Pourquoi ils hypothèquent leur vie
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Description

Nombreux sont les jeunes d’Afrique qui désirent « monter », c’est-à-dire d’un point de vue géographique rejoindre le vieux continent, mais qui signifie aussi s’élever dans l’échelle sociale et accéder au monde plus riche que représente l’Occident. Momar est l’un d’entre eux. Il a fui le bidonville de sa banlieue de Dakar et se trouve à présent à Roquetas, en Espagne, à espérer chaque jour un peu de travail dans l’une des exploitations voisines. Pour son périple, il a choisi la voie terrestre, plus sûre, car on compte par milliers les morts engloutis dans l’Atlantique et la Méditerranée depuis une vingtaine d’années. Las, les candidats à l’exil ne sont pourtant pas moins nombreux à vouloir tenter leur chance. Et les femmes sont toujours les plus vulnérables, comme Virginie dont le voyage s’est arrêté au Maroc où elle est réduite à la mendicité avec ses deux enfants accrochés à ses vieilles frusques. Combien sont-ils, sont-elles, à errer ainsi à la recherche d’une vie meilleure ? Et quelles sont les responsabilités des politiques de l’Afrique subsaharienne ? N’est-il pas plus que temps que ces pays prennent la mesure du drame qui se joue et se battent enfin pour mettre un terme aux guerres civiles, à la corruption, à la pauvreté qui poussent tous ces pauvres hères sur la route ? Et le rôle de l’Occident dans tout cela ?

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 06 juin 2018
Nombre de lectures 0
EAN13 9782414237296
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0052€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composé par Edilivre
175, boulevard Anatole France – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-414-23730-2

© Edilivre, 2018
Dédicaces

A mon épouse et à mes enfants qui m’ont encouragé – je dirais obligé – à écrire ce livre « au lieu de passer mon temps à râler » devant la télévision, à la vue des images révoltantes de migrants entassés dans un rafiot.
* * *
A mon ami et frère Libasse, l’afro-optimiste.
Exergue

