Le Spermatozoïde octogénaire
211 pages
Français

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Le Spermatozoïde octogénaire , livre ebook

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Description

Le sous-titre, Une biographie optimiste, lève toute ambiguïté sur la signification du titre. De la cellule microscopique originelle jusqu'au grand vieillard approchant la mort, il n'y a pas rupture mais continuité. Entre les deux se déroule la vie d'un homme, riche en péripéties. Médecin, Jacques Franck raconte les incroyables histoires qui ont émaillé sa vie.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 avril 2008
Nombre de lectures 293
EAN13 9782336269382
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0800€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

© L’Harmattan, 2008
5-7, rue de l’Ecole polytechnique ; 75005 Paris
http://www.librairieharmattan.com diffusion.harmattan@wanadoo.fr harmattan1@wanadoo.fr
9782296053502
EAN : 9782296053502
Le Spermatozoïde octogénaire

Jacques Franck
Sommaire
Page de Copyright Page de titre AVANT-PROPOS LA CRÉATION LE LARDON LA TRANSITION LE QUIDAM LA MATURITÉ LA TROISIÈME VIE LES PÉRÉGRINATIONS LES AMIS LES FEMMES LE SPERMATOZOÏDE OCTOGÉNAIRE LE RETOUR A L’ÉTAT ZÉRO CONCLUSIONS
AVANT-PROPOS
Arrivé sur la dernière ligne droite d’une longue vie, j’ai eu envie de regarder un peu en arrière. Pas pour “me pencher sur mon passé avec nostalgie”. Je cherche à revoir le chemin parcouru. Je ne veux pas en tirer de leçon pour l’avenir, je n’en ai plus ou presque. Mais simplement passer un bon moment, sans tristesse ni regrets. Vu sous cet angle, j’ai réussi, n’éprouvant ni l’une ni les autres. Au contraire.
L’évocation d’un peu plus de huit décennies complètes de vie consciente ou se croyant telle a été un exercice salubre. Ça m’a permis de relativiser tout et d’envisager la suite et la fin avec sérénité.
Il me fallait pour cela remonter à la source. La source de toute vie humaine se trouve dans les deux cellules initiales qui, en se conjuguant, déclenchent une suite d’événements aboutissant à vous ou à moi. La sincérité exigeait donc que je me définisse comme un spermatozoïde apparemment banal, tel qu’il en existe des milliards, tous personnages potentiels mais dont bien peu se réaliseront. Je revendique au long de ce récit le statut et la personnalité de ce spermatozoïde et me présente sous cette dénomination jusqu’au terme de mon existence. Terme qui, on le verra, se situera très loin dans le temps.
La nature du personnage et son heureuse longévité rendent compte du titre dont j’ai affublé mon élucubration. Même s’il semble parfois inapproprié, j’y tiens et je le garde. J’aurais pu m’approcher un peu plus de la vérité biologique et associer à mon spermato la cellule réceptrice. En ce cas, je me décrivais comme “ovocyte fécondé” ou, mieux, comme “œuf. C’était plus authentique, mais l’œuf octogénaire, ça sonne bizarre et ça passe difficilement.
Je ne crois pas avoir écrit une vraie biographie mais un récit, ou plutôt une suite de récits atypiques. J’aime raconter des histoires. Pas l’Histoire ni une histoire, fût-ce celle de ma vie sous une forme traditionnelle et narcissique. Alors j’en raconte beaucoup. Toutes sont vraies, exception faite de quelques détails secondaires et de petite importance. Quelquefois j’en rajoute, j’enjolive et j’exagère.
Ou au contraire je me tais, je passe sous silence, je réduis le poids et la place de certains personnages, de certains événements. J’en ai le droit, l’exactitude n’est pas une obligation littéraire. Mais, grosso modo, je m’y conforme.
Il est dit et répété au cours de ce travail que je ne suis pas quelqu’un de très sérieux. On prendra “sérieux” dans le sens de grave. En fait, je suis enclin à la non dramatisation de ce qui n’est pas dramatique et je préfère l’insouciance à l’angoisse. Ça facilite la vie. Ça rend aussi supportable la perspective de la mort, dont il est fait abondamment état vers la fin de mon récit avec un détachement qui n’est pas de façade.
Les histoires que je raconte correspondent à diverses périodes des deux siècles que j’ai fréquentés. On y trouvera des références précises aux coutumes et mœurs de ces temps, pas suffisamment éloignés pour qu’on puisse les considérer comme archaïques. Les années soixante, c’est vieux, mais ce n’est pas le Moyen-âge.
La philosophie n’a pas sa place dans ces récits. Je la respecte trop pour m’adonner à ses délices et à ses poisons. Il n’en est pas de même pour les religions. Je les respecte, bien sûr, mais il m’arrive d’exprimer un point de vue critique à leur encontre. Sans discrimination.
