La modération salariale en France depuis le début des années 1980 - article ; n°1 ; vol.367, pg 39-67
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Economie et statistique - Année 2003 - Volume 367 - Numéro 1 - Pages 39-67
La modération salariale en France depuis le début des années 1980
Depuis le début des années 1980, la croissance des salaires réels en France a fortement ralenti par rapport à celle des années précédentes. L’économie française est entrée dans une phase dite de «modération salariale». Mieux l’éclairer vise un double objectif: d’une part, évaluer l’ampleur de cette modération salariale à travers plusieurs indicateurs macroéconomiques des salaires; d’autre part, chercher à analyser si cette modération s’est accentuée à la fin des années 1990, au cours de la dernière phase haute de la conjoncture. Pour cela, les liens traditionnels entre les salaires nominaux, les prix, et le chômage sont d’abord réexaminés. La contribution à la modération salariale d’autres déterminants est ensuite étudiée: les revalorisations du Smic, la réduction du temps de travail et certains effets de structure et de champ. Il en ressort que la modération salariale à l’oeuvre depuis le début des années 1980 a pour origine principale la montée du chômage mais aussi la désindexation des salaires et les moindres revalorisations du Smic. Depuis 1998, la modération salariale s’est légèrement accentuée, ce qui s’explique essentiellement par l’effet des 35 heures. Si les salaires de base ont connu une modération supplémentaire, le constat est toutefois moins vrai pour l’ensemble des rémunérations salariales, ce qui peut s’expliquer par des effets de structure et de champ: la dynamique spécifique des salaires dans les petites entreprises, les primes et heures supplémentaires, la rupture dans la progression du temps partiel, ou la hausse du niveau de qualification.
Wage Restraint in France since the Beginning of the 1980s
Growth in real wages in France has slowed sharply since the beginning of the 1980s compared with previous years. The French economy has entered into a •wage restraint” phase. There are two reasons for studying this phenomenon more closely: to evaluate the extent of this wage restraint based on a number of macroeconomic wage indicators, and to endeavour to analyse whether restraint tightened during the last high point of the economic cycle in the late 1990s. This entails firstly taking a fresh look at the traditional links between nominal wages, prices and unemployment. This is followed by a study of the contribution of other determinants to wage restraint: changes to the minimum wage, the shorter working week and certain structural and coverage effects. The wage restraint used since the early 1980s is found to have its roots mainly in the rise in unemployment, but also in the deindexation of wages and smaller increases in the minimum wage. Since 1998, wage restraint has tightened slightly due mainly to the effect of the 35-hour working week. Although basic wages have been further restrained, this is less true of all wage remuneration together. This could be due to structural and coverage effects: the specific wage dynamic in small businesses, bonuses and paid overtime, the break in the growth of part-time work, or the rise in skill levels.
Lohnmäßigung in Frankreich seit Anfang der 1980er Jahre
Seit Anfang der 1980er Jahre hat sich der Anstieg der Reallöhne in Frankreich gegenüber den Vorjahren erheblich verlangsamt. Die französische Wirtschaft ist in eine Phase der so genannten «Lohnmäßigung» eingetreten. Aufschlüsse hierüber dienen einem zweifachen Ziel: einerseits soll das Ausmaß dieser Lohnmäßigung anhand mehrerer makroökonomischer Lohnindikatoren bewertet werden; und andererseits soll analysiert werden, ob diese Mäßigung seit Ende der 1990er Jahre, das heißt der letzten Phase des Konjunkturhochs zugenommen hat. Zu diesem Zweck werden zunächst die traditionellen Wechselwirkungen zwischen Nominallöhnen, Preisen und Arbeitslosigkeit einer Prüfung unterzogen. Anschließend wird der Beitrag weiterer Determinanten zur Lohnmäßigung untersucht: Erhöhung des gesetzlichen Mindestlohns, Arbeitszeitverkürzung sowie bestimmte Struktur-und Feldeffekte. Es zeigt sich, dass die seit Anfang der 1980er Jahre praktizierte Lohnmäßigung hauptsächlich eine Folge des Anstiegs der Arbeitslosigkeit ist, aber auch der Desindexierung der Löhne und der geringeren Anhebungen des gesetzlichen Mindestlohns. Seit 1998 hat sich die Lohnmäßigung geringfügig verstärkt, was im Wesentlichen auf die Einführung der 35-Stundenwoche zurückzuführen ist. Bei den Grundlöhnen war eine zusätzliche Mäßigung zu verzeichnen. Bei sämtlichen Löhnen ist jedoch diese Annahme weniger richtig. Dies kann mit den Struktur-und Feldeffekten erklärt werden (eigene Lohndynamik der Kleinbetriebe, Prämien und Überstunden, keine weitere Ausweitung der Teilzeitbeschäftigung, oder Erhöhung der Qualifizierungsniveaus).
