D agave et de miel
202 pages
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D'agave et de miel , livre ebook

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Description

Fabuleux récit de Khemmali et de ses compagnons de route dans un Maroc, quelque peu désuet, des années soixante-dix, avec son lot de mystère, d’histoires colportées et de légendes. Narration sobre qui allie, avec imagination et réalisme, poésie et humour, le récit de personnages exceptionnels à celui d’un pays absorbé par ses us et coutumes religieux, voire païens. Le roman met en scène le parcours de vie d’hommes et de femmes, en marge de la société et qui affrontent courageusement leur destin. Aussi au creux de leur solitude, choisissent-ils de vivre, au jour le jour, en sillonnant les régions montagneuses de l’Atlas à la quête d’une paix intérieure plus ardente que jamais.
D'agave et de miel est un véritable récit d’initiation au monde et de voyage au cœur de la condition humaine.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 17 mars 2016
Nombre de lectures 0
EAN13 9782334063340
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0060€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composé par Edilivre
175, boulevard Anatole France – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-334-06332-6

© Edilivre, 2016
Maknassa ou le temps des commencements…
« Ce que les adultes prennent pour des fadaises de conteur sont simplement des vérités auxquelles ils n’ont plus accès. »
Romain Sardou, Sauver Noël .
Meknès-la-Sublime. Grande place de Sidi Saïd. L’aède et conteur, enturbanné d’un turban vert, entonne, à pleins poumons, sa harangue du jour, juste après la prière d’al-’asr.
Dites-moi, hommes de bien et de foi, où est passé ce preux, d’entre les preux, homme sans peur et sans détour, à la bonté infinie, à la candeur angélique et à la patience à toute épreuve ? Il sut avoir le respect des hommes, l’amour des êtres vivants et la bienveillance des djinns et des Gardiens de la foi et l’indulgence des djinns croyants en Dieu Tout-Puissant.
Au temps où les hommes étaient des hommes, où la parole était sacrée et la tradition toute vigoureuse… Au temps où les femmes étaient des femmes, mères et nourricières, fières et altières… le temps inaltérable où les animaux vivaient en parfaite harmonie, avec toutes les créatures qu’Allah, dans Sa Magnificence, a créées , aussi bien les hommes, que leurs semblables dans la chaîne du vivant… le temps où l’histoire et la légende s’imbriquaient, parfaitement, et ne faisant qu’Un, parachevant le cercle indivis et ininterrompue de la Création.
En ces temps-là, mes frères, temps proches ou lointains, selon notre vision et compréhension des choses, on vit naître une destinée, peu commune, nommée sidi Khemmali Moul-’Aïn ou sidi Abdel-Khemmali Moul as-Saquia, l’Homme à la Source… En ce temps-là, j’étais l’un des nombreux pèlerins venus s’abreuver à la source du saint, réputée pour chasser les mauvais esprits, et présenter mes vœux et mes suppliques à l’âme du saint, baiser les pans du catafalque béni et faire amende honorable, ô mes frères.
En voici la légende, ou ce qui en reste, car la trace a été perdue, effacée, retrouvée et dévoyée, prenant des éléments d’autres Sirat ou biographies d’hommes légendaires. Elle fut rapportée, complétée et commentée par les disciples et les aèdes de la tradition orale des régions visitées, selon que celles-ci sont arabes ou amazighes.
Donc, je ne peux vous en livrer que des fragments que vous devez reconstituer vous-même… et faire l’effort d’en comprendre les tenants et les aboutissants.
Mais n’oubliez pas, Hommes de bien et gens de vertu, que tout commence ici et finit sur Sahat Sidi Saïd, la place animée par les valeureux guerriers amazighs de Oued Beht, Oued Ouisslane et Oued Boufekrane, puis traversée par les cavaliers arabes d’Orient, avant d’être le lieu de prédilection des armées impériales du sultan alaouite Moulay Ismaïl, véritable fondateur de la cité de Maknassa, dont il fit la capitale de l’Empire chérifien.
L’histoire que je vais vous raconter, du moins dans ses grandes lignes, est une histoire d’agave 1 et de miel, à plusieurs entrées et à plusieurs clés, avec des personnages qui existent ou qui ont existé et dont les trajectoires et les destins croisés en font une trame peu commune, pour ne pas dire hors norme.
Le miel, vous le connaissez, mais l’agave, combien de personnes le connaissent ou se rendent compte de son existence et de son utilité. L’agave, mes amis, cette plante familière qui peuple nos campagnes, nos villages et nos douars et qui vient de si loin, de l’Amérique. Les villageois l’utilisent comme haie de séparation et comme clôture des champs et des domaines d’habitation. Ses larges feuilles, hérissées de dents sur les bords, servent à canaliser l’eau dans les petites parcelles de culture individuelle des habitants de douar ou de village. Cette plante ne fleurit qu’une seule fois et elle donne, comme vous pouvez le voir, à travers les champs et les terres non cultivées, un bourgeon unique, haut et altier, avec des feuilles larges et succulentes pour ceux qui savent s’en servir et des fleurs tubulaires. La hampe florale est magnifique et peut s’élever bien haut dans le ciel jusqu’à dix mètres, mes frères !
