Politique et société : les structures du pouvoir dans l Italie fasciste et l Allemagne nazie - article ; n°3 ; vol.43, pg 615-637
24 pages
Français

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

Politique et société : les structures du pouvoir dans l'Italie fasciste et l'Allemagne nazie - article ; n°3 ; vol.43, pg 615-637

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
24 pages
Français
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Annales. Économies, Sociétés, Civilisations - Année 1988 - Volume 43 - Numéro 3 - Pages 615-637
Politics and Society: Power Structures in Fascist Italy and Nazi Germany
The differences between the fascist and nazi regimes are obvious, but must one thus neglect their similarities? In their political structuration one finds four elements distinguishing them from other totalitarian regimes like the communist regime and making of them a proper political grouping: an alliance with conservative forces, a duel between the party and the state, popular support, and the myth of the leader. These four structures enter into specific combinations, and their existence enjoins us to explore the political culture of German and Italian societies.
23 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Sujets

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1988
Nombre de lectures 17
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Philippe Burrin
Politique et société : les structures du pouvoir dans l'Italie
fasciste et l'Allemagne nazie
In: Annales. Économies, Sociétés, Civilisations. 43e année, N. 3, 1988. pp. 615-637.
Abstract
Politics and Society: Power Structures in Fascist Italy and Nazi Germany
The differences between the fascist and nazi regimes are obvious, but must one thus neglect their similarities? In their political
structuration one finds four elements distinguishing them from other totalitarian regimes like the communist regime and making of
them a proper political grouping: an alliance with conservative forces, a duel between the party and the state, popular support,
and the myth of the leader. These four structures enter into specific combinations, and their existence enjoins us to explore the
political culture of German and Italian societies.
Citer ce document / Cite this document :
Burrin Philippe. Politique et société : les structures du pouvoir dans l'Italie fasciste et l'Allemagne nazie. In: Annales. Économies,
Sociétés, Civilisations. 43e année, N. 3, 1988. pp. 615-637.
doi : 10.3406/ahess.1988.283510
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ahess_0395-2649_1988_num_43_3_283510PHILIPPE BURRIN
POLITIQUE ET SOCIÉTÉ : LES STRUCTURES DU POUVOIR
DANS L'ITALIE FASCISTE ET L'ALLEMAGNE NAZIE
L'historiographie des régimes fasciste et nazi montre combien l'histoire
comparée demeure une recommandation d'école. En vain chercherait-on parmi
les innombrables études publiées dans les trente dernières années un ouvrage
abordant de façon comparative l'histoire de ces régimes, ou explorant l'un ou
l'autre de leurs aspects, à l'exemple du remarquable travail que Jurgen Kocka
consacra aux cols blancs allemands et américains1. Emprise du cadre national
sur les études historiques, sans aucun doute, mais aussi peut-être réticence des
historiens envers une démarche accaparée dans les années 1960 et 1970 par des
politologues à qui seul importait de fixer la formule d'un fascisme générique2.
Attaché au respect des singularités, l'historien ne pouvait que voir dans des
interprétations faisant des régimes allemand et italien l'expression politique
d'un stade du capitalisme ou d'une étape de la modernisation, des généralités
peu éclairantes, grevées au surplus d'omissions ou de méconnaissances considé
rables. Ainsi pour ce qui est de l'extermination des juifs, un événement où cu
lminent et se condensent les différences de tous ordres que l'on peut constater
entre les deux régimes et que le carcan d'un modèle explicatif global amène
presque immanquablement à ignorer ou à aplatir3. Même si leur gravité a été
longtemps méconnue, les actes de barbarie commis par l'Italie fasciste en
Ethiopie sont bien éloignés d'une entreprise de génocide dont la spécificité est
d'avoir été idéologiquement motivée, administrativement planifiée et indus
triellement accomplie.
A l'évidence, les régimes fasciste et nazi ne sont pas identiques ; mais la
question pertinente est celle de leur parenté, et non de leur identité. En tant que
phénomène historique, chaque régime est singulier ; encore faut-il apprécier
Annales ESC, mai-juin 1988, n°3, pp. 615-637.
615 NAZISME FASCISME,
cette singularité, son caractère et son étendue : d'où l'appel à la comparaison,
qui doit permettre de cerner une parenté selon les ressemblances qui la fondent
