La fiscalisation du secteur informel : recherche impôt désespérément - article ; n°168 ; vol.42, pg 795-815
22 pages
Français

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

La fiscalisation du secteur informel : recherche impôt désespérément - article ; n°168 ; vol.42, pg 795-815

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
22 pages
Français
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Tiers-Monde - Année 2001 - Volume 42 - Numéro 168 - Pages 795-815
21 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Sujets

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 2001
Nombre de lectures 119
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Jean-François Gautier
Faly Rakotomanana
François Roubaud
La fiscalisation du secteur informel : recherche impôt
désespérément
In: Tiers-Monde. 2001, tome 42 n°168. pp. 795-815.
Citer ce document / Cite this document :
Gautier Jean-François, Rakotomanana Faly, Roubaud François. La fiscalisation du secteur informel : recherche impôt
désespérément. In: Tiers-Monde. 2001, tome 42 n°168. pp. 795-815.
doi : 10.3406/tiers.2001.1550
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers_1293-8882_2001_num_42_168_1550LA FISCALISATION
DU SECTEUR INFORMEL:
RECHERCHE IMPÔT DÉSESPÉRÉMENT
Jean-François Gautier*
Faly Rakotomanana** François Roubaud***
Les réformes de la fiscalité directe dans les pays en développement se
sont attachées à simplifier et à accroître la base fiscale sur les sociétés.
L'introduction d'un impôt synthétique assis sur les facteurs de production
des entreprises informelles est une réponse apportée au problème. Les
qualités théoriques de cet impôt (incitation à la production, progressiv
ité) s'avèrent moins évidentes en pratique. L'estimation du chiffre
d'affaires à partir des facteurs de production pose problème. Nos simula
tions appliquées au cas de Madagascar montrent que les effets incitatifs
de l'impôt semblent assurés. En revanche, l'existence de rendements
d'échelle croissant pourrait produire des effets régressifs.
Les études empiriques menées sur le secteur informel dans divers
pays en développement (ped) montrent généralement un poids import
ant de celui-ci dans la création de valeur ajoutée, bien que très
variable selon les pays (et aussi selon les méthodes statistiques utili
sées). À titre d'exemple, la valeur ajoutée du secteur informel non agri
cole est estimée à 17-18 % du pib à Madagascar (Paillaud et al, 1998),
à 15% pour le Bénin (Attin, 1994) et à 150% de la valeur ajoutée
industrielle du Cameroun (dial/dscn, 1993). Ce secteur échappant en
grande partie aux prélèvements obligatoires, certains y voient alors
une source importante de l'évasion fiscale dans les ped. La question de
la fiscalisation est toutefois complexe. Une telle opération vient butter
* Économiste, chercheur à dial (Développement et insertion internationale), Paris, au moment de
la rédaction de cet article.
** Économiste-statisticien, chercheur au projet Madio, Madagascar.
*** Économiste ird, cipré/dial, Paris.
Revue Tiers Monde, t. XLII, n° 168, octobre-décembre 2001 796 Jean-François Gautier, Faly Rakotomanana, François Roubaud
sur trois contraintes majeures : 1 / le niveau de vie des acteurs infor
mels ; 2 / le coût administratif d'une telle opération ; 3 / la possibilité
technique d'appliquer un impôt à des entreprises n'ayant aucune cul
ture documentaire (facturation, comptabilité).
Ces contraintes seront analysées dans la première partie de notre
étude, où nous présenterons en détail les arguments du débat sur la
fiscalisation du secteur informel. Nous montrerons que ce secteur n'est
en fait jamais totalement exempt de charges fiscales, mais que
l'inadaptation des systèmes fiscaux rend cette charge souvent régres
sive avec des performances en termes de recettes médiocres. Face à ce
constat, des réformes fiscales sont proposées, consistant à appliquer un
impôt fondé sur les capacités de production. Nous montrerons que cet comporte en théorie de nombreux avantages.
La deuxième partie de l'étude s'attachera à cerner les difficultés
pratiques de l'application d'un tel impôt dans un ped. Le choix de
Madagascar est motivé par deux raisons principales. D'une part, les
autorités malgaches ont adopté cette voie pour réformer leur système
