Rapport d étude sur les taux de change
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2004 CELLULE D’INTÉLIGENCE ÉCONOMIQUE LES EFFETS D’UNE VARIATION DU TAUX DE CHANGE SUR LE SECTEUR QUÉBÉCOIS PORCIN : LE RÔLE DU PROGRAMME ASRA Aïcha Coulibaly, Bruno Larue et Olivier Bonroy. RÉSUMÉ Le poids important des exportations québécoises de viande de porc ainsi que la complexité de l’organisation du secteur québécois porcin nous ont amené à nous interroger sur l’impact qu’un changement de la valeur de la monnaie canadienne par rapport à la monnaie américaine pourrait avoir sur les prix, les quantités produites et exportées, ainsi que les profits des acteurs de la filière. Théoriquement, une dépréciation du dollar canadien va entraîner une augmentation du coût de production des fournisseurs d’intrants, et va augmenter le prix de vente de la viande de porc. Même si ces deux effets sont opposés, leur effet net devrait augmenter les quantités produites dans la filière, les prix, et par conséquent les profits des différents acteurs. Cependant, les caractéristiques du marché québécois porcin influencent fortement l’impact d’une variation du taux de change. Nous démontrons dans cette étude que le programme ASRA de soutien des revenus sur le marché de la production annihile les effets d’une variation du taux de change sur les profits des transformateurs mais également des autres acteurs de la filière. Ainsi, un prix ASRA supérieur au prix du marché empêche les transformateurs, mais également les autres acteurs de la filière, ...

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 2004
 CELLULE D’INTÉLIGENCE ÉCONOMIQUE    LES EFFETS D’UNE VARIATION DU TAUX DE CHANGE SUR LE SECTEUR QUÉBÉCOIS PORCIN : LE RÔLE DU PROGRAMME ASRA   Aïcha Coulibaly, Bruno Larue et Olivier Bonroy.    RÉSUMÉ  Le poids important des exportations québécoises de viande de porc ainsi que la complexité de l’organisation du secteur québécois porcin nous ont amené à nous interroger sur l’impact qu’un changement de la valeur de la monnaie canadienne par rapport à la monnaie américaine pourrait avoir sur les prix, les quantités produites et exportées, ainsi que les profits des acteurs de la filière. Théoriquement, une dépréciation du dollar canadien va entraîner une augmentation du coût de production des fournisseurs d’intrants, et va augmenter le prix de vente de la viande de porc. Même si ces deux effets sont opposés, leur effet net devrait augmenter les quantités produites dans la filière, les prix, et par conséquent les profits des différents acteurs. Cependant, les caractéristiques du marché québécois porcin influencent fortement l’impact d’une variation du taux de change. Nous démontrons dans cette étude que le programme ASRA de soutien des revenus sur le marché de la production annihile les effets d’une variation du taux de change sur les profits des transformateurs mais également des autres acteurs de la filière. Ainsi, un prix ASRA supérieur au prix du marché empêche les transformateurs, mais également les autres acteurs de la filière, de bénéficier d’une dépréciation du dollar canadien. Toutefois, le prix ASRA les protège d’une appréciation du dollar canadien. En outre, nous démontrons qu’un environnement avec ASRA favorise les transformateurs, même si ces derniers ont un pouvoir de marché potentiel. En effet, le programme ASRA, a un effet bénéfique pour les transformateurs parce qu’il incite les producteurs à produire davantage, ce qui se traduit par un prix payé par les transformateurs inférieur à celui qu’ils paieraient dans un environnement sans ASRA.
 
