Paroles d artistes
264 pages
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Paroles d'artistes , livre ebook

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Description

Ces dix portraits en forme d'entretiens sont nés d'une volonté de rapprocher l'art moderne d’un large public. Ils ont été conçus dans un constant souci de clarté et relus par leurs modèles : Jean Arp, Marc Chagall, Josef Albers, Naum Gabo, Henry Moore, Alberto Giacometti, Hans Hartung, Victor Vasarely, Alfed Manessier, Jesus-Rafael Soto.


Enracinant l’expérience esthétique de ces artistes dans leur vie, partageant discrètement leur quotidien, Jean Clay restitue à merveille les aspects les plus émouvants de leurs démarches, comme leur part d'aventure humaine.


Jean Clay est critique et éditeur. Il a fondé la revue Robho, puis la revue Macula (avec Yve-Alain Bois), avant de diriger jusqu’en 2011 les éditions du même nom. Il a notamment publié chez Macula une édition annotée des Écrits du peintre américain Barnett Newman. Il a été pendant quinze ans le critique d’art de la revue Réalités.


Sujets

Informations

Publié par
Nombre de lectures 0
EAN13 9782362800757
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0075€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

« J’ai écrit la plupart de ces portraits pour la revue Réalités , qui me laissait le choix des artistes et le temps de me familiariser avec eux.
Pour Giacometti, par exemple, j’ai commencé dans l’atelier de la rue Hippolyte Maindron et j’ai continué à Stampa, son village natal, où je l’ai accompagné pendant plusieurs jours. Hartung m’a longuement reçu à plusieurs reprises dans sa villa parisienne du XIV e .
Mon ami Soto m’a invité à l’accompagner à Caracas et à Ciudad Bolivar (sa ville natale sur l’Orénoque) où nous avons organisé plusieurs débats. J’ai rencontré Gabo en Suisse, à l’occasion d’une rétrospective, et j’ai poursuivi l’entretien à New York quelques semaines plus tard. Albers m’a reçu longuement dans son sous-sol du Connecticut où, infatigablement, il « beurrait » (le mot est de lui) ses plaques d’isorel…
Ceci n’est donc pas un livre d’érudition mais d’émotion. J’ai admiré ces hommes, je les ai aimés. J’espère que ça se sent ! »
Jean Clay
Éditeur et critique, Jean Clay a fondé la revue Robho (1967-1971 ; avec le poète Julien Blaine) et la revue Macula (1976-1979 ; avec l’historien de l’art Yve-Alain Bois), avant de diriger jusqu’en 2011 les éditions Macula.
Pendant quinze ans (1970-1985), il fut critique d’art pour la revue Réalités . Son travail d’éditeur s’est achevé en 2011 avec la publication en français des Écrits de Barnett Newman.
Le présent ouvrage a été publié en 1969 par les éditions Rencontre sous le titre Visages de l’art moderne . L’édition sur liseuse doit beaucoup à la relecture attentive et aux recherches documentaires de Ginette Morel.


 
 
COLLECTION OCTETS DIRIGÉE PAR JOËL FAUCILHON
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© 2016 Éditions Thierry Marchaisse ISBN (ePub) : 978-2-36280-075-7 version 1.0, novembre 2016


