Sur la loi monétaire de c. 212 (?) - article ; n°1 ; vol.13, pg 33-43
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Cahiers du Centre Gustave Glotz - Année 2002 - Volume 13 - Numéro 1 - Pages 33-43
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Publié le 01 janvier 2002
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Langue Français

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Monsieur Arnaud Suspène
Sur la loi monétaire de c. 212 (?)
In: Cahiers du Centre Gustave Glotz, 13, 2002. pp. 33-43.
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Suspène Arnaud. Sur la loi monétaire de c. 212 (?). In: Cahiers du Centre Gustave Glotz, 13, 2002. pp. 33-43.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ccgg_1016-9008_2002_num_13_1_1557Arnaud Suspène
SUR LA LOI MONÉTAIRE DE c. 212 (P)1
Le contexte
La monnaie d'argent romaine apparaît à la fin du quatrième siècle avant
notre ère. La première phase se clôt avec la réforme qui introduit le denier.
Pline place cette réforme en 269, mais l'archéologie aussi bien que les travaux
des numismates modernes le contredisent. On a en effet un terminus ante quem
donné par les fouilles de Morgantina2, cité détruite pendant la deuxième
guerre punique. Les monnaies d'argent qu'on y a retrouvées comportaient des
exemplaires du denier et de ses subdivisions. Ces monnaies étaient très peu
usées et représentaient des modèles du tout début de la série. Cette découv
erte a donc permis d'écarter Γ « hypothèse basse », c'est-à-dire postérieure
à la deuxième guerre punique, pour la datation de l'introduction du denier.
On donne généralement pour la réforme une date comprise entre 2143 et
plus probablement 2124, voire 211 5. Il est cependant extrêmement difficile
d'être précis, et des datations plus hautes conservent également des partisans6.
1 Ces réflexions ont été inspirées par le regain d'attention prêté actuellement à la législation
républicaine. Je remercie M.H. Crawford, J.-L. Ferrary et H. Zehnacker, qui ont lu des versions
antérieures de cet article, pour leurs conseils et leurs suggestions.
2 Voir T.V. Buttrey, « The Morgantina excavations and the date of the Roman Denarius »,
dans Atti del Congresso Internazionale di Numismatica, Roma 11-16 sept. 1961, Rome, 1965, p.
26 1-267. Voir aussi les travaux fondateurs de R.Thomsen {Early Roman Coinage. A study of the
chronology, I-III, Copenhague, 1957-1974).
3 Par exemple P. Marchetti, Histoire économique et monétaire de la deuxième guerre punique,
Bruxelles, 1978, p.301. Récemment, W.T. Loomis a proposé une date entre 215 et 211 (« The
introduction of the Denarius », dans R.W.Wallace et E.M. Harris éd., Transitions to Empire :
Essays in Greco-Roman History, 360-146 B.C., in honor ofE.Badian, Norman, 1996, p. 338-355).
4 A.Burnett, Coinage in the Roman World, Londres, 1987 ; H.Zehnacker, Moneta. Recherches sur
l'organisation et l'art des émissions monétaires de la République romaine (289-31 av.J.-C), Rome,
1973, p. 325-7. Voir aussi la synthèse proposée par J. Andreau (qui suit Marchetti), Banque et
affaires dans le monde romain, Paris, 2001, p. 205-211.
5 M.H. Crawford, Roman Republican Coinage, Cambridge, 1974 (abrégé par la suite RRC), p.
28-35 et Coinage and Money under the Roman Republic, Londres, 1985, p.55, qui n'écarte pas 212
cependant.
6 La majorité des historiens italiens en particulier semblent préférer une chronologie haute,
plus proche des indications de Pline. On dispose désormais sur la question de la précieuse syn
thèse historiographique de F. Ronchi, « II dibattito sulla data di introduzione del denario nella
moderna letteratura numismatica. Storiografia e analisi », RIN, 99, 1998, p. 39-88, qui donne
et commente toute la bibliographie, en analysant également la validité (et la fragilité) des dif-
Cahiers Glotz, XIII, 2002, p. 33-43 Arnaud Suspène 34
Le denier est accompagné de fractions d'argent (sesterce, quinaire, auxquels
s'ajoute une pièce d'argent supplémentaire : le victoriat), d'un monnayage
d'or, et d'un monnayage de bronze. L'ensemble constitue un système avec des
rapports fixes7 : les pièces d'or8 portent des marques de valeur (60, 40, 20), et
le denier vaut dix as de bronze. L'as de bronze qui existait auparavant dans une
version plus lourde devient sextantaire (au sixième de la livre) et constitue la
base du système. L'as est d'ailleurs d'usage plus fréquent que le denier jusqu'au
milieu du second siècle.