 
  
1. Introduction L’industrie porcine génère 20 % du revenu total de l’industrie agroalimentaire québécoise. 1 C’est une industrie qui se caractérise par un marché vertical fortement intégré de l’amont vers l’aval (40 % de la production est contrôlée par les fournisseurs d’intrants) et par une politique de soutien de revenu dans le marché de la production communément appelée programme ASRA (programme d’Assurance Stabilisation de Revenu Agricole). En outre, l’industrie porcine québécoise est fortement tournée vers les marchés d’exportation, la moitié de sa production (soit 33 % des exportations canadiennes de viande de porc) est exportée 1 . Ces exportations sont essentiellement destinées au marché américain. Ainsi, le poids important des exportations québécoises dans la production totale et la complexité de l’organisation de ce secteur nous amène à nous interroger sur l’impact qu’un changement de la valeur de la monnaie canadienne par rapport à la monnaie américaine pourrait avoir sur les prix ainsi que sur les quantités produites et exportées. Théoriquement, une dépréciation du dollar canadien (c’est-à-dire une augmentation du taux de change $CAN/$US) va entraîner deux effets:  Un effet coût : La matière première des meuniers est soit importée, soit en concurrence avec des produits importés, une dépréciation du dollar canadien augmente le coût de production des meuniers et par conséquent le prix des intrants pour les producteurs de porcs vivants. Cette hausse se répercute dans toute la filière par son effet sur l’offre de porcs vivants.  Un effet demande : Comme les transformateurs vendent au prix mondial, une dépréciation du dollar canadien augmente le prix de vente de la viande, en dollars canadiens, ainsi que la demande de porcs vivants. Même si ces deux effets sont opposés, leur effet net devrait augmenter les quantités produites dans la filière, les prix, et par conséquent les profits des différents acteurs. Cependant, la présence de pouvoir de marché, d’intégration verticale et du programme ASRA va influer sur ces deux effets, et remettre en cause l’effet attendu d’une dépréciation du dollar canadien. De nombreux travaux ont notamment montré que la structure du marché, le degré d’intégration ainsi que l’importance relative des intrants importés par rapport aux intrants produits localement
                                                 1 Confère AAFC(2003), ISQ(2003), FPPQ et Stratégis.
 
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influencent fortement l’impact du taux de change sur les prix et les quantités produites le long de la filière (Jabara et Schwartz, 1987, Dornbusch, 1987, Feinberg, 1989, et Yumkella et al., 1994). L’objectif de la cellule d’intelligence économique est d’analyser les impacts d’une variation du taux de change à court terme ainsi qu’à long terme sur l’industrie porcine québécoise, ceci en prenant en compte les différentes caractéristiques de la filière : fournisseurs d’intrants intégrés sur le marché de la production, existence du programme ASRA qui détermine le prix et indirectement la quantité mise en marché sur le marché de la production, et un marché de la transformation concentré. En outre, afin de voir si le programme ASRA constitue un avantage ou un inconvénient pour les transformateurs, nous analyserons également l’impact d’une variation du taux de change dans le cas où le programme ASRA n’existerait pas. Nous considèrerons alors trois scénarios pouvant apparaître dans un environnement sans programme ASRA : 1) les fournisseurs d’intrants intégrés verticalement sur le marché des producteurs ont du pouvoir de marché, 2) les transformateurs ont du pouvoir de marché, et 3) aucun intervenant dans la filière n’a plus de pouvoir de marché qu’un autre. La section suivante présente en détail les caractéristiques du secteur porcin québécois. La section trois décrit le cadre opératoire de l’étude. La quatrième section présente les résultats de l’étude. Finalement, la dernière section résume les principaux impacts pour l’industrie québécoise de transformation porcine d’une variation du taux de change.  2. Description des caractéristiques du secteur porcin québécois. L’industrie porcine québécoise joue un rôle important sur la scène canadienne. Ainsi, d’une part, le Québec est le premier producteur de porcs au Canada avec plus de 33 % de la production nationale, et, d’autre part, les exportations québécoises représentent 33 % des exportations canadiennes soit environ 7 % des exportations mondiales. Remarquons que 42 % de la production québécoise est exportée, ce qui génère des revenus de 732 millions $CAN. En outre, les États-Unis sont le principal marché d’exportation des produits porcins québécois avec 55 % de nos exportations (en valeur ) 1  s . La filière porcine s’articule autour de trois principaux marchés : les transformateurs, les producteurs et les meuniers fournisseurs d’intrants. Comme nous le verrons par la suite, les caractéristiques de ces marchés, qui se distinguent à la fois par leur structure et leurs stratégies
 
