La logique de l analyse interculturelle : comment expliquer les exceptions - article ; n°3 ; vol.22, pg 514-553
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Description

Annales. Économies, Sociétés, Civilisations - Année 1967 - Volume 22 - Numéro 3 - Pages 514-553
40 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1967
Nombre de lectures 22
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Extrait

A. J. F. Köbben
La logique de l'analyse interculturelle : comment expliquer les
exceptions
In: Annales. Économies, Sociétés, Civilisations. 22e année, N. 3, 1967. pp. 514-553.
Citer ce document / Cite this document :
Köbben A. J. F. La logique de l'analyse interculturelle : comment expliquer les exceptions. In: Annales. Économies, Sociétés,
Civilisations. 22e année, N. 3, 1967. pp. 514-553.
doi : 10.3406/ahess.1967.421548
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ahess_0395-2649_1967_num_22_3_421548DES SCIENCES SOCIALES CHRONIQUE
La logique de l'analyse interculturelle :
Comment expliquer les exceptions *
Dans l'histoire de l'anthropologie sociale ont été établis des cen
taines de rapports du type « lorsqu'il y a A, on trouve В » ; ou encore
« lorsqu'il y a A, on trouve B, on trouve C... », rapports concernant
par conséquent la relation fonctionnelle entre deux, trois, ou toute une
série de phénomènes sociaux. Un rapport de ce type peut n'être qu'in
diqué eh passant ou même implicite dans l'argumentation, mais il peut
être longuement développé et plus ou moins soigneusement vérifié.
Ce qui nous intéresse ici est que de tels rapports puissent n'être
pas valables dans tous les cas, c'est-à-dire pour toutes les sociétés
et qu'il existe toujours des exceptions à la règle, quelquefois même fort
nombreuses.
Murdock nous en fournit un exemple particulièrement net (1949,
p. 152). Il avance notamment l'hypothèse suivante : « Lorsqu'il y a
résidence bilocale, il y a également terminologie de parenté « fusionnée »
au niveau de la génération x. En vue de vérifier son hypothèse, il exa-
RÉSIDENCE AUTRES RÈGLES
BILOCALE DE RÉSIDENCE
Terminologie de type
« fusionné » 9 33
Autres terminologies. 11 187
* Communication présentée par le Dr Kôbben (Amsterdam) à l'International
Social Science. Council, Round Table on Comparative Research, Paris (avril 1965).
— Le texte original anglais de ce rappor* sera publié dans le volume des Pressing
du Colloque, à paraître chez Mouton et Cie.
1. Generation kinship terminology : terminologie de parenté où les lignes collaté
rales fusionnent entièrement avec la ligne directe à l'intérieur d'une génération par
ticulière (N. de T.).
514 INTERCULTURELLE L'ANALYSE
mine vingt sociétés à résidence bilocale, dont neuf ont effectivement
des termes de parenté répondant à ce type. Les onze autres, cepen
dant, ont des terminologies de types différents et constituent par
conséquent des exceptions. Ceci étant, Murdock relève, en outre, trente-
trois sociétés qui ne sont pas bilocales et qui ont cependant une termi
nologie de type « fusionné » (elles constituent donc, elles aussi, des except
ions). Malgré cela, Murdock n'abandonne pas pour autant sa thèse.
L'importance du nombre des sociétés qu'il convient de classer
dans la case IV du tableau (187) nous oblige à présumer l'existence
d'une corrélation significative entre le phénomène de résidence bilo
cale et l'existence d'une terminologie de type « fusionné » x.
Nous avons coutume de dire que l'anthropologie culturelle peut
parvenir à établir des régularités, mais non des lois scientifiques. Cer
tains anthropologues se complaisent même à le souligner ; comme s'il
était tant soit peu vulgaire de rechercher ou de trouver des « lois ».
Certains chercheurs, après avoir réussi à établir l'existence d'une
relation statistiquement significative entre deux phénomènes sociaux,
ont tendance à se satisfaire de ce résultat et considèrent leur tâche
comme terminée ; mais ils se trompent, car il faut encore expliquer
les exceptions. Pour des raisons que nous discuterons plus à fond par
la suite (voir en particulier paragraphe 9), je crois que nous ne trou
