D’Adeline à Adeline, des histoires de femmes, de désirs subis ou destructeurs, d’hommes assassins et profiteurs… De l’une à l’autre, entre France de l’Ancien Régime et antipodes, d’Adèle à Adelphie, de filles dociles en corps violés, de femmes faciles en amantes soumises, une succession de portraits qui dessinent, dans le secret des motifs et des résonances, une généalogie obscure, qui énoncent la perpétuation d’une malédiction dont les tragiques figures sont le sexuel, le divin, le féminin, le diabolique… Des histoires d’eau, qui porte une filiation intime, souterraine et ténébreuse, inaugurée par cette religieuse suicidée, réprouvée car mystérieusement tombée enceinte. Une quasi mystique jetée d’un pont, créature des limbes et des tréfonds, à jamais éloignée du paradis. Organisé selon le modèle des variations, le nouvel opus de Dominique Viseux poursuit, sous une forme qui dévoile toute la fatalité de la répétition, une exploration de l’histoire de la femme et de sa sexualité, déjà commencée avec "Les Gorges de l’enfer"… Plus tragique que ce dernier, "Adeline dans l’eau" use ainsi de notes noires, voire lugubres, pour développer le sort d’héroïnes promises aux limbes et aux vases. Jouant sur des contrastes appuyés et grinçants, maniant aussi bien le pieux que le païen, l’innocent que le sulfureux, un roman taillé au cordeau, hypnotique, étonnant, dérangeant, qui dit la dépossession de la femme d’elle-même.
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