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respectives de mise en marché, jouent un rôle important dans l’analyse des variations du taux de change sur la performance de la filière. Ainsi, un soin particulier a été déployé afin de les détailler. 1.  Le marché de la transformation se caractérise par une forte concentration. La plus grande entreprise abat près de 55 % de la production et les quatre plus grandes se partagent environ 80 % de la production (Larue et al., 2000). Un projet de fusion entre les deux plus grandes entreprises a été mis de l’avant et est en attente d’une décision du bureau de la concurrence du Canada. La nouvelle entité contrôlerait alors plus de 70 % du marché. De plus, les prix reçus par les transformateurs sont étroitement liés au prix américain. Le poids du Québec sur le marché international est faible et d’autre part, le commerce de la viande de porc entre les deux pays est fortement intégré (Brester et al., 2002). 2.  Le marché de la production, contrôlé par plus de 3000 producteurs porcins 2 , est considéré comme un marché concurrentiel (aucun producteur ne possède un pouvoir de marché plus important qu’un autre). La mise en marché des porcs vivants est collective et gérée par la Fédération de Producteurs de Porcs du Québec (FPPQ). Ce système de mise en marché, par lequel passent tous les porcs produits au Québec, est un système hybride à travers lequel 50 à 55 % des porcs sont pré-attribués aux abattoirs en tenant compte de l’historique de leur part de marché. Les porcs sont vendus à un prix étroitement lié au prix américain. Le reste de l’offre est partagé entre la vente à contrat par soumission (où les prix sont également liés au prix américain) et la vente par enchère électronique où le prix est fixé par le jeu de l’offre et de la demande. 2 Les producteurs bénéficient d’un programme de soutien de revenu communément appelé programme ASRA (Assurance Stabilisation du Revenu Agricole) qui est décrit en détail dans l’article de Romain et Calkins (1996). Ainsi lorsque le prix du marché est inférieur au prix de soutien (plus communément appelé « prix ASRA »), les producteurs reçoivent le prix de soutien. Remarquons que, comme le prix ASRA est généralement supérieur au prix américain, les producteurs n’ont pas d’incitation à exporter leur production (Larue et al., 2000). 3.  Le marché des meuniers, chargé de l’approvisionnement des producteurs en alimentation animale, est fortement intégré au marché des producteurs. On distingue deux types d’intégration : une intégration complète et une intégration partielle.                                                  2 Ces informations ont été obtenues sur le site web de la FPPQ.
 
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 Dans le cas d’intégration complète, les fermes sont la propriété des meuniers, ainsi les meuniers sont propriétaires des animaux, des bâtiments, et sont également fournisseurs d’intrants (moulée, truies et porcelets pour les naisseurs, les finisseurs ou les naisseurs-finisseurs). En outre, ils sont responsables de l’encadrement technique qui est très diversifié (nutritionniste, vétérinaire, représentation technique : génétique, alimentation, environnement, application des normes HACCP, méthode de travail, régie), et prennent en charge le transport des animaux jusqu’aux abattoirs.
 Dans le cas d’intégration partielle, le producteur et le meunier sont co-propriétaires des fermes. Les meuniers sont souvent propriétaires des bâtiments et des sols alors que les producteurs possèdent les animaux. Les meuniers sont responsables de l’application des normes et pratiques environnementales (PAEF, ententes d’épandage si nécessaire). Ces fournisseurs intégrés sur le marché des producteurs produisent 40 % de la production de porcs vivants (Lacroix, 2002). Ainsi, comme ils bénéficient de coûts d’intrants plus faibles que ceux des autres producteurs, ils pourraient, dans un environnement sans programme ASRA, avoir un pouvoir de marché plus important que les producteurs non intégrés 3 . Enfin, remarquons que, sur le marché de l’alimentation, la fabrication des aliments nécessite l’utilisation de maïs grain dont le prix de référence est le prix de la bourse de Chicago (MAPAQ, 2004, p.24). Comme le poids du Québec dans les échanges internationaux de maïs grain est faible, il est à ce titre considéré comme un preneur de prix (son comportement sur les marchés internationaux n’influence pas les prix mondiaux). Le Québec est aujourd’hui un exportateur net de viande porcine avec 42 % de sa production qui est destinée au marché international. Cependant en 1970, le Québec était une province déficitaire, il importait l’équivalent de 104 700 000lbs (Karantininis et al., 1995, p.1207). L’expansion de la production porcine québécoise a été expliquée de différentes manières par les chercheurs. En effet, Clément et Carter (1984) attribuent cette expansion aux politiques fédérales et provinciales mises en place afin de soutenir le revenu des producteurs et favoriser la mise en marché de leurs produits. Par contre, Coffin et al. (1992) soutiennent que cette explosion de la production porcine québécoise n’est pas due aux subventions gouvernementales mais plutôt aux facteurs du marché. Cette explosion s’inscrit donc dans un mouvement général d’expansion qui a caractérisé                                                  3 Cette situation est également considérée dans notre analyse (voir le scénario 2 présenté dans la section 4).
 