« J’ai joué mon rôle et ne demande qu’à m’effacer dans l’obscurité. (…) Je n’ai pas envie d’atteindre les 100 ans en essayant de résoudre les conflits à travers le monde. Mais je demeurerai un citoyen loyal pour l’Afrique du Sud et j’examinerai les demandes de mon pays qui seront dans l’intérêt de la paix ».
Extrait du discours prononcé en 2004 lors de l’annonce de son retrait de la vie publique
Nelson Mandela, Ancien Président de la République de l’Afrique du Sud
« N’gour kèneu douko niède » (wolof)
Interprétation en français : « En matière de pouvoir, il faut savoir se retirer à temps »
Léopold Sédar Senghor, ancien président de la République du Sénégal
Avant-propos
Voilà un grand paradoxe : l’Afrique est riche, nous dit-on. Tous les économistes et les organismes financiers et de développement internationaux s’émerveillent de son taux de croissance moyen très élevé comparativement au reste du monde. Pourtant, ses fils et ses filles, plus particulièrement ceux de la partie subsaharienne, la quitte en masse au péril de leur vie. Ce problème n’est pas nouveau. Il s’est juste amplifié. J’ai vu et connu des dizaines de personnes maintenant établies en Europe en passant par les routes les plus improbables. Toutes sont parties chercher une terre plus accueillante, le plus souvent économiquement.
La crise des migrants, qui s’est imposée dans l’actualité, a fait sortir de leur torpeur une opinion publique et des dirigeants politiques qui semblent ignorer que, depuis plusieurs années, des milliers de personnes disparaissent, sans laisser de traces, quelque part dans le Sahara ou en mer. Résidant au Maroc, pays situé, du fait du hasard géographique, sur la route des migrants, ce drame m’a toujours interpellé. Je voyais la vague monter et ne manquais pas de m’en inquiéter auprès des officiels subsahariens que j’ai rencontrés fortuitement ou dans le cadre professionnel. Evidemment mes remarques ne peuvent en rien changer leur état d’esprit, encore moins les inciter à réfléchir à des solutions. Je n’en ai d’ailleurs pas la prétention. C’est juste le sens du devoir, face à un phénomène que l’on peut qualifier de catastrophe, qui me pousse à réagir. D’autant plus, faut-il encore appuyer là-dessus, que nous donnons l’impression d’avoir la mémoire courte.
Rappelons nous. Il y a presque 20 ans (juin 1999), deux jeunes Guinéens, Yaguine Koita et Fodé Tounkara, avaient été retrouvés sans vie dans le train d’atterrissage d’un avion de la Sabena qui faisait la liaison Conakry-Bruxelles. Dans leurs bagages, une lettre dans laquelle ils appelaient en substance les dirigeants européens à intervenir pour mettre fin aux guerres et aider l’Afrique à vaincre la pauvreté. Sans le savoir, ils portaient là un message politique très fort. C’était en fait une dénonciation sans ambages de l’incapacité des dirigeants à trouver des solutions à la région subsaharienne qui peine à s’en sortir. L’une des principales raisons est sans doute une fixation sur le pouvoir qui pousse prétendants et gouvernants à faire parler les armes ou à user de toutes les formes de violence pour s’imposer. Cette situation a sans doute créé un cercle vicieux de la pauvreté dans nombre de pays.
Ce livre a justement pour objectif de mettre le doigt sur ce problème. C’est une synthèse des différentes conversations informelles que j’ai eues avec des collègues, des amis, des migrants, des personnes rencontrées par hasard et, bien évidemment, de mon vécu. Les maux, il y en a une multitude. Cependant, je n’ai soulevé que ceux qui me paraissent les plus pesants. Chaque problème peut d’ailleurs faire l’objet d’un livre car il y a tant à dire. J’ai aussi cité plusieurs fois le cas du Sénégal, pays que je crois connaître mieux que les autres parce qu’étant le mien. Certains constats ont été étayés par des chiffres tirés des différentes publications des organismes internationaux comme la Banque Mondiale, l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC), l’Organisation Mondiale pour la Santé (OMS), le Fonds des Nations Unie pour l’Alimentation et l’Agriculture (FAO) et bien d’autres.
« Procès d’intention ! », « il y a des avancées dans les domaines politique, économique et social ! », objecteront les défenseurs du verre à moitié plein. Il reste que pour moi et pour bien d’autres, le verre est aux 9/10 ème vide. Bien gérés, la plupart des pays pouvaient dépasser très largement leur niveau actuel. Et dans le contexte que nous vivons en Afrique Subsaharienne, j’estime qu’aucune contribution n’est de trop. Pour ceux qui le peuvent, se taire équivaut un silence coupable. Nos dirigeants politiques doivent enfin ouvrir les yeux et comprendre que le fond du problème est l’absence de démocratie avec ses manifestations les plus aigues : l’autoritarisme et la dilapidation des deniers publics.
Je précise que l’essentiel de ces pages ont été écrites bien avant le 30 ème Sommet ordinaire de la Conférence des chefs d’Etats et de Gouvernement de l’Union Africaine qui s’est tenu les 28 au 29 janvier 2018 à Addis-Abeba et durant lequel des décisions, concernant, entre autres, la lutte contre la corruption, ont été adoptées. A mon sens, nous en sommes aux intentions, et l’histoire récente de nos Etats ne me permet pas de croire que les promesses seront honorées. Ce faisant, je maintiens tous les propos tenus dans cet ouvrage.
Je rappelle à ce sujet que la démocratie n’est pas un luxe, mais une obligation, quels que soient le pays et le peuple. Ce sont les principes régissant un tel régime politique qui, tous les jours, doivent guider les faits et gestes des dirigeants. Sans quoi, nos jeunes continueront de sacrifier leur vie pour un avenir qui risque d’être une illusion dans une Europe de moins en moins accueillante et où le nationalisme, la xénophobie et le racisme gagnent du terrain à grands pas au détriment des valeurs universelles de solidarité.
Partie I Une région qui patauge dans les paradoxes
I La dure réalité de l’exil
Il est cinq heures. Quelque part du côté de Roquetas, une petite commune située non loin d’Alméria, blottie entre une plage bien entretenue, comme on en voit sur toute la « Costa d’El Sol », et une « mer de serres ». Devant un bar désaffecté, un groupe de jeunes subsahariens, des Sénégalais pour l’essentiel, attendent, imperturbables, sous un vent glacial. Sous peu, des agriculteurs andalous passeront pour faire leur marché : recruter des ouvriers agricoles.
Aucune inquiétude pour ce qui concerne la main d’œuvre qui, depuis quelques années, quand les vagues de subventions européennes ont commencé à transformer une des régions les plus déshéritées de la Péninsule Ibérique, attire des milliers de jeunes et moins jeunes fuyant les difficultés économiques des pays du Sud. Certains ont élu domicile dans les vieilles maisons abandonnées, au beau milieu des champs, par ces agriculteurs espagnols récemment sortis de la pauvreté.
Pour Fernando, qui a hérité de la dizaine d’hectares de terre d’un père atteint par la limite d’âge, non sans avoir laissé toutes ses forces dans une exploitation qui avait du mal à arriver à l’équilibre, cette main d’œuvre est du pain béni. Comme tous les matins, parfois même le dimanche, quand les tomates risquent de trop mûrir, il refait le même chemin. Les jeunes accourent et, comme une nuée de mouches sur une mangue mûre, entourent la petite estafette. Chacun voulant se faire remarquer. Fernando ne s’embarrasse pas de détails. Il choisit ses hommes, une dizaine au total, en les désignant du doigt. Aucune discussion au préalable. Les règles sont connues. C’est quatre mille Pesetas pour une journée de 8 heures. Une fortune pour un migrant, sans papiers de surcroît.
Aujourd’hui, Momar, un des habitués de l’exploitation, est ignoré. Son tort, avoir omis de ranger les caisses une fois son travail de la veille terminé. Il n’a même pas eu droit à un regard. La mort dans l’âme, Momar attendra, tout comme ses autres compagnons d’infortune, qu’un autre agriculteur se pointe. Et cela ne saurait tarder. Il n’empêche sa mise à l’écart est interprétée comme une trahison. « Ces toubabs (les blancs en wolof), de vrais s… ! », lâche-t-il. Ce fils d’une famille polygame de 15 enfants a dû oublier que la fidélité et l’esprit de groupe, il les a laissés devant la porte de son domicile, un vendredi pluvieux, quand il a quitté parents et amis pour rejoindre le Maroc, avec pour seule intention, « monter « (Yèk en wolof. Les jeunes Sénégalais disent « dama beugue yèk » : je veux partir en occident).
* *       *
Cette scène remonte à une vingtaine d’années. Le Royaume ibérique en a terminé avec cette période dorée depuis que le bulle immobilière a explosé dans le sillage de la crise financière de 2008. Il continue cependant de faire rêver, à l’instar de tout le vieux continent. Les Etats Unis étant presque hors de portée, nombreux sont les jeunes africains, très déterminés, qui continuent, de plus belle, de braver le désert, la mer et les passeurs sans cœur pour « Monter ».
Le mot est, à bien des égards, très bien choisi. On peut le comprendre comme le fait de quitter le bas de l’échelle sociale pour rejoindre les plus riches ou de quitter le monde pauvre – toujours situé en bas du globe terrestre – pour l’occident des « nantis » placé en haut. Plus clairement, il s’agit de passer d’u

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