Grandeur et déchéance
147 pages
Français

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Grandeur et déchéance , livre ebook

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Description

Ils sont deux cousins, Boniface et François, deux Alsaciens, nés en même temps que la Révolution ; deux voisins, deux « pays » du village de Diebolsheim, deux soldats... et deux destins.


Incorporés en 1809, le premier dans l’infanterie, le second dans les chasseurs à cheval, ils participeront, sous les ordres de Napoléon, à la bataille de Wagram.
Après Wagram, la paix avec le Tsar ne peut plus durer. Une nouvelle guerre éclate. Boniface et François entrent en Russie avec la Grande Armée. Mais ce qui ressemble d’abord à une promenade militaire glisse doucement vers la tragédie, alors que l’automne s’avance et qu’on ne trouve devant soi que la terre brûlée.
Après la victoire de la Moskwa et son pénible séjour à Moscou, Napoléon décide enfin la retraite. Commence alors une des plus vastes tragédies de l’histoire. À cause du froid, de la faim, rarement un groupe humain aura été poussé dans de telles limites. Des 70 000 hommes partis, 5% à peine reviendront !


Travail historique extrêmement documenté (archives militaires et civiles, courrier de soldats) et accompagné d’un appareil de notes important, cette fresque se lit également comme un véritable roman. Les sept volumes de la série traiteront de sept générations d’une même famille aux armées de cinq empires.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 23 août 2017
Nombre de lectures 0
EAN13 9782845742352
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0097€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Déjà parus :
Tome premier – Grandeur et déchéance , 1809-1815
Tome deuxième – Le prix de la liberté , 1815-1870
Tome troisième – Quand nous étions allemands , 1871-1918
Tome quatrième – Les derniers Allemands , 1918-1940
Tome cinquième – Un instituteur alsacien dans la tourmente , 1939-1945

À paraître :
Tome sixième – Séjour au crépuscule du dernier empire , 1957-1959
Bertrand Jost
Grandeur et Déchéance
(1809 - 1815)
Vicissitudes militaires, première époque Sept générations de conscrits d’une famille alsacienne aux armées de cinq empires (1809 - 1959)
Introduction
Cette histoire, c’est d’abord celle d’un attachement. Attachement à la terre, celle d’Alsace qui a nourri tant de générations au fil des siècles ; attachement à la famille ensuite, dont chaque membre est indispensable à la survie de tous et, enfin, attachement au Bon Dieu et à la Sainte Vierge, qui de tous temps ont protégé les hommes contre les mauvais tours du Destin. Cette histoire, c’est aussi celle d’une lutte, fratricide, incessante entre les deux grandes nations qui s’étendent de chaque côté de cette Alsace Heureuse. Il y a celle de l’ouest, d’au-delà de la ligne bleue des Vosges, qui fait rêver le monde par ses arts et son raffinement, et celle de l’est, d’outre-Rhin, qui impressionne par sa rigueur, sa volonté et sa force. France et Allemagne, Francia et Germania. Pourtant ces nations sœurs étaient nées ensemble à Strasbourg le 14 février 842, des cendres du vieil empire franc et, malgré leur filiation commune, elles s’acharnèrent trop souvent à ne se retrouver en Alsace que pour y répandre leur sang et leurs pleurs. Cette histoire, c’est aussi celle d’un cauchemar lancinant, menaçant, qui revient sans cesse troubler le sommeil du bienheureux avec ses visions de glace, de pâles horizons sans fin et de lente agonie dans une mer livide qui efface tout jusqu'à la mémoire des noms. Enfin, cette histoire comporte aussi de l’exotisme, un exotisme lointain et fermé, peuplé de dromadaires, de sueur et de dunes infinies où les hommes du nord passent sans s’arrêter ou meurent dans l’oubli, balayés par le vent millénaire.