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l’industrie porcine Nord américaine. Karantininis et al. (1995) révèlent qu’une étude des firmes de consultation SCI et Deloitte et Touche confirment les résultats de Coffin et al. en établissant que le succès qu’a connu l’industrie porcine québécoise a été lié à l’intérêt des transformateurs à s’orienter vers les marchés d’exportation, à leurs innovations continues en matière de développement technologique et à la prépondérance de la coopération verticale. Karantininis et al. (1995) mentionnent également que la production sous contrat a joué un rôle important dans le développement de l’industrie. Cette dernière affirmation est appuyée par Gillepsie et al. (1995) qui expliquent que l’expansion de la production porcine québécoise a été surtout liée à l’organisation verticale de l’industrie.  3. Présentation du cadre opératoire de l’étude Pour analyser comment une variation du taux de change affecte toute l’industrie porcine québécoise, la cellule d’intelligence économique a construit un programme mathématique (appelé « modèle d’équilibre partiel »). Le modèle se compose horizontalement d’un seul secteur de production (secteur du porc) et verticalement, des fournisseurs d’intrants, des producteurs et des transformateurs. L’avantage d’une telle étude est la prise en compte de l’interdépendance entre tous les marchés au niveau de la filière porcine, et des caractéristiques propres à chaque marché (fournisseurs d’intrants intégrés sur le marché de la production, existence du programme ASRA qui détermine le prix et indirectement que la quantité mise en marché sur le marché de la production, et un marché de la transformation concentré). La méthode usuellement adoptée par les économistes pour le chiffrage des modèles d’équilibre partiel est une méthode déterministe de calibrage. La première étape de cette procédure consiste à construire une base de données pour toutes les variables incluses dans le modèle. A cette fin, nous avons choisi comme année de référence l’année 2003. Ce travail nécessite d’une part un travail de recherche des données et d’autre part un travail de transformation des données, ceci afin de les harmoniser pour les rendre exploitables.  Marché de la transformation Le prix et la quantité demandée sur le marché de la transformation ont été obtenus à partir de données disponibles sur le site d’Agriculture et Agroalimentaire Canada dans la section des viandes rouges. Le prix que reçoivent les transformateurs correspond à la moyenne pondérée des
 
