Une visite à la Faculté de Pharmacie de Paris : souvenirs de quelques-uns de ses maîtres - article ; n°265 ; vol.73, pg 99-112
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Description

Revue d'histoire de la pharmacie - Année 1985 - Volume 73 - Numéro 265 - Pages 99-112
14 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1985
Nombre de lectures 21
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Marcel Chaigneau
Une visite à la Faculté de Pharmacie de Paris : souvenirs de
quelques-uns de ses maîtres
In: Revue d'histoire de la pharmacie, 73e année, N. 265, 1985. pp. 99-112.
Citer ce document / Cite this document :
Chaigneau Marcel. Une visite à la Faculté de Pharmacie de Paris : souvenirs de quelques-uns de ses maîtres. In: Revue
d'histoire de la pharmacie, 73e année, N. 265, 1985. pp. 99-112.
doi : 10.3406/pharm.1985.2369
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/pharm_0035-2349_1985_num_73_265_2369Une visite à la Faculté de Pharmacie
de Paris : souvenirs de quelques-uns
de ses maîtres
appelons AU la rue en CUR de quelque la l'Arbalète. Galerie de la sorte, Faculté des Pour une Besnard, de y reconstitution l'avenue accéder, ornée on de l'Observatoire, doit six de celle bustes prendre qui représentant existait pied la Salle dans des ce l'École Actes que pharmacnous est, de
iens célèbres. Je ne vous dirai rien de Pelletier, ni de Caventou, ni de Chatin,
puisque chacun de les connaît parfaitement, mieux que moi probable
ment, mais je m'arrêterai devant les trois autres, dont Henri Moissan,
« notre » Prix Nobel.
Henri Moissan
Rappelons brièvement que, depuis 1879, Henri Moissan appartenait au
Corps enseignant de l'École Supérieure de pharmacie comme Chef de Travaux
pratiques. Il suivra le transfert avenue de l'Observatoire, et sera nommé
Professeur agrégé en 1 883, puis Professeur titulaire de la Chaire de Toxicologie
en 1886. Finalement, il enseignera, comme il se doit, la Chimie minérale.
A première vue, son choix pour la chimie minérale peut surprendre puis
qu'il avait commencé ses recherches en physiologie végétale chez Dehérain,
au Museum d'Histoire naturelle. Après avoir fréquenté, il est vrai, le labora
toire de Frémy, dans ce même établissement. Mais il prend la décision d'aban
donner la chimie végétale pour revenir à la chimie minérale. Il quitte donc
le Museum pour entrer, en 1882, la première année de notre centenaire, chez
Debray, à la Faculté de Sciences, dans la Sorbonne, où il aborde ses premières
recherches sur les composés de fluor. Mais là, tout se gâte, car le préparateur
de Debray réclame l'isolement de ce chercheur dont les travaux opacifient
toute la verrerie du laboratoire et nécessitent l'accaparement de la totalité
du platine dont il dispose.
Friedel et Debray donnent une solution à cette situation épineuse. Res
pectueux des projets de Moissan, ils l'autorisent à travailler en dehors des
heures de cours, sur une petite paillasse installée derrière l'amphithéâtre
qu'ils possèdent en commun à l'annexe de la Sorbonne, rue Michelet ; annexe
Conférence prononcée aux Journées Pharmaceutiques Internationales de Paris, le 22 septem
bre 1982. Manuscrit reçu le 21 mars 1985.
REVUE D'HISTOIRE DE LA PHARMACIE, XXXII, N° 265, JUIN 1985. 100 REVUE D'HISTOIRE DE LA PHARMACIE
qui deviendra le berceau de l'Institut de chimie appliquée, à l'emplacement
où s'élève aujourd'hui l'Institut d'Art et Archéologie.
Moissan est un homme audacieux. En cherchant à isoler le fluor, il s'atta
que à un des problèmes les plus difficiles de la chimie minérale ; là où avaient
échoué des chimistes de grand renom : Davy, Gore et son premier maître,
Frémy.
Après l'installation d'une puissante batterie de 90 éléments de pile Buns
en, l'électrolyse de l'acide fluorhydrique le conduira au succès. Le 26 juin
1886, il isole le fluor vers l'heure du déjeuner en présence de Rigault, prépara
teur de Troost et de Friedel, qui passait à l'amphithéâtre à ce moment là.
