L’Irak cinq ans après : logiques et enjeux d’un conflit pluriel
Les succès de l’alliance américano-tribale Au terme d’une année 2006 marquée par une violence sans précédent et un basculement brutal de la société irakienne dans les affres de la guerre civile, l’administration américaine a lancé, le 10janvier 2007, une «escalade »militaire («surge») consistant en un renforcement majeur de ses troupes sur le terrain. La nouvelle stratégie esquissée par le président George W.Bush entendait ainsi juguler les affrontements sectaires qui faisaient rage à travers le pays et ramener la sécurité à Bagdad. Au même moment a émergé un phénomène qui, très vite, s’est imposé comme l’un des principaux piliers de ce revirement : décidés àse débarrasser de l’organisation jihadiste d’Al-Qaeda, accusée d’avoir semé le chaos et de s’être livrée aux pires exactions contre les populations civiles, plusieurs chefs tribaux du gouvernorat d’Al-Anbar, sanctuaire jusqu’alors imprenable de l’opposition armée, se sont rassemblés à Ramadi pour former, sous la houlette du cheikh Abd al-Sattar al-Richawi (Abou Richa), le premier « Conseil du Réveil » (appelé «Sahwa» en arabe). Conscients de l’opportunité inédite dont ils disposaient, les États-Unis se sont alliés à la rébellion tribale et ont doté ses membres en armes et en financement. De cette alliance d’abord circonstancielle est né au fil des mois un phénomène qui s’est étendu à l’ensemble des régions centrales puis au nord du pays, où les « Conseils du Réveil» ont remporté une série de succès face aux combattants d’Al-Qaeda. À la surprise de tous, laSahwaa permis une pacification non seulement d’Al-Anbar, mais également des quartiers les plus meurtriers de la capitale irakienne. Un an et demi après son lancement, lesurgea donc sanctionné une décrue notable du nombre de victimes et une réduction similaire des violences, qui ont retrouvé leur niveau le plus bas depuis le début de l’occupation.Impasse politique et coup de force sadriste Les indiscutables progrès réalisés à travers cette «escalade» ont toutefois mal dissimulé l’impasse politique qui a continué de miner le pays. Deux ans après son investiture en avril 2006, le gouvernement irakien du chiite Nouri al-Maliki a affiché un bilan des plus précaires, ne pouvant ni se réclamer de l’amélioration de la situation sécuritaire, fruit principalement de l’alliance des troupes étrangères avec certains acteurs locaux–tribus, « citoyens mobilisés »–, ni d’une réconciliation nationale effective dont il avait pourtant fait son maître mot. Repliées sur elles-mêmes, coupées des réalités du terrain, les