Le pari économique de la Chine sur l'OMC : réalités, mythes et inconnues - article ; n°1 ; vol.70, pg 4-14

Jean-François Huchet

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Perspectives chinoises - Année 2002 - Volume 70 - Numéro 1 - Pages 4-14
11 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Sujets

• Sociologie, société et politique

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• Publié par: PERSPECTIVES_CHINOISES
• Publié le: 01 janvier 2002
• Nombre de lectures: 45
• Langue: Français
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Extrait

Jean-François Huchet
Le pari économique de la Chine sur l'OMC : réalités, mythes et
inconnues
In: Perspectives chinoises. N°70, 2002. pp. 4-14.
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Huchet Jean-François. Le pari économique de la Chine sur l'OMC : réalités, mythes et inconnues. In: Perspectives chinoises.
N°70, 2002. pp. 4-14.
doi : 10.3406/perch.2002.2728
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/perch_1021-9013_2002_num_70_1_2728j
Le pari économique de la
Chine sur l'OMC : réalités,
mythes et inconnues
noise. Comme en 1978, les dirigeants semblent en effet Jean-François Huchet
acculés à réformer et à produire une forte croissance
économique dont ils tirent leur légitimité, sous peine
EU d'événements auront déchaîné autant de pas d'être rattrapés par les problèmes structurels de l'éc
sions, généré autant d'analyses et de publications, onomie chinoise.
suscité autant d'espoirs ou d'inquiétudes au sein Dans ce contexte, rien d'étonnant au fait de retrou
de la population chinoise que l'accession de la Chine à ver un spectre très large d'analyses sur les consé
l'Organisation mondiale du commerce (OMC). L'enjeu il quences économiques de l'accession de la Chine à
l'OMC. Entre les pessimistes qui insistent sur les incaest vrai, du moins théoriquement, est considérable pour
ce pays. Même si on laisse de côté l'orgueil national, le pacités de la Chine à relever des défis dont on grossit
sentiment de ne plus être exclu de ce « club » — pour les traits pour mieux annoncer le chaos, et les opti
tant moins fermé qu'on le dit souvent — que constitue mistes béats qui voient dans l'OMC une fusée capable
l'OMC, les modifications du régime du commerce exté de placer en un temps record et sans encombre la
rieur que la Chine va devoir mettre en place tout comme Chine sur l'orbite des pays les plus développés sur le
les droits issus de son accession sont potentiellement plan économique, cet article se propose d'apporter
porteurs de vastes conséquences économiques (1). Mais une analyse plus prudente et contrastée. Cette analyse
c'est aussi parce que l'accession à l'OMC est considérée insistera en particulier sur les facteurs qui risquent de
comme une nouvelle étape, un nouveau souffle, un cata limiter l'ouverture du marché intérieur comme sur les
lyseur des réformes économiques internes, bref comme innombrables inconnues qui n'ont pas été élucidées
un instrument de politique intérieure. On comprend de par les modèles économétriques et qui sont suscept
ce fait l'ampleur comme la dramatisation des débats sur ibles de réserver bien des surprises quant à l'influen
l'OMC que l'on pourrait comparer à ceux qui eurent lieu ce de l'accession de la Chine à l'OMC sur le dévelop
dans les sociétés espagnole, portugaise ou grecque lors pement économique de ce pays.
de leur adhésion à la Communauté européenne dans les
Un choc externe amorti années 1980, ou à ceux qui se déroulent aujourd'hui
dans les pays de l'Europe centrale et orientale qui négo Parmi les interrogations soulevées par bon nombre
cient leur entrée dans l'Union européenne. Beaucoup d'analyses sur les risques encourus par la Chine du fait
d'analyses ont également comparé l'accession de la de la modification de son régime de commerce exté
Chine à l'OMC au lancement de la politique d'ouverture rieur, figure en première place la crainte qu'une ouver
en décembre 1978, c'est-à-dire une décision de politique ture trop importante et trop rapide du marché intérieur
économique générique qui devrait bouleverser les struc ne déstabilise durablement les producteurs nationaux.
tures et les modes de fonctionnement de l'économie Un examen plus attentif des conditions de ventes des