Enfants, nous sucions le jus intérieur, un jus sucré et nous mâchions les jeunes tiges fleuries et les tubercules. Dans certaines régions du Nord, les paysans extrayaient de l’agave, selon des techniques traditionnelles de fermentation, le jus et en fabriquaient une liqueur enivrante, semblable à l’eau-de-vie, faite à partir de figues séchées. Lorsqu’il y avait pénurie de pains de sucre sur le marché local, les villageois, cultivateurs, fermiers ou éleveurs de bétail, utilisaient le nectar de l’agave comme sucre dans la préparation du thé à la menthe et dans tout autre aliment.
Et oui, mes frères, longue vie à l’agave !
1 . L’agave, plante monocarpique, originaire de l’Amérique, de l’espèce de l’agave americana, rapportée par les expéditions coloniales espagnoles et portugaises du XVI ème siècle. Elle s’est bien comportée et a vite essaimé, toutes variétés confondues, dans le pourtour de la Méditerranée, le climat sec et semi-aride aidant.
Il était une fois la place de Sidi Saïd
« Une ville riche est comme un fromage gras, elle nourrit bien des vers. »
Proverbe anglais
Méknès. Sidi Saïd. Au-delà des hautes murailles ismaéliennes. Tout autour de l’imposante porte qui donne accès, à des arrivants de l’Ouest ou du Nord-Ouest, à la cité favorite du glorieux et implacable sultan alaouite Moulay Ismaïl 2 , contemporain de Louis XIV de France, dit le Roi-Soleil, des puissants sultans ottomans de La Sublime Porte , tels Mehmet IV, Mustafa II ou Ahmed III, ainsi que du tsar Pierre le Grand de Russie, qui régna d’une main forte, en réalité de fer et de sang, sur cette partie bénie des dieux de l’Occident musulman.
Au-delà de la grande place asphaltée, où sont parqués camions, cars, fourgonnettes, vans, triporteurs, véhicules de toutes sortes, motos et bicyclettes, charrettes et chariots à bras, tirés par des hommes forts en muscles, un homme, grand de taille, drapé dans un burnous ample et noir regarde impavide la scène.
A l’écart de la grande place, loin du tumulte environnant, une laiterie-crémerie, pas très avenante, mais dont les produits laitiers sont fort appréciés par les connaisseurs qui s’agglutinent autour du comptoir : lait, petit lait, pots de yaourt local, beurre frais, fromage beldi , miel et petits gâteaux d’amande ou de coco sont réclamés à grands cris.
A l’intérieur de l’inénarrable place, le mouvement des véhicules et de la foule est incessant ; le tout dans un désordre incroyable et qu’accentuent, comme dans un film indien des années cinquante, charrettes, tombereaux et carrioles bariolées transportant dans leur ventre denrées, condiments et produits divers, allant de la droguerie à la vaisselle en plastique. Les étals surchargés des marchands des quatre saisons ajoutent à la cacophonie d’ensemble, cacophonie plutôt bon enfant. Les voitures, dans ce méli-mélo surréaliste, avancent précautionneusement, de peur de heurter une charrette, de renverser un cycliste ou de bousculer un passant ou une passante. Des klaxons rageurs fusent, ici et là, et les bambins s’en donnent à cœur joie, chapardant légumes ou fruits, quand ils ne délestent pas un homme ou une femme de sa bourse, porte-monnaie ou portefeuilles.
Au-delà de la place, à l’écart des foules bruyantes, un café discret, réputé pour la qualité de son café turc, bien fort, au goût épicé, et ses grands verres de thé, avec une feuille de menthe fraîche trempée dans le liquide bouillant, qui n’a plus de thé que le nom.
Un siècle plus tôt, le lieu grouillait de caravanes entières, apportant leur lot de marchandises provenant des cités de Fass 3 , de Ksar es-Souk, de Marrakech, de Dakhla, de Nouadhibou, de Dakar et de Tombouctou sur le fleuve Niger, et qui devait être affranchi avant de passer les portes. Les tentes étaient dressées, des gargotes improvisées, ainsi que des spectacles. Aèdes et troubadours cheikhs et cheikhates meublaient les soirées fastueuses de la place. Eau-de-vie, à base de dattes ou de figues séchées et bière circulaient à flot, sous les tentes, éclairées de torches et de gros cierges, bien avant l’usage des lampes et lanternes à pétrole ou à gaz. Le soir, des cercles se formaient autour des chanteurs et des conteurs. On racontait les récits des prophètes, des saints et des hommes de vertu. Des mythes, incomplets et abâtardis, étaient narrés, sous couvert d’Islam, alors que l’origine était païenne, se rapportant à la lune, au soleil, aux vents, au tonnerre, à la pluie, à la mer ou à des créatures étranges, tels les djinns , les hommes à tête de chien, les loups à tête humaine, les hommes d’en bas, ayant des sabots à la place de pieds, les femmes-mules déterreuses de tombes, les femmes-louves dévoreuses de bébés, les géants des grandes cavernes, ayant un seul œil au front, bâtis comme des troncs de montagne qui traquent les errants et les voyageurs perdus ; ou encore ces belles pécheresses au vagin denté qui happe tout pénis imprudent, sans oublier les sorcières à la tresse d’argent qui pétrifient leurs amants et d’autres entités inimaginables, toutes aussi malveillantes, les unes que les autres peuplant le monde et l’imaginaire des hommes.
A l’écoute des récits et légendes de toutes sortes, on devient tout petit et on tremble le soir, imaginant derrière chaque objet ou bruissement un diable tapi ou un être monstrueux. Le sommeil devient une délivrance souhaitée. Les hommes, pleins de courage et n’ayant peur de rien, fanfaronnent tout en se réfugiant, corps et âme, dans les délices vaporeux du haschisch ou l’étourdissement des sens, dû aux litres d’alcool ingurgités. Aux enfants et aux femmes, il ne leur restait que les amulettes de

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