Cette histoire est dédiée à tous les jeunes conscrits d’Alsace et d’ailleurs qui, au cours des siècles, comme les héros de cette histoire, ont tant donné et si peu reçu. Que les nations qui les ont appelés se souviennent de leur sacrifice et que Dieu les garde dans le doux repos de l’Éternité.
Prélude
Mars 1815. La France est en effervescence, une fois de plus, une fois de trop peut-être. Napoléon Bonaparte, l’empereur déchu, a débarqué à Golfe Juan le 1 er du mois et depuis, son nom est sur toutes les lèvres. Partout, il suscite l’enthousiasme. L’empereur est de retour et tous se rallient à lui, y compris les troupes envoyées par le roi pour l’arrêter. Les rumeurs vont bon train. Qui donc aura le courage de l’arrêter ? Le maréchal Ney, héros de la Bérézina, pilier de l’arrière-garde de la Grande Armée lors de la retraite de Russie, dernier français à quitter le sol russe et premier maréchal à se rallier aux Bourbons, promet au roi Louis XVIII de ramener l’usurpateur dans « une cage de fer ». Le 19 mars, alors que le roi s’apprête déjà à fuir, Ney rencontre son ancien maître à Auxerre. La réunion sera orageuse, mais le maréchal ne pourra résister à ce nouvel appel de la gloire et de l’aventure, lui qui a voué sa vie à ces deux divinités inconstantes.
Le même jour, en Alsace un homme chemine seul sur la route de Strasbourg à Benfeld. Partout où il passe, on ne parle que du grand retour de l’Empereur 1 mais lui n’en a cure. Il veut simplement rentrer chez lui. Arrivé à Benfeld, il oblique vers le Rhin puis, en longeant le fleuve qui l’a vu grandir, il poursuit sa route vers le sud. Diebolsheim, le petit village où il est né, est juste un peu plus loin, à quelques kilomètres après Friesenheim. Cet homme au visage rond, au front couvert et au nez épaté a 25 ans mais il en paraît vingt de plus. Ses yeux bruns ancrés sur l’horizon qu’il reconnaît trahissent une lassitude morne. Ses cheveux qui avaient été roux sont maintenant délavés, presque gris, comme ses habits si usés qu’on pourrait presque voir au travers. On dirait un vagabond, de ceux qui sillonnent la province en temps de disette ; et pourtant, il avait été si grand, si rayonnant dans son uniforme impeccable…
Il progresse lentement, car il boîte. Pied droit gelé. Un souvenir du temps où il dormait sur la neige en haillons par moins trente degrés. Aujourd’hui, le pied est en piteux état : « atteint d’ulcère avec excroissance charnue situé au bord interne du pied droit » comme disait l’officier de santé de l’hôpital de Strasbourg. 2 Pourtant, il marche. Parfois, par habitude, il se tient le bras gauche, à l’endroit où une balle perdue le lui a traversé. Depuis le temps, le bras est guéri mais il se souvient de la balle traversant sa chair comme si c’était hier. C’était au moment de la retraite de Russie, période la plus pénible de sa vie, si pénible qu’il ne pensait jamais en revenir. Enfin, il est là, et il chemine péniblement vers son village. Finalement, au détour de la route, les premières maisons de Diebolsheim apparaissent. Diebolsheim ! Il en avait rêvé, et en ce 19 mars 1815, il en a les larmes aux yeux. Soudain il se revoit, exactement six ans auparavant jour pour jour, au moment où il quittait ce même village pour une période si longue. Il avait suivi son cousin Boniface parti une semaine plus tôt, et les deux fils de Diebolsheim étaient allés servir l’Empereur à travers l’Europe. Il était bien naïf à cette époque, mais aujourd’hui tout est fini, et le vieux soldat tout juste réformé ne veut plus entendre parler de gloire ni de conquête lointaine. Il passe les premières maisons, reconnaît vaguement quelques visages, mais lui, on ne le reconnaît pas. Les villageois sont indifférents à ce vagabond qui passe. Ce n’est que quand il revoit sa famille, notamment son oncle Georges Knobloch, le père de son cousin Boniface, qu’on le reconnaît enfin : « Franz ? Franz, besch du’s ? » (François ? François, c’est toi ?) C’était lui ; François Brigel le cordonnier était de retour.
Le 19 mars au soir, le roi avait fui, et le 20, Napoléon faisait son retour triomphal aux Tuileries à Paris. Un à un, tous les maréchaux et généraux de l’Empire se rallièrent à lui, et l’Empereur s’apprêta une fois de plus à affronter ses ennemis. À Diebolsheim, Brigel se remettait doucement à ses habitudes. Le temps de l’errance était bien révolu pour lui. Six années de sa jeunesse au service de la Patrie, cela suffisait. Le vieil homme de vingt-cinq ans n’aspirait plus qu’à couler des jours tranquilles dans son village natal, mais comme l’Empereur était de retour et que même un réformé n’était jamais trop prudent, le cordonnier se hâta de se marier, car il était bien connu que les mariés étaient dispensés de service. Le 12 avril 1815, moins d’un mois après son retour, François se maria avec Catherine Blau. L’oncle Georges était un des témoins. Le cordonnier de Diebolsheim n’eut pas à craindre longtemps d’être rappelé, puisque moins de cent jours après son retour, Napoléon fut défait à Waterloo et dut abdiquer une seconde fois. Le roi revint pour la deuxième fois, et la paix s’installa définitivement sur la France. Le pauvre Maréchal Ney fut fusillé, et ses autres compagnons d’une gloire passée se forcèrent peu à peu à oublier les temps héroïques.

François Brigel put vieillir doucement dans ses foyers avec sa femme et ses enfants. L’un des ses fils devint aide-instituteur à Diebolsheim, ce qui représentait une ascension sociale indéniable pour la famille, et François put en être fier. Quant à lui, il avait repris son humble métier de cordonnier, qu’il exerçait au bout de l’impasse des Clématites dans le calme de la campagne alsacienne. En dépit de ses souffrances passées, il devait bien de temps en temps penser au fond de lui à l’époque glorieuse où il arborait un bel uniforme de chasseur à cheval, paradant sur un destrier racé et allant conquérir les capitales de l’Europe sous la bannière de l’Empereur. Ah ! L’Empereur ! Plus son souvenir s’éloignait et plus il grandissait dans l

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