La réception des arts dits premiers ou archaïques en France
72 pages
Français

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La réception des arts dits premiers ou archaïques en France , livre ebook

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Description

Relégués pendant longtemps au rang des arts archaïques, entre l'art préhistorique et l'art grec, les arts d'Afrique embarrassent généralement les historiens de l'art. L'auteur dégage un bilan négatif de l'évolution des mentalités et un retard considérable de la France dans ce domaine, peu disposée, en outre, à faire une place dans ses institutions aux scientifiques spécialistes des arts extra-occidentaux : les ethnoesthéticiens.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 juillet 2010
Nombre de lectures 188
EAN13 9782296698048
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0424€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

La réception des arts dits
premiers ou archaïques en France

Les arts de l’Afrique
Collection « Ethnoesthétique »
Dirigée par Nadine Martinez

Cette collection s’adresse à tous ceux qui souhaitent approcher les œuvres d’art selon une double lecture : la philosophie de l’art enrichie par les données de l’ethnologie (dans son sens large d’étude d’un contexte de production et d’utilisation). Les écrits, de différents formats, dynamisent une jeune science : l’ethnoesthétique. Auteurs et lecteurs se rencontrent autour de la recherche du sens de l’oeuvre d’art .

Contact : site de l’Harmattan

Déjà publié

Nadine Martinez, Art contemporain/ art traditionnel. Aller-retour Mali-Mali , 2009.


© L’Harmattan, 2010
5-7, rue de l’Ecole polytechnique ; 75005 Paris

http://www.librairicharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

ISBN : 978-2-296-11733-4
EAN : 9782296117334

Fabrication numérique : Socprest, 2012
Ouvrage numérisé avec le soutien du Centre National du Livre
Nadine Martinez