 
Jean CLAY
P AROLES D’ARTISTES
Octets • THIERRY MARCHAISSE


Pour mon amie Isabelle Châtelet, 2016


Introduction
N ÉS D’UNE VOLONT É DE RAPPROCHER L’ART MODERNE d’un large public qui en ignore parfois les principaux développements, les textes qu’on lira dans ce recueil ont été conçus dans un constant souci de clarté. Je me suis efforcé d’enraciner l’expérience esthétique des dix hommes dont il est question dans des biographies détaillées qui restituent la part humaine, les aspects quotidiens de leurs démarches d’artistes.
Il arrive que les accidents, les drames, les moments privilégiés d’une existence et d’un milieu social conditionnent en partie une expérience artistique et qu’on puisse en tirer des relations de cause à effet pour expliquer les infléchissements d’une démarche. Ce sera, par exemple, le cas chez Giacometti ou chez Moore.
Il arrive aussi qu’un artiste, quelque sensible qu’il soit aux mouvements sociaux et politiques de son époque, ou encore aux accidents de sa propre vie, reçoive surtout ses impulsions de micro-impressions, de traumatismes psychologiques dont il ignore lui-même l’origine et qui sont proprement de l’ordre de l’indicible. À plus forte raison échappe-t-il alors aux grossissements des biographes. Nul accident, nulle rencontre fortuite n’expliquera, par exemple, l’irrésistible progression d’un Soto depuis les forêts de l’Orénoque jusqu’aux laboratoires les plus avancés de la peinture parisienne.
La vérité, en général, se situe à mi-chemin de ces extrêmes. Tout artiste est conditionné. Mais aussi, pour une large part, il se situe à l’avancée de son temps et contribue à en assurer le dépassement en forgeant les nouveaux concepts visuels, les nouvelles habitudes mentales dont le truchement, demain, nous permettra d’assimiler les structures intellectuelles qu’auront imposées de concert les progrès de l’art, de la science et de la technique.
Pourtant, ces éléments biographiques, j’ai tenu à les maintenir dans la totalité des textes qu’on va lire. C’est qu’il s’agit de lutter ici contre certains travers de l’attitude moderne face à l’art et de placer enfin à leur plan – qui est le nôtre, celui de tous les hommes – ces créateurs qui subissent trop souvent, de la part des écrivains et des journalistes, un double traitement qui les défigure :
– ou bien ils sont sacralisés , et leur expérience se change en une épopée prométhéenne, une aventure de feu et de sang, comme si l’on s’efforçait, dans un monde laïque, d’imposer un nouveau sacré, chargé de se substituer à celui des niches d’églises. Van Gogh devient le Christ aux outrages de la peinture à l’huile, et des biographies geignardes racontent pas à pas son chemin de croix. Modigliani intéresse parce qu’il était alcoolique et drogué, de Staël parce qu’il a mis fin à ses jours. Pour cette tendance, la peinture est un état maladif, une sorte d’eczéma ontologique, et tant pis si une bonne part de l’histoire de l’art a été faite par des pères tranquilles, assis sur un pliant – les Cézanne, les Monet, les Braque, les Mondrian, les Kandinsky – dont la vie se résume à deux lignes ;
– ou bien au contraire l’artiste moderne est soumis à une entreprise de désacralisation . À peine né, le produit artistique est pris en main et adapté par nombre d’intermédiaires – metteurs en pages, affichistes, couturiers, décorateurs, réalisateurs de la TV, etc. – et l’œuvre que l’artiste avait voulue vision du monde, création d’un espace plastique nouveau, expérience sensorielle et intellectuelle fondamentale, se trouve ramenée de vive force à la décoration des tapis de plage, des parapluies ou des porte-couteaux. La « robe Mondrian », pour ne citer qu’un exemple, est moins regrettable par elle-même que par ses conséquences possibles : changer en gadget une expérience de réduction du monde visible à ses dimensions statique et dynamique qui a marqué toute l’expression contemporaine ; faire écran, par un habile détournement de sens entre l’artiste et le public ; laisser intervenir, dans un domaine où elle n’a rien à faire, la mode – par définition éphémère et liée à des impératifs commerciaux – qui « use » désormais les artistes comme elle épuiserait une marque de savon.
On connaît aussi le destin de l’op art, né des recherches d’Albers et de Mondrian dans les années 1940, engagés tous les deux à l’époque dans une expérience de dématérialisation des formes, de destruction visuelle de la surface – et qu’on a brusquement vu surgir en 1964 dans les grands magasins (« Soyez op op op – optimiste ! » proclamait un hebdomadaire féminin), en même temps que Vasarely était bien malgré lui sacré – pour combien de temps ? – gagman de la vie quotidienne, inspirateur des papiers peints et des bottines de femmes. Puis, comme la mode – déjà lassée – passait à d’autres jeux, l’op art subit à son tour les conséquences de ce reflux : il n’était plus « dans le vent ». Et les yeux fatigués du public se détournèrent d’expériences – souvent vieilles de vingt ans – dont il n’avait pas compris le sens ni l’importance.
C’est pour échapper à ces deux excès – sacralisation, désacralisation – qu’on a tenu à faire figurer ici la part des expériences humaines et à découper ces vies d’artistes sur un fond d’histoire contemporaine. Des hommes, assujettis aux mêmes bouleversements, bousculés par les mêmes drames collectifs, affrontés aux mêmes problèmes personnels que tous les autres hommes, tels apparaissent dans ces pages dix peintres et sculpteurs modernes – que j’ai du reste tenu à faire figurer par ordre chronologique pour retracer à travers leur histoire quelques étapes de l’histoire de tous. Bref : il s’agissait de les situer dans leur temps, sans pour autant prétendre du même coup les expliquer.
Outre ce souci de ramener parmi nous quelques-uns des créateurs de l’époque, les textes qui composent ce recueil ont en commun trois thèmes principaux. Dans tous les cas, j’ai voulu décrire des naissances , saisir dans le détail l’éclosion, les balbutiements d’une sensibilité à la recherche de son langage, les premiers arrachements aux milieux sociaux et aux systèmes esthétiques qui tentaient – car c’est la loi commune – d’en limiter l’essor. Éveils souvent miraculeux : ainsi les premiers dessins de Chagall surgis dans un monde – le milieu juif de Vitebsk – où l’image était quasi inconnue ; ainsi la brusque attention de Moore, le fils de mineur, devant des photos de statues montrées à l’école communale ; ou bien encore l’enfance de Hartung affrontée aux éclairs…
Un deuxième thème, tout aussi présent, est lié chez ces artistes à l’expérience de la mort. Pour certains – qui rejoignent ici la pensée d’Élie Faure ou de Malraux sur l’art considéré comme un « antidestin » –, l’œuvre est une victoire sur le temps, un témoignage pour les époques futures, un prolongement de l’artiste hors de sa vie donnée vers les sociétés indescriptibles avec lesquelles il communie, comme nous communions avec le Scribe assis ou le Christ de Vézelay. Communion d’autant plus probable que, par-delà les différences économiques, culturelles, religieuses, techniques, une donnée semblable lie entre eux les hommes de tous les âges – qui est précisément l’expérience de la mort, contre quoi ces œuvres veulent lutter. Expérience qui engendre cet « élément d’art pur et éternel, dont parlait Kandinsky dans Du spirituel dans l’Art 1 , qu’on retrouve chez tous les êtres humains, chez tous les peuples et dans tous les temps, qui paraît dans l’œuvre de tous les artistes, de toutes les nations et de toutes les époques et n’obéit, en tant qu’élément essentiel de l’art, à aucune loi d’espace ni de temps ».
Face à cette conception métaphysique de l’art, une autre surgit, dont on verra la trace dans plusieurs chapitres, pour qui l’œuvre est à peine moins éphémère que l’artiste qui l’a créée. Des hommes comme Gabo, Soto ou Vasarely ont le sentiment

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