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prix des principales coupes de viande de porcs sur le marché de gros de Montréal. Les coupes dont les prix ont été considérés sont les suivantes : le jambon régulier, la longe, la coupe style Montréal et la flanc couenne. Ce prix est le prix net (sans les coûts de transport) reçu par les transformateurs puisque ces derniers vendent leurs produits sur le marché de gros de Montréal. Considérant l’hypothèse du petit pays, nous avons ensuite divisé ce prix par le taux de change afin de le ramener au prix mondial exprimé en dollar américain. Le taux de change utilisé correspond à la moyenne des taux de change mensuels, en chiffres nominaux, obtenus sur le site de la Banque du Canada. Il représente le rapport du dollar canadien par le dollar américain. Pour établir la quantité que les transformateurs vendent sur le marché québécois, nous avons soustrait à la production totale les exportations nettes ainsi que les variations de stocks.  Marché de la production Le prix ASRA et le prix d’achat de la moulée proviennent de la revue MensuelPorc 4 rédigée par le Centre de développement du porc de Québec Inc. Ces deux prix étant initialement exprimés en $/porc ont été convertis en $/kg en divisant le montant par le poids moyen carcasse. Le poids moyen carcasse exprimé en kg/porc provient de la revue MensuelPorc 5 produite par le Centre de développement du porc de Québec Inc. Selon le règlement sur la vente de porc 6 , ce poids est celui d’un porc abattu, débarrassé du poil, des ongles, du tube digestif, du foie, de la rate, de l'appareil génital et des organes génitaux, du cœur, des poumons et des glandes salivaires. Le prix d’achat du porc vivant ainsi que la quantité produite sur le marché de la production ont été calculés à partir des données disponibles dans la section « prix du porc hebdomadaire » du site de la Fédération des producteurs de porcs du Québec (FPPQ). Le prix d’achat du porc vivant utilisé correspond à la moyenne des prix moyens hebdomadaires. Ces derniers représentent le prix pondéré hebdomadaire des porcs vendus par pré-attribution, par enchères et par soumission durant les quatre semaines complètes précédant l'offre de vente par soumission 6 . Les données fournies par la FPPQ sur la quantité produite sont exprimées en nombre de têtes, et correspondent à la moyenne des quantités produites mensuellement. Ainsi, afin de pouvoir les utiliser, nous les avons converties en kg en les multipliant par le poids moyen carcasse.
                                                 4 Mensuel d’information du 6 avril 2004 5 Rapport du 6 avril 2004 6 Le règlement sur la vente de porc de la Loi sur la mise en marché des produits agricoles se trouve à l’adresse suivante : http://www.canlii.org/qc/legis/regl/m-35r.113.1.1/20041104/tout.html
 
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Nous supposons que la quantité produite sur le marché de la production équivaut également à la quantité demandée et produite par les transformateurs, compte tenu la convention entre la FPPQ et les transformateurs.  Marché de la moulée Le prix d’achat du grain a été calculé en se basant sur les formules de fabrication de la moulée conçue par le MAPAQ (Ministère de l’Agriculture, des Pêches et de l’Alimentation de Québec). La formule considérée est la formule numéro 3 utilisée pour les porcs à l’étape de finition 7 . Cette formule a été choisie car elle est similaire à la formule utilisée pour la fabrication industrielle de la moulée. Dans cette formule, le maïs grain est utilisé à 80 % ce qui fait de lui l’intrant principal. À ce titre, nous avons considéré qu’il constituait le principal coût des meuniers pour la fabrication de la moulée. Ce prix d’achat a été ensuite divisé par le taux de change afin de le ramener au prix mondial exprimé en dollar américain.  4. Présentation des résultats de l’étude Afin d’analyser l’impact d’une variation du taux de change sur la filière porcine, plusieurs scénarios ont été étudiés. Le scénario 1 , est un scénario de référence, il représente la situation actuelle de la filière. Comme nous l’avons vu, cette représentation se caractérise i) par une forte concentration des fournisseurs d’intrants (l’alimentation) : les fermes sont de plus en plus grosses, de moins en moins nombreuses, et très intensives en capital ; ii) par une intégration de certains des fournisseurs d’intrants sur le marché en aval : une firme peut être à la fois impliquée dans l’alimentation animale et dans la production d’animaux ; et iii) par un secteur de la transformation fortement concentré. Sans politique de prix, les fournisseurs intégrés (respectivement les transformateurs) pourraient profiter de leur position pour influencer le prix du porc vivant à la hausse (respectivement à la baisse), mais l’existence de politique de soutien des prix aux agriculteurs (prix ASRA pour la filière québécoise de porc) fixe le prix du porc reçu par les agriculteurs et, par conséquent, l’offre intérieure. Ainsi, le scénario 1 est caractérisé par des fournisseurs intégrés                                                  7 Les formules diffèrent en fonction du stade de croissance du porc. Cependant, dans notre modèle, étant donné que nous avons considéré les porcs prêts à être vendus aux transformateurs pour fin d’abattage, nous avons considéré les formules des porcs à l’étape de finition.
 
