Le travail qualifié est-il trop complexe pour se laisser réduire ? Marx sans les conventions - article ; n°5 ; vol.44, pg 971-990
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Description

Revue économique - Année 1993 - Volume 44 - Numéro 5 - Pages 971-990
Le travail qualifié est-il trop complexe pour se laisser réduire? Marx sans les conventions

Cet article discute la thèse selon laquelle la réduction du travail complexe en travail simple chez Marx résulterait d'une convention, entendue comme un substitut au marché. Une première partie met en évidence le contraste, dans les œuvres de Marx, entre une problématique explicite, qui présente la réduction du travail complexe comme un élément de la constitution d'un champ des valeurs-travail, et la confusion qui préside aux différentes exquisses de solutions analytiques. Le recours à la « convention » témoigne alors non d'un choix théorique délibéré mais de l'ignorance du processus mis en œuvre. L'identification de ce processus passe, dans une seconde partie, par l'exploration des multiples tentatives de résolution qui prenaient appui sur les conjectures imaginées dans Le Capital. Les controverses entre Engels et Dùhring d'abord, entre Bôhm-Bawerk et Hilferding ensuite, y occupent une place centrale. Elles permettent de faire ressortir à la fois le caractère inadéquat des solutions passant par la « coutume » ou la hiérarchie des salaires et, en contrepoint, la possibilité analytique de respecter la problématique initiale de Marx en déduisant la réduction du travail complexe des processus de qualification des travailleurs.
Is skilled labour too complex to have it reduced ? Marx without conventions
This paper discusses the thesis according to which the reduction of skilled labour into simple labour in Marx's work would be the resuit of a convention, understood as a substitute for the market. In a first section, the contrast is stressed between, on the one hand, Marx's explicit issue, which presents the reduction of skilled labour as an element of the constitution of labour values and, on the other hand, the confusion which dominates the different sketches of analytical solutions. The resort to the convention hence attests the ignorance of the process involved in the reduction of skilled labour, but not a purposeful theoretical choice. The identification of this process requires, in the second section, the exploration of these multiple attempts to solve the problem which rested on the conjectures imagined in The Capital. In this respect, the controversies between Engels and Duhring at first, and then between Bohm-Bawerk and Hilferding, are of utmost importance. They allow to bring out the inadequacy of the solutions by the custom or the hierarchy of wages and, on the contrary, the analytical possibility to respect Marx's initial issue in deducing the reduction of skilled labour from the qualification processes of the labourers.
20 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1993
Nombre de lectures 40
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Monsieur André Lapidus
Le travail qualifié est-il trop complexe pour se laisser réduire ?
Marx sans les conventions
In: Revue économique. Volume 44, n°5, 1993. pp. 971-990.
Citer ce document / Cite this document :
Lapidus André. Le travail qualifié est-il trop complexe pour se laisser réduire ? Marx sans les conventions. In: Revue
économique. Volume 44, n°5, 1993. pp. 971-990.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/reco_0035-2764_1993_num_44_5_409491Résumé
Le travail qualifié est-il trop complexe pour se laisser réduire? Marx sans les conventions
Cet article discute la thèse selon laquelle la réduction du travail complexe en travail simple chez Marx
résulterait d'une convention, entendue comme un substitut au marché. Une première partie met en
évidence le contraste, dans les œuvres de Marx, entre une problématique explicite, qui présente la
réduction du travail complexe comme un élément de la constitution d'un champ des valeurs-travail, et la
confusion qui préside aux différentes exquisses de solutions analytiques. Le recours à la « convention »
témoigne alors non d'un choix théorique délibéré mais de l'ignorance du processus mis en œuvre.
L'identification de ce processus passe, dans une seconde partie, par l'exploration des multiples
tentatives de résolution qui prenaient appui sur les conjectures imaginées dans Le Capital. Les
controverses entre Engels et Dùhring d'abord, entre Bôhm-Bawerk et Hilferding ensuite, y occupent une
place centrale. Elles permettent de faire ressortir à la fois le caractère inadéquat des solutions passant
par la « coutume » ou la hiérarchie des salaires et, en contrepoint, la possibilité analytique de respecter
la problématique initiale de Marx en déduisant la réduction du travail complexe des processus de
qualification des travailleurs.
Abstract
Is skilled labour too complex to have it reduced ? Marx without conventions
This paper discusses the thesis according to which the reduction of skilled labour into simple labour in
Marx's work would be the resuit of a convention, understood as a substitute for the market. In a first
section, the contrast is stressed between, on the one hand, Marx's explicit issue, which presents the
reduction of skilled labour as an element of the constitution of labour values and, on the other hand, the
confusion which dominates the different sketches of analytical solutions. The resort to the "convention"
hence attests the ignorance of the process involved in the reduction of skilled labour, but not a
purposeful theoretical choice. The identification of this process requires, in the second section, the
