Centrafrique
192 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

192 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Description

L'histoire de la Centrafrique est une suite de drames humains qui se déroulent loin des regards et dont on parle à peine. En 1905, le pays est intégré à l'AEF comme colonie française et va connaître le système colonial le plus féroce. En 1959, à la veille de l'Indépendance, l'équipe politique est décimée par un attentat et les médiocres ne cesseront ensuite de se coopter entre eux à la tête du pays, jusqu'à aujourd'hui.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 septembre 2014
Nombre de lectures 16
EAN13 9782336353814
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0000€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
4e de couverture
Titre
Honki de Sassara



Centrafrique

… la dérive singulière
Copyright

© L’Harmattan, 2014
5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris

http://www.harmattan.fr
diffusion.harmattan@wanadoo.fr

EAN Epub : 978-2-336-70392-3
Centrafrique
Une contrée isolée, longtemps à l’écart et ignorée…
Bien avant notre ère, le rivage méditerranéen de l’Afrique notamment autour de Carthage, de la Cyrénaïque et de l’Égypte s’enorgueillissait d’abriter de grandes cités à l’architecture moderne servies par une société cultivée et aux goûts raffinés ; résolument tourné vers le Nord et l’Europe il participait activement aux grands mouvements de civilisation ; ceux-ci n’allaient pas sans d’incessantes guerres de conquête habillées en croisades pour leur donner l’onction religieuse d’entreprises honorables ; l’objectif visé n’en restait pas moins la constitution d’immenses empires qu’on organisait en aires durables d’influence politique, de diffusion culturelle et d’échanges commerciaux. Toutefois, l’Europe continuait de focaliser son attention et ses intérêts en priorité sur l’Asie et le Pacifique qui à ses yeux présentaient les meilleures opportunités d’affaires juteuses. Avec la Chine et le Japon qu’elle ne pouvait soumettre à sa loi, elle signait des accords commerciaux et y installait des comptoirs. Ailleurs, dans le Sud-Est asiatique continental, Inde, Cambodge, Vietnam, et insulaire, Malaisie, Indonésie où les rapports de force étaient à son avantage et lui permettaient d’avoir les coudées franches, elle créait des colonies. Bientôt elle sera rejointe par les Etats-Unis d’Amérique qui mettront les Philippines sous leur tutelle.

L’épopée des grands voyages commerciaux de cette époque rapporte que des caravanes de marchands descendaient du nord de l’Afrique vers le Sahara désertique ; elles apportaient du sel et des épices, l’enseignement de l’écriture, la lecture des saintes écritures et des œuvres savantes ; elles diffusaient la culture dans la région et on met à leur actif la création et l’animation de Tombouctou, première université noire au sud de la méditerranée. C’est donc beaucoup plus tard au temps des missions d’aventure et de découverte que le reste du continent africain en ses façades maritimes à l’ est, à l’ ouest et au sud du Sahara sera exploré et occupé. En différents points de cette côte, les uns pour leur intérêt stratégique, les autres pour leur meilleure accessibilité, furent érigés de nombreux comptoirs d’échanges commerciaux pour accueillir les bateaux marchands, y compris la flotte négrière. Mais encore longtemps on hésita à se risquer plus en profondeur à l’intérieur des terres, en particulier dans la partie couverte par la forêt. Ce vaste territoire resta exclu et coupé du monde extérieur. Seuls des autochtones y entraient en dernier recours pour s’y cacher et ne plus en ressortir. Les esclavagistes arabes descendant du nord-est sous les ordres du Khédive d’Egypte pouvaient opérer des razzias dans tout le Darfour, ils n’osaient jamais poursuivre leurs victimes jusque dans la grande forêt où beaucoup trouvèrent refuge et s’installèrent définitivement. Leurs collègues aux ordres du Sultan de Zanzibar, qui pénétrèrent le continent sur sa façade est, réalisèrent des rafles d’esclaves jusqu’en Ouganda et au Sud-Soudan. Eux non plus n’abordèrent jamais la grande forêt. Lorsqu’au milieu du 19 e siècle Stanley entreprit de traverser le continent d’ est en ouest et qu’en 1876 il remonta le cours du Congo, la zone, comprise entre les deux rivières, Oubangui au sud et Chari au nord qui sera appelée Oubangui-Chari, était bien à l’écart de son itinéraire et manqua une nouvelle occasion d’être explorée. Léopold II, roi des Belges, commençait à lorgner avec insistance vers ce no man’s land et n’excluait pas de l’intégrer à l’Etat indépendant du Congo, son bien personnel ; Savorgnan de Brazza installé à Brazzaville eut vent du projet d’annexion ; il en informe la France, sa patrie, qui immédiatement intègre la zone à son espace à explorer et à coloniser. Il paraît vraisemblable que la France ait mis l’Oubangui-Chari dans son escarcelle avec la seule volonté de ne pas faire un autre cadeau territorial aux Belges. Aussi, des années plus tard, s’avère-t-il de façon affligeante que la France ne sait toujours pas plus qu’à l’époque ce qu’elle pourrait bien faire de ce territoire. Le pays tout entier souffre de ce statut de « territoire acquis au pis-aller », ce qui en fait un État traité inéquitablement, toujours en fin de liste et à la traîne des autres. C’est le pays dont on expédie les problèmes pour vite les oublier et qu’on relègue dans les quantités négligeables.