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et des transformateurs concentrés qui ne peuvent pas influencer le volume de porcs vivants, celui-ci étant dicté par le prix ASRA (il est en effet supérieur au prix du marché qui prévaudrait sans le programme ASRA). Le scénario 1 est en fait un modèle constitué d’équations mathématiques calibrées pour répliquer d’aussi près que possible les prix et les quantités produites, consommées et exportées qui ont été observées pour l’année de référence 2003. Les logiciels Mathematica 5 et Maple 9.0 ont été utilisés pour la réalisation des simulations et des calculs des gains et des pertes découlant de l’analyse des scénarios retenus. Afin d’analyser comment les politiques internes influencent l’impact des variations du taux de change, nous considérons également trois scénarios sans ASRA :
 Scénario 2 : Les intégrateurs ont un pouvoir de marché. Comme nous avons vu dans la section 2, les fournisseurs d’intrants sont fortement intégrés dans le marché de la production. Ils représentent 40 % de la production de porcs vivants. Comme ces fournisseurs intégrés sur le marché des producteurs bénéficient de coûts d’intrants plus faibles que ceux des autres producteurs, ils possèdent un pouvoir de marché potentiellement plus important que celui des producteurs non intégrés. Dans un environnement avec ASRA, ils ne peuvent pas utiliser ce pouvoir de marché, en effet, le prix ainsi que la quantité mis en marché sont dictés par le programme ASRA. Cependant, dans un environnement sans ASRA, il est tout à fait probable que ces fournisseurs intégrés puissent bénéficier de cet avantage et influencer le prix du porc vivant à la hausse
 Scénario 3 : Les transformateurs concentrés ont un pouvoir de marché. Comme les transformateurs sont fortement concentrés, ils possèdent un pouvoir de marché sur le marché des producteurs, ils peuvent ainsi influer sur le prix d’achat du porc vivant. Dans un environnement avec ASRA, les transformateurs n’ont pas à se servir de ce pouvoir de marché, car la mise en marché du porc vivant est conditionnée par le programme ASRA. Cependant, dans un environnement sans ASRA, il est tout à fait probable que les transformateurs puissent utiliser ce pouvoir de marché afin d’influencer le prix du porc vivant à la baisse.
 Scénario 4 : Aucun acteur n'a un pouvoir de marché plus important qu’un autre acteur. Dans ce scénario nous supposons qu’aucun des acteurs ne peut bénéficier d’un pouvoir de
 
