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Publié par | bibebook |
Nombre de lectures | 21 |
EAN13 | 9782824711300 |
Langue | Français |
Exrait
MON T ESQU I EU
V O Y A GE À P AP HOS
BI BEBO O KMON T ESQU I EU
V O Y A GE À P AP HOS
Un te xte du domaine public.
Une é dition libr e .
ISBN—978-2-8247-1130-0
BI BEBO OK
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distribuer , l’ env o y er à v os amis. V ous êtes d’ailleur s
encourag é à le fair e .
V ous de v ez aribuer l’ o euv r e aux différ ents auteur s, y
compris à Bib eb o ok.P RÉF A CE DE L’ÉDI T EU R
V P été aribué à Montesquieu.
Cep endant on ne l’a jamais publié dans les œuv r es complètes deL l’auteur . Il est v rai que cee p etite piè ce offr e p eu d’intérêt. On
n’y tr ouv e p oint, comme dans le Temple de Gnide, certaines réfle xions,
certaines phrases où l’ on r e connaît, p ar mi bien des fadeur s, la mar que du
maîtr e . Le Voyage à Paphos a été p eut-êtr e impr o visé p our amuser l’
oisiv eté d’une grande dame , mais ni l’inv ention ni l’ e x é cution n’ ont dû causer
grand’p eine au p oëte ; tout y est pâle et sans r elief. Nous l’av ons cep
endant réimprimé à cause de sa rar eté et p our êtr e complet.
Le Voyage à Paphos a été publié p our la pr emièr e fois, dans le Mercure
de France, en dé cembr e 1727 ¹ .
On lit en tête ce qui suit :
Le p etit ouv rag e qu’ on donne ici nous est tombé p ar hasard entr e les
mains. Le titr e , la pr emièr e p ag e et la fin sont dé chirés du manuscrit ; ainsi
nous ne sav ons p as ce qui p eut manquer p our av oir l’ ouv rag e complet.
On p eut jug er p ar l’imagination de l’auteur que la fiction doit av oir été
p oussé e plus loin. On espèr e que l’appr obation du public l’ eng ag era à
nous donner la suite et le véritable titr e ; en aendant, nous le donnons
1. Pag es 2849-2886.
1V o yag e à Paphos Chapitr e
sous le titr e que v oici : Voyage à Paphos.
En 1747, p ar ut sous la r ubrique Florence ² une é dition sép aré e , qui
p orte le titr e de Voyage de l’isle de Paphos ³ . L’ œuv r e est complète , on a
rétabli le commencement et la fin du manuscrit. On l’a même fait
précé der d’une préface insignifiante , et on a inséré , dans le cor ps du ré cit,
des v er s qui sont plus que mé dio cr es. Montesquieu n’a jamais p assé p our
p oëte , mais dans ce qu’ on connaît de lui, il n’y a rien d’aussi plat. A u r este ,
on en p our ra jug er . Nous n’av ons p as v oulu que les curieux eussent rien
à r egr eer ; aussi donnons-nous le te xte du Mercure av e c les variantes et
les additions de l’é dition de 1747.
V oici la préface de cee der nièr e é dition :
P lair e à tout le monde ; c’ est l’imp ossible . P lair e à b e aucoup de p
ersonnes ; il est difficile . P lair e à un certain nombr e ; cela se p eut. Je
souhaiterais que cet ouv rag e fût lu de toutes les nations. T outes y pr endraient
plaisir . Be aucoup l’aimeraient ; mais p eu s’ en accommo deraient. On n’y
v er ra rien que de très-agré able . Je m’aacherai moins à fair e la
description de l’île que celle des faits que j’y ai v us. Chacun essaiera de s’y r e
connaîtr e dans le caractèr e de Diphile ; et je suis certain que p eu l’imiter ont,
surtout en France ; car on assur e , et je n’ en doute nullement, que
l’inconstance y prit naissance .
Le Français p orte un cœur facile a s’ enflammer .
A vide de plaisir , il en est mer cenair e ,
Et sans p ossé der l’art d’aimer
Il s’aache au mo y en de plair e .
Sans tr op cher cher à me disculp er , je sais qu’ on p our rait tr ouv er ( et
cela même à Paris) des amants dignes de fair e le v o yag e de Paphos,
quoiqu’il n’y ait que les plus p arfaits qui puissent y ar riv er . S’il s’ en tr ouv e si
p eu, on ne doit l’aribuer qu’aux mœur s du siè cle ; on se fait un de v oir
d’êtr e inconstant, v olag e ; cep endant on aime ; mais souv ent tel s’aache
et fait v œu de bien aimer un objet indigne de lui ; ainsi heur eux mille fois
ceux que l’amour sait assortir .
2. Le caractèr e indique une impr ession faite a Paris.
3. In-12 de 64 p ag es.
2V o yag e à Paphos Chapitr e
n
3V O Y A GE A P AP HOS
(e v otr e absence est difficile à supp orter ! Pensez-v ous, Mélite , que
depuis dix jour s je ne v ous v ois p oint ? Imaginez combien j’ai de choses
agré ables à v ous dir e . J’ar riv e de Paphos.