La moderación salarial en Francia desde principios de los ochenta
Desde principios de los ochenta, el crecimiento de los salarios reales en Francia se ha ralentizado mucho en comparación con años anteriores. La economía francesa ha entrado en una fase llamada de «moderación salarial». Para aclararla seguimos un doble objetivo: primero, medir la amplitud de esa moderación salarial mediante varios indicadores macroeconómicos de los salarios; luego, tratar de ver si dicha moderación se ha acentuado a fines de los noventa durante la última fase alta de la coyuntura. A estos fines, se han reexaminado en primer lugar las relaciones tradicionales entre los salarios nominales, los precios y el paro. Después se ha estudiado la contribución a la moderación salarial de otros determinantes: la revaluación del salario mínimo, la reducción de la duración laboral, y otros efectos de estructura y de ámbito. Se llega a la conclusión de que la moderación salarial vigente desde principios de los ochenta tiene como fuente principal la subida del paro y también la desindización de los salarios y las menores revaluaciones del salario mínimo. Desde 1998, la moderación salarial se ha acentuado un poco, lo que el efecto de las 35 horas explica en parte. Si bien los salarios de base han sufrido una moderación suplementaria, no es lo mismo para las demás remuneraciones salariales, lo cual se debe a unos efectos de estructura y de ámbito: la dinámica específica de los salarios en las pequeñas empresas, las primas y horas extras, la ruptura en el desarrollo del tiempo parcial o el alza del nivel de cualificación.
29 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 2003
Nombre de lectures 332
Langue Français

Extrait


SALAIRES
La modération salariale
en France depuis le début
des années 1980
Rozenn Desplatz, Stéphanie Jamet, Vladimir Passeron
et Fabrice Romans*
Depuis le début des années 1980, la croissance des salaires réels en France a fortement
ralenti par rapport à celle des années précédentes. L’économie française est entrée dans
une phase dite de « modération salariale ». Mieux l’éclairer vise un double objectif :
d’une part, évaluer l’ampleur de cette modération salariale à travers plusieurs indicateurs
macroéconomiques des salaires ; d’autre part, chercher à analyser si cette modération
s’est accentuée à la fin des années 1990, au cours de la dernière phase haute de la
conjoncture. Pour cela, les liens traditionnels entre les salaires nominaux, les prix, et le
chômage sont d’abord réexaminés. La contribution à la modération salariale d’autres
déterminants est ensuite étudiée : les revalorisations du Smic, la réduction du temps de
travail et certains effets de structure et de champ.
Il en ressort que la modération salariale à l’œuvre depuis le début des années 1980 a pour
origine principale la montée du chômage mais aussi la désindexation des salaires et les
moindres revalorisations du Smic. Depuis 1998, la modération salariale s’est légèrement
accentuée, ce qui s’explique essentiellement par l’effet des 35 heures. Si les salaires de
base ont connu une modération supplémentaire, le constat est toutefois moins vrai pour
l’ensemble des rémunérations salariales, ce qui peut s’expliquer par des effets de
structure et de champ : la dynamique spécifique des salaires dans les petites entreprises,
les primes et heures supplémentaires, la rupture dans la progression du temps partiel, ou
la hausse du niveau de qualification.
* Rozenn Desplatz appartient à la Direction de la Prévision, Stéphanie Jamet à la Dares, Vladimir Passeron à la division
Synthèse conjoncturelle de l’Insee et Fabrice Romans à la division Salaires et revenus d’activité de l’Insee.
Les noms et dates entre parenthèses renvoient à la bibliographie en fin d’article.
ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 367, 2003 39
epuis le début des années 1980, l’économie par exemple, définissent la modération salariale
française semble être entrée dans une en France comme une préférence pour l’emploiD
phase dite de « modération salariale » qui con- au détriment des salaires qu’ils associent à une
traste avec les années précédentes pendant les- baisse du pouvoir des syndicats. Ils proposent un
quelles les salaires réels progressaient sur des modèle théorique qu’ils estiment à partir de don-
rythmes soutenus, sans vraiment s’ajuster au nées individuelles. Ils concluent à l’existence
ralentissement de la productivité. Pour Blan- d’une modération salariale en France depuis
chard et Fitoussi (1998), c’était là une des cau- 1990 qu’ils expliquent par un changement struc-
ses de la montée du chômage au début des turel des institutions du marché du travail.
