Une statuette-portrait romaine en albâtre et marbre au Musée d Agen (Lot-et-Garonne) - article ; n°1 ; vol.17, pg 63-78
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Une statuette-portrait romaine en albâtre et marbre au Musée d'Agen (Lot-et-Garonne) - article ; n°1 ; vol.17, pg 63-78

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Gallia - Année 1959 - Volume 17 - Numéro 1 - Pages 63-78
16 pages

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Publié le 01 janvier 1959
Nombre de lectures 71
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Jean Marcadé
L. Pressouyre
Une statuette-portrait romaine en albâtre et marbre au Musée
d'Agen (Lot-et-Garonne)
In: Gallia. Tome 17 fascicule 1, 1959. pp. 63-78.
Citer ce document / Cite this document :
Marcadé Jean, Pressouyre L. Une statuette-portrait romaine en albâtre et marbre au Musée d'Agen (Lot-et-Garonne). In: Gallia.
Tome 17 fascicule 1, 1959. pp. 63-78.
doi : 10.3406/galia.1959.2256
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/galia_0016-4119_1959_num_17_1_2256UNE STATUETTE-PORTRAIT ROMAINE
EN ALBÂTRE ET MARBRE AU MUSÉE D'AGEN
(Lot- et- Garonne)
par MM. J. Marcadé et L. Pressouyre
En 1880, entrait au Musée d'Agen une « charmante statuette en albâtre »,
trouvée sur le territoire de la commune voisine de Tayrac « dans des
substructions gallo-romaines »*
II s'agissait d'une figure féminine debout, le corps hanche à gauche et
le genou droit détendu, l'épaule droite haussée et l'épaule gauche abaissée ;
son vêtement consistait dans une longue tunique échancrée en rond sous
le cou et blousant à hauteur des hanches sur une invisible ceinture ; posé sur
l'épaule droite et retenu par le bras gauche collé au flanc, un manteau tombait
vague dans le dos, jusqu'à la pliure des genoux. Le rythme, le costume, le
mouvement même des plis, souples sur la poitrine et sur le ventre, raides et
verticaux entre les jambes moulées par l'étoffe, firent légitimement penser à
une image divine dérivée d'un modèle d'Aphrodite grecque : on parla donc de
la « Vénus de Tayrac »2. La pièce eut son heure de gloire : on en loua la facture
habile, on en souligna les aspects classiques qui permettaient d'évoquer à son
propos d'illustres chefs-d'œuvre ; on en remarqua aussi la curieuse technique
composite, car la base du cou était taillée non plus en albâtre mais en marbre,
un marbre dont la couleur brun-rouge passait bizarrement au blanc pur près
de l'épaule gauche. Cette célébrité pourtant devait rester locale : la tête
manquait ; de même le bras droit presque entier et la main gauche, pièces jadis
rapportées et fixées par des goujons métalliques ; de même enfin la pointe des
pieds qui dépassait primitivement sous la robe.
Retrouvée et identifiée, la tête, qui vient d'être acquise et rajustée sur le
(1) Cf. Tholin et Marraud, Revue de VAgenais, 1880, p. 556, où il est précisé que la statuette
« a été donnée par M. J. M. Mourgues, ancien maire de la commune ».
(2) Cf. Tholin, Bulletin Monumental, 1885, p. 1-16 ; puis J. Momméja. Revue de VAgenais, 1900,
p. 468-476. Dans le Recueil général d'EspÉRAMDiEU, le document figure au t. II, p. 227, sous le n° 1256.
5—1 :
:
64 J. MARCADË ET L. PRESSOUYRE
corps rend un intérêt tout neuf à la statuette (pi. I). Non seulement elle permet
une interprétation plus exacte de la sculpture, mais elle offre la possibilité d'une
datation précise que jusqu'ici ni le contexte archéologique ni l'étude de la
draperie n'auraient autorisée3.
Aucune fouille systématique n'avait suivi, à la fin du siècle dernier, la
découverte fortuite du corps, lors du creusement d'un chemin. C'est encore un
hasard heureux qui fit exhumer en 1921, à peu près au même endroit, une tête
féminine en marbre blanc (fig. 2), de dimensions réduites4. Cette nouvelle
trouvaille fut longtemps négligée. Seul, à notre connaissance, M. F. Ballouhey
devait la signaler en 1941 dans Y Histoire de l 'A gênais et affirmer l'appartenance
du fragment à la statuette du Musée d'Agen5. A une date antérieure un raccord
avait bien été tenté, dont témoignent deux photographies inédites conservées
dans les archives du Musée, mais, en dépit d'une concordance frappante des
cassures, le rapprochement n'avait pas été jugé convaincant : la différence de