La politique n’est pas absente de mes propos. Dans la mesure où il est licite d’avoir des opinions, j’use de cette licence depuis toujours. Je ne m’avance pas masqué. Je ne fais pas non plus de prosélytisme
N’ayant garde d’oublier deux des axes fondamentaux de la vie d’un honnête spermatozoïde, je consacre un verset aux femmes et un à l’amitié.
La densité d’une vie est extraordinaire. “A chaque instant il s’y passe quelque chose”. Je parle donc d’énormément de choses. Souvent j’en parle plus que je ne l’écris. Il en résulte un style plus proche du langage parlé que de la narration littéraire. Y compris par l’intrusion de vilains mots. Je m’en excuse mais j’assume et je persiste.
Bon, le vieux spermatozoïde vous souhaite bonne lecture.
LA CRÉATION
Le spermatozoïde octogénaire, c’est moi.
Lorsque je passe dans mon quartier rue Philibert Delorme, non loin de la Porte d’Asnières, je jette un coup d’œil désabusé sur la façade du numéro 24, à moins que ce ne soit le numéro 12, tout ça est si vieux...
Si je réfléchis bien, c’est là que j’ai fait mes premières armes.
Je m’en souviens vaguement. Peut-être même que je ne m’en souviens pas mais que je me l’imagine, en tenant compte des dates et des lieux, parties intégrantes de mon histoire. C’était en septembre 1924, dans la première quinzaine du mois. Je ne peux pas dire s’il faisait beau ou s’il pleuvait. Ma configuration d’alors m’interdisait toute vue sur l’extérieur, ni même sur le théâtre de l’opération. Je n’étais qu’un spermatozoïde, en tous points semblable aux cent cinquante millions d’autres issus de la couvée du jour. Couvée me semble un terme inapproprié. Le père, qui n’était encore que le géniteur, ne couvait pas. Il éjaculait. Mais si je parle d’éjaculat pour désigner une communauté d’individus, ça ne fait pas très correct.
Je suis aussi dans l’incapacité de mentionner l’environnement social et politique de ce jour. Je peux juste rappeler qu’en cette année 1924 les élections législatives avaient porté à la Chambre des Députés le “ Cartel des Gauches”. Il succédait à la majorité réactionnaire élue en 1919 sous le nom de “ Chambre Bleu Horizon ”, référence aux couleurs des uniformes de l’armée victorieuse. Appellation empreinte de militarisme chauvin Bien sûr, à l’époque, je ne savais rien de tout ça.
Mais ce succès de la gauche, même composite et timide, a probablement influencé mon évolution politique ultérieure. Allez savoir.
J’ai eu de la chance. Sur les innombrables postulants, j’ai été le seul à profiter de la promotion du jour, l’intrusion dans un ovocyte.
Je n’étais pourtant ni intrigant ni brutal, mais j’ai réussi là où mes congénères ont échoué.
Mon installation dans cet univers jusqu’alors totalement inconnu me parut confortable. Je pouvais y prendre mes aises. Bien sûr, je n’y retrouvais pas mes camarades habituels. Eliminés par l’inexorable processus de sélection dont j’avais bénéficié, ils étaient tous morts. Comme je ne les avais pas fréquentés pendant bien longtemps, ma peine fut minime. J’étais même plutôt satisfait de survivre.
Il n’y avait pas lieu de philosopher. Il me fallait obéir aux lois de la nature.
Je le croyais. J’étais encore influencé par des idées aussi floues que celle de “nature” et englué dans le conformisme moutonnier d’un idéalisme bêlant. Pour un peu, j’aurais cru en Dieu ! J’apprendrai plus tard que la notion de nature ne correspond pas à grand-chose de précis et recouvre aussi bien les arbres du Parc Monceau que les pulsions lubriques de tout un chacun ou la prolifération des vers dans les fosses nasales d’un cadavre. Il serait faux de prétendre que la nature fait bien les choses. Si on se réfère aux innombrables méfaits qui polluent la vie des humains (la mort, la douleur, l’angoisse, la connerie, les thromboses hémorroïdaires, le racisme par exemple), la nature, dont découleraient directement ou indirectement tous ces phénomènes, n’est pas si bonne que ça.
J’ai donc obéi aux lois de la biologie, préférant cette formulation à la précédente.
J’ai commencé à faire connaissance de mon partenaire, plus exactement de mon complément, l’ovocyte de la génitrice. Il ne m’échappait pas que nous aurions un bon bout de chemin à faire ensemble. Autant fixer tout de suite les règles de la coexistence.
Nous différions par la taille (j’étais minuscule à côté de cette grosse masse), la mobilité (je m’agitais dans tous les sens, l’autre ne bougeait pas), la forme (je ressemblais à un serpent à petite tête, mon partenaire à une boule de billard).
L’affaire semblait délicate. Evidemment, j’étais content d’être là, mais je me demandais com

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