Le dernier combat
27 pages
Français

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Le dernier combat , livre ebook

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Description



Ali veut décrocher parce qu’il ne digère pas le racisme ordinaire.



— Aux yeux des Français, un bon Arabe, tu sais ce que c’est, Tazzieri ? grommela-t-il. Regarde : un traître !
— Arrête, Ali ! s’emporta le président. Tu te fais du mal pour rien !
Ali décrocha sa propre photo du tableau. Il la garda entre ses doigts quelques instants, la fixant avec une sorte d’incrédulité, comme s’il ne pouvait reconnaître l’individu figé dans la posture avantageuse du champion. Puis il la tendit au président.
— Voilà à quoi je rêvais tout gosse, ce que je voulais devenir... Une image !
Il eut une moue vaguement dégoûtée pour ajouter :
— Mais c’est pas moi, ça...




La boxe comme moyen de s’extraire de sa condition inférieure demeure un vieux rêve illusoire surtout si votre entourage ou la société dans laquelle vous évoluez vous renvoie à la figure vos origines nord-africaines pour vous dévaloriser.




Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 11 avril 2014
Nombre de lectures 3
EAN13 9791023403084
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0022€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Michel Baglin Le dernier combat Nouvelle CollectionNoire Sœur
Pour son troisième combat en indépendant, Ali Mestara rencontrait un adversaire au punch dévastateur. Pourtant, nous étions tous confiants, Ali saurait imposer son rythme et, s’il parvenait à se garder de la méchante droite d’Alain Bucq, il devrait l’emporter aux points, sa technique étant bien supérieure à celle du Marseillais. J’avais vu Bucq combattre et venir à bout de boxeurs peut-être plus coriaces qu’Ali, mais ce dernier avait pour lui un extraordinaire jeu de jambes et un art de l’esquive consommé. Sans compter qu’il pouvait, lui aussi, frapper dur. Je connaissais Ali depuis plusieurs années. Il avait, pour ainsi dire, grandi dans cette salle où les licenciés du club subissaient leurs deux heures d’entraînement quotidien – échauffement, musculation, travail au sac – avant de mettre les gants. Fils d’un harki longtemps oublié dans sa misère et son village du Sud-Ouest, Ali, à la mort de sa mère, avait suivi ce père humilié venu s’installer en ville. Il avait trouvé très tôt dans la boxe un exutoire à sa révolte et aimait le club qui lui avait permis d’échapper à un probable destin de petit casseur de banlieue. En dépit de quelques accrochages et, en deux ou trois occasions, de la menace de tout laisser tomber, il s’était montré plutôt docile avec son entraîneur et les dirigeants. Les résultats étaient là, il avait décroché un titre régional et acquis une relative assurance. Le club, où l’on entretenait les vocations d’éducateurs et dont le président avait même décidé d’offrir des cours de maths aux jeunes en difficulté, avait aidé Ali à poursuivre ses études et à dénicher de petits boulots. Il se sentait en confiance ici et nul ne doutait qu’il passe professionnel la saison prochaine, après une carrière d’amateur bien conduite. J’étais venu à la salle la semaine précédente et j’avais trouvé Ali au mieux de sa forme. Son entraîneur, Hugo, semblait satisfait, même s’il insistait beaucoup sur la qualité de ses appuis. Un boxeur cherche sa puissance dans ses jambes ; Ali, qui semblait toujours danser autour de son adversaire, pouvait manquer de force de frappe face à un Bucq capable d’encaisser les plus rudes coups. Il savait néanmoins comment il devait mener son combat : dans son style habituel, moins de puncheur que de technicien inspiré. Ali connaissait ses atouts.
— J’ai disputé soixante-quinze combats, me dit-il, et tu vois, j’ai finalement pris très peu de coups. Je suis difficile à toucher parce que je vois clair. Je boxe à l’anticipation... Il devinait aussi ses points faibles, bien qu’il ne puisse toujours les évaluer. — Il n’y a pas assez d’indépendants dans la région et je ne les ai pas assez rencontrés, admettait-il. Je manque de repères pour connaître vraiment ma forme ! Après l’entraînement, Ali s’occupait encore des jeunes du club pour lesquels il était devenu un aîné exemplaire et envié. Il les conseillait, suivait leurs progrès et leur communiquait un peu de sa conviction. Avec son père, le club composait sa famille. Ali ne paraissait pas s’intéresser au monde extérieur, seule la boxe l’accaparait. Il s’accrochait à elle. Il lui demandait de le tenir – de le retenir, peut-être – et refusait quasiment toute discussion sur un autre sujet. Aux journalistes qui le questionnaient parfois sur ses origines arabes ou sur les possibilités d’intégration sociale qu’offre le ring, il répondait par un haussement d’épaules, l’air de dire : « Je suis boxeur et français, un point c’est tout ! » Au club, nous pensions qu’Ali n’avait probablement jamais tout à fait digéré son enfance. Il avait perdu contact avec ses anciens amis et se tenait à l’écart des autres fils de harkis. Nous savions au fond qu’il se défendait de lui-même. Mais peut-être puis ait-il là sa pugnacité… Son sourire le protégeait en tout cas des indiscrétions. Le jour du combat, j’arrivai un peu en avance. Le c lub, qui organisait cette soirée de gala, espérait une recette suffisante pour consolider ses finances à la dérive. L’affiche n’était pas indigne, loin s’en faut, puisqu’elle promettait, après les rencontres d’amateurs, trois combats d’indépendants où le match Mestara - Bucq tenait la vedette. Le public commençait d’ailleurs à affluer. Les guichets n’étant pas encore ouverts, je passai par la cour où donnait une seconde porte. Elle s’ouvrit brusquement et je vis Bergond, un des dirigeants, sortir du bâtiment comme un diable de sa boîte pour se précipiter vers sa voiture. Il y récupéra en hâte un carnet et revint vers la porte où je l’attendais. — Que t’arrive-t-il ? — Une catastrophe, mon vieux ! — Comment ça ?
— Entre, entre ! me dit-il en me poussant. Figure-toi qu’Ali ne veut plus boxer ! Ni ce soir, ni jamais ! Il raccroche les gants... J’espérais des explications, mais Bergond était pressé. — Excuse-moi, j’ai un coup de fil urgent à donner, >>>>>>>>>>>>>>>>
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