Parthène le Fou
168 pages
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Parthène le Fou , livre ebook

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Description

Parthène le Fou était le surnom que se donnait Ivan le Terrible pour écrire des compositions religieuses, qui existent encore. Le livre est la suite et l’épilogue de Yarilo, publié également aux éditions du Net. Il raconte comment le tsar, dévoré de passions et de remords, dépouille peu à peu, aidé par son fils Féodor, « le petit tsar des fous », par sa bru, la douce Irina, par le petit barde Vania Basmanov, dit « Rossignol le Brigand », le despote luxurieux et cruel pour ne garder de lui-même au dernier moment, que le fou Parthène. Une histoire de fous et de fous-en-Christ. Une tragédie. Un conte sur le pouvoir, la mort, le salut.

Informations

Publié par
Date de parution 07 février 2023
Nombre de lectures 0
EAN13 9782312131009
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0250€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Parthène le Fou
Laurence Guillon
Parthène le Fou
LES ÉDITIONS DU NET
126, rue du Landy 93400 St Ouen
Du même auteur
Aux éditions du Net :
Yarilo
Epitaphe
Contes pour enfants précoces et adultes infantiles
Aux éditions Rod :
Lueurs à la dérive
Aux éditions du Mercure de France :
Le tsar Hérode (prix Fénéon 1985, première version de Yarilo )
Aux éditions Gautier Languerau
Cœur d’or
Le balai de Luciole
Léon le Caméléon
Aux éditions Nathan jeunesse
Ivan l’idiot


















Nouvelle édition
© Les Éditions du Net, 2023
ISBN : 978-2-312-13100-9
À la mémoire de l’archimandrite Barsanuphe ( Ferrier ) et des nombreuses discussions que nous avons eues à propos de ce livre.
Introduction

