La Grève en France
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La Grève en France , livre ebook

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Description

La France, patrie européenne de la grève ? Le pays du syndicalisme révolutionnaire, de la grève générale et des grandes fièvres sociales est souvent associé à l’image d’une confrontation permanente qui serait la marque de fabrique de ses rapports sociaux. D’abord interdite et réprimée, la grève a fini par irriguer l’usine et le bureau pour devenir un fait social reconnu par la Constitution. Comment en est-on arrivé là ? Qui fait grève ? Pourquoi ? Comment les pratiques revendicatives ont-elles évolué  Quelle est l’attitude des acteurs sociaux (État, patronat, syndicats) face à cet événement toujours singulier ? Déchiffrer les grandes évolutions du phénomène gréviste, telle est l’ambition de ce livre. À travers la grève, c’est l’histoire de la société française qui se donne en spectacle. Docteur en histoire, Stéphane Sirot est notamment chargé de cours à l’université de Cergy-Pontoise, chercheur associé au Centre d’histoire sociale du XXe siècle de l’université Paris-I et membre du comité de rédaction de Histoire et Sociétés, revue européenne d'histoire sociale. Il est l’auteur d’un Maurice Thorez. 

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 septembre 2002
Nombre de lectures 4
EAN13 9782738142993
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,1050€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Ouvrage proposé par Nicolas Offenstadt
© O DILE J ACOB , SEPTEMBRE  2002 15, RUE S OUFFLOT , 75005 P ARIS
www.odilejacob.fr
ISBN : 978-2-7381-4299-3
Le code de la propriété intellectuelle n'autorisant, aux termes de l'article L. 122-5 et 3 a, d'une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l'usage du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration, « toute représentation ou réproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (art. L. 122-4). Cette représentation ou reproduction donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
www.centrenationaldulivre.fr
Ce document numérique a été réalisé par Nord Compo .
Abréviations

AD  : Archives départementales
AFC  : Alais, Froges et Camargue
AN  : Archives nationales
APP  : Archives de la préfecture de police de Paris
BIT  : Bureau international du travail
BNP  : Banque nationale de Paris
CDU  : Centre de documentation universitaire
CFDT  : Confédération française démocratique du travail
CFTC  : Confédération française des travailleurs chrétiens
CGC  : Confédération générale des cadres
CGPF  : Confédération générale de la production française
CGT  : Confédération générale du travail
CGTSR  : Confédération générale du travail syndicaliste révolutionnaire
CGTU  : Confédération générale du travail unitaire
CHIMT  : Cahiers d’histoire de l’Institut Maurice Thorez
CHIRM  : Cahiers d’histoire de l’Institut de recherches marxistes
CIP  : Confection industrielle du Pas-de-Calais
CNAM  : Conservatoire national des arts et métiers
CNPF  : Conseil national du patronat français
CNRS  : Centre national de la recherche scientifique
CNT  : Confédération nationale du travail
DEA  : Diplôme d’études approfondies
DES  : Diplôme d’études supérieures
EHESS  : École des hautes études en sciences sociales
EDI  : Études et documentations internationales
FFTL  : Fédération française des travailleurs du livre
FO  : Force ouvrière
IC  : Internationale communiste
IEP  : Institut d’études politiques
IFOP  : Institut français d’opinion publique
IHSM  : Institut d’histoire sociale minière
ISST  : Institut des sciences sociales du travail
MEDEF  : Mouvement des entrepreneurs et des entreprises de France
Mm  : Mémoire de maîtrise
MS  : Le Mouvement social
MSH  : Maison des sciences de l’homme
PCF  : Parti communiste français
PS  : Parti socialiste
PSU  : Parti socialiste unifié
PTT  : Poste Télégraphe Téléphone
PUF  : Presses universitaires de France
PUL  : Presses universitaires de Lille
RATP  : Régie autonome des transports parisiens
RFAS  : Revue française des affaires sociales
RFS  : Revue française de sociologie
SFIO  : Section française de l’Internationale ouvrière
SPD  : Parti social-démocrate (Allemagne)
SMIG  : Salaire minimum interprofessionnel garanti
SMTU  : Société montpelliéraine de transport urbain
SNB-CGC  : Syndicat national des banques-Confédération générale des cadres
SNCF  : Société nationale des chemins de fer français
SNECMA Société nationale d’études et de construction de moteurs d’avions
SNES  : Syndicat national des enseignements de second degré
STCRP  : Société des transports en commun de la région parisienne
SUD  : Solidaires, Unitaires et Démocratiques
REP  : Revue d’économie politique
UD  : Union départementale
UPA  : Union professionnelle artisanale
Introduction

