La lecture à portée de main
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Publié par | L'Harmattan |
Date de parution | 01 mars 2010 |
Nombre de lectures | 86 |
EAN13 | 9782296250093 |
Langue | Français |
Poids de l'ouvrage | 4 Mo |
Informations légales : prix de location à la page 0,0850€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.
Extrait
A
U
T
E
U
R
S
Lourdes BERRUECOS: Université Autonome de Mexico (UAM-Xochimilco)
ClaudeCHABROL:Université de Paris3(GRPC-CAD)
Patrick CHARAUDEAU:Université de Paris 13(CAD)
ManuelFERNANDEZ:Lycée d’Angoulême (CAD)
María EugeniaGOMEZDEMAS:UniversitéNationaleAutonome deMexico
(UNAM-CELE)
LuisaM.GREATHOUSEAMADOR:InstitutodeCiencias Sociales
Humanidades,BeneméritaUniversidadAutónoma de Puebla(BUAP)
y
RaquelGUTIERREZESTUPIINÁN:BeneméritaUniversidadAutónomade
Puebla(BUAP)
GuyLOCHARD:Université de Paris3(CREDAM-CAD)
RosaGraciela
(BUAP)
MONTE:BeneméritaUniversidadAutónomade Puebla
JulioCésarPENAGOSCORZO,Universidad delasAméricas (Puebla)
DaliaRUIZAVILA,Universidad PedagógicaNacional, EscuelaNacionalde
Antropologíae Historia
Jean-ClaudeSOULAGES:Université deLyon2(ELICO)
DanielleZASLAVSKY: El ColegiodeMéxico(CELL)
JeanHENNEQUIN
LuzMaríaSÁNCHEZ
FabienneFAVREDEGOUY
TRADUCTEURS:
Introduction
S’ilest une questionsusceptible de créerun lienentrelesdifférentes
sciences humaines et sociales, c’est bien celui du sujet. Notion déinie
diversement selon lesdifférentesdisciplines,maisnotionqui les traverse et
oblige à une mise en regard de ces déinitions, autrement dit oblige à une
interdisciplinarité.
Est-ceprésomptueuxde direqueparmicesdisciplines,les sciences
dulangageoccupentuneplace centrale, commetissantun lienentre elles ?
Sociologie,psychologiesociale,anthropologie,histoire,pourn’enprendre
quequelques-unes,ont toutesaffaire, d’unefaçon ou
d’uneautre,aulangage,àsesmécanismes, etdoncàlanature dusujet producteurdetextes
ou deparolesorales.
Encorefaut-ilqueles sciencesdulangage elles-mêmesaientuneidée
claire delanature dusujet, deson identité etdesonrôle danslesdifférents
actesdelangage dontilestl’ordonnateur. Or, celanevapasdesoi.Tout
d’abordparcequ’ilfaut seprononcer surladifférence entrelangue
etdiscours, etdonc entre unsujetdelalangue, etunsujetdu discours ;ainsise
distinguentunelinguistique delalangue etunelinguistique du discours.
Ensuiteparcequ’àl’intérieurmême del’analyse du
discours,ilexisteplusieurs pointsdevuequipeuvent setrouverdansuneoppositionradicale.
Mais quelquesoitlepointdevue,onpeutdirequelaquestiondusujet
parlantestliéeàcelle delacompétence, card’unefaçon ou d’uneautre,
c’estl’êtrehumainquiparle et setrouve doncàl’origine
del’actiondeparole.Pourcequiconcernelesujet parlantdelalangue,rappelons qu’aussi
bien lalinguistiquestructurale
d’obédiencesaussuriennequelalinguistiquegénérative d’obédience chomskyenne,attribuaientausujet parlantune
compétence dépourvue de dimensionpsychologique et sociale.
Lestructuralismesaussurienenproposantde distinguerlalanguede
laparolesignalait quelesujetdelalangue étaitunsujet socialetceluide
laparole unsujetindividuel;cependantils’est peupréoccupé delaparole,
carcequi importaitétaitdemontrercommentlalanguesestructure en
divers systèmes (phonologique,morphologique,syntaxique,sémantique)
ayantleur propre économie etcohérence. Ainsi,lesujetest porteurdes
potentialités quelui offresaproprelanguequ’il n’aplus qu’àréaliserde
façonparticulière.Sicesujet peutêtre dit social, c’estdufait qu’ilpartage
aveclesmembresd’unemême communauté ces potentialitésdelangue.
Lacompétence dusujetestune compétence deconnaissancedes systèmes
linguistiques.