coloration entre le marbre du cou et celui de la tête — dont la blancheur sans
défaut contribue d'ailleurs par le jeu d'une illusion d'optique à augmenter les
proportions apparentes — paraissait alors une objection dirimante6. En fait,
il n'y a point là de difficulté : la couleur rouge du marbre à la base du cou n'est
qu'accidentelle ; elle provient de l'oxydation d'un goujon de métal, inaperçu
des premiers auteurs, qui assujettissait la tête sur l'albâtre du corps7. Arasé
au niveau de la cassure du cou, ce goujon a rouillé, provoquant une fissure du
marbre à l'arrière du cou et répandant une large tache sur le bouchon
d'encastrement ; de même, l'oxydation des goujons qui fixaient les parties nues
des bras et l'oxydation du goujon fixant la statuette sur sa base se traduisent
par des ondes rougeâtres teintant l'albâtre translucide. Comme il fallait s'y
attendre, la tête trouvée en 1921 offre dans la cassure du cou le fond d'un trou
(3) Nous sommes heureux de remercier ici M. J. Munier, qui a su nous mettre sur la piste de ce
précieux fragment et nous indiquer le nom de son propriétaire, M. Rodes. Auprès de Mlle Labit,
conservatrice du Musée d'Agen, nous avons toujours rencontré le concours le plus actif et la
compréhension la plus obligeante. Enfin nous n'aurions garde d'oublier la bienveillance avec laquelle
M. J. Charbonneaux a bien voulu appuyer personnellement la demande d'achat présentée à la Direction
des Musées de France.
(4) Hauteur 5 cm. 5 ; largeur max. : 4 cm. 2 ; diam. du cou : 2 cm.
(5) Histoire de VAgenais (Publication de la Société des Sciences, Lettres et Arts d'Agen), Agen 1941,
t. I, p. 66 : « La tête a été retrouvée en 1921, mais n'a malheureusement pas encore rejoint le corps ».
(6) L'appréciation de Tholin faisait autorité ; « un morceau de marbre brun rouge veiné de blanc
est incrusté entre les deux épaules et forme le cou : la cassure de la tête... ne laissant voir aucun raccord,
il est à présumer que cette partie de la statuette était du même marbre » {Bull. Mon., 1885, p. 9). Dans
le Recueil d'Espérandieu, L c, on lit encore : « draperie en albâtre, chairs en marbre rouge ».
(7) Rendons cette justice à Momméja qu'il trouvait suspecte la coloration du marbre ; mais la
vraie raison lui échappait (cf. Rev. de VAgenais, 1900, p. 474 « Sommes-nous en présence d'une
décoloration accidentelle d'un marbre rouge, ou plutôt un marbre blanc aurait-il rougi sur presque
toute sa surface par l'effet chimique de je ne sais quelle matière répandue dans le terrain de Tayrac ? »). Planche I J
Illustration non autorisée à la diffusion
La " Vénus de Tayrac " complétée, au musée d'Agen
(Photo Balisiai, Marmande) r- *■*,
Illustration non autorisée à la diffusion
Fig. 1. — La « Vénus de Tayrac » complétée : a ) profil droit ; b) revers ; c) profil gauche. (Photo Balistai, Marmande). 66 J. MARGADÉ ET L. PRESSOUYRE
de goujon, et la correspondance parfaite qui s'établit entre ce trou de goujon
et la tige métallique restée en place sur le corps confirme définitivement une
appartenance que l'adaptation des cassures sur la quasi totalité de leur
surface laissait dès l'abord présumer8.
Complétée de sa tête (fig. 1-2), la «Vénus de Tayrac » cesse d'être une effigie
divine : elle se révèle un portrait. Un front bombé, un nez aux ailes épaisses,
un menton lourd et déjà empâté individualisent la physionomie, que des lèvres
un peu molles, des paupières gonflées, à demi closes sur les prunelles creusées,
parent d'une expression à la fois voluptueuse et maussade. La masse d'une
chevelure opulente à laquelle le sculpteur a laissé jusque dans la finition des
détails un aspect rugueux affine, par un effet do contraste, ce visage qui n'est
pas exempt d'une légère bouffissure. Divisés en deux bandeaux par une raie
médiane, les cheveux sont ramenés sur la nuque sans nulle brutalité : les ban
deaux, dont la souplesse est rendue par des incisions sinueuses, coulent de chaque
côté de la tête en formant une série d'ondulations lâches, qui cachent les oreilles,
couvrent une partie des joues et descendent jusqu'à mi-hauteur du cou ; ils sont
limités et repris symétriquement à droite et à gauche par deux longues m

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