La vidéo contre le cinéma
248 pages
Français

La vidéo contre le cinéma , livre ebook

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248 pages
Français

Description

La vidéo est d'un usage courant à la télévision et dans la pratique amateur depuis plusieurs décennies. Sa mise en contact avec des films tournés sur pellicules 16 ou 35 mm traditionnelles est plus occasionnelle. En conservant la texture particulière de la vidéo dans un mélange et une confrontation des formats, se produit : l'effet video. Ce premier volume, suiv de Entre vidéo et cinéma, se concentre sur trois types primitifs de l'effet video (télévisuel, de surveillance et amateur/intime) en examinant des films de Robert Kramer, William Klein, Michael Haneke, Fritz Lang, Jean-Luc Godard...

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Informations

Publié par
Date de parution 01 avril 2012
Nombre de lectures 13
EAN13 9782296488748
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,1100€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

La vidéo contre le cinéma Neige électronique Tome 1
Champs visuels Collection dirigée par Pierre-Jean Benghozi, Raphaëlle Moine, Bruno Péquignot et Guillaume Soulez  Une collection d'ouvrages qui traitent de façon interdisciplinaire des images, peinture, photographie, B.D., télévision, cinéma (acteurs, auteurs, marché, metteurs en scène, thèmes, techniques, publics etc.). Cette collection est ouverte à toutes les démarches théoriques et méthodologiques appliquées aux questions spécifiques des usages esthétiques et sociaux des techniques de l'image fixe ou animée, sans craindre la confrontation des idées, mais aussi sans dogmatisme. Dernières parutions Vincent HERISTCHI,Entre vidéo et cinéma, Tome 2,2012. Florent BARRÈRE,Une espèce animale à l’épreuve de l’image. Essai sur le calmar géant, 2012. Marguerite CHABROL et Pierre-Olivier TOULZA (sous la direction de),Lola Montès, Lectures croisées, 2011. Élodie PERREAU,Le cycle destelenovelasBrésil. Production et au participation du public,2011. Isabelle Roblin,Harold Pinter adaptateur : la liberté artistique et ses limites,2011. Florence BERNARD DE COURVILLE,Le double cinématographique. Mimèsis et cinéma, 2011. Vilasnee TAMPOE-HAUTIN,Cinéma et conflits ethniques au Sri Lanka : vers un cinéma cinghalais « indigène » (1928 à nos jours), 2011. Vilasnee TAMPOE-HAUTIN,Cinéma et colonialisme : la génèse du septième art au Sri Lanka (1869-1928), 2011. Joseph BELLETANTE,Séries et politique. Quand la fiction contribue à l’opinion, 2011. Sussan SHAMS,Le cinéma d’Abbas Kiarostami. Un voyage vers l’Orient mystique, 2011. Louis-Albert SERRUT,Jean-Luc Godard, cinéaste acousticien.Des emplois et usages de la matière sonore dans ses œuvres cinématographiques, 2011. Sarah LEPERCHEY,L’Esthétique de la maladresse au cinéma, 2011. Marguerite CHABROL, Alain KLEINBERGER,Le Cercle rouge : lectures croisées, 2011. Frank LAFOND,Cauchemars italiens. Le cinéma fantastique, volume 1, 2011.
Vincent HERISTCHI
La vidéo contre le cinéma Neige électroniqueTome 1
DU MÊME AUTEUR Entre vidéoetcinéma,Neige électronique2, Éditions Tome L’Harmattan, 2012. Nous remercions © Steve Chay pour son aimable autorisation de reproduction de sa photographieMiserereen image de couverture. © L’Harmattan, 2012 5-7, rue de l’École-Polytechnique ; 75005 Paris http://www.librairieharmattan.com diffusion.harmattan@wanadoo.fr harmattan1@wanadoo.fr ISBN : 978-2-296-55855-7 EAN : 9782296558557
Première partie FAIRE SON EFFET
« Pas de la belle photo, pas de belles images, mais des images, de la photo nécessaires. » 1 Robert Bresson «Il reconnaîtra aussitôt l’importance de chaque chose, et la muette supplication, les muettes instances qu’elles font qu’on les parle, à leur valeur, et pour elles-mêmes,en dehors de leur valeur habituelle de signification,sans choix et pourtant avec mesure, mais quelle mesure : la leur propre. » 2 Francis Ponge A plus de cent ans d’âge, le cinéma se trouve une fois de plus à la croisée des chemins où sa persistance même comme médium autonome pourrait être remisequestion. Dans le même temps et comme si de rien n’était, ses en diverses périodes, ses écoles artistiques, ses révolutions techniques et son évolution esthétique font l’objet de nombreuses études, avec des approches