Deux jours après, la lundi 28 juin, Debray annonce à l'Académie des
Sciences que le fluor a été isolé par Henri Moissan. Un événement de cette
importance nécessite, évidemment, une confirmation ; c'est pourquoi une
commission désignée par l'Académie est chargée d'aller, sur place, constater
la découverte.
C'est alors que Moissan, voulant s'entourer de toutes les garanties, décide
que l'expérience témoin sera faite en prenant toutes les précautions possibles.
Au lieu d'être directement distillé dans l'électrolyseur, comme cela avait
été fait antérieurement, l'acide fluorhydrique anhydre avait été préparé et
recueilli à part, puis avait été versé dans le tube en U constituant le système
d 'electrolyse. Hélas, devant l'honorable commission, c'est l'échec. Le courant
ne passe pas. La démonstration est manquée !
On a rapporté que certains membres auraient alors exprimé leur opinion
par :
On se moque de nous !
Scandaleux !
et même : « A défaut de fluor, mes chers collègues, nous avons, en tout cas,
du Moissan à l'état pur » !
La situation était des plus graves. Pourtant, les expériences précédentes
avaient donné satisfaction. D'où, réflexion du savant et sa conclusion :
l'électrolyse de l'acide fluorhydrique n'est possible qu'en présence de fluorhy-
drate de fluorure de potassium qui constituait l'impureté de l'acide fluorhy
drique lorsqu'il était distillé directement dans le tube à electrolyse au cours
de sa préparation. Il décide donc de rétablir l'expérience dans ses conditions
premières.
L'Académie des Sciences constitue alors une nouvelle Commission et un
nouveau rendez- vous est fixé. Cette fois, c'est le succès. Le fluor dégagé atta
que avec luminescence le silicium et d'autres métaux ainsi que de nombreux
corps organiques.
Ai-je besoin de vous dire vous l'imaginerez sans peine qu'entre les
réunions des deux Commissions, les mauvaises langues avaient bien fonc
tionné. Sachez même que les élèves d'un autre maître eminent de la science VISITE A LA FACULTÉ DE PHARMACIE DE PARIS 1 0 1
française avaient eu l'audace de venir interpeller le préparateur de Moissan
pour lui chuchoter à l'oreille que le fluor, prétendument isolé, était tout
simplement de l'ozone ! je tiens cette anecdote de mon maître, Paul Lebeau.
Cette aventure expérimentale est une belle illustration d'un conte, que
nous devons à l'humaniste Horace Walpole, écrit dans une lettre à son ami
Mann, en 1754. Il s'agit des « Trois Princes de Sérendip ». Dans ce conte tout
arrive à l'envers de ce qui est prévu. D'où le nom d'« effet sérendip » qui
caractérise une découverte inattendue de résultats que l'on ne cherche pas.
Moissan veut perfectionner une méthode de préparation du fluor et celui-ci
ne peut plus être isolé. Mais l'effet sérendip est vaincu par Moissan et son
préparateur qui ont, tous deux, une grande ressource, leur esprit méthodique.
Ils réagissent à l'inattendu et réussissent là où bien d'autres auraient échoué.
Plus tard, Moissan réussira d'autres grandes découvertes dont celle du
four électrique.
Lorsque Henri Becquerel constate, en 1896, que le sulfate double d'ur
anium et de potassium est capable d'impressionner une plaque photographi
que, même dans l'obscurité, il confirme le pouvoir d'ionisation des sels d'ur
anium mais il lui faut une expérience décisive, à partir du métal lui-même.
C'est Moissan qui lui fournira, à point nommé, cet échantillon tant désiré,
grâce à son invention du four électrique. Car, le four électrique est né, ici
même, dans la cave dite « du moteur ». Bien modestement ; il est vrai, avec
un moteur de quatre chevaux qui actionnait une machine Gramme. Mais,
quelle réussite ! Avec ce four électrique, la chimie des hautes températures a
pris naissance dans notre Faculté.
A propos de cette invention, on ne relève aucun effet sérendip. Elle est
l'aboutissement d'un raisonnement cartésien tenu au cours de ces entretiens
quotidiens, en fin de journée, entre Henri Moissan et Paul Lebeau. Ayant
constaté l'insuffisance du four Deville pour la réalisation de leurs projets de
recherche, le maître envisage de construire un four électrique. Tout est décidé
le soir même, y compris le choix des matériaux, la taille des blocs du four, la

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