V énus a choisi cee île p our s’y délasser des fatigues de Cythèr e et
d’ Amathonte , où elle r e çoit les hommag es de tous les amants ; on ne v oit
à Paphos que les amants p arfaits. A vais-je dr oit, Mélite , de m’y
présenter ⁴ ?)
Après une douce navig ation que les Zéphir s r endent plus pr ompte
p ar l’ empr essement qu’ils ont d’aller v oltig er autour de V énus, j’ar rivai à
Paphos au moment que l’ A ur or e commençait à s’y montr er ; elle me p ar ut
si riante , en é clairant cee île , que sans v oir Céphale , je jug e ai aisément
qu’il était à ses côtés.
Je n’ essay erai p oint, Mélite , de v ous dé crir e les b e autés du p alais de
V énus : v ous le connaissez p ar l’idé e que v ous en a donné le pince au de
l’ Albane ; il est si fidèle , qu’ on distingue difficilement si les Grâces l’ ont
bâti sur ses dessins, ou s’il a travaillé d’après les Grâces.
L’imagination la plus viv e et le g oût le plus g alant n’appr o cher ont
4. T out ce qui est entr e cr o chets est pris du Voyage de l’île de Paphos. Nous indiquer ons
les autr es empr unts et les variantes p ar la ler e A.
4V o yag e à Paphos Chapitr e
jamais de l’agré able assemblag e qui comp ose ces jardins. Le Dieu qui les
pr otég e y fix a son sejour , et tout s’y r essent de sa fav orable influence .
L’art n’y p arait que p our fair e g oûter av e c plus d’admiration les b e
autés de la natur e , ou p our mieux dir e , on n’y r e connaît p oint d’art. Paphos
enfin plait aux Amour s, et V énus ne l’a jamais quié sans r egr et, que p our
aller à la conquête d’ A donis ⁵ .
Rempli de v otr e idé e , que ne sentis-je p as à Paphos ⁶ ? Tâchez de le
compr endr e , Mélite (Melite ), car je ne l’ e xprimerais jamais.
J’ er rai q uelques moments de b osquet en b osquet, et j’é coutais av e c
attention ⁷ les sons touchants de P hilomèle , qui me p araissaient plus tendr es
en se mêlant au mur mur e des fontaines de cee île , quand j’ap er çus une
ny mphe qui v enait à moi.
Je ne doute p as, heur eux Amant, dit-elle en m’ab ordant, que v ous ne
so y ez bien r e çu dans cee cour . Je suis Diphile , ai-je rép ondu ⁸ , j’aime
Mélite . L’amant de Mélite , r ep art la ny mphe , doit êtr e le mo dèle des amants ?
Nous entendons sans cesse p arler des char mes de Mélite à la cour de V
énus, et v ous v enez sans doute r endr e grâces à la dé esse de ses bienfaits ;
mais on n’ entr e p oint encor e dans son p alais. Je v ous y conduirai quand
il en sera temps ; et je v eux, en aendant son ré v eil, v ous entr etenir sous
cet ombrag e .
Je v oulus r emer cier la ny mphe d’un accueil si gracieux ⁹ . V ous
m’av ez moins d’ oblig ation que v ous ne p ensez, rép ondit-elle ; le plus grand
plaisir que je puisse av oir à Paphos, c’ est d’ entr etenir les mortels. Les
ny mphes, mes comp agnes, se char g ent de ce soin à Cythèr e , mais à
Paphos, c’ est le seul soin de Zélide .
V énus p er met à ses ny mphes de choisir leur s amants à Gnide , à
Amathonte et à Cythèr e and le séjour de la dé esse est à Amathonte , les
amantes des autr es îles languissent dans les p eines de l’absence ; v ous
me tr ouv ez seule ici dans la rê v erie ; j’aime à Cythèr e ! Eh quoi ! dis-je à
5. A. Dit simplement : Paphos enfin plaît à V énus.
6. A. T oujour s présente à mon idé e , que ne sentis-je p as à Paphos ? Tâchez de le
compr endr e , Melite ; je ne l’ e xprimerai jamais !
7. A. A v e c soin.
8. A. Lui rép ondis-je .
9. A. Si pr o v enant.
5V o yag e à Paphos Chapitr e
Zélide , la r eine des plaisir s p er met que dans sa cour même on connaisse
des p eines en aimant ! Ne v ous en étonnez p as, Diphile , ce sont ces p eines
qui font le b onheur des cœur s amour eux ¹⁰ .
V énus, aentiv e à tout ce qui p eut augmenter les délices de sou
empir e , ordonne quelquefois à ses ny mphes de p asser un jour sans p arler à
leur s amants ; il nous est même défendu de les v oir à de certaines heur es.
Ces défenses ne sont p as faites p our nous priv er de leur présence , mais
p our ajouter au plaisir de les v oir , le plaisir de les v oir en se cr et.
L’absence que les v ulg air es amants comptent p our une p eine ,
augmente les douceur s qu’ o n g oûte en aimant. V énus même se soumet à ses
lois, et la mèr e des Amour s connait ce qui doit r endr e un cœur heur eux.
