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Description
Sujets
Informations
Publié par | L'Harmattan |
Date de parution | 01 novembre 2009 |
Nombre de lectures | 162 |
EAN13 | 9782296688926 |
Langue | Français |
Informations légales : prix de location à la page 0,0600€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.
Extrait
AU CŒUR DES MOTS BANTU
N’zenguet-Lola
AU CŒUR DES MOTS BANTU
La dénomination chez les Pové
L’Harmattan
DU MEME AUTEUR
Bitola, épopée bantu, éditions de l’Ixcéa, 2005.
© L’Harmattan, 2009
5-7, rue de l’Ecole polytechnique, 75005 Paris
http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr
ISBN : 978-2-296-10552-2
EAN : 9782296105522
Fabrication numérique : Socprest, 2012
Ouvrage numérisé avec le soutien du Centre National du Livre
Avant-propos
Les mots sont les signes des idées ; les idées sont les expressions des choses ; en sorte que les mots se rapportent aux choses par le moyen des idées.
Saint Thomas d’Aquin
P ourquoi les Pové nomment-ils Dieu, nzambé ? Et pourquoi ce mot prend-il également d’autres acceptions, par exemple celles de caractère, habitude, comportement, nature, innéité ? Comment expliquer cet usage des mêmes Pové de désigner par le même mot odi, la voix et le fleuve ? Pourquoi le mot kâdi, la sœur, ne s’emploie que de l’homme à la femme, et jamais entre femmes ?
Au seuil de cette réflexion, il importe de remarquer que dans la plupart de nos langues, l’idée même de nommer est rendue par le même mot qui signifie à la fois percer, dévoiler, dire la vérité, dénoncer. Il en est ainsi par exemple du mot tubaka, en langue pové.
Nommer une chose, c’est donc la décrire, la peindre par la parole, par le son. C’est précisément là l’objet du présent essai, à savoir, tenter de comprendre les raisons ayant présidé à l’éclosion des mots pové, en l’occurrence les dénominations ; un défi que nous essayerons de relever en nous appuyant essentiellement sur les onomatopées et les idéophones, ces termes expressifs dont regorgent nos langues, et qui nous servent précisément à traduire nos sensations, c’est-à-dire les réalités suggérées par les choses et les êtres qui nous environnent.
Nous avons l’honneur de dédier cet ouvrage à Madame Solange Mabignat , Ministre Déléguée, en charge de l’Education Populaire, qui a contribué à sa publication. Les mots qu’elle en dit sont pour nous pleins d’émotion et déjà de fierté :
« L’ouvrage de Monsieur N’zenguet-Lola met le doigt sur une question fondamentale liée à la connaissance, à l’apprentissage, à la maîtrise et à la conservation de nos langues : la question de la composition des mots. On comprend donc que le sujet ait interpellé ma fonction, pour autant que cette réflexion invite à s’interroger sur la généralisation éventuelle de sa démarche, qui pourrait permettre d’envisager sous un jour nouveau la recherche sur nos langues et les traditions qu’elles véhiculent.
Je reste persduadée que c’est avec non moins de profit que le public lira cet essai, sans doute la première tentative du genre, s’agissant des langues gabonaises.
R. N. L.
Canton Lolo-Wagna (Ogooué-Lolo), foyer
d’habitation des Pové
Source : Paulin Kialo (ouvrage cité)
Source : Paulin Kialo (ouvrage cité)
Danseuses de Nyembè
Danseurs de Bwiti
Bénédiction par crachement
Pressoir d’huile de palme
Avis
1. Alphabet
Les lettres suivantes sont employées pour la transcription des mots pové :
Voyelles : a, e, i, o, u (prononcer « ou »)
Consonnes : b, mb, d, nd, gh, ng, k, 1, m, n, ñ, p, s, t, ts, v, w, y (ill.), nz
2. Les mots d’entrée
• Les mots d’entrée sont classés dans l’ordre alphabétique du radical nominal. Ainsi, par exemple, le mot muana, l’enfant, se trouve à la lettre A du radical Ana, et non pas à M du préfixe Mu.
• Par ailleurs, les mots d’entrée sont transcrits au singulier, à l’exception de ceux s’employant uniquement au pluriel.
3. Le trait d’union
• Il servira à relier le préfixe nominal de la racine du mot, par exemple : mu-ana, au lieu de muana.
