Témoignage : de l espace communautaire à l espace public dans le champ intellectuel - article ; n°4 ; vol.20, pg 21-36
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Description

Sciences sociales et santé - Année 2002 - Volume 20 - Numéro 4 - Pages 21-36
16 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié le 01 janvier 2002
Nombre de lectures 27
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Antoinette Chauvenet
Témoignage : de l'espace communautaire à l'espace public
dans le champ intellectuel
In: Sciences sociales et santé. Volume 20, n°4, 2002. pp. 21-36.
Citer ce document / Cite this document :
Chauvenet Antoinette. Témoignage : de l'espace communautaire à l'espace public dans le champ intellectuel. In: Sciences
sociales et santé. Volume 20, n°4, 2002. pp. 21-36.
doi : 10.3406/sosan.2002.1568
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/sosan_0294-0337_2002_num_20_4_1568Sciences Sociales et Santé, Vol. 20, n° 4, décembre 2002
Témoignage : de l'espace
communautaire à public
dans le champ intellectuel
Antoinette Chauvenet*
L'environnement institutionnel et scientifique
de la sociologie de la santé lors de la création de la revue
La plupart des membres du groupe de réflexion pluridisciplinaire
constitué en 1979 et à l'origine de la création de la revue Sciences Sociales
et Santé s'étaient lancés, au cours de la décennie précédente, dans des
recherches portant sur le champ de la santé à une époque où très peu
d'études, du moins en sciences sociales et en France, existaient. Citons
parmi les études pionnières en sociologie celles d'Haroun Jamous (1967)
et de Claudine Herzlich (1969).
L'essentiel de ces recherches avait été non seulement financé mais
impulsé par le CORDES (1), une émanation du Commissariat général au
plan (CGP) auquel participaient d'ailleurs les directeurs des centres dans
lesquels nous travaillions. C'était le cas de notre centre, puisqu' Alain
Touraine y défendait de tout son poids les projets de recherches que nous
présentions sous sa direction. Dans les années postérieures aux événe-
* Antoinette Chauvenet, sociologue, CEMS-CNRS, EHESS, 54, boulevard Raspail,
75006 Paris, France. Ce texte a été élaboré à partir d'un entretien avec Doris Bonnet et
Janine Pierret.
( 1 ) Comité d'organisation de recherches appliquées sur le développement économique
et social, crée en 1969 (Fraisse, 1981). ANTOINETTE CHAUVENET 22
ments de 1968, les travaux de sciences sociales dans le domaine de la
santé comme dans celui de la recherche urbaine — avec le Plan urbain —
étaient effectués par une nouvelle génération de chercheurs (une douzaine
de personnes ont été recrutées par Touraine en deux ans, par exemple).
Nous étions rémunérés par des contrats, alors que les postes au CNRS
étaient en nombre infime (un poste, deux postes, voire zéro poste selon les
années) ; l'existence même des centres dépendait donc étroitement de ces
contrats tout comme les objets sur lesquels nous travaillions.
L'intérêt du CGP pour la santé et les questions sociales était relat
ivement nouveau. Auparavant, la politique de population, de reconstruc
tion urbaine et la planification économique avaient mobilisé ses forces.
L'attention portée par le CGP à la santé et aux questions sociales — par
exemple, les travaux préparatoires à la loi de 1975 sur le handicap — se
situe à un moment qui est aussi celui du chant du cygne de cet organisme
comme lieu central d'impulsion des politiques à moyen et long terme, en
amont des administrations. Un des aspects les plus intéressants de son
fonctionnement était sans doute la procédure qui consistait à rassembler
« les partenaires sociaux » autour des grandes questions d'intérêt général.
Il faut souligner aussi que le déclin du rôle du CGP est concomitant de
celui de la place des salariés dans la gestion et la définition des politiques
de la Sécurité sociale (Ordonnances de 1967).
Le déclin du CGP s'est fait au profit des administrations, celle de la
santé en particulier, et des gestionnaires au détriment des partenaires
sociaux. Cette administration se développait et occupait une place crois
sante au sein du gouvernement dans une configuration politique fort dif
férente, où les préoccupations de gestion plus immédiates et de limitation
des dépenses de santé devenaient de plus en plus insistantes.