Or, la lecture de Pline nous incite à penser qu'on avait recours à une loi
pour introduire des changements dans la monnaie : par exemple loi Clodia
sur la réforme du victoriat, loi Papiria sur la réforme de l'as, et peut-être aussi
loi Livia sur la baisse du titre de l'argent9.
Les numismates ont donc logiquement postulé une loi en 212 ou en 211,
correspondant à l'introduction du nouveau système (explicitement chez
Mattingly10 et chez Crawford11). Crawford propose même un nom pour cette
loi : lex de assibus sextantariis et de pecunia noua feriunda, parce que Festus ment
ionne à deux reprises une mesure concernant l'as sextantaire12 et que nous
avons vu que la monnaie de bronze était le socle du nouveau système.
férentes méthodes de raisonnement, la nature des différentes hypothèses et l'histoire critique de
leur réception.
7 La chose semble confirmée par les trouvailles réalisées sur le site de Morgantina. Mais là
encore, le problème reste difficile, et l'unanimité n'est pas réalisée, surtout sur les problèmes de
la réduction du poids du bronze.
8 Voir sur ces pièces A.R. Meadows, «The Mars/Eagle and thunderbolt gold and Ptolemaic
involvement in the Second Punic War », in A.Burnett et alii, éd., Coins of Macedonia and Rome :
Essays in Honour of Charles Hersh, Londres, 1998, p. 125-134.
9 Pline XXXIII, 44-46 : argentum signatum anno urbis CCCCLXXXK Q. Ogulnio C. Fabio
coss., quinque annis ante primum Punicum bellum. Et placuit denarium pro X libris aeris ualere... Mox
lege Papiria semunciarii asses facti. Liuius Drusus in tribunatu plebei octauam partent aeris argento mis-
cuit. is qui nunc uictoriatus appellatur lege Clodia percussus est. On note qu'outre les lois Claudia et
Papiria, il faut supposer une mesure législative, sans doute un plébiscite, à l'initiative de Drusus
(mais l'historicité de cette pose problème). Le placuit du texte de Pline semble enfin
suggérer l'existence au moins d'un sénatus-consulte.
10 H.B. Mattingly, «The management of the Roman Republican Mint », AIIN, 29, 1982,
p. 9-46, p. 9.
11 M.H. Crawford, Roman Republican Coinage, Cambridge, 1974, p. 612.
12 Fest., L., p. 468 s.v. sextantarii asses : sextantarii asses in usu esse coeperunt ex eo tempore, quo
propter bellum Punicum secundum, quo[d] cum Hannibale gestum est, decreuerunt patres, ut ex assibus
qui turn erant librari , fièrent sextantari...Va\u,L., p. 87 s.v.graue aes :sed bello Punico populus Romanus,
pressus aere alieno, ex singulis assibus librariis senos fecit, qui tantundem, ut UH ualerent. Le texte est de
manière générale trop peu précis dans les termes pour qu'on puisse déduire de l'expression
Populus Romanus fecit que la procédure employée ait été une loi. À propos de ce dernier texte,
il me semble que l'expression aere alieno pressus provient d'une confusion entre la deuxième
apparition des mensarii, pendant la seconde guerre punique, et leur première apparition au
milieu du quatrième siècle (Liv.,VII, 21) où leur mission est précisément de régler les pro
blèmes des dettes. En 216-210, le problème des dettes n'est en effet pas d'actualité et on s'ex
plique mal le aere alieno pressus. Cette hypothèse semble parler en faveur de l'historicité de la
première apparition des mensarii, qui cependant paraît douteuse à Cl.Nicolet, « À Rome pen
dant la seconde guerre punique : techniques financières et manipulations monétaires », Annales
ESC IS, 1963, p. 417-436. Sur la loi monétaire de c. 212 (?) 35
Quoi qu'il en soit, cette loi ne figure pas dans Tite-Live. Cet oubli est étran
ge, et il faut donc rétablir au moins une loi essentielle dans les listes proposées
par J.-L. Ferrary13. Pourquoi cet oubli ?
On peut envisager deux possibilités : Tite-Live a peut-être parlé de cette loi
ailleurs. Dans le livre XV par exemple, que nous avons perdu. Ce livre traitait
certes de l'histoire de Rome au début du troisième siècle, mais la Periocha que
nous en avons mentionne l'apparition de la monnaie d'argent à Rome.
L'historien aurait pu faire un excursus. La Periocha est en effet peu satisfaisan
te : les événements qu'elle rapporte paraissent bien minces et une digression
monétaire est tout à fait possible dans l'économie du livre. Mais rien de
concret ne permet véritablement de retenir cette hypothèse

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