Pourtant, déjà à l’époque, le territoire ne manquait ni d’intérêt ni d’atouts en dehors d’avoir servi de refuge à diverses populations fuyant devant des esclavagistes. La nature y donne à observer une grande biodiversité. La flore, constituée de grands arbres en zone forestière, renferme en grandes quantités diverses essences rares ; la faune riche et variée comprend des éléphants aussi bien en forêt que dans la savane où évoluent des rhinocéros, des lions, des guépards, des panthères, des buffles et toutes sortes d’antilopes qui pourraient facilement aiguiser l’appétit de chasseurs d’images ou de trophées ; les petits cours d’eau charrient du diamant alluvionnaire et des paillettes d’or ! Mais la seule évocation des difficultés à surmonter, voire des périls à affronter, pour d’abord accéder dans la zone et ensuite y survivre assez longtemps pour exploiter les richesses suffisait à décourager jusqu’aux plus intrépides parmi les missionnaires. On disait en effet que les seules voies d’accès étaient les grandes rivières ; on imaginait avec frayeur l’impétuosité de leurs cours sauvages, irréguliers, coupés de rapides et infestés d’hippopotames irascibles et de crocodiles hypocrites. Il y avait ensuite la chaleur et la moiteur de l’air du sous-bois qui se conjuguaient en une atmosphère si étouffante que s’y maintenir se payait en souffrances inhumaines. L’homme y était régulièrement pris en chasse par une certaine mouche tsé-tsé à la recherche continuelle de sang humain pour son breuvage ; cette glossine vampire, non contente de soutirer du sang à ses victimes, leur transmettrait également la trypanosomiase, une maladie effroyable qui allume un feu dans votre cerveau et vous rend fou avant de vous plonger dans le sommeil et la mort. De jour comme de nuit, en sous-bois comme dans la savane, des moustiques vous assaillent pour prélever leur tribut de sang en même temps qu’ils vous inoculent la fièvre jaune ; celle-ci, après avoir jauni vos yeux et assombri vos urines, vous fait saigner de toutes vos muqueuses dans un tableau de fatigue extrême et de grandes douleurs qui vous amenaient inexorablement à la mort après un dernier vomissement de sang noir, le vomito negro des Portugais ; avec une fréquence encore plus élevée ces maudits moustiques propagent également la malaria, la bien connue fièvre des marais dont les crises font passer le corps par des périodes de chaud et de froid avec des frissons si intenses qu’ils se transmettent en secousses au lit du malade ; l’atteinte des reins et du cerveau aggrave le pronostic vital de ces crises chez les sujets vierges exprimant leur première exposition à l’infestation.

Somme toute, cette partie du continent était présentée comme un bout d’enfer sur terre : l’homme y était partout et à tout instant en danger. En effet, dès qu’il parvenait à s’extirper de l’étouffant sous-bois, il était dans la savane immédiatement pris sous la menace d’être dévoré par l’une des innombrables bêtes fauves ou de mourir d’envenimation par morsures de serpents et piqûres de scorpion. Habituellement à cet instant précis de la narration la voix du conteur de ces malheurs se casse ; elle devient légèrement chevrotante par effet simulé pour non seulement susciter la frayeur mais encore planter durablement et profondément dans l’esprit de l’auditoire le dégoût et la répulsion que lui provoquera désormais la seule évocation de ces lieux et de ces moments difficiles. Pareilles histoires

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents