Normes et normativité en éducation
188 pages
Français

Normes et normativité en éducation , livre ebook

188 pages
Français

Description

Les normes en éducation participent à la fois du plus haut niveau par imposition des politiques scolaires européennes et descendent jusqu'au plus personnel de l'élève, sa réalisation par l'écriture. Elles préparent aux enseignants des lendemains professionnels difficiles, si on établit une homologie avec le monde de l'entreprise. Ces nouvelles caractéristiques de la norme donnent ainsi à voir le rôle qui est désormais dévolu à l'éducation dans un monde commandé par l'économie de marché.

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Publié par
Date de parution 01 décembre 2011
Nombre de lectures 92
EAN13 9782296475878
Langue Français
Poids de l'ouvrage 4 Mo

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Extrait

NORMES ET NORMATIVITÉ EN ÉDUCATION
Entre tradition et rupture
Sous la direction de Odile Schneider-Mizony et Maurice Sachot NORMES ET NORMATIVITÉ EN ÉDUCATION
Entre tradition et rupture
© L’Harmattan, 2011 5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris http://www.librairieharmattan.com diffusion.harmattan@wanadoo.fr harmattan1@wanadoo.fr ISBN : 978-2-296-56856-3 EAN : 9782296568563
       Introduction 920   e La normativité dans l’enseignement de l’allemand au XX siècle 2128   Entre normativité et scientificité : Ferdinand Brunot et le système e éducatif sous la III République française 2940   Les dissertations de philosophie d’élèves de lycée : entre normalisation et normativité 4156    Normes culturelles et styles d’apprentissage 5770  ! LePortfolio européen des languesle et Cadre européen commun de référence: entre normalisation institutionnelle et responsabilité indivi duelle 7193   Le Conseil de l’Europe et l’éducation aux langues : la normativité du réalisable 95116  " Le système éducatif français entre lois, discours et pratiques : le cas de l’orientation scolaire 117130 #$  Cadres normatifs et logiques d’action dans les stratégies organisa tionnelles 131138  % Les politiques scolaires et la question de la normativité 139153  & ' Règles et capacités : contribution à une grammaire des objets d'édu cation 155164    De la norme comme loi ? 165179
(      Norme et éducation forment un couple aussi indissociable qu’est le couple âmecorps dans la tradition occidentale. Impossible d’envisager l’éducation sans la référer à des normes. Aucun secteur éducatif, aucune forme éducative ne lui échappe, à un point tel que vouloir en faire l’inventaire serait sans fin et n’aurait même guère de sens. La normativité règne à Summerhill comme dans le collège ou le séminaire où rien n’est laissé au hasard et où tout fait l’objet de dispositions réglementaires les plus fouillées et les plus strictes. Rien dans l’éducation qui soit gratuit, rien qui puisse se faire sans être rapporté à une référence, principe, règle, pratique, coutume…, qui en indique en même temps que la fin la voie à suivre et la façon de procéder. Or, ce rapport n’est pas vraiment étudié, alors même qu’il serait difficile de trouver un écrit portant sur l’éducation qui, soit ne constate la présence de normes, soit ne fasse luimême appel à des normes pour justifier ses analyses, ses positions et ses critiques. Les raisons en sont sans doute multiples. Nous en noterons seulement deux. La première, générale, est que la normalité est aux pratiques ce que la logique est au raisonnement. Tout le monde raisonne. Mais qui se préoccupe explicitement de la logique qu’il met en œuvre ? La seconde est historique et plus spécifique : jusqu’à présent, le rapport entre normes et éducation se vivait et se comprenait dans la médiation de ses formes concrètes, c’estàdire dans la médiation de tout ce qui constitue le système éducatif, depuis les principes philosophiques jusqu’à la moindre consigne pédagogique en passant par toutes les instances et pratiques d’ordre politique, institutionnel, pédagogique, disciplinaire, didactique, personnel, bref, par tout ce qui fait le matériau concret de l’éducation, scolaire ou non. C’est sur ces réalités que portaient l’attention et la discussion, non sur le principe de normativité qui était à l’œuvre et qui y recevait sa justification explicite. La dimension institutionnelle à laquelle est liée la notion de normativité allait, elle aussi, de soi.