La grève, cette cessation collective et concertée du travail, est un fait social qui attire le regard, suscite les passions et les analyses souvent contradictoires. Pas plus qu’un autre fait politique ou social, elle n’échappe au champ des sondages. Le 6 décembre 1998, l’IFOP affirme que 82 % des Français sont favorables à un service minimal en cas de conflit dans les services publics. Ce thème récurrent accompagne les poussées de fièvre gréviste, dès lors qu’elles touchent des secteurs, comme celui des chemins de fer, dont la place dans la sphère productive leur permet de ralentir l’activité économique et de contrarier la vie quotidienne des individus. Depuis 1988, pas moins de onze propositions de loi ont été déposées au Parlement pour imposer, comme l’indique la dernière débattue au Sénat en février 1999, « l’obligation légale d’un service public minimum ». Le président de la République lui-même, Jacques Chirac, lors de l’inauguration du TGV Méditerranée en juin 2001, réclame des « réflexions sur l’institution d’un service minimum que les Français appellent de leurs vœux 1  ». Les réactions à ce discours, de même que les débats au Parlement, découvrent chaque fois le jeu de rôle habituel : une droite unanime à condamner le préjudice subi par les entreprises et les usagers ; une gauche qui s’élève contre ce qu’elle condamne comme une volonté de porter atteinte au droit de grève. Ces débats, au-delà de leur rhétorique codée, laissent percer à quel point la grève fait partie de ces passions françaises qui alimentent des clivages historiques, des antagonismes traditionnels, politiques (droite/gauche) et sociaux (salariés/employeurs). Ils montrent aussi combien le phénomène gréviste s’inscrit au cœur de la société française contemporaine qui, en construisant un univers industriel et salarial potentiellement antagonique, a progressivement érigé le conflit au centre de la régulation des rapports sociaux.
Nous en arrivons là à une série de questions qui suscitent elles aussi régulièrement des débats entre les observateurs de ce fait social : quelle est la place de la grève dans le monde moderne ? Comment évolue-t-elle ? Sera-t-elle dépassée par d’autres modes de protestation et de régulation, ou est-elle destinée à perdurer avec force ? Sur ce terrain de l’analyse, comme sur celui de la polémique politique, les interprétations divergent.
Pour certains, la grève est l’expression d’une lutte de classes qui remet en cause le fonctionnement du système capitaliste, ou tout au moins exprime la rivalité foncière et irréductible entre les travailleurs et leurs employeurs 2 . En d’autres termes, la France serait le terrain, depuis deux siècles, d’une « bataille sociale » scandée par des épisodes épiques ou tragiques, depuis la révolte des canuts lyonnais de 1831 disposés à « Vivre en travaillant ou mourir en combattant », jusqu’au mouvement social de novembre-décembre 1995, en passant par le Front populaire et mai 1968. Or la grève est en effet au cœur de chacun de ces mouvements de contestation à l’ampleur et au retentissement considérables, tant au moment de leur déroulement que dans les mémoires.
D’autres estiment au contraire que la grève tend progressivement à s’ériger en mode de régulation naturelle des rapports sociaux qui n’implique pas, par essence, une remise en cause des formes de domination propres à la sphère productive 3 . Pourtant, depuis les années 1960 et l’entrée dans l’ère postindustrielle, la grève est régulièrement annoncée comme une pratique vouée au dépérissement par la construction de sociétés consensuelles 4 , ou au dépassement par la prolifération de nouveaux mouvements sociaux (féminisme, écologisme, régionalisme, etc.) dont le rapport salarial n’est pas l’élément central 5 . Ces jugements souvent hâtifs sont démentis à intervalles réguliers par l’actualité qui, parfois à l’étonnement des observateurs trop pressés, replace la grève au centre des préoccupations du moment. S’il est vrai que, depuis la décennie 1980, la conflictualité connaît une tendance à l’érosion, en France comme en Europe occidentale 6 , il n’en reste pas moins que des éruptions périodiques viennent rappeler sa vivacité. Deux événements des années récentes en apportent la démonstration. D’abord le mouvement social de novembre-décembre 1995 contre le plan Juppé de réforme de la Sécurité sociale et la remise en question des régimes spéciaux de retraite, emmené par les cheminots de la SNCF. Ce conflit a mis en ébullition la société et fait couler beaucoup d’encres contradictoires : « Les uns y ont vu un renouveau de la lutte des classes et la contestation globale d’une politique économique 7  » ; les autres ont privilégié une interprétation focalisée sur ce qu’ils apprécient comme une puissante persistance de la crispation sur des avantages acquis, estimant que les revendications des grévistes « ont su dépasser, mais sans aller très loin au-delà, le stade de la défense corporatiste ou catégorielle 8  ».
Cinq ans plus tard, dans la torpeur estivale de l’été 2000, la grève avec occupation de l’usine Cellatex à Givet (Ardennes) fait pendant plusieurs jours la une de la presse écrite et audiovisuelle. Les salariés de cette usine de fabrication de fibres textiles artificielles en liquidation judiciaire menacent de faire sauter l’usine et de déverser de l’acide sulfurique dans la Meuse. À la suite de ce conflit, d’autres s’en inspirent qui occupent eux aussi, dans une sorte de dynamique médiatique coutumière, le devant de l’actualité. Les analyses qui accompagnent la stupeur face à la résurrection apparemment soudaine de mouvements durs font largement intervenir la mémoire des temps anciens. On s’interroge par exemple sur le « retour du luddisme “briseur de machines” », pour souligner que ces mouvements « évoquent l’ambiance des premières révoltes ouvrières du XIX e siècle 9  ». Le sociologue Jacques Capdevielle y voit « la résurgence d’un anarcho-syndicalisme que l’on croyait étouffé par les années de crise ». Et le journaliste, suivant l’expert, d’évoquer, dans une prémonition hasardeuse, que « ce type de mouvements désespérés n’a rien d’une queue de comète. Ils pourraient au contraire se transformer en mouvements populaires. Si les gens venaient à s’identifier à cette forme de résistance 10  ».
On le voit, pour comprendre ces mobilisati

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