historiques, sémiologiques, philosophiques, encyclopédiques ou autres. Il se publie en permanence des monographies de réalisateurs et, pour qui souhaite approfondir les aspects les plus divers qui touchent cet art, il est aisé de confronter différents points de vue par des lectures et par la vision des œuvres du patrimoine que les institutions et les chaînes de télévision proposent en permanence. Longtemps méprisé, considéré comme trop populaire et indigne alors d’être l’objet de réflexions, le cinéma a acquis progressivement son droit de cité comme art à part entière et comme objet d’étude. Il n’en est pas vraiment de même concernant la vidéo.Certes ce terme mêle en son sein de multiples acceptions, ce qui induit probablement des méprises. C’est en effet un mode de diffusion, transmis originellement par les ondes hertziennes, le réseau câblé ou le satellite, et 1  R. Bresson,Notes sur le cinématographeFolio »,, éd. Gallimard, Paris 1975, collection « p. 92. 2 Francis Ponge, « Les façons du regard » inProêmes, I, éd. Gallimard, Paris 1948, collection « Poésie » (précédé deLe Parti pris des choses), p. 120.
reçu sur un poste de télévision; c’est également un support de prises de vues dont les formats et les modes d’usage ont considérablement évolué avec le temps, se simplifiant, s’allégeant et par suite se démocratisant; c’est enfin un type d’image, perçu comme tel par le spectateur, avec ses caractéristiques propres. Ces dernières sont issues en partie des modes de diffusion et de réception habituelles auxquelles ledit spectateur s’est accoutumé, par son usage de la télévision, mais aussi par ses utilisations en tant que vidéaste amateur. Par voie de conséquence si un plan cinématographique cadre un écran T.V., l’habitude a codifié cette image comme prenant une texture particulière. Le terme « vidéo » traverse ainsi différentes sortes de pratiques et de technologies, et il est malaisé de porter une vision globale sur celles-ci, leurs donnant une cohésion et une téléologie générales. Mais même si cette étude se concentre sur un aspect très précis de son utilisation, il faut pourtant garder à l’esprit tous les aspects que ce terme désigne et dont il garde forcément des traces.
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1.1) Le mélange des supports Une question de départ pourrait être formulée ainsi : que se passe-t-il quand un metteur en scène utilise une image vidéo comme support pour son film ? On pourrait supposer qu’une image «une image, et que pourvaut » reprendre l’adage, «peu importe le flacon, pourvu qu’on ait l’ivressesi» : en effet seules comptent l’histoire narrée et la qualité du jeu des acteurs, il importe alors assez peu qu’un film ait été tourné sur un support plutôt que sur un autre. Mais dès qu’une approche esthétique s’engage, évaluant d’autres types de paramètres (les choix de réalisation, doncde découpage, de cadrage, de montage, etc.), il n’est plus négligeable de s’intéresser à la matière première sur laquelle est « imprimée» l’œuvre. De plus, au cœur d’un même film, il est possible d’utiliser différents types d’images: la question du support y est alors fondamentale pour saisir vraiment ce que le créateur a choisi d’exprimer.Faire apparaître une image à l’intérieur d’une image est un procédé et l’un des trucages visuels le plus ancien. On peut mentionner l’exemple du Spectre rouge(1907) de Segundo de Chomon, qui met en scène une série de tours d’un diable-magicien. Entre deux disparitions largement inspirées (pour ne pas dire copiées) de Georges Méliès, un tour attire notre attention : le diable fait en effet apparaître une sorte de grand tableau, encadré richement et décoré en son chef par un emblème démoniaque, où à l’intérieur l’image de trois femmes se met en mouvement. Le diable s’accroupit et, placé en dessous de la machine, il fait mine de pianoter la dorure inférieure de l’encadrement (qui ressemble aux boutons d’un proto-récepteur de télévision): en volet vertical, l’image se transforme, une femme filmée en plan moyen sourit et salue la caméra (et le spectateur). De nouveau, le diable caresse le cadre et en volet deux hommes apparaissent. Puis le « tableau » disparaît brusquement et le film se poursuit pour de nouveaux tours. Bien entendu, ces images ne sont pas en vidéo, et l’idée même d’un écran comparable à une