C'était aussi la fin des trente glorieuses et c'est à l'époque du Ve plan
qu'est né le discours de l'administration, soutenu par celui des représent
ants du patronat, selon lequel les dépenses pour la santé commençaient à
avoir des rendements décroissants sur l'état de santé de la population. Par
ailleurs, la réforme Debré (2) qui visait à réorganiser les hôpitaux publics
était en cours d'application et le mot d'ordre dominant dans les différentes
administrations directement concernées était alors celui de la « rationali
sation » : par exemple, l'application de la RCB, — la rationalisation des
choix budgétaires — à des programmes de santé publique. Dans ce
contexte, il n'était pas surprenant que certains appels d'offre aient porté
sur l'organisation des hôpitaux, sur les pratiques médicales et sur la sécur
ité sociale...
(2) La réforme Debré votée en 1958 (Jatnous, 1967). ESPACE COMMUNAUTAIRE, ESPACE PUBLIC 23
Dans ces années là, un nombre important de chercheurs était issu de
la sociologie du travail, des professions et des organisations (Naville,
Touraine, Crozier, Reynaud, Tréanton notamment). Rien de plus logique
dans ces conditions que certaines des premières recherches dans le champ
de la santé aient emprunté aux divers courants de la sociologie du travail
leurs problématiques, leurs résultats et leurs méthodes pour étudier l'hô
pital. Lorsque je suis entrée dans le centre que dirigeait Touraine, celui-ci
s'appelait le Laboratoire de sociologie industrielle. Il devait, quelques
mois plus tard et dans la suite des événements de 1968, abandonner ce titre
pour se nommer le Centre d'étude des mouvements sociaux. Lorsque nous
avons travaillé, Jacques Saliba, François Steudler et moi-même, sur les
hôpitaux de l'Assistance publique (1969-1973), notre point de départ
consistait à considérer l'hôpital comme une entreprise, comme une orga
nisation. Ma propre étude visait à analyser les rapports entre professions
et organisation, la division technique, la division sociale et les processus
de spécialisation du travail dans le cadre de l'hôpital pris comme unité
d'analyse, et d'étudier leurs effets sur les métiers hospitaliers, les profes
sions de médecins et d'infirmières, en particulier la hiérarchie informelle
de positions qui en résultait. La principale méthode utilisée avait été l'ob
servation, complétée par des entretiens. Dans ces années là, d'ailleurs, la
critique des méthodes quantitatives en sociologie battait son plein. Mes
collègues se sont surtout intéressés à l'étude de l'administration de
l'Assistance publique tandis que je me centrais davantage sur une socio
logie du travail. Ma recherche suivante a porté sur le système d'accès aux
soins de la population d'un département géographique, en relation avec
une analyse de la hiérarchie des différents services et institutions de soin
de ce département. Elle répondait à une demande du CORDES qui faisait
l'hypothèse de l'existence de « filières de soins ». Ces deux exemples
montrent l'articulation étroite qui pouvait exister entre la demande sociale
et des objets de recherche scientifique.
La création de notre groupe de réflexion correspond à une conjonct
ure différente de celle de nos débuts dans la recherche sur la santé. Ce
champ avait derrière lui un certain nombre de travaux plus ou moins
cumulatifs, les orientations scientifiques et les objets de la discipline
sociologique se diversifiaient. Y contribuaient la croissance du nombre
des sociologues et surtout de nouveaux questionnements. Parallèlement,
le poids de la sociologie du travail et des organisations déclinait. Je pense,
par exemple, à Bernard Mottez (1982), longtemps investi dans la sociolo
gie du travail, et qui étudiait alors la surdité, rompant avec l'approche
médicale dominante, en mettant en lumière l'existence d'une culture
propre à la population sourde. Bien d'autres exemples de nouvelles orien- ANTOINETTE CHAUVENET 24
tations sociologiques et de nouveaux questionnements pourraient être
cités pour illustrer ces déplacements transversaux dans la disciplin

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