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marché. Ce scénario est différent de celui avec ASRA, dans le sens où les prix sont simplement dictés par l’équilibre entre l’offre et de la demande. Dans le scénario 1, l’existence d’un prix ASRA neutralise en grande partie les effets d’une dépréciation à long terme du dollar canadien (voir Tableau 1). Les profits des différents acteurs dans la filière (intégrateurs, producteurs et transformateurs) ne varient pas suite à une augmentation du taux de change. Or, comme les transformateurs vendent au prix mondial, ils devraient bénéficier d’une dépréciation du dollar canadien, c’est-à-dire d’une hausse du taux de change (comme c’est le cas pour les autres scénarios, Tableaux 2, 3 et 4). Pourquoi un tel effet ? Sans prix ASRA, une dépréciation du dollar canadien a deux effets opposés :
 Un effet coût : Comme la matière première est soit importée, soit en concurrence avec des produits importés, une dépréciation du dollar canadien augmente le coût de production des fournisseurs d’intrants et par conséquent le prix des intrants. Cette hausse se répercute dans toute la filière parce qu’elle a une incidence sur l’offre de porcs vivants.
 Un effet demande : Comme les transformateurs vendent au prix mondial, une dépréciation du dollar canadien augmente le prix de vente de la viande (en dollars canadiens) et la demande de porcs vivants. Le degré de report du taux de change est complet puisque les transformateurs sont preneurs de prix sur le marché d’exportation. Globalement, l’effet demande est plus important que l’effet coût. Ainsi, une augmentation du taux de change augmente les quantités produites dans la filière, les prix, et par conséquent les profits des différents acteurs (Tableaux 2, 3 et 4) 8 . Avec l’ASRA, une dépréciation du dollar canadien va à long terme entraîner un ajustement à la hausse du prix ASRA 9 . Cet ajustement couvrant exactement la hausse du prix des intrants, la quantité produite de porcs vivants n’augmente pas. Comme la quantité produite de porcs vivants est constante, la hausse du prix de vente de la viande couvre exactement la hausse du prix du porc vivant, le profit des transformateurs reste constant (Tableau 1). Remarquons qu’à court terme, le
                                                 8  Si l’effet demande était plus faible que l’effet coût, seuls les prix auraient augmenté, les quantités ainsi que les profits des acteurs de la filière auraient diminué. 9  En effet, le prix ASRA étant par définition un prix couplé au coût variable d’un producteur représentatif, un accroissement du coût variable induit éventuellement une augmentation du prix ASRA. Or, une augmentation du taux de change augmente le prix des intrants et par conséquent le coût variable du producteur représentatif. C’est pourquoi le prix ASRA s’ajuste alors à la hausse (+0.7 %, Tableau 1).
 
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prix ASRA ne s’ajustant pas, la hausse du prix des intrants entraîne une baisse de l’offre de porc vivant. Cette baisse contraint l’offre de viande des transformateurs et ceux-ci ne peuvent pas bénéficier de la hausse du prix mondial, leur profit diminuant légèrement (-1.2 %, Tableau 1). Ainsi, un prix ASRA supérieur au prix du marché empêche les transformateurs, mais également les autres acteurs de la filière, de bénéficier d’une dépréciation du dollar canadien. Toutefois, le prix ASRA les protège d’une appréciation du dollar canadien. En effet dans un environnement sans ASRA, une diminution du taux de change diminuerait les quantités produites dans la filière, les prix, et par conséquent les profits des différents acteurs. Curieusement, si nous comparons le profit des transformateurs dans le scénario 1 (avec ASRA) avec celui obtenu dans les scénarios 2, 3 et 4 (sans ASRA), nous nous apercevons que la présence d’un prix ASRA est bénéfique aux transformateurs (Tableau 5). Si ce résultat est compréhensible lorsque les transformateurs n’ont pas de pouvoir de marché (Tableau 5, scénarios 2 et 4), il est moins intuitif lorsque ces derniers ont la possibilité d’influencer fortement le prix du porc vivant. Il existe deux raisons expliquant ce résultat. Premièrement, dans un environnement sans prix ASRA et avec un pouvoir de marché des transformateurs (scénario 3), les transformateurs influencent le prix du porc vivant à la baisse, mais leur capacité à faire baisser le prix est limitée. En effet, ils ne peuvent pas acheter le porc vivant à un prix inférieur au prix mondial (1.52, Tableau 5). Ainsi le pouvoir de marché des transformateurs est contraint par la possibilité d’exportations de porcs vivants au prix mondial ajusté par des coûts de transport. Deuxièmement, l’existence d’un prix ASRA permet aux transformateurs de payer un prix pour le porc vivant inférieur au prix reçu par les producteurs (ces derniers recevant le prix ASRA). Ce mécanisme permet aux transformateurs de bénéficier d’un prix inférieur à celui du marché mondial (1.441 contre 1.520, Tableau 5), ce qui se traduit par un profit plus élevé dans le scénario avec ASRA que dans le scénario 3 (9.952 centaines de millions de dollars canadiens contre 9.066, Tableau 5). L’ASRA permet aux transformateurs de bénéficier d’un bas prix sans devoir réduire leur achat/capacité.  5. Conclusion et discussion Le poids important des exportations québécoises de viande de porc ainsi que la complexité de l’organisation du secteur québécois porcin nous ont amené à nous interroger sur l’impact qu’un
 
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