A
Ma-ambâ : l’eau
Ce mot pluriel qui signifie littéralement « les eaux » traduirait le caractère expansif de l’eau. C’est en effet cette idée d’expansion que tend à véhiculer le son [A], lequel correspond à l’interjection Ahé qui signifie non !, et traduit de ce fait le refus, le rejet, le désintérêt, la privation, le défaut, l’éloignement, l’écartement, l’étendue, l’extension, l’aggravation, etc. Des nuances que nous allons retrouver dans les mots suivants :
a-muña : aider (à faire avancer un travail), donner un coup de pouce ;
a : il, elle, lui, le vis-à-vis, l’autre ;
abogha : traverser un cours d’eau (passer d’une rive à l’autre) ;
aghaka : proliférer, envahir, croître abondamment ;
mi-angala : le venin ;
é-ambo : affaire grave :
ma-ana : les larves d’abeilles ;
mu-angola : vin de palme dont la production tire vers sa fin ;
mu-aso : petit objet pointu servant à démêler les cheveux ;
mu-andzâ : la toiture ;
ambâka : délirer.
Ma-até : les crachats
L’idée évoquée est celle d’éloignement, car cracher c’est jeter ou lancer au loin. Mais le mot m’até est également pris pour « bénédiction », bénédiction dont le rituel consiste à postillonner dans les mains ou sur la tête du récipiendaire.
Mu-âna : le fils, la fille
Le mot mu-âna (au pluriel, wa-âna ) renvoie lui aussi à la même idée d’écartement contenue dans le son [A] qui, suivant la prononciation, peut également vouloir dire : monter, accentuer, aggraver, lever, soulever, extirper, arracher, ôter, émaner, provenir de, sortir de, naître de, etc.
D’où tous ces mots :
ân ân ân ân : onomatopée traduisant les vagissements du nouveau-né ;
âbâkâ : crier ;
âtéghâ : parler à tue-tête ;
âsîmâ : bâiller ;
âsâkâ : parler en plein sommeil ;
âswâkâ : ouvrir largement la bouche ;
âghânâ : se raccompagner (chacun retournant chez soi) ;
âka : manger, mâcher ;
âneghâ : faire sécher au soleil ;
âghâna : se séparer, se dire au revoir, se dire adieu, raccompagner quelqu’un.
B
Ghe-bambala : le pancréas
Cet organe doit en effet sa dénomination au fait qu’il est plaqué contre l’estomac. Cette idée de « plaquer » est contenue dans le son [ba] que nous retrouvons dans l’idéophone bamba-bamba qui veut justement dire placer côte à côte, coude à coude, "collé-collé", appliquer, porter, apporter, supporter, poser sur, poser contre, rendre épais, tapisser, etc. D’où les mots suivants :
bambeledya : placer un objet à côté de soi ;
balé : deux (allusion au fait de placer un doigt contre l’autre pour signifier cette quantité) ;
badâ : se dit d’un aliment (tubercule de manioc, banane, patate, etc.) cuit d’un seul côté ;
ghe-bapa : cortège, suite ;
baké : la mémoire, c’est-à-dire porter des informations ;
é-bale : la rate ;
ghe-baghala : le cache-sexe féminin ;
é-bagha : le mâle ;
bagha : le prochain (celui qui est proche, tout à côté) ;
babwâka : détacher un gros morceau de chair ;
bakâka : engendrer une douleur aiguë, mordre ;
bandâka : choisir, appliquer sa préférence sur ;
mu-baba : la grosse lèvre vaginale ;
ghe-bano : la profession, ce à quoi on s’applique ;
mu-bandô : la hernie (idée de gonflement) ;
bapâ : la bretelle (idée d’appui) ;
mu-baté : le slip ;
mu-bandoko : la cale de la porte ;
bata : plein, bien rempli ;
ghe-batâ : action de manger gloutonnement ;
bahâka : débrousser, ensoleiller, éclaircir, apporter la clarté ;
bangaka : s’allumer, apporter la lumière ;
banégha : poser en haut ;
baghâka : dépecer, trancher ;
ghe-bandô : le « sit-in » (le fait de rester fixé au même endroit) ;
ghe-bango : nappe végétale tapissant le sol ;
ghe-bandzô : la mémoire ;
o-bandza : la