exploration of these multiple attempts to solve the problem which rested on the conjectures imagined in
The Capital. In this respect, the controversies between Engels and Duhring at first, and then between
Bohm-Bawerk and Hilferding, are of utmost importance. They allow to bring out the inadequacy of the
solutions by the "custom" or the hierarchy of wages and, on the contrary, the analytical possibility to
respect Marx's initial issue in deducing the reduction of skilled labour from the qualification processes of
the labourers.Le travail qualifié
est-il trop complexe
pour se laisser réduire?
Marx sans les conventions
André Lapidus ,*
Cet article discute la thèse selon laquelle la réduction du travail complexe en
travail simple chez Marx résulterait d'une convention, entendue comme un substit
ut au marché. Une première partie met en évidence le contraste, dans les œuvres
de Marx, entre une problématique explicite, qui présente la réduction du travail
complexe comme un élément de la constitution d'un champ des valeurs-travail, et
la confusion qui préside aux différentes exquisses de solutions analytiques. Le
recours à la « convention » témoigne alors non d'un choix théorique délibéré mais
de l'ignorance du processus mis en œuvre. L'identification de ce processus passe,
dans une seconde partie, par l'exploration des multiples tentatives de résolution
qui prenaient appui sur les conjectures imaginées dans Le Capital. Les controver
ses entre Engels et Dühring d'abord, entre Böhm-Bawerk et Hilferding ensuite, y
occupent une place centrale. Elles permettent de faire ressortir à la fois le carac
tère inadéquat des solutions passant par la « coutume » ou la hiérarchie des
salaires et, en contrepoint, la possibilité analytique de respecter la problématique
initiale de Marx en déduisant la réduction du travail complexe des processus de
qualification des travailleurs.
INTRODUCTION
II serait satisfaisant pour l'esprit que l'idée moderne de « convention »
retrouve, aujourd'hui, une intuition ancienne de Marx : une hétérodoxie répond
rait ainsi à une autre hétérodoxie, montrant que les héritages ne se dissipent
jamais complètement et que, si on laisse s'écouler suffisamment de temps, le
contenu proprement subversif d'une œuvre finit toujours par resurgir. Pourtant,
l'historien de la pensée économique qui s'abandonnerait à de tels espoirs les
verrait trop souvent déçus. C'est aux grandes orthodoxies que les hétérodoxies
semblent préférer s'alimenter. On apprend plus de Key nés en lisant Marshall ou
Pigou que Malthus ou Sismondi ; et il est à craindre qu'en lisant Marx, on n'ap
prenne rien sur les conventions.
* Je tiens à remercier Christian Tutin pour ses commentaires qui m'ont permis
d'améliorer une version précédente de cet article. Je reste, cependant, seul responsable
de ses insuffisances.
971 Revue économique
C'est, cependant, le parti-pris inverse qu'adopte E. Poulain dans un article
récent (Poulain [1992]). En distinguant la convention comme adjuvant et
comme alternative au marché, l'auteur y retrouve respectivement les questions
liées, chez Marx, à la transformation des valeurs-travail en prix de production,
puis à la réduction du travail complexe en travail simple. C'est à ce dernier
point que 1 ' on s ' attachera ici.
Lorsque la question de la réduction du travail complexe apparaît dans l'œu
vre de Marx, il est difficile d'y voir autre chose qu'une succession de mentions
marginales, très éloignées du traitement systématique et rigoureux que ses com
mentateurs auraient probablement attendu. Toutefois, les quelques phrases du
Capital qui s'y rapportent permettent de repérer une problématique suffisam
ment explicite pour évaluer les quelques conjectures qui, au sein du même texte,
s'efforcent d'y répondre (section 1). Cette problématique présente la réduction
du travail complexe comme un élément de la constitution d'un champ des
valeurs-travail, logiquement antérieur à toute considération sur la valeur de la
force de travail ou le taux d'exploitation et, plus encore, aux comportements
déterminant les prix de marché. De sorte que le recours à la convention renvoie
non à une option théorique délibérée, mais à l'ignorance du processus mis en
œuvre.
L'identification plus précise de ce processus devait succéder à l'exploration
des voies de résolution du problème qui, tour à tour, éliminaient les diverses
conjectures du Capital au profit de la problématique initiale (section 2). Dans
cette perspective, V Anti-Dù'hring d'Engels et la Critique de Marx par Böhm-
Bawerk d'Hilferding constituent deux étapes essentielles. La première a permis,
contre Dühring, de resituer l'enjeu du problème posé par Marx et de récuser par
avance l'exploitation des conjectures du Capital. Contre Böhm-Bawerk,
ensuite, la seconde étape fut marquée par la construction, dans le texte publié
par Hilferding en 1904, d'une réponse cohérente à la question, telle qu'elle était
soulevée dans Le Capital, de la réduction du travail complexe en travail simple.
LA REDUCTION DU TRAVAIL COMPLEXE
PROBLÉMATIQUE ET CONJECTURES DANS LE CAPITAL
Dans la perspective tracée par Marx, la question du travail qualifié n'est pas
une préoccupation permanente des chercheurs. Lorsqu'on la retrouve à l' avant-
scène, c'est fréquemment pour clore un débat. Après la mort de Marx, Böhm-
Bawerk [1896] y voyait une pièce importante de son réquisitoire contre Le Capit
al. La réponse de Hilferding [1904] montre que le n'était pas aussi
définitif que cela. De même, le lecteur crédule, qui aurait pris à la lettre l'a

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