Le labo des sentiments
152 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Le labo des sentiments , livre ebook

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152 pages
Français

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Description

Dans un futur proche, à l'école d'ingénieurs spécialisée en robotique, SupRobotique, cinq étudiants racontent les rivalités, les sentiments, les réflexions sur les rapports entre humains et machines ou encore la conception d'un robot qui jalonnent leur première année de cours. Une année qui se termine par une compétition de robots.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 30 novembre 2020
Nombre de lectures 2
EAN13 9782733891940
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0450€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

© Éditions Auzou, 2018
24-32 rue des Amandiers, 75020 Paris
 
Mise en pages : IGS-CP
Correction : Catherine Rigal
 
Tous droits de traduction, de reproduction et d’adaptation strictement réservés pour tous les pays.
Loi n o  49-956 du 16 juillet 1949 sur les publications destinées à la jeunesse,modifiées par la loi n o  2011-525 du 17 mai 2011.
Dépôt légal : février 2019
Imprimé en Serbie.
Produit conçu et fabriqué sous système de management de la qualité certifié AFAQ ISO 9001.
 


 
 


 
 

AUZOU
 

À Dahvia Ouadia
1. Anulika
J’étais encore au collège le jour où, quelque partau Japon, ils ont célébré le tout premier mariage entredeux robots. C’était un matin, au milieu des vacancesd’été. Je me rappelle avoir regardé la vidéo de la cérémonie sur ma tablette, face à un bol de Chocapic, lespieds fourrés dans d’énormes pantoufles Bourriquet.
 
Le moins que l’on puisse dire, c’est que je n’ai pasété charmée. Les yeux de la mariée, une humanoïderoulant sur une estrade dans une robe-meringue demauvaise qualité, étaient vides de toute expression.Quant au marié, il ressemblait à une énorme boîte de conserve rouge avec des antennes et des petitesoreilles décollées en forme de mini-passoires. Deuxlarges tuyaux terminés par des pinces métalliques luifaisaient office de bras. Pour lui donner une allurefestive, on l’avait orné d’un nœud papillon à poisroses très moche.
Le comble du sordide a été atteint au momentoù la bouche de monsieur s’est décollée de son visageet, guidée par une tige en inox télescopique, est alléese presser sur les lèvres en plastique de madame. Letout sous les applaudissements de spectateurs qui sebousculaient pour capturer cet événement historiqueavec leurs téléphones portables.
Les nouveaux mariés ont ensuite découpé unepièce montée blanche, surchargée en crème, dont ils negoûteraient pas une seule bouchée. J’ai coupé la vidéo.
 
Si c’était ça l’avenir, ça ne m’intéressait pas. À cetteépoque, je nageais en pleine phase romantique etsupportais difficilement que l’on plaisante avec unechose aussi noble que l’amour. Que pouvait-il yavoir de plus beau que cette étincelle inexplicable et incontrôlable entre deux êtres ? J’aimais l’idée qu’elleéchappe à toute programmation… Je passais l’essentiel de mes soirées à soupirer devant des comédies sentimentales. Le reste de mon temps libre, je coloriaisdes petits cœurs sur mon agenda en me persuadantque Quentin de 4 e B était secrètement fou de moi. Etqu’il faisait semblant de préférer Célia de 4 e D pourme rendre jalouse (je me fourrais le doigt dans l’œil).
On avait beau nous prédire l’arrivée de l’intelligence artificielle et de robots capables de prendre laplace de l’homme dans tous les domaines de la vie– y compris sentimental –, pour moi, l’amour, le vrai,restait une affaire d’humains. Ce mariage entre deuxmachines ne pouvait être qu’une farce stupide.
 
Me voici maintenant, quatre ans plus tard,avec une opinion un peu différente. Les émotionshumaines ne me semblent plus si surnaturelles quecela. Comme les robots, ne sommes-nous pas tousprogrammés, à notre manière, par nos instincts, notreéducation ou ce que la société attend de nous ? Est-cevraiment nous qui rêvons, qui aimons, qui ressentons, ou nos gestes sont-ils guidés par des milliers de ficellesinvisibles ? Existera-t-il un jour des gens capables deréduire toute notre existence à une poignée de formules mathématiques ? Vous avez le droit de penserque je me prends un peu trop la tête. C’est vrai queces derniers temps, ce n’est pas très drôle de traîneravec moi.
 