Vania Basmanov enfant, vu par l’auteur.
Parthène le Fou est la suite et l’épilogue de Yarilo, le devenir du tsar, de ses proches, et de la famille Basmanov qui en étaient les héros. Les deux livres sont étroitement liés, et pour lire le second, il vaut mieux avoir lu le premier qui lui-même appelait ce complément. C’est d’ailleurs en voulant réécrire la suite, que j’ai décidé de réécrire le début. Parthène le Fou était le pseudonyme que prenait réellement le tsar Ivan pour composer des chants religieux et des prières. La meilleure explication que j’ai entendue au choix de ce pseudonyme est qu’il fait référence aux vierges folles de l’Évangile, qui n’ont pas prévu assez d’huile pour entrer chez l’Époux, Parthène signifiant « vierge » en grec. Je suis d’assez près l’histoire en ce qui concerne le tsar et sa famille, du moins l’histoire officielle jusqu’à récemment, puisque l’on conteste maintenant que le tsar ait tué son fils Ivan. On dit aussi qu’il serait devenu moine, or à ma connaissance, il l’est devenu sur son lit de mort, comme c’était alors la coutume. J’ai lu les récits de l’ambassadeur anglais, sir Jerome Horsey, que je mets d’ailleurs brièvement en scène. Les gens qui voudraient canoniser le tsar accusent les étrangers de propagande mensongère, mais je n’ai pas cette impression. Bien sûr que les Polonais ne portent pas un regard bienveillant sur les Russes. Mais les Italiens, par exemple, ont laissé des descriptions enthousiastes du jeune tsar, et sir Jerome Horsey, s’il n’est pas enthousiaste du tout, et ne comprend rien à la Russie, ni aux Russes, ni à l’orthodoxie, est juste un témoin étranger, intelligent et curieux, un être sans illusions, sans mysticisme, assez moderne, déjà. Il voit évidemment tout ceci à travers le prisme de sa personnalité, mais je ne crois pas qu’il invente par pure malveillance, ou par souci de propagande. Du reste, s’il trouve Ivan le Terrible cruel et despotique, il considère également qu’il ne pouvait peut-être pas faire autrement, dans le contexte où il était. Son récit des derniers moments du tsar, de la visite qu’il lui fait faire de son trésor, sont extraordinairement vivants et fantastiques. On voit bien là que la réalité russe de l’époque était fort loin de la modernité, elle était mystique et magique, comme la nôtre au moyen âge, c’était une autre réalité, je veux dire qu’elle comportait vraiment des sortilèges et des miracles que nous sommes devenus incapables de voir et d’accomplir.
En ce qui concerne le tsarévitch, je pense personnellement que le tsar l’a vraiment tué. Il n’en avait pas l’intention, mais il l’a tué parce qu’il ne se contrôlait pas. Et cela me paraît dans la logique de son caractère et de façon plus générale, du destin tragique de certains êtres. Pour bien des choses, j’ai laissé libre cours à l’invention romanesque ou disons, à ce qui m’était dicté par l’évolution de mes divers archétypes. J’ai appris que Varia Basmanova s’était remariée, ce qui n’est pas le cas dans mon livre, et cela m’a fait de la peine pour Fédia, qui n’était pourtant peut-être pas pour elle le mari exemplaire que je lui donne dans l’histoire. Pour ce qui est de Vania, Ivan Basmanov, j’ai totalement inventé la suite de son destin pour les besoins du roman. Parthène le Fou est donc la fin du conte qui m’avait complètement et si tôt absorbée, et ne m’avait, en fin de compte, jamais vraiment lâchée.
« Saint ange, en nous apportant la mort, transforme-nous par la beauté de ta nature ».
Parthène le fou.
P REMIÈRE PARTIE : Ivan Tsarévitch
Chapitre I
Surgi peu à peu du néant, l’Archange s’embrasait tout entier pour se ternir ensuite, comme un métal surchauffé retombe dans son inertie et sa froideur initiales. Ses ailes, répandues sur son manteau, entrelaçaient à l’infini des diagonales sanglantes, et son image se désagrégeait et s’effaçait dans la nuit. C’était une illusion récurrente des ténèbres, une illusion mortelle qui hantait ses songes.
Le tsar s’éveillait d’un court sommeil agité. « Éloigne-toi de moi, Satan ! » souffla-t-il et, se signant, il ajouta : « Que Dieu se lève et que ses ennemis soient dispersés, et que ceux qui le haïssent fuient devant sa Face ! »
Il chercha autour de lui et le vit près de l’icône où figurait saint Michel en relief, dans son armure émaillée. Le jeune garçon chantait d’une voix sonore et poignante. Son avant-bras drapé de soie, son joli visage et ses boucles blondes se détachaient de l’ombre par intermittence. Vêtu d’un caftan de laine tissée blanche largement brodée de motifs noirs au point de croix, avec de longues manches à crevés nouées dans le dos, des braies rayées, une ceinture et des bottes écarlates, il portait en travers de sa poitrine des gousli {1} en forme d’aile : c’était avec l’escarboucle qu’il avait au doigt, une partie de l’héritage de son père défunt.
« Ils viennent, ils viennent, les derniers siècles
Les sources des rivières vont se tarir
Le soleil et la lune s’assombrir
Les claires étoiles tomber sur la terre
Et l’archange Michel surgissant
Va sortir sur la haute montagne
Et jouer de sa trompette d’or :
Debout , les vivants et les morts… » {2}
Assis un peu plus loin, dans l’ombre, deux personnages, habillés de la même manière, faisaient doucement résonner des instruments semblables. C’étaient les serviteurs du garçon, oncle Micha et son fils Stépane. Le tsar les avait réunis en rachetant ce dernier aux Turcs auxquels il avait été vendu comme esclave. Stépane était le plus jeune, il avait à présent près de trente ans, l’exil et la servitude l’avaient marqué, et le tsar l’avait marié avec une femme de vingt cinq ans, qui avait connu un destin similaire. Il avait donné au jeune noble, Ivan Féodorovitch Basmanov, la même fonction qu’à l’ancien palefrenier de son grand-père et à son fils retrouvé, celui de barde à son service. Il aurait pu lui faire franchir tous les degrés d’une carrière à la cour, mais il avait tout de suite senti que Vania devait être tenu à l’écart de tout cela, qui avait perdu son père et le perdrait d’autant plus. Dans la position choyée, mais marginale et subalterne où il l’avait placé, il ne gênait les ambitions de personne, il n’existait que pour enchanter ses yeux et ses oreilles, et tromper, avec l’oncle Micha, qui l’avait en partie élevé, et son fils Stépane, ses longues et fréquentes insomnies.
Il leur avait installé un logement près de son palais, dans le kremlin de la Sloboda, et pouvait les envoyer chercher à tout moment. Ou bien il pouvait aller retrouver, dans la résidence des femmes, de l’autre côté de la cour, sa nouvelle et sixième épouse, une gamine terrifiée à laquelle il n’avait rien à dire et qu’il allait dépraver de temps en temps, avec le semblant de légitimité que donnait à cela un semblant de mariage. Il avait pris cette compagne, beaucoup trop jeune, après s’être cru trahi par sa maîtresse, la veuve Vassilissa, dont avant de la reléguer au couvent, il avait fait empaler l’amant sous ses fenêtres. Une chose pareille ne pouvait naturellement pas être tolérée, mais il devait s’avouer que Vassilissa lui manquait : elle avait du caractère et de la répartie, elle avait vécu, c’était une vraie femme… La jeune Macha lui donnait la consternante impression d’avoir pris un animal de compagnie, une petite chatte mal apprivoisée qui ne comprenait pas ce qu’il lui voulait.
Les trois bardes lui chantaient des épopées et tout leur merveilleux répertoire, la musique hypnotique et cristalline des gousli l’aidait à s’endormir ; il aimait aussi deviser avec eux, ils le reposaient de tout le reste, et ils en étaient protégés. Cela ne faisait pas l’affaire des grands-parents du garçon, mais il n’allait pas compter avec leurs désirs personnels, et quand à sa mère Varvara, elle pourrait ainsi bientôt se retirer au monastère, comme elle en avait le désir, son second fils Pétia devant suivre la filière habituelle d’un jeune noble, la guerre et le service de l’état ; l’important pour le tsar étant avant tout de garder à portée de la main Rossignol le Brigand, sa tête fantasque et dorée, son joli visage, et aussi son serviteur Micha, dont il appréciait la profondeur et la sagesse populaire.
Vania avait douze ans, l’âge de son père quand le tsar l’avait vu la première fois, avant de le prendre plus tard à son service et en faveur, et il ne vivait au palais que depuis quelques jours. Depuis son lit, où il gisait en chemise de lin, frileusement enveloppé dans une couverture fourrée, le tsar contemplait avec satisfaction son trio de bardes. Ils lui faisaient la vie plus gaie et les nuits plus courtes. « Rossignol le Brigand, proféra-t-il, tu es content ici, Vanietchka ?
– Oui, souverain ! répondit joyeusement le garçon.
– C’est ton père qui t’avait appris ce poème spirituel…
– Oui, souverain…
– Je le reconnais, c’est moi qui le lui avais chanté. Viens ici… »
Le garçon s’approcha d’un pas souple, comme si ses jolies bottes brodées ne demandaient qu’à danser et rebondir. Le tsar le prit par la main et le fit asseoir près de lui : « Que pourrais-je donc t’offrir ?
– Mais… rien, souverain.
– Oh Vanietchka… Tu es sûr ?
– Je n’ai besoin de rien… »
Le garçon fit un sourire perplexe et navré : son parrain voulait lui faire plaisir et il ne savait pas

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