La réception des arts dits
premiers ou archaïques en France

Les arts de l’Afrique


L’Harmattan
Couverture : Dessin de l’auteur d’après une Tête d’Oni réalisée par un
sculpteur d’Ife entre le XIIème et le XVème siècle, en alliage de cuivre,
mesurant 31cm de haut, découverte dans le quartier de Wunmonije d’Ife et
conservée au Musée National d’Ife sous la référence d’inventaire : Ife 6.
À Andreï
INTRODUCTION
Le texte présenté est une réflexion portant sur la réception des arts premiers ou archaïques en France. Certaines parties ont été reprises et prononcées lors d’un colloque {1} .
Le livret se divise en trois parties. Une première, afférente à la notion d’archaïsme permettant de situer les qualificatifs appliqués aux arts extra-occidentaux ; une seconde, portant sur l’évolution de la reconnaissance et de la réception des arts extra-occidentaux de laquelle dépend la troisième, traitant de la réception actuelle de ces arts principalement dans les institutions publiques françaises.
L’art nègre… Tel était son nom lorsque le grand public découvrit ces œuvres de l’art d’un continent presque encore inconnu. Il était un art noir, sombre et obscur comme la peau de ses auteurs. L’enténèbrement d’alors rappelle que l’art nègre n’est pas encore aujourd’hui sorti de son statut. Les expressions qui l’ont qualifié dans le temps – art tribal, arts primitifs, arts premiers –, nous renvoient toutes à la source de la négritude et tracent les lignes d’une relation qui ne s’est pas améliorée dans le temps.
La réception des arts extra-occidentaux est ensuite envisagée chronologiquement dans le monde, principalement aux Etats-Unis et en France, depuis les premières grandes expositions jusqu’à la création de musées et divers lieux consacrés exclusivement à ces arts venus d’ailleurs. Le passé colonial de la France a influencé le regard porté sur les arts des nations colonisées et se répercute encore sur la monstration des œuvres. Il est grand temps d’interroger nos consciences afin de rapidement donner toute la place qu’ils méritent aux arts extra-occidentaux.
La réception des arts extra-occidentaux est une longue histoire, l’histoire d’une relation sans cesse différée et manquée et qu’aujourd’hui nous allons manquer une fois de plus si nous n’y prenons garde. Je propose de l’analyser avec minutie afin de la comprendre et espérer pouvoir un jour la corriger.
L’ARCHAIQUE, LA PRIMEITE : UNE DISTANCE RELATIVE
Un art archaïque serait, selon la définition d’Etienne Souriau dans son « Vocabulaire d’esthétique » en 1990 {2} , l’ «état d’un art reculé dans le passé et encore à ses débuts». Deux distances sont donc déjà annoncées et antagonistes : le recul dans le passé dans un mouvement arrière et les débuts proches de la naissance dans un mouvement avant. La distance est donc au cœur du propos. La définition demeure très floue : dans quelle échelle temporelle situer le passé ? Dans le lointain ou le proche ? Une autre relativité du temps s’impose donc. L’un des premiers écueils de sa définition réside dans l’expression « encore à ses débuts» signalant un état figé de la production : un début qui n’en finirait pas et pour autant qu’il soit considéré éloigné dans le temps s’inscrirait pourtant dans le présent, dans une sorte d’éternel commencement. Le passé est une notion bien trop relative pour circonscrire l’état de l’archaïsme. En outre, on ne peut donc qualifier d’archaïque que depuis là où l’on parle, c’est-à-dire toujours rétrospectivement… Étienne Souriau précise alors « il faut encore que l’évolution ait établi entre les deux époques une différence stylistique extrêmement marquée» . Mais la notion de style l’entraîne dans le piège de l’évolution. Néanmoins, suivons-le…
Il précise ensuite que ces arts seraient considérés comme à l’origine de l’évolution en question. Si les arts extra-occidentaux étaient des arts archaïques, ils seraient donc à l’origine des autres arts mais cette notion ne tient pas compte de l’actualité de la création plastique africaine (par exemple) ni de la longue époque historique pendant laquelle ces arts n’ont absolument pas nourri l’art occidental alors même qu’ils suivaient pourtant leur propre évolution. Il nous faut donc bien admettre qu’ils ont évolué sans nous, même si nous aimerions parfois les considérer à la source de nos créations… Cette idée permet cependant de dériver sur une notion connexe : l’archétype. L’archétype est donc le modèle primitif «à la fois original et originel» précise Souriau. Chez Platon, il renvoie aux modèles relevant de la perfection et dont l’homme éprouverait une sorte de nostalgie. Nous trouvons là un élément fondamental puisque ses linéaments apparaissent dans la pensée de l’exotisme : sorte de rêve d’un monde passé et parfait que l’homme aurait perdu et dont il aurait une nostalgie, porté par une sorte d’idéalisation renvoyant les mondes exotiques dans un passé idyllique, tel que nous l’imaginons et que nous projetons sur les œuvres en les enfermant dans un tel passé figé et ne répondant à aucune réalité. Nous aboutissons ainsi à la négation de l’autre, de son inscription dans le présent et donc de son existence même à nos côtés… C. G. Jung ramène cependant l’archétype vers la notion d’instinct, elle-même liée à l’inconscient collectif. Par ce biais, nous pourrions replacer les mondes exotiques dans une parenté éloignée de la nôtre, certes, mais que nous reconnaîtrions comme fondatrice.
Revenons à l’archaïque. Autre point d’achoppement relevé par Souriau : les œuvres que nous considérons comme à l’origine d’un art dépendent de notre connaissance et personne ne pourrait dire si des œuvres antérieures non encore découvertes ne viendront pas modifier cette origine-là et placeront peut-être ce que nous considérons aujourd’hui comme une origine dans une maturité d’un style ou dans son déclin. Tout dépend donc du temps dans lequel est pensée une telle évolution. En outre, replacées dans un contexte d’évolution, ces mêmes œuvres qui nous paraissent archaïques aujourd’hui ont été, en leur temps, à l’avant-garde de la création… La relativité est bien une caractéristique dominante de l’archaïsme.
Il est vrai cependant qu’un goût pour l’archaïsme s’est développé ces dernières années et que dans cette recherche de formes archaïsantes, les arts extra-occidentaux ont nourri les formes de l’art occidental. Je ne parle pas de la rencontre cubisme/art africain qui, elle, ne correspondait pas à une recherche d’archaïsme mais de solutions plastiques adaptées à une modernité. J’évoque la mode pour les formes archaïques du continent africain dans ce qu’elles apportaient de brut, de mal construit, de mal fini, de jeux de matières,

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