La valeur cathartique de l agression : un mythe ou une inconnue ? - article ; n°2 ; vol.77, pg 525-550
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La valeur cathartique de l'agression : un mythe ou une inconnue ? - article ; n°2 ; vol.77, pg 525-550

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Description

L'année psychologique - Année 1977 - Volume 77 - Numéro 2 - Pages 525-550
Résumé
Cet article passe en revue les nombreuses mises à l'épreuve expérimentales de la catharsis au niveau de l'agression. Trois conclusions se dégagent. 1) La contre-attaque physique ou verbale peut réduire la tension physiologique uniquement dans la mesure où elle est perçue comme susceptible d'arrêter ou d'éviter une stimulation désagréable. 2) Les expressions directes ou indirectes n'ont pas en tant que telles de pouvoir cathartique ; au contraire, dans beaucoup de cas, elles renforcent plutôt qu'elles ne diminuent l'agressivité résiduelle. 3) La catharsis par agression ne se produit que si l'interaction agressive donne lieu à une réinterprétation de la situation, de sorte que la signification agressive de celle-ci est réduite.
Une telle conception remet en question les modèles théoriques traditionnels de l'agression ainsi que certaines formes thérapeutiques actuellement en vogue.
Summary
This paper reviews the numerous experimental investigations of aggression catharsis. The conclusions are threefold : 1) Verbal or physical counter-attacks can reduce physiological tension only to the extent that they are considered as likely to stop or to avoid an aversive stimulation. 2) The direct and indirect expressions of aggression have no cathartic power per se ; on the contrary, they increase rather thon decrease the residual aggression. 3) Aggression catharsis occurs only if the aggressive interaction produces a reinterpretation of the situation which changes the aggressive meaning of that situation. Such a perspective seriously questions the traditional theore-tical models of aggression as well as several fashionable therapeutic schools.
26 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1977
Nombre de lectures 43
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

