Spécial portraits

Talese Gay, Adrien Bosc, Laurence Butet-Roch, Richard Vallerand, Michel Rabagliati, Marc Seguin, Émile Duchesne, Sylvie Drapeau, Marie-Claire Blais, David Altmejd, Geneviève Pettersen, Alain Farah, Véronique Côté, Serge Bouchard

Description

Point de rencontre entre le journalisme, les arts visuels et la création littéraire, le portrait est un espace de renouvèlement infini. Douze collaborateurs—romanciers, dramaturges, journalistes, bédéistes, peintres, anthropologues et photographes—ont exploré cette forme, l'ont revisitée, en ont redéfini les contours.

Sujets

• Disciplines
• Language Arts
• Journalism
• Dossier
• Portrait

Informations

• Publié par: Atelier 10
• Date de parution: 28 mars 2016
• Nombre de lectures: 0
• EAN13: 9782897591670
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 20 Mo

Extrait

Sommaire Nouveau Projet09, printemps — été 2016

En couverture

David Altmejdest un sculpteur québécois. Né à Montréal en 1974, il habite désormais New York et participe à de nombreux évènements internationaux. En 2007, il représentait ainsi le Canada à la Biennale de Venise. En 2016, deux expositions monographiques sont consacrées, au Nasher Museum of Art, en Caroline du Nord, et au Musée royal des beaux-arts de Bruxelles.

Photo :Cindy Boyce

6 — sommaire

Ouverture

 28 correspondances  33 le mode d’emploi  Sept étapes pour  humaniser la police  MarieClaude ÉlieMorin

 36économie environnementale  Notre assiette vatelle craquer ?  PierreOlivier Pineau

38le nouvel urbanisme  Réinventer la ville, une  artère commerciale à la fois  MarcAndré Carignan

 41les lectures  Benoit Dorais

 43la lettre de l’étranger  Le jour qui changea  à jamais la Catalogne  Gabriel Anctil

 49histoire des mouvements sociaux  Un lieu pour les idées nouvelles  MarcAndré Cyr

 52la visualisation de données  Couts francs Judith Oliver  54en principes  Guy Rocher

 56l’idée à voler  La cité d’or  MarcAndré Sabourin

Récits, reportages et essais

SPÉCIAL PORTRAITS  62 Le syndrome du messie—Alain Farah  70 Iles(trois)—Véronique Côté  77 n’est pas une catastrophe naturelle Ceci  —Geneviève Pettersen  80 Les devoirs dutallyman—Émile Duchesne

 autoportraits  84 Moi, à Montréal, le 19 novembre 2015—Marc Séguin  85 Moi, devant ma robe marbrée de sel—Sylvie Drapeau  86 Moi, changeant mes cordes—Michel Rabagliati  87 Moi, en mai 2006, à Cimo Shakaigan—Serge Bouchard  88 Moi, un matin de juin 2015, dans l’île de Key West—MarieClaire Blais

 89 photoreportage  Pelleteurs de nuages—Laurence ButetRoch

 97 bédéreportage  L’école à l’étude—Richard Vallerand

108 les grands essais  Le porteur de mauvaises nouvelles—Gay Talese  Avec une introduction d’Adrien Bosc

 16 intro  L’état dans lequel nous sommes — Nicolas Langelier

127 fiction  Marianne et les ogres — Patrick Nicol

134 poésie  Les filles sont belles ce soir — Chloé SavoieBernard

Commentaire

137arts visuels  L’art de la guerre  Catherine Couturier

141essai  L’étrange cas du racisme sexuel  Martin Gibert

146musique  Bras de fer en clé de sol  Olivier Robillard Laveaux

Varia

 10 mécènes et partenaires fondateurs

 13 courrier

 25 donateurs

150collage

162mes six derniers mois Nicolas Dickner

sommaire — 7

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60 — spécial portraits

SPÉ

SPÉCIAL PORTRAITS — Pour dessiner plus en détails le relief de ce siècle accidenté, nous avons choisi de revisiter une forme: le portrait. Point de rencontre entre le journalisme, la littérature et les arts visuels, le portrait permet d’humaniser des lieux, de donner corps aux évènements, de poser les contours de réalités un peu floues, et de mettre en lumière des anonymes ou des personnes qu’on croyait trop bien connaitre.

