216
pages
Français
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1994
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1994
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Publié par
Date de parution
01 novembre 1994
Nombre de lectures
15
EAN13
9782738140517
Langue
Français
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Date de parution
01 novembre 1994
Nombre de lectures
15
EAN13
9782738140517
Langue
Français
© O DILE J ACOB , NOVEMBRE 1994 15, RUE S OUFFLOT , 75005 P ARIS
ISBN : 978-2-7381-4051-7
www.odilejacob.fr
Le code de la propriété intellectuelle n'autorisant, aux termes de l'article L. 122-5 et 3 a, d'une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l'usage du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration, « toute représentation ou réproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (art. L. 122-4). Cette représentation ou reproduction donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Ce document numérique a été réalisé par Nord Compo .
Introduction
La France va mieux qu’elle ne le croit, mais moins bien qu’elle ne le pourrait. Peu habituée à la loi d’airain des cycles économiques, elle sort inquiète de la récession et inconsciente des métamorphoses qu’elle a réalisées depuis vingt ans. Certes, ce succès s’est accompagné d’un échec majeur : l’irrésistible accroissement du chômage et surtout la multiplication des chômeurs de longue durée, matrice de l’exclusion. Il serait vain d’incriminer la fatalité, le destin ou la malchance : la société française a fait, consciemment ou non, le choix du chômage. Mais l’angoisse devant cette réalité ne se confond pas, à elle seule, avec les incertitudes du pays. La France sait, au fond d’elle-même, qu’une époque s’achève et qu’il lui faut réinventer un nouveau projet. Un projet, car à la différence des autres démocraties, nous ne pouvons nous en passer. Ce qui, chez l’autre, relève de l’ordre des choses, doit, chez nous, s’incarner en une vision. Rançon de notre universalisme, produit de l’histoire, cette exigence est aujourd’hui notre principal défi. C’est le préalable à toute réforme.
Ce projet français s’inscrit dans un monde qui nous impose ses rythmes et ses révolutions plus encore qu’il ne l’a fait jusqu’à présent. Ce doit être pour notre plus grand profit, comme ce le fut depuis vingt ans. La France et les Français dans leur ensemble ont bénéficié de l’ouverture au monde et de son corollaire, la course à la productivité. Nous n’avons pas le choix : la réalité internationale nous surplombe avec une force chaque jour plus grande, et sauf à rêver de la commander, comme le Petit Prince de Saint-Exupéry les étoiles, nous devons la faire nôtre. D’autant plus qu’elle nous offre, tels que nous sommes, avec nos atouts et notre puissance, de vraies opportunités. Mais il n’existe de France puissante dans le monde qu’à travers un dessein européen. Nous le possédions, mais la disparition du communisme et la fin de Yalta l’ont bousculé. Il nous faut, d’ici l’an 2000, le redessiner, avec, à l’esprit, une double conviction. Nous ne disposons pas d’autre alternative à notre choix européen. Prétendre qu’il conditionne notre organisation économique et sociale au prix de nos degrés de liberté, c’est ignorer une évidence : sans insertion européenne, la France serait bien davantage ballottée par les vents des marchés. De ce point de vue, la perspective de l’union économique et monétaire représente à la fois un acte stratégique majeur et un instrument de transformation de la société. Elle nous fait passer d’une compétition entre entreprises à une compétition entre systèmes socio-économiques, entre pays européens d’abord, mais surtout entre le modèle européen et les autres grands acteurs mondiaux. C’est à cette aune-là que se mesure l’obsession de réduction des déficits publics telle qu’elle va dominer, à partir de 1995, le nouveau cycle de croissance.
À nous de trouver, à l’intérieur de l’équation européenne, les clefs d’un nouveau compromis. Celui que la société française a élaboré en 1945 s’affaisse : l’État-providence de l’après-guerre avait permis une extension indéfinie de la classe moyenne avec, comme valeur cardinale, l’égalité ; il bute aujourd’hui sur l’envolée des déficits publics et l’apparition, à rebours des principes d’égalité, de groupes qui ont payé, pour le compte commun, un tribut à la crise. Le compromis de l’an 2000 doit, lui, concilier l’impératif de productivité et la cohésion sociale, les principes d’une société ouverte et le devoir de solidarité, l’efficacité et l’équité. Équité : tel est en effet le nouveau maître mot, comme égalité l’a été pour le modèle de l’après-guerre. D’un côté, donc, une course toujours renouvelée à la productivité : elle détermine les grandes lignes de notre politique macro-économique, la mutation des grands services collectifs, la transformation de l’État-providence et enfin, une modernisation de l’État désormais inévitable. De l’autre, une quête inlassable d’une plus grande équité : elle signifie infléchir la politique de l’emploi, redessiner le système de protection sociale, modifier l’organisation de l’éducation et de la formation avec une obsession : réintroduire dans la société française cette partie d’elle-même en voie de marginalisation. Il s’agit, à long terme, de refonder un contrat social qui se perpétue aujourd’hui dans nos discours collectifs mais que nie la réalité quotidienne. Encore faut-il que ce nouveau dessein soit porté par la société et ne demeure pas l’apanage de l’État et des élites, sous peine de s’enliser.
