Potosí à la fin du XVIIIe siècle, 1776-1797.  - article ; n°1 ; vol.40, pg 21-50
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Description

Journal de la Société des Américanistes - Année 1951 - Volume 40 - Numéro 1 - Pages 21-50
30 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1951
Nombre de lectures 62
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Extrait

Marie Helmer
Potosí à la fin du XVIIIe siècle, 1776-1797.
In: Journal de la Société des Américanistes. Tome 40, 1951. pp. 21-50.
Citer ce document / Cite this document :
Helmer Marie. Potosí à la fin du XVIIIe siècle, 1776-1797. In: Journal de la Société des Américanistes. Tome 40, 1951. pp. 21-
50.
doi : 10.3406/jsa.1951.2536
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/jsa_0037-9174_1951_num_40_1_2536A LA FIN DU XVIIIe SIÈCLE POTOSI
(1776-1797).
HISTOIRE D'UN MANUSCRIT.
Par Marie HELMER.
Potosi à la fin du xvine siècle n'est plus ce prodige qui a étonné le monde
moderne par sa richesse fabuleuse, sa situation quasi inaccessible, sa ville de
luxe et de jouissance.
Entre sa découverte en 1542 et l'abandon de l'exploitation en 1864, l'argent
extrait du « Cerro Rico de Potosi », du ««Riche Mont » est évalué à un tiers de
la production de l'Amérique, soit 6.050 m3, chiffre qu'il faut naturellement
considérer comme un ordre de grandeur et non comme une exacte précision x .
Mais, à la fin du xvine siècle, des cinq mille entrées de mines qui perçaient le
Cerro « como un cascabel », comme un grelot, à peine en restait-il cent, d'où
ne sortait qu'un minerai de faible teneur.
Sa position géographique défie l'exploitation : il se dresse à 4.830 m. dans le
massif de Porco, le premier des sept nœuds qui unissent les deux chaînes pa
rallèles de la Cordillère des Andes, loin de toute voie naturelle de terre ou d'eau.
Il domine un haut-plateau aride et glacé, la « puna ». L'eau exceptée, l'air, le
combustible, les produits de la terre, tout y manque. Or, c'est au xvié et au
début du xvne siècle qu'ont été réalisés, avec les moyens techniques les plus
lents et lesplusrudimentaires,les chiffres les plus élevés de la production. Tout
l'outillage de l'industrie extractive a dû y être hissé pièce par pièce ; le bois
venait du Tucumán ; alors qu'il y avait du fer au Pérou, les exigences du pacte
colonial, du commerce avec la métropole, obligeaient à le faire venir, ainsi que
l'acier, de Biscaye. D'interminables files de lamas et de mules, au pas lent et
sûr, traversaient les Andes, de Potosi à la côte, sur une distance de cinq cents
kilomètres de montagnes, perpendiculairement aux voies naturelles de péné
tration qui sont parallèles à la chaîne, du Nord au Sud. Les chevaux ne sup
portaient pas le froid et l'air raréfié des hauteurs ; la roue était inutilisable sur
ces chemins escarpés. Les pistes traversaient des déserts d'hommes, les « des-
poblados ». Les bêtes de somme montaient chargées du plus lourd des métaux,
le mercure nécessaire au traitement de l'argent par amalgame ; il était venu
des Andes péruviennes, jusqu'à la mer, exploité à Huancavelica, à 300 lieues
de là, dans des conditions aussi primitives que celles de Potosi. En retour, •
22 SOCIETE DES AMERICANISTES
l'argent en barre descendait jusqu'au Pacifique, au port de la Province de
Potosi, à Arica ; de là, les galions du roi d'Espagne l'emportaient par Panama
à Seville, deux fois l'an.
En plus du matériel, il fallut attirer dans cette steppe où la densité actuelle
des habitants n'atteint pas quatre au km2, les milliers de travailleurs, la main-
d'œuvre innombrable qu'exigent les techniques primitives. Il fallut faire
vivre cette foule dans ce désert. La puissance du métal blanc résolut tout et
l'accoutumance vint bientôt rendre le miracle familier et quotidien. L'élan
initial disparut et la rouille de la routine grippa les rouages de la machine.
Aucun progrès sur le xvie siècle dans les procédés fut la rançon de la perfec
tion relative avec laquelle avait été résolu le problème de la main-d'œuvre
à bas prix, par la mita.
La ville minière du type champignon qui s'étendit à toute vitesse au pied
du Cerro, elle, à 3.960 m. d'altitude, connut une prospérité aussi exceptionn
elle que l'industrie, condition de son existence. L'attrait de l'argent fit de ce
lieu, que le froid et la stérilité rendaient inhabitable, la ville la plus peuplée
d'Amérique 2. A son apogée, au début du xvne siècle, Potosi comptait 150.000
habitants 3 et figurait parmi les villes les plus populeuses du temps. Elle dépass
ait Londres, Paris, Rome ou Seville 4. Seule la précédait Naples avec ses
280.000 âmes 5. Aujourd'hui, Potosi, où l'exploitation de l'étain et du zinc
par une compagnie nord-américaine fait vivre 25.000 personnes, est entourée
de pans de murs, de bâtisses délabrées, ruines et vestiges qui attestent son
étendue passée.
Les vallées fertiles des Andes — agriculture et élevage — trouvèrent le
marché de leurs produits tropicaux dans cette ville située au-dessus de la
limite en altitude des cultures. Les régions voisines très tôt créèrent des indust
ries annexes : cuirs, cordages, luminaire, alimentation, coca, tissus. Lima
envoyait les produits de la métropole, tissus de luxe, vins, huile. Le reste de
l'Europe était représenté surtout par des toiles, car, comme dans toute
économie dirigée, il y avait un marché noir et une contrebande prospère et,
en plus de la voie officielle suivie par l'argent de la Couronne d'Espagne, très
tôt l'interlope relia Potosi à travers le Tucumán et la Pampa par Buenos-Aires,
plus tard par le détroit de Magellan, à la France, à la Hollande, au Portugal, à
l'Angleterre (6i\b).
On évalue le volume d'argent ainsi détourné à un montant égal à celui de
la production officielle et contrôlée.
Grâce à Potosi, le Haut-Pérou, cette steppe d'une altitude moyenne de
3.000 m., devint la région la plus riche et la plus peuplée d'Amérique du Sud.
Potosi était la fourmilière où convergeaient, en un va-et-vient perpétuel, beau
coup plus intense que ne le laisseraient supposer l'énormité des parcours et la
faible densité de la population, les longues caravanes qui, de toutes les direc
tions, y transportaient en abondance denrées et tissus ; Potosi était non seul
ement le grand marché de consommation, mais encore le centre de distribution,
de ravitaillement, de répartition pour tous les bassins miniers du Haut-Pérou, A LA FIN DU XVIIIe SIECLE 23 POTOSÍ
le sommet du grand courant commercial sur l'axe de la route qui relie le Paci
fique à l'Atlantique.
En retour de ce nécessaire et de ce superflu, le Cerro devint le château
d'eau d'où les flots d'un Pactole, richesse unique et essentielle de cette terre
disgraciée, bouleversèrent l'économie agraire et pastorale héritée de l'Empire
inka et transformèrent par une action à longue distance, à travers l'Espagne,
la vie de la vieille Europe mondée d'argent 7.
A la fin du xvine siècle, ces perspectives internationales s'étaient estompées
et Potosi n'était plus que la place la plus active de commerce entre Lima et
Buenos-Aires.
I. — Le manuscrit.
Les descriptions de Potosi sont très nombreuses dans les sources de l'histoire
du Pérou colonial. A toutes les époques, les voix les plus diverses ont ajouté
leur note au concert de surprise et d'admiration que suscitait ce paradoxe
vivant. Mais ces quelques pages, ces quelques chapitres n'en donnent que des
vues fragmentaires. Il faut attendre la fin du xvine siècle pour découvrir un
ouvrage synthétique où l'auteur affirme son intention d'étudier le Potosi de
tous les temps sous tous ses aspects. Cette étude d'une extrême importance
se trouve aux Archives des Indes à Seville, dans un manuscrit encore inédit,
dont le titre est solennel :
Description geografica, /Histórica, fisica, y politico, jde la Villa Imperial /y
cerro rico de Potosi, /y de los Partidos de Porco, Chayanta, Chichas, ô Tarija,
Lipes, y Atacama./Con un Diseur so Preliminar, donde se mani fiesta el E stádo
politico jde esta Villa desde su fundación, bašta él présente /con las Providencias
dictadas para su buen regimen, y novedades executadas en su Govierno./Se trataj
de los Minérales y demds producciones de esta Provincia explicando el origen,
Jurisdiction, y Economia de la Super-Intendencia de la Real Mita, Casa de
Moneda, Minas y Banco de Rescates que se hallan unidas

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