J.-P. Leyens
La valeur cathartique de l'agression : un mythe ou une inconnue
?
In: L'année psychologique. 1977 vol. 77, n°2. pp. 525-550.
Résumé
Cet article passe en revue les nombreuses mises à l'épreuve expérimentales de la catharsis au niveau de l'agression. Trois
conclusions se dégagent. 1) La contre-attaque physique ou verbale peut réduire la tension physiologique uniquement dans la
mesure où elle est perçue comme susceptible d'arrêter ou d'éviter une stimulation désagréable. 2) Les expressions directes ou
indirectes n'ont pas en tant que telles de pouvoir cathartique ; au contraire, dans beaucoup de cas, elles renforcent plutôt qu'elles
ne diminuent l'agressivité résiduelle. 3) La catharsis par agression ne se produit que si l'interaction agressive donne lieu à une
réinterprétation de la situation, de sorte que la signification agressive de celle-ci est réduite.
Une telle conception remet en question les modèles théoriques traditionnels de l'agression ainsi que certaines formes
thérapeutiques actuellement en vogue.
Abstract
Summary
This paper reviews the numerous experimental investigations of aggression catharsis. The conclusions are threefold : 1) Verbal
or physical counter-attacks can reduce physiological tension only to the extent that they are considered as likely to stop or to
avoid an aversive stimulation. 2) The direct and indirect expressions of aggression have no cathartic power per se ; on the
contrary, they increase rather thon decrease the residual aggression. 3) Aggression catharsis occurs only if the aggressive
interaction produces a reinterpretation of the situation which changes the aggressive meaning of that situation. Such a
perspective seriously questions the traditional theore-tical models of aggression as well as several fashionable therapeutic
schools.
Citer ce document / Cite this document :
Leyens J.-P. La valeur cathartique de l'agression : un mythe ou une inconnue ?. In: L'année psychologique. 1977 vol. 77, n°2.
pp. 525-550.
doi : 10.3406/psy.1977.28213
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/psy_0003-5033_1977_num_77_2_28213LA VALEUR CATHARTIQUE DE L'AGRESSION
UN MYTHE OU UNE INCONNUE ?
par Jacques-Philippe Leyens1
Université de Louvain
SUMMARY
This paper reviews the numerous experimental investigations of aggres
sion catharsis. The conclusions are threefold : 1) Verbal or physical
counter-attacks can reduce physiological tension only to the extent that they
are considered as likely to stop or to avoid an aversive stimulation. 2) The
direct and indirect expressions of aggression have no cathartic power per se ;
on the contrary, they increase rather than decrease the residual aggression.
3) Aggression catharsis occurs only if the aggressive interaction produces a
reinterpretation of the situation which changes the aggressive meaning of
that situation. Such a perspective seriously questions the traditional theore
tical models of aggression as well as several fashionable therapeutic schools.
Gomme beaucoup de termes psychologiques, la catharsis n'a pas
une signification univoque. Lorsqu'elle concerne l'agression, la catharsis
se définit d'une manière générale comme la diminution, voire l'extinc
tion, de comportements et de sentiments agressifs, due à une expression
préalable d'agression. Plutôt que de comportements et de sentiments
agressifs, certains auteurs parleront d'une diminution de tension consé
cutive à cette expression. Nous nous réservons de spécifier ces défini
tions par la suite, lorsque nous examinerons le statut empirique de la
catharsis.
En effet, dès l'origine, la catharsis fut une notion controversée.
Platon, par exemple, ne partageait pas du tout l'avis d'Aristote qui
voyait dans la tragédie l'occasion d'une catharsis, c'est-à-dire l'oppor
tunité pour le spectateur de se purifier, notamment de ses tendances
1. Cet article a été rédigé dans le cadre d'un projet de recherches subven
tionné par le Fonds de la Recherche fondamentale collective. Que Gérard de
Montpellier et Bernard Rimé veuillent bien trouver ici les signes de notre
gratitude pour leurs nombreuses suggestions critiques.
Adresse : Laboratoire de Psychologie expérimentale et sociale, Voie
du Roman Pays, 20, 1348 Ottignies/Louvain-La-Neuve.
L'Année psychologique 2/77, 525-550 526 J.-Ph. Leyens
agressives1. Depuis lors, les deux philosophes grecs ont eu de nombreux
émules.
L'ambivalence vis-à-vis de la catharsis se manifeste déjà chez les
auteurs de l'ouvrage Frustration and Aggression (Dollard et coll., 1939),
les premiers à avoir énoncé systématiquement une théorie de l'agression.
Pour Dollard et ses collègues, qui subissent l'influence des conceptions
psychanalytiques et du modèle motivationnel de Hull, la frustration
met en branle une pulsion (drive) agressive que viendra réduire le
comportement agressif. Il en résulte que « l'occurrence de tout acte
d'agression est censé réduire l'instigation à l'agression. Dans la termi
nologie psychanalytique, une telle décharge est appelée catharsis »
(Dollard et coll., 1939, p. 50). Les mêmes auteurs signalent cependant
(1939, p. 6 et p. 50) que la réduction de l'instigation à l'agression est
probablement souvent temporaire et que le comportement agressif
est d'autant plus susceptible de se reproduire qu'il a mené antérieur
ement au but recherché.
Dans le domaine de l'agression, où les partisans de la théorie « fru
stration-agression » sont encore nombreux et où les modèles homéosta-
siques, hydrauliques, régnent de façon maîtresse, cette double pers
pective va perdurer. La recherche s'énoncera en termes exclusifs,
s'enfermant ainsi dans le dilemme suivant : ou bien il y a réduction de
l'instigation et donc catharsis, ou bien il y a renforcement et donc
absence de catharsis, voire même probabilité accrue de comportements
agressifs. Cet article, nous l'espérons, montrera ce qu'il faut penser
de pareille alternative.
La mise à l'épreuve expérimentale de la catharsis ayant suscité
de nombreuses expériences avec des variables dépendantes et ind
épendantes très diverses, nous procéderons, pour la clarté de cet exposé,
à plusieurs distinctions.
Nous traiterons d'abord des expériences qui ont envisagé les variables
dépendantes au niveau du comportement et des attitudes, pour analyser
ensuite les recherches psychophysiologiques. Le premier groupe étant
fort important et hétérogène, il sera encore subdivisé selon que l'activité
censée amener la catharsis est indirecte ou directe, c'est-à-dire que le
sujet ne se comporte pas lui-même de façon agressive ou, au contraire,
attaque une cible déterminée soit verbalement, soit physiquement. Un
tel découpage en fonction des variables dépendantes et indépendantes
est plus pragmatique que théorique et nous le proposons uniquement
comme un guide de discussion des différentes recherches.
1. Cf. l'ouvrage de Barrucand (1970) qui discute l'étymologie du terme
catharsis et qui retrace son histoire, surtout dans le domaine clinique, depuis
l'Antiquité jusqu'à nos jours. valeur cathartique de l'agression 527 La
Dans la dernière partie de l'article, enfin, nous énoncerons notre
conception personnelle à laquelle nous a amené l'examen des expériences
présentées. Nous tenterons d'y montrer que l'alternative « renforcement
ou réduction de pulsion » doit être dépassée au profit de l'analyse de
l'interaction agressive et de la signification de celle-ci à différents
moments pour les protagonistes.
L'EXPRESSION INDIRECTE DE L'AGRESSION
l'activité fantasmatique
Une première manière de réaliser indirectement la catharsis est de
substituer au comportement agressif des activités fantasmatiques de
type agressif comme, par exemple, les réactions à des images du Thematic
Apperception Test (T. A. T.). C'est le raisonnement suivi par Fesh-
bach (1955). Ses sujets sont répartis en trois conditions. Dans la pre
mière de celles-ci, ils sont insultés par un expérimentateur arrogant
qui dénigre leur intelligence et leur maturité et ils doivent ensuite
écrire une histoire à propos de chacune des quatre cartes du T. A. T. qui
leur sont montrées. Dans la deuxième condition, après l'insulte, les
sujets doivent soit répondre à un test, soit décrire des diapositives.
Dans le troisième gro

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