et les différences qui la limitent. Dans l'essai qui suit, la démarche comparative
est appliquée aux structures politiques qui charpentent ces deux régimes, leur
permettent d'être et de durer, leur donnent physionomie et direction. Par-delà
le jeu politique au sens étroit dont l'importance n'est pas à sous-estimer, nous
intéressent ici les convergences stratégiques qui offrent une assise au pouvoir,
les conceptions idéologiques qui orientent son action, les dispositifs institution
nels qu'il met en place, enfin les dispositions et la réceptivité de la société qu'il
régit. A travers cette exploration, qui nous fera aller d'aspects connus à
d'autres moins travaillés, on voudrait reconnaître les terrains en friche d'une
histoire politique encore largement à faire 4.
Dans cette recherche en parenté, il est un premier niveau, celui de l'idéologie
et de la caractérisation globale des régimes, qui nous laisse à la surface du pro
blème et que l'on n'évoquera que dans la mesure où notre propos s'en trouve
éclairé. Vus dans la perspective de l'histoire des idées, le fascisme et le nazisme
sont d'une parenté évidente : tous deux s'inscrivent dans un même courant
ď irrationalisme politique et de nationalisme impérialiste, tous deux proclament
les mêmes valeurs fondamentales de foi, de force et de combat. Le racisme n'en
occupe pas moins au cœur du nazisme une place singulière. Mussolini, il est
vrai, l'adopte en 1938 et le place au fronton de son régime, ce qui n'est tout de
même pas sans signification. Mais l'intensité des convictions comme le milieu
de réceptivité sont bien différents, et la pratique reste bien en deçà de la poli
tique d'extermination nazie. Cette différence cruciale prise en compte, l'on
accordera que les deux régimes partagent un projet politique fort semblable,
qui vise la formation d'une communauté nationale unitaire et conquérante,
aveuglément mobilisée derrière un chef absolu. Un projet qui, par sa nature et
par les moyens mis en œuvre pour le réaliser, fonde à les qualifier de régimes
totalitaires plutôt qu'autoritaires, deux concepts qui ont ici valeur de notions
utiles et non de modèles explicatifs englobants affirmant l'identité des phéno
mènes considérés.
Pour reprendre la définition qu'en a donnée Juan Linz, les régimes totali
taires sont caractérisés par la présence simultanée d'un centre de pouvoir qui
affirme son monopole, d'une idéologie qui prétend à l'exclusivité et d'une
entreprise de mobilisation totale de la population à travers un parti unique et les
organisations sous sa dépendance. Les régimes autoritaires s'en distinguent par
l'existence d'un pluralisme limité, le pouvoir reconnaissant la légitimité de
corps privilégiés comme l'Église, par une idéologie mal articulée et faiblement
diffusée, enfin par l'absence ou un degré limité de mobilisation politique de la
population, le parti unique, quand il en existe un, n'ayant qu'une place réduite
au sein du régime et qu'une prise superficielle sur la société5.
Dans la réalité historique, ces deux types entrent en combinaison. Le régime
de Franco, par exemple, est à dominante autoritaire, mais il inclut dans les pre
mières années une composante totalitaire de type fasciste, en l'espèce la Phal
ange, tôt domestiquée par un pouvoir qui lui tient la bride serrée. En sens
inverse, les régimes de type fasciste ont au départ une forte composante autori
taire dans la mesure où ils trouvent leur point d'ancrage dans un compromis
avec les forces conservatrices. Mais cette composante autoritaire est soumise à
616 P. BURRIN LES STRUCTURES DU POUVOIR
une incessante pression totalitaire de la part du pouvoir, le régime allemand et
italien se distinguant l'un de l'autre par la mesure dans laquelle ils réussissent à
la faire reculer, sans parvenir plus l'un que l'autre à l'éliminer. Le critère décisif
n'est donc pas un accomplissement totalitaire dont il n'y a encore jamais eu
d'exemple, mais la traduction en actes d'une volonté de mobilisation totale de
la société selon les lignes d'une idéologie exclusive 6.
Le partage d'une visée totalitaire ne doit pas toutefois répandre Г indistinc
tion entre les membres de la famille totalitaire, dans laquelle il faut placer le
régime soviétique. Or il y a entre celui-ci et les régimes fasciste et nazi des diffé
rences profondes, qui l'emportent de loin sur la similitude de certains instr
uments de pouvoir (le parti unique, la propagande, la terreur) et qui vont bien
au-delà de la divergence effectivement radicale des sources d'inspiration idéolo
gique. En réalité, c'est l'ensemble de la structuration politique qui diffère, telle
qu'elle résulte du mo

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents