tiers-Monde - Année 1983 - Volume 24 - Numéro 95 - Pages 625-642
18 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1983
Nombre de lectures 19
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Ali Arayici
L'enseignement en milieu rural dans la Turquie de l'entre-deux-
guerres
In: Tiers-Monde. 1983, tome 24 n°95. pp. 625-642.
Citer ce document / Cite this document :
Arayici Ali. L'enseignement en milieu rural dans la Turquie de l'entre-deux-guerres. In: Tiers-Monde. 1983, tome 24 n°95. pp.
625-642.
doi : 10.3406/tiers.1983.4316
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers_0040-7356_1983_num_24_95_4316L'ENSEIGNEMENT EN MILIEU RURAL
DANS LA TURQUIE
DE L'ENTRE-DEUX-GUERRES
par Ali Arayici
« Ce sont les instituteurs, dit-il, qui élèvent
les peuples au rang de nations véritables. C'est
vous, maîtres d'école, qui allez édifier la nouv
elle génération, la nouvelle Turquie.
« Le jugement que l'avenir portera sur votre
œuvre dépendra de vous, de votre capacité et
de votre dévouement. La République a besoin
d'une élite physiquement et intellectuellement
forte.
« C'est à vous de la former 1 »
M. Kemal Atatûrk.
Dans les années qui suivent la proclamation de la République turque,
(29 octobre 1923), le problème de l'alphabétisation des campagnes constitue
une des préoccupations majeures du gouvernement d'Ankara. D'après le
recensement de 1927, 94 % des villageois ne savent ni lire ni écrire; sur les
3 5 000 villages que compte le pays à cette époque, près de 30 000 sont dépourvus
d'écoles. Pour le pouvoir kémaliste, qui a proclamé à maintes reprises son désir
ď « occidentaliser » la Turquie, cet analphabétisme généralisé représente un
sérieux obstacle qu'il convient de surmonter au plus vite.
Mais la tâche des responsables de l'Education nationale est loin d'être
aisée. Près de 27 000 villages comptent moins de 400 habitants. Il y a là une
population d'âge scolaire émiettée, à laquelle il apparaît très difficile de fournir
un enseignement régulier. La médiocrité des voies de communication, l'inexis
tence de moyens rapides de transport interdisent, dans l'immédiat, la mise
en place d'écoles intervillageoises. Au reste, même les gros villages, les
bâtiments scolaires font en général totalement défaut. Les autorités se trouvent
confrontées à un problème d'infrastructure qui semble quasiment insurmont
able. Autre handicap, la faiblesse des effectifs d'enseignants : vers 1930,
en dépit de l'immense effort accompli par le gouvernement d'Ankara, on ne
recense qu'environ 6 000 maîtres d'école en milieu rural, alors qu'il en faudrait
quatre ou cinq fois plus.
Revue Tiers Monde, t. XXIV, n» 95. Juillet-Septembre 1983 626 ALI ARAYICI
Pour la jeune République turque, la question de l'enseignement villageois
se pose d'abord en termes financiers. Où trouver les ressources nécessaires
pour construire des écoles, donner des salaires aux maîtres, établir des centres
de formation d'instituteurs ? Les quelques millions de livres turques débloqués
chaque année dans le budget de l'Etat en faveur de l'enseignement primaire
ne permettent guère des investissements massifs; c'est à peine si le ministère
de l'Education nationale parvient à assurer le financement de la routine quoti
dienne. A côté de ces difficultés d'ordre matériel s'affirment également des
difficultés d'ordre pédagogique. De toute évidence, il ne s'agit pas seulement
d'alphabétiser les masses rurales. L'enseignement doit aussi servir à former
de bons producteurs et à guider la paysannerie dans la voie du progrès écono
mique et social. Mais comment y parvenir ? Quel contenu convient-il de
donner à la nouvelle éducation républicaine ? Dès 1923, le débat pédagogique
est ouvert. On consulte des experts, on constitue des commissions, on esquisse
des expériences. Progressivement, on s'oriente vers des solutions.
Quelles furent ces solutions ? C'est précisément à cette question que nous
tenterons de répondre dans les pages qui suivent1.