télévision n’est à l’époque qu’une idée de science-fiction (comme elle l’est encore dans leMetropolis(1926-1927) de Fritz Lang). Néanmoins, il est remarquable de sentir dans ce court film un ancêtre de la télévision et son premierzapping, l’image projetée semblant changer de « programme» comme si le personnage passait d’une «chaîne » à l’autre. Ce code visuel n’évolue pas pendant des décennies. Même après les premières expérimentations de transmission télévisée et même après que se sont implantés largement les postes de réception, la pratique courante d’apparition d’images supposées en vidéo est restée inchangée: par cache/contre-cache, une image film simule l’image vidéo. Peut-être est-ce par conformisme des pratiques, peut-être est-ce parce que les codes de ce
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que le public considère comme visuellement acceptable sont censés ne pas évoluer, mais ce n’est que tardivement que l’image vidéo est utilisée comme telle et à part entière. C’est donc au nom d’un certain réalisme qu’elle apparaît à l’intérieur du ruban filmique: la qualité de l’image télévisée étant 3 au départ ce qu’elle est , accepter cette image (et l’utiliser telle qu’en elle-même) ne devient que progressivement la norme, norme d’usage pour les réalisateurset norme acceptée par le public. L’image vidéo n’est donc pas apparue immédiatement dans les films de la façon qui la constitue (et qui fondamentalement estautreque l’argentique): elle eut à lutter contre la pratique cinématographique d’une certaine tendance à la représentation conventionnelle et simulée, et contre sa difficulté à modifier ses codes une 4 fois implantés . Le mélange dans le cours d’un film de formes hétérogènes est depuis les débuts du cinéma une possibilité que le réalisateur a à sa disposition pour formuler des faits narratifs ou des émotions de façon plus subtile que la simple énonciation. On se rappelle par exemple des virages des films muets, ou plus récemment l’arrivée éclatante de la couleur à la fin d’Andreï Roublev(1966) d’Andreï Tarkovski, où les icônes du peintre semblent irradier la pellicule et bouleversent le spectateur, alors qu’il a été plongé jusque-là dans le noir et blanc maussade de la Russie médiévale. De même, les quelques secondes duPortrait de Dorian Gray (The Picture of Dorian Gray, 1945) d’Albert Lewin, où l’on peut apercevoir en couleurs le terrible rictus de perversité du personnage sur la toile, desserrent le carcan de grisaille où le film nous avait enserré pour nous offrir quelques photogrammes d’un 5 technicolor violent dans ses teintes éclatantes . Le noir et blanc est le plus couramment utilisé de nos jours pour signifier une époque passée, alors que 6 la couleur est la marque du présent narré. Et il est d’usage que les scènes de flash-backou de rêve soient d’une texture différente, avec ses fameux flous 3  Certaines introductions de films - en particulier ceux de Frank Tashlin dans les années cinquante (par exemple dans le préambule deLa Blonde et moi(The Girl can’t help it, 1956), qui exhibent leur Vistavision et leur Technicolor nouveau riche, au destin pourtant éphémère -n’hésitent pas à ironiser sur la petitesse, l’absence de couleurs et la mauvaise qualité de l’image télévisée, peut-être parce qu’elle s’apprête déjà à faire jeu égal avec le cinéma.4  Cette approche conservatrice, voire réactionnaire, a accompagné le cinéma depuis ses débuts. On se souvient par exemple à quel point le montage parallèle de David W. Griffith parut insupportablement déstabilisant pour ses producteurs et distributeurs, qui craignaient le rejet du public devant cette nouveauté (en fait, toute espèce de nouveauté) : cette pusillanimité s’est trouvée constamment vérifiée depuis, tout le long de l’histoire du cinéma et des médias en général. 5 On peut également mentionner les scènes tribales en couleurs qui ponctuent de leurs transes Shock corridor(1963) de Samuel Fuller, issues du tournage avorté d’un film en Amazonie, voire le seul photogramme rouge du suicide au revolver du Dr Murchison à la fin deLa Maison du Dr Edwardes(Spellbound, 1945) d’Alfred Hitchcock. 6 Cette utilisation est poussée à l’extrême de ses possibilités de dialogue dansNuit et brouillard(1956) d’Alain Resnais.
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