Socialisation et violences
318 pages
Français

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Socialisation et violences , livre ebook

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Description

Les rapports de la société avec la violence sont ambigus : la violence est organisatrice de la société tout comme celle-ci est organisatrice de la violence. En révélant qu'au Sénégal chaque groupe social est spécifiquement porteur d'une violence à l'école, les données légitiment la déconstruction de la relation quasi bijective qu'un déterminisme a hâtivement établi entre les classes populaires et la violence comme faits d'apprenants habitant les quartiers et banlieues pauvres.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 février 2013
Nombre de lectures 44
EAN13 9782336288772
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,1350€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
4e de couverture
Titre
H AROUNA S Y






Socialisation et violences

Violences de l’école, violences à l’école
Copyright

© L’HARMATTAN-SÉNÉGAL, 2013
« Villa rose », rue de Diourbel, Point E, DAKAR

http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
senharmattan@gmail.com

EAN Epub : 978-2-336-28877-2
Dédicace

À la mémoire de :
– Boubou Dicko Sy, mon grand-père
– Et Dicko Boubou Sy, ma tante
Préambule

Au cours de mes enquêtes sur la violence dont cet ouvrage constitue l’aboutissement, j’ai bénéficié en 2007, sur proposition de Boubacar Niane très fortement appuyée par Monique de Saint Martin, d’une bourse d’un mois de la Fondation Maison des Sciences de l’Homme de Paris en qualité de Directeur d’Études Associé [DEA]. Je remercie ces deux amis et cette institution d’utilité publique.
INTRODUCTION
La violence scolaire semble incontestablement avoir fini de se constituer en domaine spécifique de réflexion même s’il irrigue plus ou moins complètement tout le champ de la sociologie de l’éducation. En témoigne l’énorme quantité de travaux déversée sur le marché de la connaissance dès le début des années 1990, impulsant ainsi un développement accéléré d’un secteur de recherche encore balbutiant dans les décennies 1970 et 1980. Paradoxalement, la violence est encore un domaine qui peine à s’affirmer comme objet de science. Serait-ce à cause du fait qu’elle soit trop réelle et très tributaire des contingences de la réalité ? Ce statut ontologique aurait-il pour effet de rendre vaines ses prétentions à la généralité caractéristique de la science ? Au moins un constat s’impose : si les études empiriques permettent un travail quasi expérimental sur des faits de violence en tant que cas concrets, les différentes figures du phénomène et ses variations d’une époque à la suivante et d’une société à l’autre rendent difficile la conceptualisation. L’explication de ce paradoxe permanent, et permanemment renouvelé par l’actualité des crises tendanciellement endémiques, pourrait être recherchée dans la complexité essentielle de la violence. Mais le contexte de crise a fini par imposer une démarche simplificatrice qui s’est réappropriée spécifiquement l’instrumentalisation de la politisation de la violence à l’école. Et cette réappropriation spécifique a fonctionné à la fois comme critère de crédibilité scientifique du discours et comme principe de dissimulation de l’instrumentalisation. C’est ainsi que dans les pays comme la France par exemple, la forte orientation politicienne a multiplié des études commanditées auxquelles des Termes de références [TDR] tendancieusement conçus ont réussi à imposer un cadre normatif préfabriqué. De sorte que les explications fournies sont, dans la plupart des études de ce genre, aprioriques et attendues. Elles sont de type causal en ce sens qu’elles sont trop préoccupées à établir un rapport déterministe entre le couple immigration – pauvreté d’une part, la violence à l’école, le terrorisme et le chômage, c’est-à-dire l’insécurité publique d’autre part. Et même les recherches qui construisent leur légitimité hors du cadre normatif préfabriqué sont tenues de dire leur rapport – adhésion ou invalidation – à ce déterminisme.