UNE MOBILISATION POUR L'ÉDUCATION DES ADULTES
Nous examinerons plus loin les diverses solutions qui furent proposées
dans le domaine de l'enseignement primaire. Mais avant d'aborder ce chapitre,
il nous semble intéressant de mettre l'accent sur un des aspects les plus carac
téristiques de la stratégie éducationnelle du pouvoir républicain : l'ense
ignement pour adultes. Renvoyer toute la nation à l'école, telle fut, en effet,
dans les premières années qui suivirent la Révolution kémaliste, la grande
tentation du régime. Les diverses mesures qui furent prises eurent constam
ment en vue un double objectif : l'alphabétisation des masses et la diffusion
des idées nouvelles. L'enjeu était en partie politique. Il s'agissait notamment,
par le biais d'un vaste « lavage de cerveau », de gagner le peuple anatolien
aux idéaux de la jeune Turquie.
Dès 1925, les « Associations d'enseignants » avaient lancé un vaste pr
ogramme d'éducation populaire visant à « éclairer les citoyens » et à leur
inculquer les idées de la Révolution kémaliste. Des écoles avaient été installées
dans une quinzaine de villes et de bourgs de Turquie, mais l'opération s'était
soldée par un demi-échec : en une année, les « Associations d'enseignants »
n'avaient réussi à recruter qu'un millier d'élèves, presque tous d'origine
urbaine2.
1. Les problèmes de l'enseignement en Turquie ont fait l'objet de nombreux travaux.
Pour la période qui nous intéresse, le meilleur aperçu d'ensemble est, à notre connaissance,
celui d'Ilhan Basgôz, Educational Problems of Modern Turquey ip2O-ipjo, Indiana Univ., 1968.
Бпап Basgôz a également publié en collaboration avec Howard E. Wilson un excellent
ouvrage en langue turque, Turkiye Cumhuriyetinde Egitim ve Ataturk (Atatiirk et l'enseign
ement dans la République turque), Ankara, 1968.
Voir aussi : le livre de Andreas M. Kazamias, Education and the quest for modernity in Turquey,
Londres, 1966.
2. Au sujet de ces « Associations d'enseignants », cf. I. Basgôz et H. E. Wilson, op. cit.,
p. 121-122. L'ENSEIGNEMENT EN TURQUIE 627
Les « écoles nationales » ( Ulus okullarï)
Fondées en 1929 et disséminées sur l'ensemble du territoire, jusqu'à
l'échelon villageois, eurent beaucoup plus de succès. Leur tâche essentielle
était d'enseigner les caractères latins, sous la forme de cours « intensifs »
d'une durée relativement brève (quatre mois). Accessoirement, ces cours
fournissaient aux élèves quelques rudiments de calcul ainsi que des notions
d'hygiène et d'instruction civique. Une loi avait été votée qui obligeait tous
les citoyens (hommes et femmes) entre 15 et 45 ans à suivre l'enseignement
dispensé par ces écoles. En 1929, 600 000 individus furent ainsi alphabétisés.
Dans les années qui suivirent, les effectifs des Ulus okullarï connurent une
nette diminution, mais en 1932, près d'un million et demi d'adultes avaient
déjà appris à lire et à écrire grâce à cette campagne d'alphabétisation3.
Le rôle de Г armée dans la lutte contre V analphabétisme
La lutte contre l'analphabétisme se déroulait également dans le cadre de
l'armée, une des institutions les plus modernes et les plus dynamiques de la
Turquie. Le contingent était soumis à divers stages et au bout de quelques
mois la plupart des soldats savaient déchiffrer les règlements militaires et
gribouiller une lettre. Il est vrai qu'il s'agissait là, bien souvent, d'un savoir
passager que les jeunes gens s'empressaient d'oublier dès leur retour au vil
lage; mais chez les plus doués, il en restait toujours quelque chose.
A l'armée, les fils de paysans ne faisaient pas seulement l'acquisition de la
lecture et de l'écriture; ils y apprenaient à maîtriser les machines, à appréhender
de manière rationnelle l'univers des techniques, et nombre d'entre eux s'y
spécialisaient dans un métier : menuiserie, cuisine (eh oui !...), maçonnerie,
électricité, etc. C'est à l'armée également que la plupart des villageois découv
raient la douche et un certain nombre de mesures élémentaires

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