Elle établit sa cour dans plusieur s îles, et ce n’ est qu’à Paphos qu’ elle jouit
du plaisir de v oir A donis.
A donis ! m’é criai-je , eh ! les dieux ne l’ ont-ils p as chang é en fleur ?
V otr e étonnement ne me sur pr end p oint, dit Zélide , p eu de mortels
connaissent le b onheur d’ A donis. Son courag e l’ayant emp orté sur les
prièr es que lui fit V énus de ne p oint chasser les bêtes fér o ces, un sanglier
l’immola à la colèr e de Diane , et V enus, en v er sant du ne ctar sur son sang,
obtint des dieux qu’il serait chang é en fleur .
Dès que la dé esse fut e x aucé e , elle trav er sa les air s p our se transp orter
dans l’ empir e de F lor e . Reine des fleur s, lui dit-elle , dont l’ empir e est aussi
brillant que celui des Amour s ; v ous v ous plaignez tous les jour s de la
légèr eté de Zéphir e , v ous ne v ous en plaindr ez plus : je viens v ous offrir
de le r endr e aussi constant que les colomb es que v ous v o y ez aelé es à
mon char .
A des offr es si eng ag e antes, F lor e connut que la D é esse aendait
quelques se cour s de sa puissance : car les Dieux, ainsi que les mortels,
ne flaent que p our obtenir ce qu’ils désir ent.
’ e xig ez-v ous de moi, p our r e connaîtr e une fav eur si sensible ,
rép ond F lor e à V énus ? Il est v rai que Zéphir e m’inquiète et m’alar me sans
cesse , et qu’ en m’assurant son cœur , v ous assur ez ma tranquillité . V otr e
b onheur dép end de v ous, r eprit V énus ; le plus char mant des mortels,
A donis vient de p erdr e le jour ; mais si F lor e me se conde , la Par que n’aura
10. A. ajoute :
6V o yag e à Paphos Chapitr e
tranché le fil d’une si b elle vie que p our r endr e son sort plus glorieux.
Il est sous v otr e empir e , transp ortez-le à Paphos, aimable D é esse , faites
que cee fleur y conser v e toujour s sa fraîcheur et sa b e auté ; de sa
duré e dép end la constance de Zéphir e . La constance de Zéphir e ! s’é cria
F lor e av e c transp ort ; allez D é esse , A donis est immortel. Dès ce jour
Zéphir e n’a p oint quié F lor e ; F lor e , intér essé e à la fleur d’ A donis, ne quie
p oint Paphos ; et le b onheur de ces amants r end ce séjour plus digne des
Amour s.
V énus, en obtenant qu’ A donis serait chang é en fleur , ne b or nait p as
ses v œux à ce seul chang ement. C’ est ainsi que p our réussir dans ce qu’ on
pr ojee , il faut aller p ar degré au b onheur qu’ on aend.
Assuré e du se cour s de F lor e , elle fit cee prièr e au maîtr e des dieux.
« Puissant Dieu de l’univ er s, si p our punir l’audace d’un mortel, v ous
donnâtes autr efois à Diane le p ouv oir de chang er A cté on ; r efuser ez-v ous,
p our fair e le b onheur de V énus de chang er une fleur ? C’ est à ma prièr e
que v ous av ez animé l’ ouv rag e de Py gmalion ; l’amour d’une D é esse v ous
toucherait-il moins que l’amour d’un mortel ? Non, non, v ous allez
animer la fleur d’ A donis ; il a plu à V énus, il mérite v otr e se cour s. »
Jupiter doit tr op de plaisir s à l’ empir e des Amour s p our ne p as
contribuer au b onheur de la D é esse ; elle v ole à Paphos, maîtr esse de r endr e à
la fleur qui lui est si chèr e , la figur e et les char mes d’ A donis ; mais elle
ne le p eut que dans cee île , et ses plaisir s seraient moins dignes de V
énus, si elle p ouvait fair e ce chang ement dans tous les lieux soumis à sa
puissance . i p eut se plaindr e de l’absence , V énus s’éloigne d’ A donis ?
Il est v rai, ajouta Zélide , que dans et les autr es p eines
aaché es à l’ Amour , il faut connaîtr e les douceur s qu’ on p eut en r etir er . Je
n’ en néglig e aucune . A Gnide ou à Paphos, je ne p ense qu’aux plaisir s de
Cythèr e . Je me rapp elle les moments que j’ai p assés av e c Ly cas ¹¹ . . . Ce
soupir v ous appr end que c’ est Ly cas que j’aime : absent, son idé e est sans
cesse présente à mon esprit ; je répète en moi-même tout ce que je lui ai
dit en p arlant. Je le suis dans les b ois où j’aime à le tr ouv er ; je le v ois
nonchalamment couché s’ entr etenir dans une douce rê v erie ; il m’aime ,
il p ense à moi, il me p arle p eut-êtr e . elques jour s avant de r ejoindr e
11. A. Écrit p artout Palmir e au lieu de Ly cas.
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