Seulement, depuis l’accident, je ne suis plus sûrede rien. Vous le seriez aussi, si, comme moi, vous étiezdevenu un hybride, mi-femme, mi-robot.
PARTIE I
2. Martin
Il y a à peine dix minutes, j’ai rencontré la célèbreCoriander Pike. Et j’hallucine. J’étais assis tranquilledans ma chaise rembourrée quand la meuf a commencéà tchatcher sauce mitrailleuse pour me raconter sa vie.Je suis déjà capable de réciter sa biographie complète, ycompris le nom de son robot de compagnie (Fluff) etle nombre maximal de paquets de chamallows qu’elleest capable d’ingurgiter à la suite (six. Respect). C’est àpeine si je parviens à écouter le discours de rentrée.
 
— Si nous vous avons sélectionnés, c’est parce quenous vous pensons capables de devenir de brillants ingénieurs. Vous tous, ici présents, êtes les artisans dela société de demain !
Le directeur, Christian Vilmaux, se tient sur uneestrade de verre, au centre de l’amphithéâtre hypermoderne de SupRobotique. Son visage est retransmisen direct à la surface du pupitre tactile placé devantchacun des 300 nouveaux élèves. Chacun d’entrenous peut ainsi contempler en gros plan ses cheveuxblonds en bataille et ses yeux bleus scintillants commedes diodes. Possédé par le Dieu sacré de la technologie, il déclame, théâtral, les bras en l’air et les paumesvers le ciel :
— Aujourd’hui, les robots n’appartiennent plusau monde de la science-fiction ! Non, messieurs-dames, ils sont une réalité ! Et ils vont jouer un rôlede plus en plus important dans nos vies !
 
Mais Coriander – « appelle-moi Cori » – Pike s’entape. Et elle ne semble pas vouloir me laisser savourerpeinard la perspective d’être un « artisan de la sociétéde demain ».
— Tu sais que dans ma famille, on porte tous des noms d’herbe aromatique ? Coriander, en anglais,ça veut dire coriandre. Ma sœur jumelle s’appelleParsley, c’est-à-dire persil. Devine comment s’appellemon père ?
— Euh… Cerfeuil ? je chuchote.
Elle se marre avec la discrétion d’un hippopotamenain, et une dizaine de têtes se tournent vers nous.Y compris celle de Christian Vilmaux qui s’interrompt au milieu d’une phrase portant sur « l’humilitédu scientifique qui ne doit pas se prendre pour Dieu »et nous jette un regard rayon laser.
— Non, reprend-elle un peu plus bas, pas déstabilisée pour un rond. Il s’appelle Basil 1  ! Bon, t’as le droità un deuxième essai : comment s’appelle ma mère ?
— Ciboulette ?
Nouveaux gloussements. Nouveau regard laser.Pas de bol, dans la famille salade, maman s’appelleRosemary 2 . J’espère que l’ascendance de Coriander n’a pas joué à ce jeu sur plusieurs générations, parceque je ne me sens pas d’attaque pour deviner le prénom de papy Estragon, de mamie Curcuma et detatie Poivre du Sichuan.
En parlant de sa famille, Persil… euh, pardon,Parsley, sa sœur jumelle, est assise sagement trois rangsplus bas. Elle ne loupe pas une miette du discours,dont elle tape les points clés sur une tablette électronique violette munie d’un clavier. La ressemblanceentre elles est à couper le souffle : elles sont toutesles deux fines, presque maigres, et mesurent 1,55 mmaximum. Petit nez, visage rond, peau ébène sansdéfauts. En revanche, leur style et leur attitude sontopposés. Parsley, en robe d’été motifs Liberty, le nezcaché derrière un rideau de tresses brunes, ne profèrepas un son. Coriander, en revanche, ne tient pas enplace. Les cheveux frisés coupés court, elle porte ununiforme jean-tee-shirt blanc et pas un seul bijou.
 
Les jumelles Pike sont des genres de stars. À l’âgede 13 ans, elles ont remporté le prestigieux concoursmondial des jeunes inventeurs, en fabriquant un robot jardinier qui plante des carottes tout seul. Lapremière fois que je les ai vues, c’était au journal de20 heures. Les petits prodiges franco-canadiens setenaient là, dans un potager ensoleillé, à côté d’unmachinchose à roulettes doté d’un bras articulé ettélécommandé par téléphone. Coriander racontait àtoute allure des trucs dont je ne captais pas un motà l’époque : « Le robot jardinier est muni d’une carte Raspberry (gné ?) qui envoie des ordres au moteurpar l’intermédiaire d

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