La concurrence internationale des manufactures lainières aux XVIe et XVIIe siècles - article ; n°1 ; vol.27, pg 20-32
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Annales. Économies, Sociétés, Civilisations - Année 1972 - Volume 27 - Numéro 1 - Pages 20-32
13 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1972
Nombre de lectures 10
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Pierre Deyon
La concurrence internationale des manufactures lainières aux
XVIe et XVIIe siècles
In: Annales. Économies, Sociétés, Civilisations. 27e année, N. 1, 1972. pp. 20-32.
Citer ce document / Cite this document :
Deyon Pierre. La concurrence internationale des manufactures lainières aux XVIe et XVIIe siècles. In: Annales. Économies,
Sociétés, Civilisations. 27e année, N. 1, 1972. pp. 20-32.
doi : 10.3406/ahess.1972.422478
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ahess_0395-2649_1972_num_27_1_422478La concurrence internationale
des manufactures lainières
aux XVIe et XVIIe siècles
Le commerce international des textiles figure au premier rang des préoccu
pations des ministres et des publicistes mercanti listes. C'est un chapitre sur
lequel Antoine de Montchrétien dans son Traité de l'Économie Politique insiste
tout autant que Thomas Mun dans le British Treasure by foreign Trade \ L'impor
tation des étoffes étrangères est coûteuse, suspecte, traquée par les moralistes,
les prohibitions et les dispositions somptuaires, tandis que l'exportation, assure,
dit-on, l'aisance aux artisans, le profit aux marchands et les bonnes espèces aux
Monnaies du royaume. La concurrence des manufactures lainières est un théâtre
essentiel de la « guerre d'argent » que se livrent les grands États de l'Europe.
L'étendue du sujet déborde les limites d'un simple exposé, et me contraint à
limiter mon propos à l'examen des conditions techniques et politiques de la
concurrence, au déroulement de ses péripéties essentielles entre les États de
l'Europe de l'Ouest, et à ses conséquences sur la répartition géographique et
l'organisation des manufactures 8.
La compétitivité et la souplesse d'adaptation des manufactures engagées
sur le marché international dépendent, dans une large mesure, de l'état des
techniques, de l'évolution de la demande et de l'intervention mercantiliste.
Menacée sur ses marchés habituels, une industrie ancienne peut soit chercher
à réduire ses prix de revient en agissant sur les matières premières ou les salaires,
1 . A. D E M ONTCH R ÉTI EN, Traité de l'Économie politique. Rouen, 1 61 5 ; Th. M U N, England's
treasure by foreign trade, 1 664.
2. Cet exposé a été présenté le 31 janvier 1970 devant l'Assemblée générale des historiens
économistes français.
20 LAINIÈRES, XVI'-XVII* SIÈCLE P. DEVON MANUFACTURES
soit changer ses fabrications et proposer de nouveaux tissus à sa clientèle
ancienne, soit encore rechercher d'autres débouchés, et faire appel à la pro
tection douanière, aux subventions et à toutes les autres interventions possibles
de l'État.
L'action sur les prix de revient est peut-être la plus difficile en raison de
l'indigence technologique et de la lenteur des circuits du commerce. En l'absence
de grand marché régulateur, l'approvisionnement en matières premières est une
entreprise délicate qui commande à la fois la qualité des fabrications et les prix
de revient. La production des draperies les plus belles, les plus coûteuses, les
draperies traditionnelles de laine cardée, repose en effet exclusivement sur l'ut
ilisation de toisons fines et bouclées, d'origine anglaise ou espagnole. Quant
aux prix de revient, la part de la matière première dans le coût final est telle, que le
pays privé de fournitures régulières à des prix normaux et stables ne peut résister
à ses concurrents mieux placés sur des marchés souvent spécifiques et étroit
ement localisés.
Le rapport de la commission nommée par le Privy Council pour examiner,
en 1622, les causes de la crise commerciale et manufacturière fournit un témoi
gnage de cette importance stratégique de l'approvisionnement. C'est à la reconst
itution du monopole anglais que les experts attachent le plus d'intérêt et lient
l'avenir de l'industrie nationale:
« Le progrès des fabrications dans les pays étrangers est rendu possible
par les exportations de laine d'Angleterre, d'Ecosse et d'Irlande, c'est la cause
principale de la réduction de nos ventes... pour empêcher la fabrication de draps
outre mer... il faut prohiber l'exportation des laines, des toisons, du fil, de la terre
à fouler et des cendres d'Angleterre, d'Ecosse et d'Irlande... car ces pays étrangers
qui fabriquent maintenant des draps, ne pouvant pas ailleurs s'approvisionner si
commodément et à si bon marché, ne pourront plus vendre moins cher que
nous » 3.
Ces propositions sous-estimaient la concurrence possible des laines espa
gnoles et la souplesse d'adaptation des manufactures continentales, mais elles
n'étaient pas absurdes puisque le prix de la laine pesait fort lourd dans les coûts
de production. Les statisticiens et les économistes qui dès la fin du XVIIe siècle
tentent en Angleterre de mesurer le produit national se préoccupent de la question,
et cherchent à évaluer la part de la matière première et de la valeur ajoutée dans les
manufactures textiles. Pour la matière première, G. King avance le maximum de
40 % 4 et Matthew Hale, dans A discourse touching provision for the Poor, cite
des chiffres analogues (38 %) 6. En France, en 1708, à Sedan, dans une manuf
acture de qualité travaillant des laines espagnoles, la matière première représente
47,5 % du prix de revient de l'étoffe 6. On comprend le soin avec lequel certains
manufacturiers comme les Van Robais se procuraient leurs laines espagnoles
assurant eux-mêmes leurs expéditions vers l'Espagne et le retour des appro
visionnements en laine au départ de Bilbao. Le coût élevé de la matière première
3. Cité par G. D. RAMSAY, The Wiltshire woolen industry, 1965, London, pp. 147-148.
4. Ph. DEANE dans The output of the british woolen industry in the 18th century. The
journal of economic history, pp. 207-223, discute les estimations de Y. King et Devenant.
5. Cité par E. LIPSON, The History of the woollen and worsted industries, London, edit, de
1 965, p. 256.
6. T. J. MARKOVITCH, L'industrie française au XVIIIe siècle. Cahiers de l'I.S.E.A., n° 8,
août 1968, p. 1669.
21 CROISSANCE ET CHOIX ÉCONOMIQUES
explique aussi certaines innovations techniques et le développement des draper
ies légères, « petites draperies » ou worsted. La fabrication et le travail du fil
de laine peignée permettent en effet, d'utiliser des laines moins coûteuses et de
simplifier les opérations de foulage et d'apprêt. La préparation de trames ou de
chaînes mêlées de laine, de lin ou de chanvre répond au même souci de réduire
les coûts. En France comme en Angleterre, tous les administrateurs et les écono
mistes du XVIIIe siècle confirment que le prix de revient de la matière première est
plus faible dans les draperies peignées que dans les draperies cardées, et que la
part de la valeur ajoutée y est plus élevée 7. En 1 741 , l'auteur de Short Essay upon
Trade, cité par Ph. Deane, estime à 33 % du prix de revient le coût de la matière
première dans les woollen, mais à 21 % seulement dans les draperies de laine
peignée ou worsted 8. Les pourcentages fournis par Y Encyclopédie méthodique sont
dans l'ensemble plus élevés, c'est une des causes des difficultés de la manufacture
française dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, mais ils permettent de constater
une fois de plus la différence qui oppose les deux secteurs de la draperie : dans
les manufactures de Picardie qui utilisent des laines peignées d'origine locale,
la matière première représente 33 % seulement du coût de production, mais dans
les draperies fines d'Abbeville, travaillant les laines d'importation, ce pourcentage
atteint et dépasse 50 % 9.
Dans le chapitre des matières premières, il faut encore considérer les savons,
les graisses, les colles pour ensimer les chaînes et surtout les teintures. L'achat et
l'application de ces teintures constituent une part non négligeable du prix de
revient (1 /9 à Sedan en 1 708 comme en 1 780), part variable, bien sûr, en fonction
de la qualité de l'étoffe et de la teinture. C'est un domaine où s'exerce l'esprit
empirique et inventif des hommes de l'art, sans qu'il soit toujours facile de dis
tinguer la fraude de l'innovation technolog

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