L’ambition n’est pas mince et elle déborde pour une part la période 1995-2000. Celle-ci doit donc être l’occasion d’une inflexion décisive, faute de laquelle la France serait condamnée au déclin, entraînant un appauvrissement collectif des Français, un affaissement de nos valeurs et un recul irréversible sur l’échiquier mondial. Une inflexion de cette ampleur doit être l’expression d’un choix collectif. Comment la société française y parviendra-t-elle, elle qui a toujours privilégié le changement par spasmes à l’évolution progressive, le forceps au consensus, le réformisme par fatalité au réformisme délibéré ? Le premier de nos défis est d’esquisser une méthodologie du changement dans un pays où l’opinion est devenue le premier des acteurs sociaux et où seul son accord, explicite ou tacite, peut garantir les réformes à réaliser.
Composée de personnalités d’horizons divers, la Commission est, pour l’essentiel, parvenue à une vision commune des enjeux 1 . Aussi ses membres espèrent-ils que l’accord auquel ils sont arrivés dans leur grande majorité préfigure une conscience collective des problèmes. C’est dans un tel cadre que devrait se développer le débat naturel dans une démocratie sur les solutions à leur apporter.
PREMIÈRE PARTIE
L’impératif d’efficacité
CHAPITRE 1
Une ouverture au monde réussie, mais à un prix élevé
Notre premier défi est peut-être le plus difficile : mieux nous connaître, mieux nous percevoir. Ne plus osciller entre un pessimisme exagéré et une insouciance démobilisatrice. Mesurer la réussite de notre insertion dans le monde et le prix social que, par égoïsme collectif, nous avons payé. Échapper au divorce entre l’économique et le social que nous considérons, à tort, comme naturel.
La France ne peut envisager son avenir qu’en évaluant à leur juste mesure les efforts considérables qu’elle a accomplis depuis de si nombreuses années pour « rester dans la course ». Que s’est-il passé depuis vingt ans sinon une formidable modernisation du pays, accompagnée d’un enrichissement global, qui suscite quoi qu’on en dise le respect chez nos partenaires étrangers ? Vieille habitude, la France croit reculer quand elle avance. Un bilan fait, elle s’aperçoit que, pour l’essentiel, elle a conservé son rang. L’histoire des deux dernières décennies ne déroge pas à cette règle. Que n’a-t-on pas dit de cette France désuète, hostile au capitalisme, effrayée par le grand large, entravée par son État, avide de protections et incapable de sentir les pulsations du monde ! Comment faire comprendre aux Français que la réalité est rigoureusement inverse ? Comme tous les pays qui ont réussi leur parcours économique, la France a compris d’abord, maîtrisé ensuite, les règles que le monde lui imposait. Peu nombreux sont ceux qui l’en croyaient capable. Son économie s’est ouverte, les structures de ses entreprises, le fonctionnement des marchés, les règles de la compétition, ont été bouleversés par une marche, réussie, vers davantage d’efficacité. Les Français devraient, par conséquent, vivre leur rapport au monde dans des termes qui n’ont rien de commun avec ceux de la génération précédente.
Changer pour croître , telle est la devise inconsciente du pays depuis un demi-siècle. Elle s’accompagne depuis la seconde guerre mondiale d’une ouverture à la compétition internationale qui s’inscrit dans une rupture radicale avec la période antérieure, celle du repli des échanges extérieurs sur les colonies et de la stagnation de l’économie française. Les temps forts de l’ouverture ? 1957 et l’acceptation du Marché commun, 1958 et la convertibilité externe de la monnaie ; mais aussi 1969, avec le plan de stabilisation de l’après-68, ou 1983 et le choix de la désinflation compétitive ; 1986 avec la liberté des prix et la libération des marchés de capitaux achevée en 1990 ; 1992 et la perspective de la monnaie unique ; 1993 et le débat à propos du GATT . Les grandes tensions économiques du pays se sont toujours résolues « du bon côté », dans l’adoption d’une stratégie dynamique de confrontation directe avec la concurrence internationale. Depuis le premier choc pétrolier, ce parcours n’a certes pas été linéaire. Mais il n’a jamais été infirmé : la France est aujourd’hui un pays aux performances macro-économiques honorables, qui a profondément modernisé le fonctionnement de son économie.
En dépit des crises, les performances de la France sur le long terme sont bonnes
« Juge de paix » des performances d’une économie, la croissance du PIB atteint 2,3 % en moyenne annuelle sur la période 1974-1994, très légèrement supérieure à la performance de nos