La posture d’analyse adoptée ici peut revendiquer une certaine affinité, du moins une analogie certaine, avec la phénoménologie. La violence à l’école est identifiée comme un phénomène pluriel dont la description permet d’en révéler l’aspect essentiel. Et l’essentiel qu’elle rend compte est un fait décisif : les différents types de violence à l’école ont en commun ce qui les constitue comme violence mais les oppose en même temps à la violence de l’école, à savoir celle qui affecte le fonctionnement d’un établissement scolaire par la perturbation de son ordre. La perturbation peut affecter soit un cours dans une classe, soit les relations entre individus, soit la vie de l’établissement. Dans tous les cas, l’ordre indispensable au processus enseignement-apprentissage et / ou à la gestion administrative est troublé.
La violence scolaire est aussi un phénomène à large amplitude démographique et extensible par ses multiples connexions avec la violence non scolaire. Tous les acteurs d’un établissement sont confrontés à la violence. Dans la classe par exemple, ce n’est pas seulement l’enseignant qui fait face à l’indiscipline, les apprenants aussi sont exposés aux comportements perturbateurs de leurs camarades. La violence dure [= délinquante] n’affecte pas que les rapports entre apprenants, elle s’invite aussi dans les rapports entre enseignants et apprenants, entre enseignants, entre enseignants et direction administrative, entre apprenants et autres personnels administratifs ou de surveillance. C’est en tant que phénomène à la fois pluriel et à large amplitude démographique que la violence scolaire s’inscrit au quotidien, mais à des degrés divers, dans la vie de chaque établissement. Elle s’incruste ainsi dans les rapports de travail, dans les rapports de camaraderie comme dans les rapports pédagogiques d’apprentissage.
Une des exigences épistémologiques pour étudier la violence scolaire est le refus de l’inscrire dans un cadre normatif quelconque. Pour réussir une telle résistance, il ne suffit pas seulement de mettre en cause les légitimations méthodologiques et leur fonction, il faut, plus sérieusement et de manière systématique, déconstruire l’espace durkheimien de conceptualisation du phénomène pour prendre au sérieux la violence comme objet en [re]construction [chapitre 1]. Cela est une nécessité pour qui veut interroger les questionnements déjà théorisés pour réinterroger autrement le phénomène.
Et une des manières de prendre la violence au sérieux est de l’inscrire dans tout processus de socialisation. Et par cette inscription, on se donne les moyens d’accéder à l’intelligibilité du statut de la violence comme instrument de socialisation à l’œuvre dans tous les domaines de la culture. On peut choisir de privilégier, arbitrairement et spécifiquement, certains domaines tels que l’initiation, les rapports entre castes, etc. comme dans la société pulaar 1 . Mais pour spécifique que soit le cas choisi et pour arbitraire que soit le choix, cela ne compromet nullement la possibilité de donner une portée plus générale à la théorie. Cette possibilité est donnée par l’analyse de l’usage que les institutions de socialisation font de la violence [chapitre 2].
Pour être pertinente, une réflexion sur la violence scolaire a besoin de fournir des instruments d’intelligibilité de l’école et de la violence. Cela exige, pour l’école, l’analyse systématique de ses dynamiques mutationnelles et, pour la violence, la description détaillée de ses différentes figures. L’analyse des dynamiques mutationnelles s’intéresse ici aux acteurs, aux effets criminogènes de la démocratisation de l’enseignement et à la démultiplication de stratégies non conventionnelles de réussites scolaires au détriment du principe même de la méritocratie. La description des figures de violence est conçue ici un exercice empiriquement singulier de délimitation du phénomène, exercice qui tente de montrer la permanence d’un phénomène qui se renouvelle cependant dans sa forme et dans son contenu [chapitre 3].
On peut alors s’interroger sur le mode d’existence de la violence de l’école. Certains théoriciens comme par exemple Bourdieu et al., Baudelot et al., etc. ont privilégié dans leurs analyses un aspect de cette violence à savoir la violence de la fonction [chapitre 5]. Mais il semble qu’il soit nécessaire aujourd’hui de renouveler la réflexion compte tenu de l’effet des dynamiques mutationnelles qui n’ont pas encore fini d’affecter l’école et l’État. Renouveler la réflexion, c’est aussi soumettre le fonctionnement de l’école à un questionnement systématique pour détecter son caractère violent [chapitre 4]. Ce questionnement est spécifiquement conçu ici de manière i) à s’interroger sur la légitimité théorique d’inscrire l’école

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