années 1980, d’où l’instauration d’une politique
plus rigoureuse, visant à juguler l’inflation et à L’existence d’une modération salariale au cours
modérer les salaires. des dernières années ne fait donc pas l’unani-
mité. Il paraît dès lors important de s’interroger
La modération salariale peut être définie ou sur l’existence et l’ampleur de cette modération
abordée de plusieurs façons. On fait souvent salariale. Mais pour éviter d’une part des pro-
référence à la baisse de la part des salaires dans blèmes de mesure, et d’autre part pour ne pas
la valeur ajoutée. Par exemple, Timbeau (2002) développer une analyse plus complexe de
met en évidence une baisse continue de plus de l’ensemble des déterminants du partage de la
six points de la part des salaires dans la valeur valeur ajoutée, on n’abordera pas ici la modéra-
ajoutée depuis 1981. Toutefois, la mesure même tion salariale sous l’angle de ce partage. On
de la part des salaires dans la valeur ajoutée pose définira la modération salariale de façon simple,
problème. Elle dépend notamment de la notion comme un ralentissement de la croissance des
de salaire retenue et de la correction ou non de salaires réels par rapport à celle des années pré-
la salarisation croissante. Ainsi, Artus et Cohen cédentes. Avec cette définition plus restrictive,
(1998), utilisant une mesure différente, con- on ne s’intéresse ainsi qu’aux gains de pouvoir
cluent à une baisse de la part des salaires dans la d’achat par salarié ; on ne tient pas compte des
valeur ajoutée de 1982 à 1989 mais à une stabi- variations de l’emploi qui contribuent aux
lisation depuis la fin des années 1990. Le même rémunérations salariales d’ensemble et on
constat de stabilisation, à un niveau équivalent à exclut explicitement l’analyse du partage.
celui d’avant le premier choc pétrolier, est
dressé par Baghli, Cette et Sylvain (2003). On tentera alors de quantifier la modération
salariale ainsi définie à travers différents indica-
Par ailleurs, il est assez complexe d’expliquer les teurs macroéconomiques de salaires. Deux
variations de la part des salaires dans la valeur événements, susceptibles d’avoir modéré la
ajoutée parce qu’elles dépendent de la dynami- croissance des salaires, seront au cœur de
que jointe des salaires, de la productivité appa- l’analyse : la désindexation salariale observée
rente du travail et des prix. Les variations des prix depuis 1982 et la généralisation de la réduction
à l’importation, et notamment ceux du pétrole collective du temps de travail (RTT) depuis
ont, par exemple, beaucoup contribué aux varia- 1996. On s’interrogera ainsi sur les détermi-
tions récentes du partage de la valeur ajoutée nants de l’évolution des salaires, dans le cadre
(Deroyon et Fourcade, 2003). Une baisse de la d’une relation de Phillips, qui relie l’évolution
part des salaires dans la valeur ajoutée ne s’expli- des salaires nominaux à celle des prix et à un
que donc pas nécessairement par un ralentisse- effet négatif du chômage. L’article peut donc
ment des salaires. Mihoubi (2002) met ainsi en être lu comme une mise à l’épreuve de la courbe
évidence le rôle joué par le coefficient de capital de Phillips pour retracer l’évolution des salaires
et les termes de l’échange dans la dynamique du depuis le début des années 1980. Son originalité
partage de la valeur ajoutée. Pour Baghli et al. n’est donc ni dans la technique, ni dans l’outil
(2003), le partage est déterminé à moyen terme utilisés. Elle est davantage dans l’attention por-
par le prix relatif de l’énergie et dans une moindre tée aux données et aux résultats, ainsi que dans
mesure par le coût du capital et les tensions sur la mise en évidence de certains déterminants
l’outil de production. Selon de Serres et al. habituels ou d’autres moins étudiés.
(2002), la baisse de la part des salaires dans la
valeur ajoutée s’explique notamment par des
effets de structure, du fait de l’importance crois- Un net ralentissement du salaire réel avec
sante des secteurs à faible part des salaires dans la une sensibilité à la conjoncture
valeur ajoutée. On peut donc préférer vouloir
définir et mesurer la modération salariale à un La simple analyse graphique de l’évolution du
niveau moins agrégé. Estevao et Nargis (2002), pouvoir d’achat des salaires souligne que la
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France est durablement entrée dans une phase l’activité : primes, rémunération d’heures sup-
de modération salariale depuis le début des plémentaires, et différents effets de structure
années 1980 (cf. graphique I). L’analyse com- (cf. encadré 1 sur les concepts couverts par les
parée des prix et des salaires bruts (1) mensuels indicateurs de salaires). L’évolution du pouvoir
de base (SMB) versés dans les secteurs concur- d’achat de ces indicateurs illustre la forte diffé-
rentiels permet de distinguer deux sous- rence entre le régime des années 1970, avec de
périodes : une période inflationniste (1970- 1972 à 1982 une hausse annuelle moyenne de
1982) où les gains en pouvoir d’achat sont 2,5 % pour le SMB et le SMPT et celui observé
importants ; puis une période qui débute par une depuis lors, avec des hausses de salaires bien
forte désinflation (1983-1985) et se poursuit plus faibles : respectivement 0,7 % et 0,6 %
avec une inf

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