QuantàcequeproposeNoamChomskydans son modèle degrammaire
générative–dontil faut rappeler qu’ilamarqué
uneruptureaveclestructuralismesaussurienencequ’ilcontesteprécisémentl’oppositionentre d’un
côté unelangue« fait social »etd’unautre uneparole« faitindividuel » –,
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IDENTITÉS SOCIALES ET IDENTITÉSDISCURSIVES
c’est unsujet capable de produire un nombreillimité de phrases, y compris
des phrasesinédites,àpartir d’uncertain nombre d’énoncés debase
(structure profonde) quisubiront uncertain nombre de transformations en leur
appliquant unsystème de règles complexes (phonologiques, syntaxiques,
sémantiques). Cetteaptitude du sujetàproduire des phrases estappelée
compétenceet saréalisationperformance. Ainsitout fait delangage est-il le
fait d’unsujet,lequelàlafoismémorise des connaissances et des règles, et
calculeleuractualisation(toute choseabsente dumodèle structuraliste). Ce
sujet parlant est, commel’adit Chomskylui-même, un«locuteur-auditeur
idéal», c’est-à-dire unsujet purementcognitifquiconfond dans un même
processusl’acte de productionet de compréhension, etn’accordeaucune
placeaux circonstances et conditions contextuelles del’acte delangage.
Aveclapragmatique, issue de la rélexion des philosophes du langage,
estapparu unsujet se trouvantàl’origine d’actes (lesactesdeparole)ayant
une certaine force (illocutoireetperlocutoire) ; ce sujetn’est pas seulement
tourné verslemonde pour enrendre compte (théorie représentationnelle)
mais versl’autre dulangage pourlemettre enpositiond’avoiràpenser età
faire (théorieactionnelle). Onpeuticiparler decompétencepragmatique,
mais rien n’est dit sur l’identité spéciique du sujet, comme si, quelle que
soit celle-ci, l’acte de parole signiiait par lui-même.
Lasociolinguistique–considéréeicienunsenslarge,incluantles
courantsnordaméricains (Labov,Hymes,Gumperz) etanglo-saxons
(Bernstein,Halliday)–refuse delimiterlacompétence du sujetau seul
domainelinguistique et propose de relier defaçonétroitel’énoncé
(saproductionet son interprétation)au contexte socialet culturel.Cela adonné
lieuàdifférentsmodèles d’analyse,le point
communétant,faceàlapragmatique, que ce sontles données externesàl’acte delangage qui font
sens.D’oùlapréférence donnéeàl’étude des variations sociolinguistiques
(Labov), des différentesfonctionslangagières (modèle ethnographique de
Hymes, des rites d’interaction(Goffman),au détriment des structures. On
peut parlericid’unecompétencesocio-communicativedontle sujet est
partie prenante.
Enanalyse du discours,le sujet faitluiaussiproblème etaété
souvent discuté.Étantàl’origine de pratiques discursives quiconstruisent des
représentations de systèmes de valeurs,ilpeut être considéré comme un
sujetactif. Mais du fait que ces pratiques sont partagées parlesautres du
groupe, et qu’ellesluireviennent sous forme de représentations dominantes
qui le surdéterminent,onpeut dire que ce sujet estpassifet se dilue dansla
conscience (oul’inconscient) du groupe social.Delà, deux positions :
– l’une, radicale, qui ne confèreàce sujet d’autre existence que celle
d’une« illusion », carilserait complètement surdéterminé par ce que
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Pêcheuxappellelpréce «onstrui« ft » desormes discursives ».Le sujet
1. Pêcheux parle d’« effet Münchhausen»,inM. Pêcheux (1975), « Les vérités de
LaPalice »,III.2. «Idéologie,interpellation, effet Münchhausen»,inL’inquiétude
INTRODUCTION
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n’est quele résultat d’unproduit ;il ne s’appartient pas,ilest parlé par
unailleurs quisera appelé tantôtidéologie (Althusser), tantôtinconscient
(Authier-Revuz). Dans uncas comme dansl’autre,le sujetn’est pas un
«je »mais un« ça »(idéologiqueouinconscient) quiparleàtraversle
sujet parlant.
– l’autre positionestmoinsglobalisante. Ellenenie paslejeu de
lasurdéterminationdu sujet,maisaulieu d’en faire uneillusion, elle en
fait quelque chose de positif.Ilexiste dans toute société des discours de
doxa(lieux communs, stéréotypes), savoirs partagés de connaissance et de
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croyancece ;ux-cicirculent et se répartissent de façon nonaléatoire dans
les différents groupes sociaux. Tout sujet est donc porteur, pourune part, de
certains de ces discours, et dumême coup cetappariement révèle (souvent
àson insu) sonpositionnement social. Onpeut donc dire que, d’une
certainemanière, ce sujet est « responsable » (ce qui ne veut pas dire conscient
et volontaire) de ses représentations.
Laquestiondemeure de savoir queltype d’articulation opérer entre