verons jamais de lois absolument sans exceptions. Pas même si nous
disposions de données parfaites et de parfaits anthropologues. L'an
thropologue, néanmoins, peut éliminer bien des exceptions, soit en
démontrant qu'elles ne sont pas de véritables soit en les
intégrant à sa thèse. Cette dernière méthode, outre qu'elle rend son
hypothèse statistiquement plus importante, a l'avantage de donner
à sa « loi » plus de subtilité, augmentant ainsi sa valeur. J'utiliserai
ici comme exemple le phénomène de l'esclavage, j'y reviendrai d'ailleurs
à plusieurs reprises dans le courant du texte.
M. J. Nieboer est le premier à avoir sérieusement tenté, dans son
livre sur l'esclavage 2, d'établir des régularités interculturelles. Il
avance notamment l'hypothèse suivante : « Là où la chasse, la collecte
et la pêche représentent les seuls moyens de subsistance, il n'y a pas
d'esclavage. » La vérification de cette hypothèse laisse apparaître
effectivement une nette corrélation entre les deux phénomènes. Néanm
oins, il existe une exception importante, celle des Indiens de la côte
nord-ouest du Pacifique qui pratiquent l'esclavage. Nieboer s'efforce
d'en donner une explication, ce qui est tout à son honneur. Il fait
1. Les chiffres concernent seulement les termes employés pour la sœur du père
(FaSi), la sœur de la mère (MoSi) et la mère (Mo).
2. Nieboer (1910). Pour une critique et une nouvelle étude de ses thèses voir
Fahrenfort (1943) ; Siegel (1945) ; Kôbben (1952) ; Kloosterboers (1960) ; Baks es.
(1961).
515 ANNALES
observer que ces populations vivent principalement de la pêche et
qu'elles disposent d'une abondante nourriture. Ceci leur permet de
vivre en groupes assez importants et de vivre d'une manière séden
taire (alors qu'en général, les chasseurs ne peuvent pas se le permettre).
Pour la même raison, des différences sensibles de fortune et de statut
peuvent s'affirmer x. Nieboer rectifie donc sa thèse de la manière su
ivante : « Là où l'on vit de la chasse, de la collecte et de la pêche, il n'y a
pas d'esclavage, à moins qu'il y ait abondance de nourriture, et pour
cette raison... » Cette rectification faite, notre compréhension du phé
nomène de l'esclavage en est enrichie.
Mais est-il tout à fait juste de dire qu'en anthropologie culturelle
il n'existe pas de lois sans exceptions ? Ce n'est pas vrai, en tout cas,
des propositions les plus abstraites et par conséquent les plus banales,
telles que : « Lorsqu'il y a changement rapide et brusque, il y a des
réactions violentes » ; mais nous pouvons impunément ne tenir aucun
compte de semblables lois. Certains auteurs, cependant, établissent
des rapports moins abstraits qu'ils prétendent être sans exceptions.
Pour différentes raisons, leurs prétentions ne sont pas, à mes yeux,
soutenables, ou à tout le moins pas complètement. Prenons trois
exemples relativement récents, ceux de S. N. Eisenstadt (1956), de
K. A. Wittfogel (1957) et de G. Sjoberg (1960).
Eisenstadt étudie les classes d'âge, et plus particulièrement la
question de savoir pourquoi elles apparaissent dans tel type de société
et non dans tel autre. Il avance l'hypothèse qu'on les trouve
partout où l'unité familiale empêche les jeunes d'atteindre un statut
social (p. 248). Il est à ce point certain qu'il s'agit là d'une loi générale
qu'il ne trouve pas nécessaire de la vérifier systématiquement (p. 123-
124). Il prend comme exemple le cas des Nuer. Quelles sont les données
qui l'amènent à penser que les unités familiales constituent une entrave
pour les membres les plus jeunes ? Essentiellement le fait que l'on
retrouve chez eux des classes d'âge ! Son raisonnement est, en fait,
un cercle vicieux. Rien d'étonnant à ce qu'il ne trouve pas d'excep
tions *.
Wittfogel pense qu'il existe une relation nécessaire et suffisante
entre, d'une part, le fait que les sociétés aient un régime despotique,
et, d'autre l'existence d'ouvrages hydrauliques. Nous avons
donc : « Là où existent des ouvrages hydrauliques, on trouve le des
potisme », et : « Là où il y a despotisme, on trouve des ouvrages
hydrauliques 8 ». Cette règle est certainemen

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