fiscal. La loi de finances 1998 prévoyait l'introduction d'un «impôt
synthétique » visant à taxer le revenu des micro-unités de production
sur la base de leur patrimoine. Si ce dernier n'avait pas encore été mis
en place trois ans plus tard, il reste toujours à l'ordre du jour et
revient de manière récurrente dans toutes les lois de finances ulté
rieures. D'autre part, nous disposons de données représentatives et de
«première main» sur les unités de production du secteur informel
(upi) que nous mobiliserons pour analyser les contraintes et les effets
de l'introduction d'un tel impôt à Madagascar (Madio, 1995).
I - LA FISCALISATION DU SECTEUR INFORMEL
1. Un état des lieux
Un débat qui reste ouvert...
Au-delà de l'augmentation «mécanique» des recettes fiscales
qu'engendrerait la fiscalisation du secteur informel, les arguments en
faveur d'une telle politique s'appuient également sur la promotion
d'une plus grande justice sociale (le traitement fiscal égalitaire du
citoyen en fonction de sa capacité financière) et le respect de la souve
raineté du pouvoir politique (Medahri Alaoui, 1989). Le rapport Thill
(1991), quant à lui, justifiait la fiscalisation de l'informel sur la base La fiscalisation du secteur informel 797
d'un « transfert » d'une partie de la charge fiscale du secteur formel
vers le secteur informel. Une plus grande participation des entreprises
informelles aux recettes fiscales permettrait de diminuer le fardeau
supporté par les entreprises formelles, pour qui les taux nominaux de
taxation sont jugés trop élevés, donc désincitatifs.
À l'opposé, les mesures de fiscalisation de l'informel sont combatt
ues principalement sur la base de trois types d'arguments. En premier
lieu, la fiscalisation du secteur informel est rejetée par ceux qui
s'opposent à l'impôt en général, comme conséquence de la remise en
cause de la légitimité de l'État dans les ped. En deuxième lieu, certains
auteurs y voient une source d'injustice, car ponctionner les revenus
d'origine informelle revient à taxer le pan de la population le plus
démuni. En effet, la littérature montre que les activités informelles ne
permettent, en général, de fournir qu'un revenu de « survie » (Lautier,
1994 ; Latouche, 1991). La fiscalisation des unités de production infor
melles, en réduisant des revenus déjà très faibles, pourrait aggraver les
conditions de vie des plus pauvres (Charmes, 1980). Enfin, et consé
quence du deuxième argument, il s'agit d'une opération non rentable
pour l'État tant la base d'imposition du secteur informel est faible
(Lautier, 1994).
Toutefois cette vision « misérabiliste » est en partie caricaturale, du
fait de la forte hétérogénéité du secteur informel. En effet, la plupart
des enquêtes montrent qu'une partie des revenus issus du travail infor
mel est nettement supérieure au revenu moyen, et donc taxable. Par
exemple, l'étude menée par Dioubaté (1992) à Conakry montre que
20% des indépendants informels percevaient des rémunérations très
élevées. De même, l'enquête sur le secteur informel dans l'aggl
omération d'Antananarivo estimait que le salaire moyen des chefs
d'entreprises informelles était environ 6 fois supérieur au salaire min
imum (Madio, 1995). Il existe donc a priori un gisement fiscal au
niveau des revenus du travail informel.
... mais dépassé par la réalité
La majorité des enquêtes consacrées au secteur informel montre
que ce secteur n'est jamais totalement exempt de taxes, contrairement
à l'idée commune d'un secteur entièrement en marge de toute régl
ementation (Morrisson et al, 1994 ; Oudin, 1991). Ainsi, Oudin (1991)
montrait que le taux de pression des impôts directs sur les entreprises
informelles au Niger était de 4 % (en proportion de la valeur ajoutée)
pour les entreprises manufacturières, btp et services et de 7 % pour les
commerces. Malgré la définition du secteur informel (pas de déclara- 798 Jean-François Gautier, Faly Rakotomanana, François Roubaud
tion aux services statistiques et fiscaux), les deux tiers des entreprises
enquêtées avaient acquitté une forme d'impôt l'année de l'enquête. Les
études menées par I'ocde (Morrisson et al, 1994) montrent que si le
degré de respect des obligations fiscales varie entre les pays et selon les
types d'impôts, l'as

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents