La psychologie judiciaire - article ; n°1 ; vol.12, pg 157-232
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Description

L'année psychologique - Année 1905 - Volume 12 - Numéro 1 - Pages 157-232
76 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1905
Nombre de lectures 30
Langue Français
Poids de l'ouvrage 5 Mo

Extrait

J. Larguier des Bancels
La psychologie judiciaire
In: L'année psychologique. 1905 vol. 12. pp. 157-232.
Citer ce document / Cite this document :
Larguier des Bancels J. La psychologie judiciaire. In: L'année psychologique. 1905 vol. 12. pp. 157-232.
doi : 10.3406/psy.1905.3714
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/psy_0003-5033_1905_num_12_1_3714IX
LA PSYCHOLOGIE JUDICIAIRE
Le témoignage.
I
Si on voulait saisir la « psychologie du témoignage » à son
origine et suivre les étapes de son développement initial, il
conviendrait d'étudier tout d'abord les ouvrages des savants
qui, au cours des deux derniers siècles, ont créé les méthodes
de la critique historique : c'est dans leurs travaux, bien plutôt
que dans ceux des juristes modernes, que l'on découvrirait
comme le germe de la science nouvelle,
En présence des documents écrits qui constituent la matière
principale de ses recherches, l'historien se contenta longtemps
de la notion commune du témoignage, telle, en particulier,
que la pratique des tribunaux l'avait fixée peu à peu. A
l'exemple du juge, il se préoccupait moins de déterminer la
valeur intrinsèque d'une assertion que d'établir l'autorité
d'une personne et, se bornant comme lui à distinguer les
bons et les mauvais témoins, il était naturellement disposé
à accepter tout dés premiers, à rejeter tout des autres. « Les
bons témoins, dignes de foi, sont ceux qui ont connu la vérité
et voulu la dire, les témoins sincères et bien informés; les
mauvais témoins sont les menteurs et les hommes mal informés,
ils n'ont pas su la vérité ou n'ont pas voulu la dire. Cette dis
tinction s'applique d'abord aux personnes. En la transportant
aux écrits, on classe les documents suivant leur auteur, comme
en justice on les témoignages : d'un côté les documents
dignes de foi, de l'autre les suspects; c'est la vieille
notion juridique qu'il y a des témoins dont la déclaration doit
emporter le jugement. » Mais cette attitude, que les nécessités
pratiques commandent dans une certaine mesure au tribunal,
ne pouvait être celle de l'homme curieux seulement d'atteindre
les faits du passé dans leur réalité véritable; en même temps 158 MÉMOIRES ORIGINAUX
que l'historien définissait avec une vigueur croissante l'objet
propre de sa science, il apercevait de plus en plus clairement
l'insuffisance de la théorie classique du témoignage et il
s'efforçait d'en formuler à son usage une autre, laquelle sur
presque tous les points s'oppose à la première.
Pour le juriste d'autrefois, pour la plupart des juristes con
temporains, une déposition est une sorte de bloc, qui parti
cipe à la valeur morale de son auteur et qui, comme celle-ci,
est susceptible d'une estimation globale. L'historien critique
reconnaît, au contraire, que le document, loin de constituer
un tout indivisible, est un ensemble d'éléments de nature et
de signification très diverses et que chacun de ces éléments
doit être examiné à part. Il admet que les témoignages les
plus consciencieux renferment des erreurs et que les récits
les plus mensongers peuvent offrir des données exactes. Il
sait que la véracité d'un individu ne garantit en aucune façon
la vérité des déclarations qu'il apporte et que la sincérité la
plus entière ne préserve pas des pires illusions. Mais il ne s'est
pas borné à ces constatations toutes négatives; et, guidé par
une analyse très juste de la nature et des conditions du témoi
gnage, il a formulé tout un système de règles pratiqués qui
lui permettent d'utiliser avec une sécurité remarquable les
documents dont il dispose. Ce que sont ces règles et comment
on les applique, il ne saurait être question de le résumer ici;
il a. paru tout au moins intéressant d'en signaler l'existence et
l'origine. En les étudiant de près, on se convaincrait sans
peine que bien des points de vue, nouveaux pour les psycho
logues, sont familiers aux historiens et que ceux-ci possèdent
depuis longtemps une connaissance solide des processus qui
interviennent dans le témoignage et des facteurs qui le déter
minent1.
Â.U reste, s'il est incontestable que les historiens ont été les
premiers à poser nettement le problème du témoignage, il
serait inexact de prétendre que nul, en dehors d'eux, n'ait été
1. On trouvera des renseignements étendus sur ces diverses questions
dans les ouvrages de Bernheim, de Seignobos, de Langlois. Citons
entre autres :
3e éd., 1903. Bersheim, Lehrbuch der historischen Methode,
Langlois et Seignobos, Introduction aux éludes historiques, 1898.
Seignobos, La méthode historique appliquée aux sciences sociales, 1901.
Voir aussi : Bernhkim, Dœs Verhältniss der historischen Methodik zur
Zeugenaussage. Heiträge zur Psychologie der Aussage, II, 110, 1903.
Le fragment cité un peu plus haut dans le texte est emprunté à
l'ouvrage de Seignobos, La méthode historique, etc., p. 38 et suiv. DES BANCELS. — LA PSYCHOLOGIE JUDICIAIRE 159 LARGUIER
capable jusqu'à ces dernières années de le pressentir. Les
psychologues1 aussi bien que les juristes l'ont partiellement
aperçu et il est possible de recueillir dans leurs ouvrages un
certain nombre de remarques sur la question. Mais on est
obligé de convenir que ces remarques sont vagues, incom
plètes et rares; il n'y a pas grand dommage à les négliger2.
II
LES RECHERCHES DE B1NET ET LES PREMIÈRES EXPÉRIENCES
DE STERN
Pour intéressante que soit la théorie qu'on vient de rap
peler, il faut reconnaître qu'elle n'éclaire que bien imparfai
tement la psychologie du témoignage. Les historiens ont, il
est vrai, opposé d'éclatants démentis à l'opinion commune qui
accorde spontanément une entière confiance à un récit, à une
déposition sincères. Mais c'est là une conclusion toute négative,
et les résultats positifs qu'ils ont apportés d'autre part sont
d'un ordre trop général, si l'on peut ainsi dire, pour satisfaire
pleinement. Sans doute la critique a distingué avec finesse les
fonctions multiples que le témoignage met en jeu, énuméré
les diverses conditions dont il subit l'effet, relevé beaucoup des
erreurs qui l'altèrent; mais elle n'a pas été plus loin. Attachée
à une matière prodigieusement complexe et où, dans chaque
1. C'est ainsi que James Sully remarque que les « erreurs du témoi
gnage, qui tiennent à une falsification de l'observation pure, par la con
jecture et l'inférence, comme, par exemple, les affirmations téméraires
et inexactes de ceux qui ont assisté aux séances de spiritisme, tout en
révélant une fusion fort curieuse de ces deux genres d'erreurs [erreurs
de perception et erreurs de mémoire], sont sans doute plus souvent des
illusions de la mémoire que des illusions de la perception. » Les illusions
des sens et de l'esprit. Trad, franc., 3e éd., p. 191.
Tous les auteurs qui ont étudié la perception ou la mémoire ont relevé
ces erreurs. Je citerai, en particulier, les expériences de Philippe sur les
transformations des images mentales (publiées dans la Revue philoso
phique dès 1897 et réunies dans Vimage mentale, Paris, 1903) et je me
borne à ajouter que Cattell, en 1896, montrait l'intérêt qu'il y aurait,
dans la pratique judiciaire, à connaître l'exactitude moyenne des sou
venirs pour tel objet, au bout de tel intervalle de temps, etc., Measure
ments of the accuracy of recollection. Science, N. S., II, p. 361.
2. Il convient cependant de faire une exception en faveur de H. Gross.
Dès 1898, l'éminent criminologiste attirait l'attention des juristes sur
l'importance de la psychologie du témoignage. La Kriminalpsychologie,
dont la deuxième édition a paru en 1903, contient une foule d'aperçus ingé
nieux auxquels l'expérience pratique de l'auteur donne une grande
valeur. 160 MÉMOIRES ORIGINAUX
cas particulier, les facteurs les plus variés sont intervenus
et ont mêlé leur action, elle ne pouvait déterminer, dans le
détail et avec précision, ni le rôle propre de ces fonctions, ni
l'influence

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