Or, et c’est notre deuxième constatation, il semble que le rapport entre les normes et ces réalités médiatrices s’inverse depuis environ un demisiècle et que ce mouvement se manifeste maintenant avec toute sa force et son ampleur. La référence à des normes tend de plus en plus à prendre le pas sur toutes ces références, voire à se substituer à elles, comme si elle devenait l’instance fondatrice de toutes les autres. Ce mouvement et cette inversion ne sont pas propres à l’éducation. Ils touchent tous les autres domaines qui, comme l’éducation, ont une forte implication humaine. La question de la norme, notamment sous la forme de standards, est posée avec acuité dans les domaines techniques ou qui impliquent
Odile SchneiderMizony et Maurice Sachot,Introduction
la technique. Pas de communication sans standards. Mais, ce qui est nouveau et étonnant, c’est que la norme soit la référence première dans des domaines comme l’économie, l’environnement, les langues, la santé, l’éthique, la politique. Elle devient le mode naturel, le mode « normal » de la pensée et de la gestion de ces domaines. L’éducation apparaît comme le dernier carré à investir.
Par définition, la normativité relève de la médiation. Les normes ne sont ni totalement du côté du sujet, ni totalement du côté de l’objet. Elles sont un intermédiaire. Cette ambivalence ne détermine donc pasa prioridans quel sens elles vectorisent la relation. À dire vrai, une norme est un oxymore : elle prétend être objective au moment même où elle est arbitraire. L’objectivité qu’elle affecte ne se trouve pas dans le réel, pas plus que l’angle droit, le fil à plomb ou tout autre instrument de mesure, puisque c’est à de tels instruments que nous renvoie l’étymologie de ce mot comme celle de tous ceux qui lui sont apparentés. La norme résulte d’une prise de décision sur un repère que l’on fabrique, que l’on pose arbitrairement (cf. l’étymologie du mot « loi »), de manière à décider ensuite de la réalité des choses de façon… non arbitraire ! Comme la loi qui lui est apparentée, la norme s’impose, de manière quasi absolue, jusqu’au moment où on décide de la changer ! Faire cette constatation, c’est soulever la question de l’origine de la norme ; c’est faire remarquer que la force de la norme, présentée comme interne à la norme ellemême, réside en fait dans celui qui l’établit et qui est reconnu comme ayant cette autorité par l’ensemble des autres personnes.
La norme ne seraitelle alors qu’une forme dissimulée de l’argument d’autorité, autrement dit, d’une forme de domination d’un groupe ou d’une classe sur le reste de la population ? Et, si tel était le cas, l’éducation seraitelle alors purement et simplement synonyme d’inculcation ? Chacun connaît la célèbre définition de l’éducation donnée par le sociologue français Émile Durkheim dans l’article « Éducation » écrit pour leNouveau Dictionnaire de pédagogie et d’instruction primaireen 1911 sous la direction de publié Ferdinand Buisson : « L’éducation est l’action exercée par les générations adultes sur celles qui ne sont pas encore mûres pour la vie sociale. Elle a pour objet de susciter et de développer chez l’enfant un certain nombre d’états physiques, intellectuels et moraux que réclament de lui et la société politique 1 dans son ensemble et le milieu spécial auquel il est particulièrement destiné ». Donnée comme un fait sociologique observé et universel, cette définition ne laisse pas cependant d’être discutable. Telle qu’elle est formulée, elle ne se distingue guère du dressage. Surtout, elle exprime une domination exercée par les adultes sur la génération montante telle que celleci n’est en rien reconnue
1. Définition reprise dans Émile Durkheim, « L’éducation, sa nature, son rôle »,Éducation et 9 1 sociologie, Paris, PUF, 2005 ( 1922), collection Quadrige, p. 51.
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