erspectives chinoises N° 7O • MARS - AVRIL 2OO2 Chine
importés, des stratégies à long terme choisies ait accepté des quotas d'importations relativement produits
par les investisseurs étrangers ainsi que des conditions plus importants que d'autres pays membres de
d'application des règles de l'OMC permet néanmoins l'OMC, le tableau 1 montre que les quotas d'importa
de tempérer très fortement cette anticipation négative. tions maximums représentent une part relativement
En effet, de nombreux « facteurs amortisseurs » (buf faible de la consommation intérieure et cela même
fering effects (2)) devraient tempérer le choc de l'ouver si, en raison de la taille du marché chinois, les import
ture pour les producteurs nationaux. ations sont significatives à l'échelle mondiale (4). Par
ailleurs, en cas de dépassement des quotas, la Chine
Ouverture négociée et effets « amortisseurs » : peut imposer des droits de douane capables de pro
l'exemple de l'agriculture téger de manière efficace son marché intérieur (der
Des prix intérieurs chinois trop éloignés des prix mond nière colonne du tableau 1), même si elle a accepté
iaux conjugués à la baisse des tarifs douaniers prévue d'appliquer des droits de douane inférieurs à ceux
dans l'accord OMC pourraient, selon certaines analyses, maintenus par de nombreux autres membres de
provoquer un basculement de la demande intérieure vers l'OMC. Ces quotas devraient ainsi limiter l'effet sur
les produits importés et une chute drastique du chiffre les producteurs locaux.
• Par ailleurs, en dépit des variations observées entre d'affaires des producteurs nationaux, accélérant ainsi un
exode rural massif vers les villes côtières. Cette possibili les différentes catégories de produits agricoles, les
té a été très largement évoquée au sujet des produits agri prix mondiaux et les prix chinois convergent déjà de
coles de base notamment du blé, du soja, du riz et tout plus en plus depuis plusieurs années grâce aux gains
particulièrement pour les producteurs des régions les de productivité réalisés dans l'agriculture chinoise.
plus pauvres aux coûts de production les plus élevés et Cette tendance devrait à l'avenir améliorer la comp
qui sont par conséquent plus exposés que les producteurs étitivité des produits chinois par rapport aux
des régions côtières. Plusieurs facteurs incitent néan importations.
moins à relativiser le choc attendu en matière agricole : • Enfin, le marché intérieur chinois est loin d'être
• Les accords signés par la Chine pour son accession à intégré. Les coûts de transport des produits agri
l'OMC prévoient des garanties en matière de protec coles sont, en moyenne, cinq fois supérieurs à ceux
tion de son marché intérieur agricole. Des quotas enregistrés aux Etats-Unis. Les producteurs des
d'importation maximums ont été négociés sur la régions intérieures qui vendent sur les marchés
base des accords généraux prévus dans Y Uruguay locaux ne devraient donc pas subir une concurrence
Round pour la libéralisation des produits agricoles. instantanée. En effet, le coût du transport des pro
Les quotas d'accès au marché intérieur pour les duits importés vers ces marchés renchérit sensible
importations sont déterminés par rapport à la ment leur prix (5). Ce phénomène devrait donc, enco
consommation intérieure. Ces quotas seront pro re pendant quelques années, permettre aux paysans
gressivement revus à la hausse sur une base annuell les plus pauvres dans les régions reculées de diver
e jusqu'en 2004 comme le montre le tableau 1 (3). sifier leur production ou de tenter d'accroître leur
Bien que, comme le précise Nicholas Lardy, la Chine productivité.
Tableau 1 ► Exemple d'évolution des quotas d'importation et droits de douane sur les produits agricoles
Droits de %dela Droits de douane sur
Quotas initiaux douane sur consommation les importations
les d'importation Quotas fin de intérieure en supérieures aux Importations
1998 début et fin importations quotas début et fin de période (2004) (2002)
(millions inférieures aux (millions (millions de période période (2002-2004,
Produits agricoles quotas sauf * 2006) de tonnes) de tonnes) de tonnes) (2002-2004)
80% - 43% Blé 1,55 7,30 9,30 6,1% -7,8% 1%
4,7% - 6,4% 80% - 43% Maïs 0,25 4,50 7,20 1%
Riz 0,26 5,32 1,4%