MarieClaire Blais,Serge Bouchard, Véronique Côté,Sylvie Drapeau,Alain Farah, Geneviève Pettersen,Marc Séguin,Michel Rabagliati,Isabelle Arsenault—sans parler de David Altmejd—nous ont faiten couverture l’honneur de se prêter au jeu. Leurs contributions inédites rejoignent celles deLaurence ButetRoch, Émile DuchesneetRichard Valleranddans ce riche dossier qui compte aussi un chef d’œuvre oublié du nouveau journalisme, signéGay Talese.

Portrait de David Altmejd parCindy Boyce

spécial portraits — 61

LE SYNDROME DU MESSIE | spécial portraits | Mélanie Joly, Rodolphe Husny, Marc-André Viau : portraits croisés de trois politiciens et, en filigrane, toujours, inévitablement, celui de l’écrivain,physiquement dépolitiqué. — Alain Farah

C O N S I D É R É D A N S C E T E X T E e La politique électorale au 21 siècle, et celle qui se manifeste (rarement) comme une intensité fugace et imprévisible. La notion de vocation. David Foster Wallace, John McCain,House of Cards et la difficile question de l’authenticité. La grande lassitude de Charles Baudelaire.

De 1983 à 1991, j’ai fréquentéune école catholique de Cartierville, dans le nord de Montréal. Parmi mes sou- venirs les plus indélébiles, j’ai en tête ces curieux mo- ments où, agenouillés dans la chapelle de l’école, nous écoutions les Sœurs de l’Immaculée-Conception nous parler devocation. Inquiet de mon propre sort et déjà sensible au démon de la singularité, je m’épuisais cer- tains soirs, à genoux dans ma chambre, à prier le ciel pour ne pas être conscrit par l’Armée de Dieu. Je savais déjà que le vœu de chasteté n’allait pas me convenir. Trois décennies plus tard, cette question de la voca- tion me trouble encore. Surtout quand je pense à la poli- tique : pourquoi et comment des gens de mon âge, des gens beaux, des gens intelligents, décident-ils de s’en- gager, aujourd’hui, dans la politique des politiciens ? Ressentent-ils un appel, au milieu de la nuit ? Jusqu’à quel point les causes qu’ils défendent dépassent-elles leurs intérêts personnels ? Peut-on les croire quand ils disent vouloirchanger les choses? Quand, devant mon écran de télévision, je vois des hommes et des femmes de ma génération s’engager dans les vieux partis, je suis incrédule. Peut-être parce que la politique, moi, j’en sors de plus en plus. J’ai tou- jours en tête, dès que je rêvasse à la possibilité d’y aller

62 —spécial portraits

moi aussi, ce que Baudelaire a écrit le 5 mars 1852 à son précepteur : « Vous ne m’avez pas vu au vote, c’est un parti pris chez moi. Le 2 décembre m’a physique- ment dépolitiqué. » Le poète, qui était monté aux bar- ricades pendant la révolution de février 1848, se replie. En quelques mois seulement, les idéaux romantiques ont été liquidés; le 2 décembre 1851, Louis-Napoléon Bonaparte a pris le pouvoir par un coup d’État, avant de se proclamer, un an plus tard, empereur des Français. « Physiquement dépolitiqué ». Ce choix d’adverbe, explique l’essayiste Pierre Laforgue, signifie l’intention non pas de renoncer à une conscience et à une action politiques, mais de prendre une distance vis-à-vis des lieux où elles se manifestent, pour ne plus y engager son corps directement. La campagne fédérale dont nous sortons à peine, tout comme les élections provinciales du printemps 2014, m’a profondément lassé, si bien que je n’ai presque plus d’intérêt pour la politique politicienne. Appelons ça ma démobilisation. Je ne crois pas être le seul à ressen- tir cela. Cette fatigue se comprend mieux en regard des intensités vécues en 2012, comme si toute expérience politique devait désormais s’évaluer à l’aune de ces semaines de mobilisations spontanées. Nous sommes nombreux, peu importe nos allégeances, à avoir eu l’im- pression, pour une rare fois, que l’ordre établi vacil- lait, que les évènements échappaient à ce qui est écrit d’avance. Mais l’élection du Parti québécois, en sep- tembre 2012, seulement par des poussières, puis l’em- pressement de ce nouveau gouvernement à tourner la page sur cette mobilisation historique, le délétère débat sur la Charte des valeurs, l’opportunisme populiste de